fantastique ou insolite
HARRY
À
L'ÉCOLE DES FANS
Où l'on évite la
référence facile à Stephen King.
Importance métaphysique de la lecture. Digression
déplacée sur l'argent. Problèmes de
transcription et de réception. De l'importance d'un
casting britannique. Préjudice littéraire
envers Dickens. Conclusion en musique.
|
Dans la file d'attente, qui n'en
finit plus de s'allonger à mesure que l'ouvreuse bloque
l'accès aux salles, deux femmes se trémoussent et
papotent sur un ton haut perché, car enfin rendez-vous compte
"leurs enfants LISENT !" Et des vrais livres s'il vous plaît,
écris en petits caractères. C'est ça, la magie
de Harry Potter. Ce n'est rien d'autre que ça. Deux heures
trente et trois kilos de pop-corn plus tard, on se dit que la magie
c'est "exactement" ça.
On a bien trop souvent tendance à sacrifier la qualité
potentielle de certains films en vertu de l'argument que "c'est pour
les enfants." Autrement dit, qu'importe le résultat, les
gosses n'y verront pas la différence. C'est vraiment prendre
pour un idiot un public très difficile et intransigeant. Les
enfants connaissent leur Harry Potter sur le bout des ongles, et le
film de Chris Colombus
respecte leur capacité si particulière à
l'émerveillement. La formule du film semble être le
toujours plus. Toutes les dix minutes, on mise encore plus fort que
la scène précédente, dans un souci de
fidélité au récit qui laisse
rêveur.
La représentation d'un univers
aussi riche que celui de J.K. Rowling
était le premier écueil : comment mettre en forme une
telle débauche d'inventivité sans courir le risque du
grotesque ou de l'invraisemblable ? La solution comme souvent se
révèle être l'argent et la sensibilité.
Chris Colombus, dont les précédents films
laissaient craindre un déballage honteux de bons sentiments,
de violons et de séquences mélo, saisit la chance de sa
carrière en se donnant les moyens financiers et artistiques
nécessaires à la folie douce des romans.
La reproduction époustouflante
de Poudlard ferait presque oublier le brio de la mise en
scène, qui sait se faire discrète puis qui explose
l'écran lors de séquences en passe de devenir cultes.
Le match de Quidditch et la partie d'échecs procurent une
euphorie irrésistible, ce à quoi il faut rajouter la
pluie de courrier qui s'abat sur la maison, le combat contre le troll
et la cape d'invisibilité.
Le casting, tellement british que toute l'ironie du style de Rowling est restituée, joue pour beaucoup dans cette
réussite. Ron et Hermione sont sans doute les plus justes,
suivis de près par Daniel Ratcliffe, Harry
en personne, car tout de même il faut bien parler du
héros. Ce gamin a dans les yeux ce qui fait le mystère
du jeune sorcier : une innocence parfois feinte, qui masque les
blessures de son passé et son "côté obscur" qui
n'attend que d'être dévoilé. Pour l'instant le
personnage est entièrement positif, mais les prochains films
pourraient bien changer notre perception. C'est sans conteste
l'évolution des différentes personnalités qui
fera tout l'intérêt des oeuvres suivantes, au même
titre que pour les romans. Le choix d'Alan Rickman dans le
rôle du professeur Rogue apparaît moins subtil, tant il a
l'habitude d'incarner les méchants, mais il parvient
malgré tout à ne pas trop forcer le trait et à
rendre le caractère à la fois sympathique et
inquiétant du professeur.
Au sujet de l'adaptation proprement littérale, les coupes sont
inévitables mais pour une fois minimes et judicieuses. Aucune
perte réelle n'est à déplorée, et la
participation active de l'auteur au scénario y a beaucoup
contribué. Certaines scènes sont raccourcies ou
atténuées pour des raisons d'efficacité
narrative : le film s'adresse avant tout à un public jeune, et
une durée de deux heures trente constitue déjà
un tour de force. Il s'agit de captiver leur attention et de
renouveler sans cesse l'émerveillement sur une longue
période. On regrettera donc que les scènes de la vie
quotidienne de Harry chez sa famille adoptive aient été
autant réduites et tournées sous un angle comique, ce
qui entraîne la perte de la dimension dramatique du roman.
Rowlings considère Harry comme son petit Oliver
Twist, et les Dursley de Colombus sont
bien plus risibles que tyranniques, d'autant plus que leurs
motivations ne sont à aucun moment expliquées,
réduisant ainsi les personnages à la caricature.
Malgré cette fausse note, le
spectateur (qu'il soit membre de la confrérie Potter ou non)
se laisse étourdir par ce joyeux délire visuel et
sonore, où chaque morceau de bravoure laisse pantois... en
attendant le suivant. Sur le plan musical, la Warner, ne reculant
devant rien pour que le film soit un succès, s'est offert le
talent de John Williams qui
retrouve soudain son inspiration d'antan et nous livre une
composition simple et onirique, portée par un thème
envoûtant. L'école de Poudlard résonne des
accords de cuivres et de pianos, au rythme des sortilèges et
des conspirations.
Colombus et Rowling se sont
visiblement régalés. Ce qui aurait pu être un
fiasco total par manque d'ambition et de talent est au final un film
enchanteur, farci de prouesses techniques et des bons vieux
thèmes fédérateurs tels que l'amitié, le
courage et la volonté sans jamais tomber dans un
manichéisme béat que le cinéma américain
nous a fait boire jusqu'à la lie. Le film parvient à
concilier son rôle de bulldozer du box-office, conçu de
bout en bout pour le succès, et son sujet principal, à
savoir que la magie existe bel et bien quoiqu'en pensent les Moldus.
Aujourd'hui Harry Potter (plus six autres films à venir,
ça va tout de même être un peu fatiguant...), le
déjà historique Seigneur des Anneaux en salles le 19 décembre... il ne reste plus que
la Tour
Sombre. Qui osera s'y risquer ?
Personne sans doute, et c'est parfait comme ça.
article de Sylvain Tavernier <syltavernier@wanadoo.fr> © décembre
2001
lors du tournage du
film
|
Warner Bros a
entrepris l'adaptation cinématographique du premier
volume, Harry Potter à l'école des sorciers.
Le film, dirigé par Chris Columbus (Mrs.
Doubtfire, Maman j'ai raté l'avion 1 & 2, Neuf
mois...), est sorti
aux USA et Grande-Bretagne le 16 novembre 2001, en France le
5 décembre 2001. La musique est de John
Williams (La
Guerre des Étoiles, Jurassic Park, Maman j'ai
raté l'avion, La liste de Schindler). Acteurs : John Cleese (ex-Monty
Python), Maggie Smith, Alan Rickman et Richard
Harris.
|
. Index du site
Cinéma :
.Le
film : L'École des sorciers
par Sylvain
Tavernier
.Le DVD
L'École des sorciers, présentation.
.Le
DVD analyse critique par Franck Ernould
.LE SON dans le
film Harry Potter à
l'école des sorciers,
par Franck
Ernould
.
Harry Potter et la
chambre des secrets. Photos et
informations sur le film,
sorti en GB et USA le 14 novembre, en France le 4
décembre.
à la
liste des films
Revues sur le
cinéma
|
L'Écran fantastique
le
cinéma du nouveau millénaire
Cette revue, une doyenne du
genre, est d'une qualité indiscutée, ce qui
explique son succès. 4 ¤ 50.
9, rue du Midi, 92200
Neuilly-sur-Seine.
Directeur : Alain
Schockoff
|
|
Simulacres, revue d'esthétique du
cinéma. Une superbe revue, à la
présentation somptueuse, Simulacres est parue pour la
première fois en automne 1999, avec son numéro
trimestriel d'automne, sous la direction de Jean-Baptiste
Thoret et Guy Astic. Avec le programme ambitieux
de repenser, d'interroger et d'analyser les formes
cinématographiques.
"Filmer la peur" a été le
premier thème choisi, avec un programme ambitieux :
"Parvenir aux
origines émotives du cinéma, aux
réactions des premiers spectateurs devant les bandes
des frères Lumière, et interroger à
nouveau le cinéma comme double expérience
d'éblouissement et de peur." Pour des informations
complémentaires sur Simulacres ou le sommaire des
numéros parus.
|
..général
.... .Étude :
.... Arnie et
Carrie
Contenu du site
Stephen King :
.