Stephen KING ET LE
PARANORMAL : LA PERCEPTION EXTRASENSORIELLE.
6. L'ÉNERGIE VITALE
"Vos batteries, comme vous dites, ne
devraient jamais être à plat,
vu que vous
détenez une réserve de puissance
illimitée."
(Insomnie,446)
Dans plusieurs romans cosmiques, King
a tiré des effets intéressants littérairement
d'éléments anciens, récemment repris par les
doctrinaires du New Age1, auxquels il n'est pas insensible. Il y manifeste une
primauté de l'esprit sur la matière, à
l'encontre d'un matérialisme techniciste qui lui fait peur.
Alors que le matérialiste se limite à agir sur le
quantifiable, certains de ses personnages arrivent à un accord
avec les entités du monde-autre. Dans une vision spiritualiste
de l'homme et du monde, les personnages kingiens se concentrent sur
leur conscience psychologique et leurs pouvoirs cachés. Une
énergie particulière, dont ne disposent pas les hommes
ordinaires, leur est nécessaire, où moins dans les
moments où l'équilibre des forces universelles est en
péril.
.Pour les divers courants
ésotéro-occultistes, l'aura est le rayonnement
énergétique fluidique du périsprit, ou corps
astral2. Leur point commun est d'affirmer qu'il existe un monde
spirituel inaccessible aux sens, sur lequel repose le monde
perçu par nos sens. Le périsprit sert de lien entre
l'âme et le corps, par le moyen de l'énergie vitale ou
fluide vital, dont sont imprégnés tous les êtres
vivants. Certains hommes débordent d'énergie vitale,
d'autres en manquent. Le fluide vital est l'agent qui expliquerait la
répercussion du mental sur le physique. Le fluide vital n'est
pas de la même qualité chez tous les individus.
Certains hommes ont beaucoup
d'énergie vitale, d'autres en manquent. Le fluide
consommé se renouvelle par l'absorption et l'assimilation des
substances organiques. Ce fluide vital, par combinaison avec le
périsprit, permet à l'âme d'agir sur la
matière. Le périsprit seul ne suffit pas pour avoir une
action sur la matière. Dépourvus de ce fluide vital,
les Esprits ne peuvent agir directement sur la matière et ont
besoin pour cela de "médiums" c'est-à-dire de personnes
capables d'extérioriser leur fluide vital pour le mettre
à la disposition de l'Esprit.
Il n'a été question jusqu'ici que de l'énergie
humaine, mais l'énergie vitale se trouve également chez
les autres êtres vivants et dans les objets.
Une notion théorique entre ici en jeu, de grande importance
parce qu'elle sous-tend tout le système
ésotéro-occultiste. Quelle peut bien être cette
énergie particulière, que nos physiciens ne connaissent
pas?
Historique de
l'idée de principe vital.
........
La tradition du principe vital a des
origines lointaines. Le «fondateur» de l'alchimie,
Hermès Trismégiste3, auteur du texte La Table d'émeraude (Tabula
smaragdina) qui lui est
attribué, disait que la force qui anime le monde est la "force
forte de toutes les forces" ce qui ne veut scientifiquement rien
dire. Cette expression, un des principes fondateurs des doctrinaires
du New Age, auxquels King n'est pas insensible, a été
appelée de toutes sortes de noms au cours du temps :
télesme, fluide universel, principe vital, âme du monde,
feu sacré, force psychique, etc. Paracelse l'appelait
l'"arché". On a évoqué cette "force" pendant des
siècles, ne disposant que de mots faute de moyens pour en
déterminer les caractéristiques matérielles. Les
explications se multiplieront avec la découverte du
magnétisme terrestre et surtout de la parution du livre de
Mesmer4 Mémoire sur la découverte du
magnétisme animal en 1779.
Mesmer prétendait avoir découvert l'existence d'un
nouvel élément physique, le magnétisme animal,
aux caractéristiques proches de l'électricité et
de l'aimant
On a depuis cherché en vain
à déterminer les caractéristiques
matérielles de ce fluide, dont les magnétiseurs et les
tenants de l'énergie psychique universelle affirment, sans
courir de risques d'être démentis, qu'il est
formé d'ondes, de vibrations et de radiations. Actuellement,
dans les stages du New Age, particulièrement nombreux aux USA
depuis les années 60, on apprend une vision du monde
énergétique et vibratoire, en adaptant les traditions
ésotéro-occultistes. L'homme ne se réduit pas
à son corps visible, qui est doublé d'un corps
invisible ou subtil qui soutient le premier et peut s'en
séparer à l'occasion (voyance, bilocation). C'est sur
ce corps subtil que travaillent guérisseurs,
magnétiseurs, etc. qui rétablissent les
dysfonctionnements en énergie., notamment sur les plexus ou
chakras5, canaux propres à la circulation
d'énergie. C'est cette vaste circulation de forces qui
explique la voyance, la télékinésie, et divers
phénomènes étudiés par la
parapsychologie, possibles par un excédent ou une bonne
organisation des forces énergétiques.
Un psychologue du XXème siècle très connu, Carl
Gustav Jung6 a éclairé le sujet en dégageant la
notion d'inconscient collectif, identique chez tous les individus.
Cet inconscient collectif, constitué d'archétypes, est
le produit de l'accumulation des expériences
millénaires de l'humanité. Pour Jung, "l'idée de l'énergie et de sa
conservation doit être une idée originelle qui sommeille
dans l'inconscient collectif." Cette image se retrouve au cours de toute l'histoire de
l'esprit humain, et elle a fait sentir son influence pendant des
milliers d'années. Les religions les plus primitives du monde
sont fondées sur cette image. Jung appelle ces religions
"dynamistes" parce que leur pensée "unique et déterminante consiste
à affirmer l'existence d'une force magique partout
présente et qui est comme le centre de toutes
choses." 7 .
Jung confirme dans le même
texte que cette énergie est celle liée au
«mana» mélanésien, bien connu des
ethnologues. Le mana8 est une de ces idées confuses, un peu
passe-partout. Un seul mot rassemble l'idée d'un
véhicule d'énergie magique, une qualité
liée à un pouvoir dont certains disposent, à
manier selon des rites propres à susciter le fonctionnement de
l'énergie. L'américain Arthur O. Lovejoy l'a
désigné du nom de "primitive energetics". Cette notion au champ très vaste s'étend
à tout ce qui évoque une certaine force, aussi bien
Dieu, l'esprit, la force physique, la santé, la
fertilité, le pouvoir magique, le pouvoir social, etc.
Autrement dit, faute de pouvoir comprendre le sens du fonctionnement
énergétique du monde, les hommes ont, dans le
passé, projeté leur psychologie sur la
réalité en inventant des explications destinées
à les satisfaire en les rassurant.
Actuellement, pour le physicien, la
quantité d'énergie est liée à la
capacité d'un système de fournir un travail, au cours
duquel l'énergie se transforme et se dégrade. Sans
preuve, certains partisans de l'énergie psychique
prétendent que l'énergie connue des physiciens,
produite par la matière dans sa structure atomique est
négative parce qu'elle est finie et limitée, tandis que
la force vitale ou énergie spirituelle (sur laquelle nous ne
savons rien) est positive et infinie de par sa nature. Pour
fonctionner, l'esprit pourrait donc utiliser une énergie,
totalement différente de l'énergie physique normale,
énergie psychique que nous n'avons pas les moyens de
découvrir ni de mesurer, au point où en sont notre
science et nos moyens techniques.
La
découverte de l'énergie.
Dans Insomnie, un septuagénaire, Ralph Roberts, perd le
sommeil et découvre l'existence d'auras mystérieuses
autour de personnes et d'êtres vivants. Il s'aperçoit
qu'il n'est pas seul à le faire. Il apprend
simultanément à utiliser son énergie mentale
pour obtenir des modifications physiques et psychiques importantes.
Le tout fait partie de la réalisation d'un dessein
d'importance cosmique, qui a mis en action des entités dont il
ne soupçonnait pas l'existence. La première
constatation faite par Ralph est celle de l'énergie lumineuse
des doigts. Les partisans de l'aura, voient, même en pleine
lumière, le fluide vital de certains médiums ou
magnétiseurs créer des effluves lumineux,
colorés de teintes diverses, qui s'échappent de leurs
mains. Dans Insomnie, Ralph
remarque la première fois le phénomène lors d'un
signe que lui fait Lois alors qu'elle passe dans la rue :
"Lois le salua de sa main
levée et, à sa grande stupéfaction, Ralph vit
des lignes diagonales d'un bleu brillant jaillir de la pointe de ses
ongles courts, mais soigneusement taillés. On aurait dit des
traînées de condensation." (124) Ralph a du mal
à en croire ses yeux, vivant le phénomène
d'acceptation de l'altérité, comme King le fait
pratiquement dans les romans qui utilisent le surnaturel. Cette
expérience se renouvelle un certain nombre de fois.
Une première fois, Ralph a le
sentiment de disposer d'une énergie particulière
insoupçonnée dans des circonstances curieuses. De sa
fenêtre, il remarque dans la rue un petit homme chauve malmener
la vieille chienne errante du quartier, qu'il connaît bien.
Sans savoir pourquoi, il a un geste stupéfiant :
"Ralph leva brusquement la
main à hauteur de l'épaule, la paume tournée
vers sa tempe, comme s'il s'apprêtait à donner un coup
de karaté - un atémi. Il abaissa la main et vit,
stupéfait, un rayon serré de lumière bleue
9 jaillir du bout de ses doigts et foncer, en
travers de la rue, comme un javelot." (306) Le gnome chauve s'interrompt et s'enfuit.
Cette énergie sortie des
doigts de la main peut avoir une puissance considérable, comme
on peut le constater dans l'exemple suivant. Lors d'un combat entre
le policier Leydecker et un agresseur qui a le pistolet à la
main : "Ralph leva la main et
l'abattit d'un geste tranchant - son atémi de karaté;
mais cette fois-ci, au lieu d'un javelot de lumière, ce fut
une sorte de grosse larme bleue qui jaillit du bout de ses doigts.
Elle traversa l'aura jaune citron de Leydecker juste au moment
où l'homme dans la maison ouvrait le feu. Ralph vit deux
balles frapper l'arbre qui se trouvait à droite du
policier. (...)
Une troisième balle
heurta l'enveloppe bleue venue se superposer à l'aura de
Leydecker, provoquant un bref pétillement rouge
foncé (...) accompagné d'un bourdonnement bas lorsqu'elle
ricocha, ou glissa, à la manière dont un caillou plat
ricoche à la surface d'une eau calme." (508)
Cette énergie, King la relie
directement au "ka" 10, notion de La Tour Sombre reprise dans Insomnie, qui en donne en partie la cosmogonie. Le mot,
utilisé incidemment dans Les Tommyknockers, sera repris de
nombreuses fois dans le deuxième volume de la Tour Sombre,
Les Trois
Cartes 11 avec des sens qui varient. Un des sens est
proche du "mana" de l'énergie vitale, la "force vitale, leur ka." (Insomnie,
584) acceptation qui nous
intéresse ici. Un sens proche est celui de la force vitale
effectuant un transfert psychique, quand Roland se projette dans
l'esprit d'un autre : "Un
ka détaché dans
le cerveau d'Eddie"
(Les
Trois Cartes,
Le Prisonnier,
3.17)12. Ensuite le "ka" prend le sens d'esprit en même
temps que cerveau coordinateur : "Divorcé d'un corps diminué, son esprit -
son ka - retrouvait son acuité
foncière" (Les Trois
Cartes,
Le Pusher, 1.4). Ou : "Physiquement présent plutôt que
ka désincarné, il n'eût pas
manqué de se tenir sur la pointe des pieds, prêt
à reprendre les choses en mains au moindre signe de
mutinerie" (Les Trois
Cartes,
Le Pusher, 4.8). Ce sens semble être aussi celui
de Le Fléau, quand le juge voit un corbeau : "Ce qu'il voyait devant lui était l'homme noir, son âme, son ka
incarné dans ce corbeau grimaçant. (...). Si
c'était lui, pourrais-je le tuer? Emprisonner son
ka -si cette chose existe- dans le cadavre de ce corbeau?"
(954).
La conséquence de cette vaste extension
sémantique13 est que le mot "ka" pourra être utilisé en
de multiples circonstances, avec des sens qui s'éloigneront de
plus en plus du sens archaïque "mana" ou énergie
psychique.
Pourquoi la couleur bleue? King a pu
se référer aux thèses de Wilhem
Reich14 et ses disciples concernant la bioénergie. La
découverte par Reich des «bions» (vésicules
qui apparaissent dans des substances organiques dans certaines
conditions), dotés d'une charge positive, lui fait penser
qu'il a trouvé la formule de la vie. Les transformations
produisent une lumière bleue, représentation visible de
l'énergie vitale, celle qui anime tout l'univers vivant. Cette
énergie particulière, appelée
«orgonique», semblable au courant électrique,
indifférente à l'ionisation, ne se décèle
que dans certaines conditions. L'énergie orgonique n'est pas
contenue seulement dans les organismes vivants. L'orgone provient de
l'atmosphère et l'énergie vitale est partout, plus ou
moins concentrée. Le cosmos en est rempli. L'orgone aurait une
couleur bleue. Elle émane du corps humain, surtout des doigts
et des yeux. Elle peut être contrôlée par
l'esprit, agir sur des choses à distance. Elle est à la
source de plusieurs phénomènes paranormaux.
Ses effets sont importants : un individu enfermé dans sa
carapace caractérielle a ses muscles et ses organes
bloqués par sa vie d'inhibitions et bénéficie
peu de la vitalité de l'orgone. Sa puissance orgastique est
faible, ou nulle. L'énergie vitale n'alimente plus ses tissus,
qui commencent à se décomposer. Mais ce ne sont pas les
tissus qui sont malades, c'est la personne qui l'est, qui a perdu son
unité fonctionnelle de son esprit et de son corps. Le cancer
et beaucoup d'autres maladies sont ainsi des biopathies, des maladie
de la vie. Les inhibitions développent des tensions qui
bloquent le transit de l'énergie vitale. Le praticien peut,
par l'analyse, faire disparaître les plaques de la carapace
caractérielle, pour permettre aux émotions vitales
d'apparaître. Les exercices proposés visent à
libérer les courants profonds d'énergie vitale qui se
trouvent dans chaque individu. Il ne sait ordinairement pas se
libérer, ce qui explique les divers maux dont il souffre. Pour
lever ce blocage, à un niveau ou un autre de l'organisme,.
Reich propose un certain nombre de techniques destinées
à faciliter l'écoulement du "fluide vital" et à
faire disparaître les blocages. Reich avait fabriqué une
caisse de bois de la hauteur d'un homme, sorte d'accumulateur de la
bioénergie. Son action prétendument
thérapeutique sur un homme affaibli, consiste à le
charger de l'énergie qui l'entoure, et à
l'éloigner ainsi de la maladie, de la vieillesse et de la
mort. À noter que, si elle est capable de guérir, elle
peut aussi, dans un usage négatif, blesser ou faire mourir
d'autres organismes vivants.
Outre la couleur bleue, une deuxième idée a pu
être suggérée par Reich. Elle porte sur la notion
d'énergie psychique de source humaine, liée à
l'énergie vitale. Ralph vient de découvrir le sens des
auras, et a compris qu'elles sont liées à la
quantité d'énergie dont dispose chacun de nous. Il
approfondit cette réflexion individuelle en lui donnant un
sens collectif, alors qu'il regarde une bagarre de gamins, à
la porte d'un magasin : Deux d'entre eux se sont mis à se
chamailler : "Leurs auras,
l'une verte et l'autre de nuance vibrante d'orange
brûlé, s'intensifièrent, se
rétrécirent et se mirent à chatoyer, parcourues
de fils écarlates s'élevant en spirale" signes de leur colère montante. Les
gosses s'empoignent, d'autres se rassemblent, prennent parti, les
soutiennent, crient : "Un
dôme en forme de cumulus d'un violet tirant sur le rouge
apparut au-dessus et autour de la bagarre." Suit la description pendant laquelle Ralph se dit qu'il
doit y avoir une telle aura au-dessus d'un véritable champ de
bataille. Puis sa réflexion s'approfondit et se
généralise : "La
rue est une débauche d'énergie, pensa Ralph. Le jus
dégagé par les deux morveux au cours des quatre-vingt
dix secondes qu'a duré la bagarre aurait sans doute suffi
à éclairer Derry pendant une semaine; et si on pouvait
se brancher sur l'énergie produite par les spectateurs -
l'énergie du nuage en forme de champignon - on pourrait sans
doute éclairer l'État du Maine pendant un
mois. (...)
Quelque chose lui disait qu'il
avait aperçu la pointe d'un iceberg d'énergie d'une
telle puissance et d'une telle vitalité qu'il réduisait
toutes les armes nucléaires mises au point depuis 1945
à des pétards allumés par des gamins dans des
boîtes de conserve vides. Une énergie suffisante pour
détruire l'univers, peut-être... ou en construire un
nouveau." (375)
Accédant à quelque chose existant au-delà des
sens, Ralph vient de découvrir "une autre ville, secrète, celle-là,
murmura-t-il. Le Derry des auras." (368), le produit de l'énergie psychique, la
force vitale sur laquelle se fondent les divers courants
spirito-occultistes. Son amie Lois a fait cette expérience en
même temps que lui.
La maîtrise
de l'énergie.
L'utilisation la plus simple du rayon
lumineux est celle de la vie quotidienne, comme le fait Lois avec une
porte d'ascenseur qui se referme trop tôt à son
gré : "Lois fit un
mouvement des doigts en direction des portes - comme si elle les
menaçait - et une substance grise lança un filet en
éventail de la pointe de ses doigts. Les portes s'y
heurtèrent et repartirent dans l'autre sens." (404)
Autre utilisation de cette énergie : la persuasion et
l'influence mentale. Ralph a des problèmes avec une
réceptionniste d'hôpital dans l'aura de laquelle il a vu
la "dame qui adore les
mentions en petits caractères et toutes les
formalités"
(400), un "chien de
garde de la bureaucratie."
Elle lui fait des difficultés pour lui accorder les
laisser-passer qu'il demande. Par l'ouverture du guichet, il la
saisit au poignet : "Il serra
doucement et sentit un petit jaillissement de force (...)
passer de lui à la
femme. Soudain, l'aura trop zélée qui entourait son
bras gauche adopta la teinte turquoise délavée de
Ralph. L'employée eut un hoquet et sursauta, penchée en
avant comme si on venait de couler des glaçons dans le dos de
son uniforme.
[«Laisse tomber l'ordinateur. Donne-moi simplement deux
laissez-passer, s'il te plaît. Tout de suite.»]
- Oui monsieur», répondit-elle sur-le-champ. Ralph la
lâcha pour qu'elle pût accéder aux documents, sous
son bureau.
La partie turquoise de son aura redevint orange, le changement de
couleur se faisant de l'épaule vers la main. «Mais
j'aurais pu aussi bien la faire devenir toute bleue, pensa Ralph.
M'emparer d'elle et la faire courir dans le hall comme un jouet
à ressort." (401/2)
Si elle peut servir à influencer, voire à contraindre
les individus, cette énergie peut aussi servir à aider,
à apaiser, ce que fait Ralph avec Lois qui a pris peur :
"Il passa un bras autour de
ses épaules et la serra contre lui, emprisonnant ses bras
entre leurs deux poitrines. Les cris de Lois n'en continuaient pas
moins à lui percer le crâne. Refermant les mains dans le
dos de sa compagne, il l'étreignit de toutes ses forces. La
puissance jaillit de lui comme elle l'avait fait le matin même,
accompagnée d'une sensation entièrement
différente, toutefois. Une lumière bleue se
déversa dans l'aura rouge striée de noir de Lois et
l'apaisa. Elle cessa peu à peu de se débattre. Elle
prit une profonde inspiration et frissonna. Tout autour et au-dessus
d'elle, la lueur bleutée s'agrandissait et s'estompait; les
bandes noires disparurent, l'une après l'autre, du bas vers le
haut, et l'inquiétante nuance rouge malsaine commença
à son tour à se dissiper. Elle s'appuya de la
tête au bras de Ralph.
[«Je suis
désolée, Ralph, je crois que j'ai encore un coup
piqué ma crise nucléaire, hein»]" (414)
Un vampirisme
énergétique.
Croisant une vieille dame dans la
rue, Mme Perrine, spontanément15 Ralph arrondit sa main en cornet autour de sa bouche,
et aspire : "Le
résultat fut stupéfiant. Une lumière grise en
trait de crayon jaillit de l'aura de Mme Perrine, semblable à
une aiguille de porc-épic. Elle s'allongea rapidement, allant
en sens inverse de la vieille femme, franchit la pelouse
jonchée de feuilles mortes et s'enfonça dans le tube
formé par la main de Ralph. Il la sentit le
pénétrer, avec l'impression d'avaler de
l'énergie à l'état pur, l'impression de
s'allumer comme l'enseigne au néon d'un cinéma de
prestige dans une grande ville. Un sentiment explosif de puissance,
violent comme une détonation, parcourut sa poitrine et son
estomac avant de dégringoler dans ses jambes jusqu'à la
pointe de ses orteils. Il fusa en même temps jusqu'à sa
tête, menaçant de lui faire sauter la calotte
crânienne comme si ce n'était que le voile fin de
béton qui recouvre un silo de missiles.
Il vit des rais de lumière, aussi gris qu'un brouillard
chargés d'électricité, fumer depuis
l'extrémité de ses doigts. La sensation de puissance,
à la fois joyeuse et terrible, illumina ses pensées,
mais seulement pendant quelques instants. Elle fut suivie par un
sentiment de honte et d'horreur stupéfaite.
Mais qu'est-ce que tu fabriques, Ralph ? Ce truc-là, quel
qu'il soit, ne t'appartient pas. Te permettrais-tu de fouiller dans
son sac et de lui prendre son argent pendant qu'elle ne ferait pas
attention?" (378)
Ralph et Lois, qui font partie d'une génération qui a
été conditionnée par le respect du bien
d'autrui, ont été quelque temps gênés par
le fait de puiser l'énergie des autres ou de l'utiliser. Quand
il a obtenu par un moyen particulier les laisser-passer de la
réceptionniste de l'hôpital, il a été
interpellé par sa conscience : "Il fut envahi par un mélange de peur et de honte.
Des images de vampirisme lui revinrent à l'esprit, ainsi qu'un
aphorisme fameux, tiré de la bande dessinée
Pogo : Nous avons
rencontré l'ennemi, et c'est nous! 16 Oui, il pouvait
probablement faire tout ce qu'il voulait à cette râleuse
dans son halo orange; il avait les batteries chargées à
bloc. Seul problème, le jus emmagasiné dans ses
batteries - comme dans celles de Lois - était une
énergie volée."
(402) Quand il veut communiquer
ses problèmes aux deux petits docteurs chauves, il doit
transmettre une image mentale de vampire pour traduire la
représentation qu'il se fait de ce vol : "Une chauve-souris surgit d'une
meurtrière, décrit deux cercles virevoltants dans un
rayon argenté de clair de lune pour devenir Ralph Lugosi
17, en cape et smoking à l'ancienne. Il
s'approche d'une femme endormie - non pas une jeune vierge toute
rose, mais la vieille Mme Perrine dans sa solide chemise de nuit en
flanelle - et se penche dessus pour sucer son aura." (447)
On sait que King a
été un fanatique du cinéma d'horreur dans son
enfance et que cette passion n'a pas diminué avec
l'âge.
La technique d'absorption vue
de l'extérieur par Ralph lui donne un autre aperçu de
son fonctionnement, quand Lois, fatiguée, «pompe»
une énergie disponible : elle "porta une main en cornet à sa bouche et inhala
vivement. En même temps, elle eut une sorte de bref
clignotement et, dans d'autres circonstances, Ralph se serait
peut-être cru la victime de son imagination. Elle était
montée 18. Juste un peu.
Juste assez pour se nourrir.
(...)
Un rayon serré de
lumière violette jaillit de leur groupe - du caméraman
barbu de Connie Chubg, en fait. Il se divisa en deux à
quelques centimètres du visage de Lois; la branche
supérieure se divisa à nouveau en deux, et se glissa
ainsi dans les narines, tandis que la branche inférieure
s'introduisait entre ses lèvres entrouvertes. Le rayon rendit
un instant ses joues vaguement translucides, les éclairant de
l'intérieur comme une bougie une citrouille
évidée."
(546)
Problèmes d'énergie.
Le renouvellement de
l'énergie.
La production de l'énergie et son renouvellement font depuis
longtemps l'objet des préoccupations de l'humanité
(voir plus haut les
références à Jung et sa conception de
l'idée de l'énergie et de sa conservation faisant
partie de l'inconscient collectif.). L'anthropologie nous a appris que, pour les hommes
archaïques, un dieu a pour fonction de distribuer le
mana, élément de vie essentiel. Un dieu n'a de
valeur aux yeux de ses fidèles que s'il peut distribuer le
mana efficacement. Or un dieu qui agit consomme de l'énergie.
Le sacrifice a pour fonction de la lui restituer, pour le rendre
opérationnel et à nouveau prêt à
intervenir avec puissance pour ses fidèles. Avoir plusieurs
dieux permettait de disposer d'énergies
multiples.19 Le problème de l'énergie est ainsi
fondamental, et le souci de King a été de proposer dans
ses romans des sources diverses à la production et à la
conservation énergétiques (Désolation et Les Régulateurs, qui traitent longuement des problèmes d'une
entité, Tak, qui a besoin de l'énergie psychique -
humaine ou animale - pour agir, sont intéressants à cet
égard).
Ralph, capable de déclencher
un éclair bleu et froid avec un atémi de karaté,
Lois produisant avec son index des boulettes de lumière
gris-bleu, ne peuvent le faire longtemps. Leur énergie
s'épuise vite. King a repris les affirmations de ceux qui
prétendent que les photographies de Kirlian permettraient
aussi d'observer le transfert d'une énergie vitale du corps du
guérisseur à celui du patient. Avant l'imposition des
mains sur le malade, les guérisseurs présentent sur la
photographie une aura puissante qui se transforme en une aura faible,
à peine visible, après l'acte de guérison. Les
malades subiraient le processus inverse, leur faible aura initiale se
transformant après l'action du médium en une aura
forte. Ralph et Lois évoquent ce problème avec les
petits docteurs chauves, les envoyés de l'ordre de
l'Intentionnel (voir mon
étude DES MYTHES RELIGIEUX AUX
PUISSANCES DE LA TOUR SOMBRE
), qui leur expliquent : "Vos batteries, comme vous dites, ne devraient jamais
être à plat, vu que vous détenez une
réserve de puissance illimitée." (446)
L'énergie psychique serait inépuisable, et Ralph ou
Lois ne risquerait pas plus de l'épuiser que de vider
l'océan avec un seau de plage d'enfant.
Mais les voilà contraints de
chercher à s'approvisionner régulièrement, la
fatigue liée à l'absence de pouvoir apparaissant
dès que le niveau d'énergie baisse. L'aura faiblit dans
ce cas, pouvant servir d'étalon comme la jauge avec laquelle
le mécanicien vérifie le niveau d'huile d'une voiture.
Quelquefois en situation d'urgence, comme doit le faire Ralph avec
Lois, une prise d'énergie est nécessaire, comme cette
fois en catastrophe : "Un
ruban d'une fumée scintillante commença à couler
de la bouche et des narines de Lois pour pénétrer dans
la bouche de Ralph. L'aura de ce dernier prit instantanément
de l'éclat, éclat qui alla en s'amplifiant pour se
métamorphoser en une grande mandorle éblouissante tout
autour de lui. (...)
Au moment où cette
inhalation titanique atteignit son zénith, Ralph se rendit
compte que l'aura de Lois était d'une blancheur de lait et du
gris était réapparu dans ses cheveux. Il devait
s'arrêter, il le devait - sinon, il risquait de la tuer."
20 (636)21
Un élément pittoresque original ici et là vient
agrémenter les captations d'énergie qui ont lieu au
cours du récit. Notons celle-ci qui donne - ce qui est tout
à fait inusité - un goût à
l'énergie psychique : "Un rayon d'un vert éclatant jaillit du clochard,
franchit les trois mètres qui les séparaient et
pénétra dans la bouche de Ralph. Il avait un goût
parfaitement identifiable : le «vin de pomme» Boone's Farm.
Goût rude et peu raffiné, mais pas
désagréable, dans son genre, avec son côté
boisson d'ouvrier. Sensation accompagnée d'un retour de
vigueur, ce qui était bien mieux, et d'une clarté de
pensée aiguë, ce qui était encore
mieux." (564)
Quelles limites?
La possession d'une telle
énergie pourrait, entre des mains criminelles, s'avérer
très redoutable, comme le meurtre que Ralph commet, sans
l'avoir voulu expressément, en intervenant contre un dangereux
tueur : "Il prit le visage de
Pickering à deux mains, tandis que quelque chose se mettait
à flamboyer dans son esprit. (...) Il
escalada plusieurs niveaux [mentaux], montant pendant une fraction de
seconde plus haut qu'il n'avait jamais été. Au sommet
de son ascension, il sentit une force terrible se décharger
dans sa tête et exploser le long de ses bras. (...)
Le corps de Pickering se mit
à tressaillir comme s'il était soumis à une
énergie galvanique. (...) Un
instant, Ralph eut l'impression de voir de minuscules
étincelles bleues jaillir de la pointe de ses cheveux
hirsutes. Puis il n'y eut plus rien et Pickering retomba contre le
mur." (516) Mort.
Mais ceci n'est rien en comparaison de la lutte, à
caractère cosmique, qui se déroule entre Ralph et
l'entité Le Roi Pourpre. Subissant le rituel magique du
sacrifice, Ralph a accepté que les petits docteurs chauves lui
incisent le bras, blessure qui se refermera instantanément.
Mais avec cette marque, Ralph porte le signe d'une entité
supérieure au Roi Pourpre et bénéficiera
occasionnellement de ses pouvoirs, c'est-à-dire de son
énergie. Ce qui se produit peu de temps après, Ralph
ayant la main et le bras avalé par le mufle du Roi Pourpre :
"La cicatrice chauffa
instantanément à blanc et atteignit une
température critique. La chaleur ne brûla pas le bras
mais en jaillit une vague d'énergie qui allait croissant. Il
eut conscience d'un éclair vert titanesque, tellement
éclatant que pendant un instant on aurait pu croire que toute
la ville d'Oz 22 avait explosé autour de
lui. (...)
Un torrent d'énergie
passa près de lui, son souffle déployé en
éventail, sa lueur verte allant en s'estompant."
(655) Le Roi Pourpre disparaît.
Énergie et
magie.
Enfin King établit un rapport
entre l'obtention de résultats magiques et la possession d'une
quantité d'énergie suffisante. Venant des temps
archaïques, l'attitude magique a toujours été
celle de l'enfant ou, de nos jours, de l'adulte non
rationalisé qui pense qu'une intervention quelconque venue
d'ailleurs peut changer la
réalité à son profit. 23 La magie est la projection ou l'expression de
l'imaginaire du désir, qui fonctionne dans une certaine
ambiguïté, en transgressant la normalité. Dans
certaines oeuvres de King comme Ça, les
faits magiques se produisent constamment, dans un mépris total
de la réalité quotidienne.
Celui qui croit en la magie pense que
ce sont les forces de l'invisible qui exerceraient ou permettraient
l'exercice de tels pouvoirs, délégués en partie
aux partisans de ces forces. Ces forces elles-mêmes, qui
peuvent se concrétiser sous forme d'entités,
personnalisées ou non, utilisent des techniques
particulières d'action sur les hommes. L'humain peut donc,
dans une certaine mesure, traiter avec ces forces, souvent avec un
rituel approprié. Comme le récapitule Marcel Mauss, le
mana "subsume une foule
d'idées que nous désignerions par les mots de pouvoir
du sorcier, le qualité magique d'une chose, aussi avoir du
pouvoir magique; agir magiquement." 24 C'est, très transposée et avec une mise
en scène habile, la situation que l'on trouve dans
Insomnie.
Ralph aurait besoin de ciseaux pour
couper le linceul qui contient l'objet convoité. Il se
représente mentalement les ciseaux en acier de la trousse de
couture de sa mère :
"Il sentit cette force dans son esprit, (...) une
force immensément puissante, qui se contractait lentement.. Il
fixait ses doigts des yeux et, dans son esprit, fit s'ouvrir et se
refermer les lames, tout en mimant le geste. Il sentit
l'énergie empruntée au garçon Nirvana et au
clochard de Neibolt Street qui, après s'être
concentrée sans sa tête, se propageait jusqu'à
ses doigts à travers son bras, comme une crampe.
L'aura qui entourait son index et son majeur tendus commença
à s'épaissir et à s'allonger. À prendre
la forme effilée et nette de lames. Ralph attendit de les voir
dépasser d'environ quinze centimètres et fit de nouveau
jouer ses doigts. Les lames s'ouvrirent et se
refermèrent.
(...)
Il déploya des efforts
colossaux pour écarter les doigts; les lames d'un bleu
chatoyant s'écartèrent. (...) Ralph
resserra les doigts et les lames se refermèrent, ouvrant une
fente dans ce qui était à moitié coquille,
à moitié chair. Il poussa un cri. Ce n'était pas
tant de la douleur qu'il ressentait, qu'une immense fatigue. C'est
l'impression qu'on doit avoir lorsqu'on saigne à mort, se
dit-il." (588)
Les choses vivent
aussi.
Les objets ont une aura, comme les
arbres ou les animaux, êtres vivants25 : "Les objets
n'avaient jamais été aussi brillants, aussi
définitivement présents. Les voitures, les poteaux
téléphoniques, les caddies devant le
supermarché, les immeubles de l'autre côté de la
rue, tout semblait se précipiter sur lui comme dans les vieux
films en relief." (144) À fortiori, la consommation
d'énergie par les véhicules est visible en couleur!
comme ce camion qui laisse des traces : "Un camion de boulangerie reculait d'une place de parking
(...) et une substance d'un marron brillant, qui
avait presque la consistance du sang séché sortait du
pot d'échappement.
26 Ni exactement
fumée, ni tout à fait vapeur, mais avec des
caractéristiques des deux, elle s'élevait en pics
irréguliers qui allaient en s'atténuant, comme une
courbe d'électroencéphalogramme. (...)
Le véhicule accéléra en quittant le parking et
le graphique fantomatique, qu'il laissait derrière lui adopta
une nuance d'un rouge brillant semblable à du sang
artériel." (145)
Plus singulière est la vie dans le temps de certaines choses.
Atropos, le docteur chauve agent de l'Aléatoire, a besoin de
voler un objet à l'être humain qu'il a
repéré avant de pouvoir provoquer les circonstances de
sa mort (rituel magique, inexpliqué). Ralph et Lois sont
entrés dans l'antre où il entasse ses trophées,
Or ces objets vivent toujours : "C'est toujours vivant! Tout ce qu'il y a ici est encore
vivant! Je ne sais pas comment c'est possible, mais... mais d'une
certaine manière, ces choses vivent. À peine. Comment
se fait-il qu'elles soient aussi affaiblies?" (584)
Pour les spirites, le passé
laisse des traces, inscrites nécessairement quelque part. les
objets avec lesquels nous avons été en contact portent
notre empreinte, s'imprègnent de nos vibrations, sorte de
réservoir contenant quelque chose de chaque personne ou animal
ayant existé (1er cas proposé par King, la maison
Marsten dans Salem). Ces
traces sont perçues par le médium qui, en touchant un
objet ou en pénétrant dans un lieu, arrive à
reconstruire leur histoire (cas de Johnny dans L'Accident). Le médium entre alors dans une autre
dimension, où le présent, le passé et le futur
s'entrecroisent, coïncident et se poursuivent en un jeu
étrange, de nature magique. Ralph tient en mains une chaussure
de tennis et la reconnaît comme appartenant à une amie,
Helen : "Lorsque Ralph la
prit, il entendit chantonner doucement une voix très
lointaine. (...) Il
avait reconnu la voix parce que c'était celle d'Helen :
"Et en prêtant mieux
l'oreille, il entend les voix de tous les autres objets. Elles
chantaient comme un choeur perdu." (585)
Le plus singulier de tous ces objets est enfermé dans un
linceul noir, comme dans un cocon vampirique, disposé au
milieu du cercle d'objets. Il ne chante pas, mais gémit,
"un braiement sans
fin" et attire Ralph, qui
comprend sa nature : "Ça essayait de leur sucer la vie? Presque, mais
ce n'était pas tout à fait cela. Ce n'était ni
leur vie, ni leur âme
(...) que la chose
dissimulée dans le linceul fuligineux voulait d'eux; ou du
moins, pas exactement. C'était leur force vitale, leur
ka." (584) Un des sens du
terme "Ka" proche ici du "mana".
Conclusion.
Peu après Insomnie, King
consacrera deux romans à une entité elle-aussi grosse
consommatrice d'énergie, dans Désolation 27 dans Les Régulateurs ·28 Dans ces deux romans, Tak, pur esprit, ne peut vivre
que dans le corps d'un humain (voir
ð mon étude DU TAK AU TAK). La prise de possession initiale se fait dans
l'ini, par pénétration des orifices du nez et de la
bouche (Dés,
549). Cette première prise
de possession effectuée,Tak use l'organisme de sa victime
d'emprunt à une vitesse considérable. Il lui faut donc
constamment changer de corps. Le second type de possession se fait
par un bouche-à-bouche de transfert (Dés, 463)
avec la nouvelle victime choisie. Dans Les Régulateurs, Seth est le fournisseur de base de Tak, mais
il ne lui suffit pas. Tak a besoin davantage dénergie pour se
fortifier : "C'est un vampire,
n'est-ce pas? (...)
sauf qu'il puise de
l'énergie psychique au lieu de sang" (326). Il pompe l'énergie des autres
(208), et "l'énergie dont il a besoin est disponible avec
d'autant plus d'abondance que la personne souffre" (327). King a pris
soin de ne pas évoquer ici le problème
général de l'énergie universelle, et de sa
prétendue infinitude.
Dans Insomnie, King mêle les croyances du New Age à ses
propres croyances, en bon méthodiste de la Nouvelle-Angleterre
marqué par le puritanisme, ce qui est propre à beaucoup
d'Américains. Cette conception de la vie repose sur la
conviction que "The Will is the World" toute volonté qui est
appuyée sur une énergie suffisante et dirigée
méthodiquement obtient nécessairement des
résultats dans ce monde. Les pouvoirs du psychisme sont
constamment affirmés par King, ce qui fait ressembler certains
de ses personnages à des chamanes aux pouvoirs magiques, en
relation avec les forces de l'invisible.
Mais l'image du Dieu biblique a
marqué King et ses icones littéraires se ressentent
fortement de ce qu'il a appris au catéchisme enseigné
à l'école de l'Église Méthodiste de
Durham, juste à côté de chez lui quand il
était enfant. Si bien qu'il mêle inextricablement dans
certains de ses récits l'utilisation de la magie païenne
avec la mythologie chrétienne. Dans les conceptions des hommes
archaïques qui avaient trouvé une solution à leurs
problèmes d'explication de l'énergie (évoqués par C. G. Jung plus
haut) par la magie et
l'intervention des esprits, le mana ou son équivalent tenait
lieu d'explication et de lien fictif entre les hommes et les
entités qu'ils avaient imaginées. En Occident, les
religions judéo-chrétiennes ont cherché à
canaliser ce qu'on appelle la "pensée magique" pour la
rattacher à une énergie spirituelle, infinie, celle de
Dieu. Mais l'esprit magique a du mal à mourir et refleurit
toujours en ce siècle perturbé, rendu évident
par le succès des sectes qui assurent de la possibilité
d'acquérir des pouvoirs occultes, le nombre des marabouts, de
désenvoûteurs, de mages, de sorciers africains, de
voyants qui publient leurs annonces racoleuses partout où il y
a des clients potentiels, dans une vaste escroquerie collective
organisée, dans le silence des autorités trop contentes
de voir leurs électeurs s'en prendre à des forces
occultes plutôt qu'à eux-mêmes. Ne parlons pas de
la télévision, favorisant implicitement par ses images
ce qui la sert bien, une perte de la conscience rationnelle qui lui
permet de désencerveler davantage des consommateurs de
publicité...
King écrit pour ce lectorat, marqué par le nomadisme
religieux ou de moins en moins fidèle à la religion de
ses ancêtres, héritier défaillant des pratiquants
intégristes du May Flower.
Mêlant les vieilles croyances magiques aux mythes religieux
plus récents, King a rattaché habilement la
transmission d'énergie à Ralph par un équivalent
du Dieu judéo-chrétien. Dans Insomnie, certaines entités "merveilleuses, extraordinaires" font partie de l'Intentionnel (440). Un
de leurs représentants haut-placé est l'Homme Vert, qui
a certains attributs du dieu biblique Jahvé. Il apparaît
notamment à la manière de Yahvé s'imposant
à Moïse avec son buisson ardent : Lois "se vit alors prise dans une étrange
lumière, d'un vert atténué, qui ondoyait tout
autour d'elle, lançant ses rayons entre son corps et ses bras.
(...). Cette
lumière la caressait avec des mains sans chaleur, de la
couleur de la mousse espagnole. (...). La
seule chose au monde qu'elle avait envie de faire était de se
tourner pour contempler la source de la lumière
verte. (...).
Lois entra dans la
lumière." (632)
L'Homme Vert "paraissait
bon (...).
Je n'arrivais pas à le
distinguer. Son aura était trop brillante." (634)
L'Homme Vert donne à Lois l'énergie dont Ralph a besoin
et qu'elle lui transmettra. En coulisse, il montera le
stratagème décisif des fermoirs des boucles d'oreilles
de Lois gardés en prévision des blessures qui seront
causées aux adversaires. Il n'y a pas d'autres
précisions à apporter sur les entités
représentant le bien : pour un romancier de l'horreur, cela
n'est pas payant. King s'étend bien davantage sur
l'adversaire, le Roi Pourpre.
Le Roi Pourpre fait partie de l'Aléatoire, et il veut avant
tout éviter qu'un nouveau Messie apparaisse sur la terre. Le
Roi Pourpre "saute d'un corps
à l'autre et de génération en
génération"
"toujours lancé
à la recherche du Messie" qu'il a "toujours manqué, mais cette fois, ça
pourrait être différent." Parce que Derry est une ville différente :
"Toutes les lignes de force
ont commencé à converger par ici." (87)
Comme la créature Ça, le Roi Pourpre cache sa vraie
forme : "Il vaut mieux que tu
ne me voies jamais sans mes déguisements." (444) Il est capable
de prendre successivement des aspects variées pour
déstabiliser Ralph, dégageant une lumière
"rouge, et non pas
noire" mais n'en est pas
moins un linceul de mort : Ralph "savait maintenant l'effet que cela faisait de s'y
trouver pris, pris dans un filet tissé de ses peurs les plus
ignobles et de ses expériences les plus
traumatisantes."
(652) En final paraît la
silhouette d'un homme rouge, rutilant, au regard froid et à la
bouche impitoyable; grand, blond, d'une beauté glaciale, avec
des yeux et des mains rouges (653). Et enfin
l'apparence d'un vieillard tors, qui a perdu beauté et
jeunesse (654). Ralph a rencontré le Diable et l'a
vaincu, avec l'aide de l'Homme Vert.
Pourtant, en bonne logique,
l'ésotéro-occultisme ne fait pas bon ménage avec
le christianisme. Comme le signale Jean Vernette, cette doctrine
"n'est pas neutre. Elle engage
souvent une croyance quasi religieuse qui diverge sur des poins
importants. On notera : la conception d'un Dieu, Énergie
impersonnelle, Grande Vibration Cosmique, fort différente d'un
Dieu personnel révélé par Jésus-Christ.
Et le doctrine de la réincarnation comme loi universelle de
l'existence humaine diverge de la foi chrétienne en la
résurrection."
(29)
Cette contradiction, comme bien d'autres, ne gêne pas King. Les
droits du créateur jouant avec l'imagination n'ont rien
à voir avec les exigences d'exactitude et d'objectivité
du scientifique dans son laboratoire. Est-ce au lecteur de se
plaindre? Et pourquoi ne pas se livrer à un travail d'analyse
comme celui-ci (terminant provisoirement une série de six),
travail qui permet de retrouver son esprit rationaliste après
avoir joyeusement gambadé sur les chemins de
l'Imaginaire.
Roland Ernould © septembre 2002.
Notes :
1 Courant contemporain multiforme, né
dans les années 1960, ayant exercé une grande influence
aux USA qui mélange écologie et mystique, recherche une
prise de conscience de l'harmonie d'un monde à retrouver, par
les religions comme les pratiques magiques. L'adepte du new age
exerce la maîtrise du corps par les arts martiaux, les
thérapies douces, l'accord avec la nature, le
végétarisme et l'épanouissement des formes
artistiques. Voir Jean Vernette, Le New Age, PUF
Que sais-je? 2674.
2 L'énergie vitale a reçu différents
noms à travers l'histoire et les écoles spirites en
utilise des différents, tous plus ou moins
dérivés de la conception du "mana" pour les Indiens du
Pacifique : "fluide vital" "bioénergie" "bioplasma" "Ch'i"
(pour les anciens Chinois), "prana" (pour les Hindous), fluide vital
(pour les alchimistes du Moyen Âge), "fluide universel" (pour
Anton Mesmer), "périsprit" (pour Kardec), "fluide odique"
(pour von Reichenbach), "rayons-N" (pour le professeur Elondot), ,
énergie psychique (pour C. G. Jung), "force-X" "énergie
préphysique" "énergie éloptique" "énergie
biocosmique" "énergie psychotronique" ou "bio-plasma" les
appellations ne manquent pas, de la mystérieuse à la
pseudo-scientifique. Dans son cycle de Nicolas Eymerich, inquisiteur, Valerio Evangelisti reprend la théorie des
«psytrons», particules élémentaires qui
voyagent plus vite que la lumière et lui permettent à
de donner une justification à des phénomènes
mystérieux. En passant par l'esprit humain, les psytrons sont
chargés d'informations psychiques capables d'intervenir sur la
matière. Réunis, les individus d'une foule peuvent
susciter une apparition par l'énergie résultant de
l'association de leurs psytrons. Certains, capables d'imprimer
consciemment ou inconsciemment un grand nombre d'informations
à leur psytrons peuvent envoyer leur double ou des objets
imaginaires à différents moments de
l'espace-temps.(voir Nicolas
Eymerich, inquisiteur)
3 On ne sait rien de la vie d'Hermès
Trismégiste, introduit en Europe au XIIIème
siècle par des écrits arabes (du XIIème
siècle), même pas s'il a existé. Son nom a
donné le mot "hermétique". La légende attribue
la fondation de l'alchimie et de l'occultisme à ce fabuleux
personnage (l'apposition «trismegiste» a donné lieu
à plusieurs interprétations), auquel on attribue
plusieurs traités. On a fait remarquer que on nom est
également celui du dieu grec Hermès (le Mercure latin),
le messager entre les dieux et des hommes. Éditions
récentes: La table d'Émeraude, Belles-Lettres, 1994; Hermès trismégiste : Le
grand texte initiatique de la tradition occidentale, Sand & Tchou, 1996.
4 Franz Anton Mesmer, théologien, médecin
allemand (1734/1815), a été vite influencé par
les doctrines occultes. Sa thèse de médecine traitait
de l'influence des planètes sur la santé humaine.
Intéressé par les théories de Paracelse qui
"inventa" l'idée de magnétisme animal, il étudia
particulièrement tout ce qui se rapporte à la notion de
l'esprit universel dans l'oeuvre de Fludd et de Van Helmont. À
partir de 1772, Mesmer commença à appliquer le
magnétisme au traitement de ses malades et obtint un
succès considérable. Il vint à Paris en 1778,
où sa réputation l'avait précédé.
Les mondains s'empressèrent autour de son baquet
"magnétique" capable de soigner diverses maladies. Mesmer,
riche, officiait vêtu d'une robe de soie lilas remarquable, la
baguette de fer à la main, et au son de chants ou de clavecin
(Il fut un moment à Vienne l'ami franc-maçon de
Mozart).
5 Des auteurs indiens décrivent des "roues" ou
"chakras" tout le long de l'axe corporel. Les chakras
représentent des centres hiérarchisés de
l'organisme psychophysiologique et chacun des chakras correspond
à un ensemble pulsionnel particulier, connecté avec un
organe de perception et un organe d'action particuliers. Cette notion
n'a aucune valeur scientifique.
6 Psychiatre suisse (1875/1961), fondateur du courant de
la psychologie analytique. Avec Freud, il va tenter d'appliquer la
psychanalyse au traitement de la démence précoce. Les
deux hommes, proches au début, se séparent
en 1913, après la publication des Métamorphoses de l'âme et ses
symboles, ouvrage dans lequel
Jung s'oppose complètement à Freud. La psychanalyse de
Jung nie le rôle positif du transfert, analyse les rêves
par rapport aux archétypes, et se donne pour but une rapide
adaptation du sujet à la vie réelle
7 C. G. Jung, Psychologie de l'inconscient, 1952. Livre de poche Références,
éd. 1996, 123.
8 Le mana est une croyance archaïque, universelle sous diverses appellations, sorte de force
spirituelle immatérielle et surnaturelle. Cette notion est
liée un problème d'énergie et de puissance
vitale. L'anthropologie nous a montré que, pour les hommes
archaïques, un dieu a pour fonction de distribuer le
mana, élément de vie essentiel.
9 Cette couleur a peut-être été
choisie en fonction de la couleur de l'orgone, énergie que
prétendait avoir découvert Reich.
10 Chez les anciens Égyptiens, on trouve une notion
à la fois similaire et différente, le ka,
devenu le pouvoir procréateur, qui est en l'homme son support
vital. C'est l'"énergie
motrice de l'être, qui donne l'élan de la vie. Chaque
homme, chaque dieu possédait un ka particulier, parcelle de la
grande force divine diffuse dans l'univers" Claire Lalouette, L'Empire de Ramsès, Fayard, 1985, (480)
11 Les Trois
Cartes, La Tour Sombre 2
(The Drawing of the Three,
1987). Édition fr.
J'ai lu 1991.
12 Ou dans d'autres circonstances: "Roland ferma les yeux et se concentra tout
entier sur Jake. Il pensa aux yeux du garçon et expédia
son ka à leur recherche" Terres
Perdues, II.V.29.
13 Un autre sens est synonyme de destinée :
"Il n'y avait que trois choses
qui comptaient: la mort, le
ka et la
Tour." (Les Trois Cartes, Brassage). Roland a passé "sa vie entière à lutter contre
la fatalité brutale - c'était son ka en
quelque sorte."
(Les Trois
Cartes,
Le Pusher, 1.2). C'est le plus
souvent à l'idée de destinée que King raccordera
le mot Ka, avec les nuances nécessaires : "Le ka ne
régit pas tout et des coïncidences peuvent toujours se
produire." (Terres Perdues, II.IV.20). Et enfin un lieu lié à
l'action et sa localisation : "Ici, ka veut dire
devoir ou destin, ou encore, dans l'usage courant, un lieu où
tu dois te rendre."
(Les Trois
Cartes,
Brassage).
14 Médecin et psychanalyste, né en Galicie
en 1897, Wilhelm Reich a été l'assistant de Freud
à Vienne, en 1922. En 1930, il s'installe à Berlin,
s'inscrit au Parti communiste et fonde le Sexpol, un institut de
politique sexuelle. Dans de nombreux écrits, comme
La fonction de
l'orgasme (1927), il
défend la thèse que la frustration sexuelle du
prolétariat contrecarre sa prise de conscience politique. Seul
le rejet total des inhibitions sexuelles permettra la
réalisation de sa mission révolutionnaire. Son
caractère entier, sans concessions, l'attaque directe qu'il
mène contre les opposants à ses idées lui
amèneront de nombreux déboires. En 1933-1934, il est
exclu du Parti, de l'Association psychanalytique Internationale, et
fuit l'Allemagne où les nazis ont pris le pouvoir.
Après un itinéraire mouvementé dans les pays
nordiques, il trouve un refuge aux Etats-Unis, et une certaine
audience, grâce au soutien des milieux socialistes et
anarchistes. Ses livres, trois périodiques, une fondation et
un institut diffusent sa pensée, et suscitent des disciples.
La révolution
sexuelle (1945) expose que
les institutions ne peuvent pas être bonnes sans
évolution de la sexualité. En revanche, la
libération sexuelle produira un monde équilibré,
où lois et autorité seront inutiles.
Reich s'appuyait sur sa découverte de l'«énergie
orgonique», force universelle dont il affirmait qu'elle
régissait la vitalité. Il se mit à vendre des
«accumulateurs orgoniques» qui prétendait-il,
devaient guérir l'anémie comme l'arthrite, le cancer
comme les ulcères chroniques, à peu près toutes
les maladies qui proviennent d'un déficit vital. Les
autorités médicales et la Food and Drug Administration
intervinrent. Après une longue polémique où il
fut comparé aux grands martyrs de la science, Reich fut
emprisonné. Il mourut en prison en 1957, à 60 ans.
Reich passa ensuite pour un martyr de la science et les
événements consécutifs aux mouvements
étudiants des années soixante le remirent au goût
du jour.
15 Ralph se sent conditionné, comme un "pion sur un
échiquier".
16 Allusion à John Wayne Gacy, un honorable
entrepreneur, un tueur en série des années 70 qui se
déguisait en clown surnommé Pogo pour attirer des
jeunes gens et les assassiner. King cite plusieurs fois Pogo, duquel
il a repris l'idée du personnage déguisé dans
Ça. La citation la plus récente :
"Nous avons rencontré
l'ennemi, et il est en nous dit Pogo" Dreamcatcher,
480.
une photo de Pogo,
en représentation...
17 Bela Lugosi, acteur de cinéma hongrois
(1882/1956). devenu, à partir de 1931, le plus
célèbre vampire de l'âge d'or du cinéma
fantastique américain en jouant le Dracula de Tod
Browning, puis plusieurs autres dans des rôles de vampire. De
nombreuses légendes circulent autour du personnage, errant
encore dans sa vieillesse en cape noire dans les quartiers de sa
ville. Le lecteur aura évidemment remarqué que son
prénom a été changé pour celui de Ralph
par King, puisque les personnages de la fiction
cinématographique ont été remplacés par
ceux de la fiction romanesque.
18 Il y a plusieurs niveaux dans la cosmogonie
particulière d'Insomnie, qui
serait aussi celle de La Tour Sombre. Voir pp. 427 et
suivantes.
19 D'où les difficultés, bien connues par
La Bible, des Hébreux d'abandonner leurs divers
dieux primitifs pour un seul, même très performant comme
Yahvé. Qu'on songe à tous les saints occidentaux qui
remplissent la même fonction dans une religion
judéo-chrétienne pourtant monothéiste. Certains
hommes (guerriers, prêtres et guérisseurs), disposent
aussi du mana. Voir notamment Claude Lévi-Strauss,
Anthropologie
structurale, Plon, 1958; et
La pensée
sauvage, Plon, 1962. Marcel
Mauss, Sociologie et
anthropologie, PUF, 1966.
t
20 On est bien obligé de faire remarquer à
King qu'emporté par son élan, il a bravé la
contradiction implicite sur laquelle tout le récit est
fondé. Il affirme d'une part que l'énergie qu'il y a en
chacun de nous est inépuisable et pratiquement infinie, mais
en même temps ses personnages sont vite en manque
d'énergie. Quand on voit Lois ainsi pâlir, et que Ralph
constate qu'en insistant, il va l'épuiser et la faire
mourir,on peut constater sur un cas que King ne faiblit pas en tout
cas devant les paradoxes...
20 King a des problèmes de limites à ne pas
dépasser, ce qu'il oublie suivant, tombant alors dans le
grand-guignol et détruisant son travail antérieur. Le
récit continue ainsi. Ralph "débordait d'un sentiment de puissance tellement
gigantesque qu'il avait l'impression d'être sur le point
d'exploser au moindre contact, comme une bouteille de
nitroglycérine. Il aurait pu détruire tout un
bâtiment - voire tout un pâté de maisons - d'un
seul atémi de karaté." (636)
21 Allusion au célèbre roman de fantasy de
L. Franck Baum, Le magicien
d'Oz (The Wizard of Oz, 1900), oeuvre qui a bercé l'enfance de nombreux
Américains, et dont le succès ne s'est jamais
démenti. Baum réalisa plusieurs suites. On en fit une
pièce de théâtre, un film de Victor Fleming en
1939, et une version moderne de Sidney Lumet en 1978.
22 Magistralement étudié par Bruno
Bettelheim, The Uses of
enchantement (1976), trad.
Fse Psychanalyse des contes de
fées, Robert Laffont
éd., 1976. Le titre original (approximativement traduit)
signifie littéralement : Du bon usage du merveilleux.
23 Marcel Mauss, Sociologie et anthropologie, Paris, PUF, 1950, 101/2
24 Une des prétendues conséquences de
l'énergie vitale des végétaux liés
à l'énergie universelle est donnée avec les
communautés Findhorn, du nom d'une baie d'Écosse,
où, en 1962, un chômeur se mit à cultiver des
légumes avec son épouse. Il en obtint de gigantesques
dans un sol ingrat et sous un climat rude. Il prétendit avoir
redécouvert l'agriculture biologique centrée sur
l'importance de l'humus, dans une coopération constante avec
les "dévas" les esprits de la nature. Il affirme ne former,
avec ses disciples, qu'une communauté d'amour avec le cosmos
dans la créativité et l'amour. Voir Jean Vernette,
Le New Age, PUF Que sais-je? 2674, 82 et sv.
25 L'essence, le sang d'un moteur? Il fallait y
penser.
26 Désolation (Desperation
1996). Édition fr.
Albin Michel 1996.
27 Les
Régulateurs
(The
Regulators 1996) Richard
Bachman. Édition fr. Albin Michel 1996.
28 Jean Vernette, Les mystères de l'occulte et de
l'étrange, Presses de
la Renaissance, 1998, 116.
ce texte a
été publié dans ma Revue trimestrielle
différentes saisons
# 17 automne 2002.
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