"Un Américain de ma génération aurait dû être sourd et aveugle
pour ne pas être entré en contact avec un monstre quelconque avant l'âge de douze ans."
(Anatomie de l'horreur, 116)
Un chapitre entier d'Anatomie de l'Horreur (chap. 4, intitulé "un irritant intermède autobiographique") est consacré à narrer des épisodes de la vie de King qui ont pu jouer leur rôle dans le choix de ce qu'il écrit. Il précise bien qu'il ne s'agit pas de fournir des matériaux pour une analyse psychologique quelconque1. Son but avoué est d'exposer des origines possibles de son goût pour l'horreur, dans la mesure où écrire des histoires d'horreur a quelque chose de malsain et d'aberrant. Parmi ces diverses influences, on retiendra ici le rôle des médias, et plus particulièrement le cinéma, ce qui nous donnera l'occasion de découvrir l'affiche que King voyait en entrant dans la salle.
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Simultanément à la
lecture, il faut noter l'influence de la radio des années 50.
King raconte dans Anatomie de l'horreur que la première
expérience de la peur, bien avant vu L'Étrange Créature du lac
noir, (premier film
dont King se souvienne à sept ans), lui vient de la radio. Il
avait alors quatre ans. Sa mère lui interdit d'écouter
l'adaptation d'une nouvelle de Ray Bradbury2, dans le cadre de l'émission
Dimension X, qu'elle même écoutait. Trop
dérangeant. Il écouta derrière la porte :
"Elle avait raison :
c'était sacrément dérangeant. (...) Je n'ai pas dormi dans mon lit cette nuit-là;
j'ai dormi sur le seuil de ma chambre, le visage baigné par la
lueur rationnelle de l'ampoule de la salle de bains. Tel était
le pouvoir de la radio à son apogée." (Anatomie de l'horreur,
141)
King fait partie du dernier
carré de la génération à se souvenir de
la radio comme d'un media de premier plan, une forme d'art
dotée de sa propre conception de la réalité. Il
a assisté à l'agonie de la radio en tant que media
pourvoyeur de fictions.Pendant son enfance, la radio diffuse encore
des dramatiques, que King écoutait avec son grand-père
quand il est retourné à Durham à douze ans . La
force théâtrale de la radio, sur certains plans, a
été perdue3.
Le visuel fait désormais
partie intégrante de notre conception de la
réalité, alors qu'avec la radio, c'est l'imagination
qui était sollicitée : "Entre 1930 et 1950, les auditeurs ne disposaient
d'aucune image préconçue pour meubler leur conception
de la réalité.
(...) Ils avaient certes une
conception de la réalité, mais celle-ci était
malléable, quasiment vierge de toute idée
préconçue. Quand ils imaginaient le monstre dans leur
esprit, il n'y avait pas de fermeture Éclair sur son dos;
c'était un monstre parfait." (Ana, 140)
De ces contacts avec la radio, il garde un souvenir nostalgique. La radio sollicitait l'esprit et l'imagination. Avec elle, l'impossible pouvait avoir sa représentation. King, qui utilise constamment le visuel, seul moyen d'être en phase avec le grand public, se rend compte que sa tâche est devenue plus difficile, avec les difficultés de la monstration : "Si la radio a réussi à faire l'impasse sur cette fichue porte, c'est à mon avis parce qu'elle faisait des dépôts plutôt que des retraits à la banque de l'imagination. (...) La radio rendait réel tout ce qu'elle touchait.4 " (Ana, 140)
Gamin, King a "découvert l'horreur grâce aux EC Comics 5 de William M. Gaines - Weird Science, Tales From the Crypt, The Vault of Horror - et à tous leurs imitateurs (mais les revues de Gaines étaient souvent imitées mais jamais égalées). Ces BD des années 50 représentent toujours pour moi le comble de l'horreur." (Ana, 30)
Parues entre 1950 et 1955, les bandes dessinées d'horreur (horror comics) s'étaient multipliées aux États-Unis. À la mort en 1947 de son fondateur, son successeur s'était tourné vers la bande dessinée d'horreur et de science-fiction, dont la vente était plus profitable. Il sut accepter le délire visuel de dessinateurs d'exception6 qui donnèrent à la bande dessinée quelques-unes des planches les plus terrifiantes de son histoire, dont certaines illustraient des nouvelles d'écrivains aussi prestigieux que Ray Bradbury. L'aspect grand-guignolesque et morbide des couvertures de ces magazines finit par attirer les foudres de la censure, et le Comics Code, instauré en 1955, mit fin à la parution de la plupart des titres de la firme. Leur lecture a marqué au fer rouge nombre d'écrivains - comme King - et metteurs en scène dans le fantastique ou l'épouvante. King en a gardé des souvenirs précis, au point de se rappeler des dialogues, dont il donne un exemple, celui d'un mort-vivant qui revient chez lui châtier son épouse infidèle : "J'arrive, Marie, mais j'arrive lentement... car il ne cesse de tomber des petits bouts de mon corps... " (Ana, 31)
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Creepshow est l'hommage qu'un écrivain alors connu de 35 ans rendra aux Comics des années cinquante qui ont modelé son imaginaire, et plus particulièrement à l'humour macabre qui imprégnait ces histoires. Ce recueil de bandes dessinées par Berni Wrighton - adaptées des scénarios du film à sketches écrits pour le film de George Romero - comporte cinq histoires (quatre inédites, la cinquième inspirée par une nouvelle), à l'humour macabre, à mi-chemin entre l'absurde et le gore. Mais ce qui était d'un accès si facile pour Steve l'est moins pour le jeune Billy, sur lequel pèse maintenant l'interdit. Il est surpris par son père en train de lire l'horrifiant album, qui finit à la poubelle. Heureusement, les éléments des Comics veillent : tonnerre, éclairs et tempête font tourner les pages de album, dont les histoires s'animent sous nos yeux.
King fait partie des enfants de cette
génération qui sont ont vécu
simultanément la fin de la radio et les débuts de la
télévision7. Il faut noter l'influence de la série
télévisée La Quatrième Dimension, de Rod Serling8, diffusée d'octobre 1959 à
l'été 1965, par la chaîne CBS, que le jeune King
vit semaine après semaine. La Quatrième Dimension rendit familière à King la situation
qu'il exploite dans la plupart de sesoeuvres, des gens ordinaires
placés dans des situations extraordinaires, des gens qui ont
apparemment fait un faux pas et franchi une lézarde dans la
réalité :
"C'est là un concept
des plus puissants, sans doute la route la plus directe pour
transporter dans le royaume du fantastique les lecteurs ou les
spectateurs qui n'ont pas l'habitude de le visiter." (PN,
30)
Les influences sont ainsi multiples, et impressionnantes par leur
intensité et leur impact; Anatomie de l'horreur et
Pages
Noires, qui en font le bilan,
constituent un ensemble si vaste qu'on ne peut guère noter
qu'une influence plus importante du visuel. King fait lui-même
la synthèse. Si l'impact de La Quatrième
Dimension a été
important, Serling n'a pas
la paternité de cette situation : Bradbury avait
entrepris de juxtaposer l'horrible et le quotidien dès les
années 40, et Jack Finney9 a repris ensuite le flambeau de ses mains :
"La plus grande
réussite de Finney, à laquelle font écho les
meilleurs écrivains de fantastique nourris au lait de cette
série, c'est cette capacité «dalienne» de
créer un univers fantastique sans chercher à
l'expliquer ni à s'en excuser. Cet univers est là,
fascinant et un peu inquiétant, un mirage trop réel
pour être nié : une brique flottant au-dessus d'un
réfrigérateur, un homme mangeant un plateau-repas
couvert de globes oculaires, des enfants jouant avec leur dinosaure
dans une chambre en désordre. Si le fantastique semble assez
réel, insiste Finney, et Serling après lui, alors on
n'aura pas besoin de ficelles ni de trucages optiques. Ce sont Jack
Finney et Rod Serling qui, après H. P. Lovecraft, ont fait
franchir au fantastique une nouvelle étape dans son
évolution. Pour mes contemporains et moi-même, ce fut
là une stupéfiante révélation qui nous
ouvrait des horizons infinis." (Pages Noires, 31) Horizons que
King n'a pas fini d'explorer.
Arrive enfin le choc du livre.
À douze ou treize ans, il trouve une caisse de livres de son
père dans le grenier d'une tante. Son père, qui a
abandonné la maison familiale alors que Steve avait deux ans,
aimait la littérature d'horreur et de science-fiction. La
caisse "regorgeait de vieux
livres de poche édités par Avon. En ce temps-là,
Avon était le seul éditeur de poche à publier du
fantastique et de la terreur." Dans cette caisse, il y avait notamment un livre de
Lovecraft10 : "Le
plus fabuleux de ces trésors était un recueil de H. P.
Lovecraft. Le titre m'en échappe aujourd'hui, mais je n'ai
jamais oublié son illustration de couverture : un
cimetière (...),
en pleine nuit, et surgissant
de sous une pierre tombale, une répugnante créature
verdâtre pourvue de longues griffes et d'yeux de braise.
Derrière elle, à peine suggéré par le
dessinateur, un tunnel conduisant aux entrailles de la
terre. (...)
Ce jour-là et le jour
suivant, j'ai visité pour la première fois les plaines
de Leng; j'ai fait la connaissance d'un étrange Arabe d'avant
l'OPEP,
Abdul Alhazred (auteur du Necronomicon) (...); et surtout,
j'ai été transfiguré par la sinistre terreur
insidieuse de La Couleur tombée du ciel."
11 (Ana,
115)
La lecture de ces comics spécialisés dans l'horreur
avait, comme le cinéma, très tôt marqué
l'enfance de King. mais ces livres sont une révélation
: "Si bien que ce livre,
héritage d'un père absent, m'a fait découvrir un
univers bien plus complexe que celui des films de série B que
j'allais voir le samedi après-midi. (...) J'avais
trouvé ma voie. Lovecraft - par l'entremise de mon père
- l'avait ouverte pour moi, comme il l'avait fait pour bien d'autres
écrivains avant moi."
(Ana, 116)
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L'Étrange
Créature du lac noir
est le premier film dont King se souvienne avoir vu étant
enfant (il devait avoir sept ans, dans un drive-in. Une seule
scène lui en est restée en mémoire, et elle l'a
marqué profondément, es celle où apparaît
le monstrueux batracien du marécage : "J'ai su à ce moment-là que la
Créature était devenue ma Créature. Elle
était à moi. Cette Créature n'était
guère convaincante, même pour un gamin de sept
ans. (...) Je savais qu'il s'agissait d'un homme dans un
costume de monstre... tout comme Je savais que, plus tard dans la
nuit, la Créature me rendrait visite dans le lac noir de mon
esprit et qu'elle serait beaucoup plus réaliste.
Peut-être se serait-elle planquée dans les
ténèbres de la salle de bains, empestant l'algue et le
marais, impatiente de croquer le marmot." (Ana, 119)
Pour King enfant, le macabre et le
monstre sont toujours présents. Il raconte qu'il
économisait son argent de poche pour voir des films d'horreur,
en «matinée», le samedi après-midi. Il
faisait à pied les trois kilomètres du trajet, ses
quelques pièces enveloppées dans un mouchoir afin de ne
pas les perdre. Il détaille longuement et avec émotion
dans Ça
les séances de cinéma de son enfance, la queue avec les
copains pour retirer son ticket à Godzilla, la dame
"méchante" du guichet, qui voulait voir d'abord leur argent,
pour avoir droit "à
deux monstres pour vingt-cinq cents et, avec un quarter de plus,
à tout le pop-corn qu'on était capable d'avaler."
Avec le chahut, les dessins
animés et les actualités. Puis le silence, les cris et
les hurlements : les sauterelles géantes arrivaient et
détruisaient Chicago ou Londres.
Quand après le cinéma, il rentre à la maison, le jeune Steve écrit des histoires basées sur les films qu'il vient de voir. Comme son double littéraire Richie, il adore et adorera toujours ce cinéma : "Dans la hiérarchie de ses goûts cinématographiques, il ne connaissait rien de mieux que deux films d'horreur dans un cinéma envahi par des jeunes criant à qui mieux mieux aux passages les plus sanglants." (Ça, 340)
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"Étant enfant, le macabre était toujours là. J'aimais les comics d'horreur. J'économisais mon argent de poche pour voir des films d'horreur comme The Black Scorpion, The Creature from the black Lagoon, tout ce qui contenait des monstres, cela m'effrayait et m'excitait en même temps.
Le samedi après-midi, notre
argent de poche enveloppé dans un mouchoir afin de ne pas le
perdre, nous faisions la queue. J'ai d'ailleurs parlé de cela
dans un livre appelé It. (...)
Debout, faisant la queue, avec un quart de dollar, comme la dame
derrière le petit guichet en verre paraissait méchante!
Elle voulait voir notre argent. Elle avait du rouge à
lèvres très brillant et de vilaines rides partout sur
le visage. Nous l'appellions Godzilla. Puis nous entrions dans le
cinéma et nous transformions nos bottes de pop-corn en
clairons. Il y avait les dessins animés et les
actualités. Puis les sauterelles géantes arrivaient et
détruisaient Chicago ou Londres; c'était formidable! Je
me revois aller au cinéma. Il fallait marcher pendant environ
deux miles. Je voyais des gosses devant leur cour et je me sentais
triste pour eux parce qu'ils n'allaient pas au cinéma, parce
que pour moi c'était important. Puis après le
cinéma, je rentrais à la maison et j'écrivais
des histoires basées sur les films que j'avais vus.
(cité dans Martin Coenen, Phénix 2, éd.
Lefrancq, 37)
Richie adore ce cinéma : "Dans la hiérarchie de ses goûts
cinématographiques, il ne connaissait rien de mieux que deux
films d'horreur dans un cinéma envahi par des jeunes criant
à qui mieux mieux aux passages les plus sanglants. Il ne
faisait absolument pas le rapprochement entre les deux séries
B d'American-International Pictures et ce qui se passait actuellement
en ville... " (340)
Dans notre civilisation (quand elle reste fidèle au
caractère qui la désigne historiquement), cette
visée personnelle n'a aucune valeur culturelle et se trouve
polémiquement niée : "Ces choses-là ne sont jamais réelles,
elles n'accèdent à l'existence qu'entre les pubs des
programmes de nuit de la télé ou le samedi en
matinée, au cinéma; là, avec un peu de chance,
on avait droit à deux monstres pour vingt-cinq cents et, avec
un quarter de plus, à tout le pop-corn qu'on était
capable d'avaler." (227)
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"Non, ils n'avaient aucune
réalité. Les monstres de la télé, du
cinéma et des BD n'étaient pas réels... du moins
jusqu'au moment où on allait au lit sans pouvoir dormir;
jusqu'au moment où étaient sucés jusqu'au
dernier les quatre bonbons que l'on avait placés sous son
oreiller contre les sortilèges de la nuit; jusqu'au moment
où le lit lui-même se transformait en un lac de
rêves méphitiques tandis qu'au-dehors hurlait le vent et
que l'on redoutait de regarder vers la fenêtre de peur d'y voir
un visage, un ancien visage ricanant qui n'aurait pas pourri mais se
serait desséché comme une feuille, les yeux
réduits à deux diamants enfoncés au plus creux
d'orbites ténébreuses; jusqu'au moment où l'on
voyait une main noueuse comme une patte de rapace
tenant..." etc (222)
"Ça descendait à
toute allure le rideau arachnéen de sa toile, araignée
de cauchemar venue d'au-delà du temps et de l'espace,
d'au-delà de ce qu'aurait pu imaginer l'esprit
enfiévré du dernier des pensionnaires de l'enfer.
(...) Cette forme ne fait pas partie de celles que
Ça a puisées dans nos esprits; c'est simplement la plus
proche de celles que nos esprits peuvent concevoir comme étant
celle des lumières-mortes, de Ça, sa vraie
forme." L'Araignée est
la forme qui cache celle inconcevable du Ça
dissimulé.
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"Ça avait peut-être cinq mètres de
haut et était aussi noir qu'une cuisse de culturiste. Ses yeux
étaient des rubis à la lueur malveillante,
dépassant d'orbites remplies d'un fluide couleur de chrome.
Ses mandibules en cisailles s'ouvraient et se refermaient,
s'ouvraient et se refermaient, bavant de longs rubans rubans
d'écume. Pétrifié d'extase et de terreur,
oscillant aux limites de la plus complète démence, Ben
observa avec un calme d'oeil au milieu du cyclone que cette
écume était vivante; elle heurta les dalles crasseuses
du sol et se mit à progresser dans les fissures avec un
tortillement de protozoaire.
(...)
Son corps était
recouvert d'une épaisse toison et Ben vit que Ça
possédait un dard assez long pour empaler un homme. Un fluide
clair en dégoulinait, fluide également vivant; comme la
salive, le poison du dard s'infiltrait dans les fissures du sol en se
tortillant. Son dard, oui... mais en dessous, son ventre faisait un
renflement grotesque, traînait presque sur le sol que Ça
venait de gagner." (1025)
Comme le jeune Eddie assassiné par Ça, qui s'est
transformé en créature du Lagon Noir : "La chose avait
un groin allongé et plissé ; un liquide verdâtre
s'écoulait d'entailles noires qui dessinaient des sortes de
bouches verticales dans ses joues. Elle avait des yeux blancs
gélifiés et des mains palmées dont les doigts se
terminaient par des griffes comme des rasoirs. Elle produisait un
bruit de respiration pétillant de bulles. Quand elle vit
qu'Eddie la regardait, ses lèvres d'un vert noirâtre se
retroussèrent sur d'énormes crocs en un sourire mort et
vide.
Elle se dandinait derrière lui, dégoulinante, et
brutalement, Eddie comprit. Son intention était de l'amener
dans le canal, de l'emporter dans les ténèbres humides
du passage souterrain du canal. Et là, de le
manger. (...)
Il regarda derrière lui
et vit la Créature s'incliner, ses yeux comme des oeufs
pochés luisants, ses écailles laissant couler une bave
couleur d'algue, ses ouïes s'ouvrant et se refermant au rythme
du gonflement de son cou et de ses joues." (264/5)
"Dans la seconde qui précéda l'instant où les mains cornées de la créature empestant le poisson se refermèrent sur sa gorge, il lui vint une pensée réconfortante : ce n'est qu'un rêve; la Créature n'existe pas, Le Lagon noir n'existe pas non plus, c'est une invention du cinéma, et puis même, c'est en Amérique du Sud ou en Floride, un coin comme ça. (...) «Tu... n'es pas... réel», souffla Eddie en s'étouffant; mais les nuages crépusculaires se refermaient sur lui, maintenant, et il se rendit vaguement compte que la Créature était bel et bien réelle. Après tout, elle était en train de le tuer.
Et cependant, il lui resta jusqu'à la fin un fond de rationalité : tandis que la Créature enfonçait ses griffes dans la chair tendre de son cou et que sa carotide laissait jaillir, sans douleur, un jet chaud qui alla arroser les plaques écailleuses, les mains d'Eddie continuèrent de chercher à tâtons, dans le dos du monstre, la fermeture à glissière. Elles ne retombèrent que lorsque la Créature arracha la tête au tronc avec un grognement de satisfaction." (265/6) La recherche de la fermeture Éclair dans le dos du monstre qui tue rejoint la rationalité inefficace submergée par une réalité autre.
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L'expression est utilisée par
King dans Anatomie de l'horreur. King enfant
regardait le film de Jack Arnold de 1954 L'Étrange Créature du lac
noir, créature
guère convaincante, jouée par Ricou Browning, cascadeur
aquatique réputé, vêtu d'une tenue en latex
à l'allure du monstre. Ce jour-là, l'emprise a
été totale et le jeune Steve, captivé par
l'action, n'a trouvé aucune imperfection. Mais ce n'est pas
toujours le cas: "Quand on
regarde un film d'horreur, le seul processus mental qui suffit
à rompre le charme, c'est quand un copain vous murmure
à l'oreille : «T'as vu la fermeture Éclair sur le
dos du monstre?»"
(Ana, 119).
"Il faisait une
agréable journée ensoleillée avec une
légère brise. Claquant des doigts, Richie descendait
Center Street en direction de l'Aladdin tout en chantonnant Rockin'
Robin. Il se sentait bien. Il se sentait toujours bien quand il
allait au cinéma; il aimait ce monde magique de rêves."
(345)
"Les gosses faisaient la queue au
guichet de l'Aladdin, leur pièce de vingt cents à la
main, puis entraient dans la salle. Regardant à travers les
portes vitrées, Richie vit une foule de jeunes
agglutinés autour du comptoir à friandises. La machine
à pop-corn était en sur-régime et
débitait cornet sur cornet. Pas de Ben.
«Peut-être est-il déjà entré,
suggéra Beverly.
- Il a dit qu'il n'avait pas d'argent. Et c'est pas
la Fille de
Frankenstein,
là, qui le laisserait entrer sans billet»,
répondit Richie avec un geste du pouce en direction de Mrs.
Cole, qui avait commencé à vendre des billets à
l'Aladdin au temps du muet. Ses cheveux, teints en rouge
éclatant, étaient tellement clairsemés que l'on
voyait la peau de son crâne; elle avait d'énormes
lèvres pendantes qu'elle barbouillait d'un rouge à
lèvres violacé; de féroces taches rouges
recouvraient ses joues, et ses sourcils étaient passés
au crayon noir." (350)
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"« Bonjour-bonjour, chère madame, fit Richie
(voix du baron Trouduc). Je souhaiterais procéder à
l'achat de trois billets pour ce spectacle si typiquement
américain.
- Pas de baratin et dis -moi ce que tu veux, petit!» aboya
Tranches-de-Foie à travers le rond découpé dans
la vitre. Quelque chose dans la façon qu'elle avait d'abaisser
et de soulever ses sourcils mit Richie tellement mal à l'aise
qu'il se contenta de pousser un billet tout froissé d'un
dollar dans le guichet et de grommeler : « Eh bien, trois
places.
- Ne faites pas les idiots, ne jetez pas les cornets de pop-corn, ne
criez pas, ne courez pas dans le hall et les allées, dit-elle
en lui rendant vingt-cinq cents, tandis que les billets jaillissaient
de la fente." (25)
"Le balcon était parfait.
Pendant la première bobine de Frankenstein Junior, Richie
repéra Henry Bowers et sa bande de tordus, juste au
deuxième rang, comme il l'avait prévu. Ils
étaient cinq ou six en tout, (...) leurs bottes de
moto sur les dossiers de la première rangée. Foxy
venait, leur disait de les mettre à terre; ils
obtempéraient. Dès qu'il avait tourné le dos,
les bottes réapparaissaient. Dix minutes plus tard, la
comédie recommençait. Foxy n'avait pas le courage de
les vider, et ils le savaient.
Les films étaient vraiment bien, le Jeune Frankenstein était convenablement balourd. Le
loup-garou adolescent faisait davantage peur...
peut-être parce qu'il avait quelque chose de triste. Certes il
avait été victime de l'hypnotiseur, mais c'était
à cause de la rage et des mauvais sentiments qu'il avait en
lui qu'il s'était transformé en loup- garou. Richie se
demanda s'il y avait beaucoup de personnes comme ça,
dissimulant d'ignobles sentiments. Bowers débordait de tels
sentiments, mais ne se souciait guère de les cacher.
Beverly était assise entre les garçons, mangeait du
pop-corn dans leurs cornets, criait, se cachait les yeux, riait
parfois. Quand le loup- garou se mit à poursuivre la jeune
fille, elle enfouit son visage dans le bras de Ben, et Richie
entendit distinctement le hoquet de surprise qu'il eut, en
dépit des hurlements des deux cents gosses du parterre.
Finalement, le loup-garou fut tué. Dans la dernière
scène, un flic déclarait solennellement à un
autre flic, que cet exemple devrait montrer aux gens qu'il il ne vaut
mieux pas jouer avec ce qui relève de Dieu. Le rideau tomba,
les lumières s'allumèrent. Il y eut des
applaudissements. Richie goûtait un bonheur sans
mélange, si ce n'était un léger mal de
tête ; il allait de nouveau falloir rendre visite au
toubib-pour-les-yeux et changer de verres. Quand il entrerait au
lycée, c'est des culs de bouteille qu'il allait avoir devant
les mirettes, pensa-t-il, morose." (354)
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"Richie, Ben et Beverly Marsh se trouvèrent face
à face non pas avec un monstre, mais avec deux, un samedi. Ils
payèrent même pour cela (Richie, du moins, paya). Ces
deux monstres étaient certes effrayants, mais nullement
dangereux, car ils poursuivaient leurs victimes sur l'écran du
cinéma Aladdin tandis que Richie, Ben et Beverly assistaient
à leurs exploits depuis le balcon.
L'un des monstres était un loup-garou, joué par Michael
Landon. Il était chouette, car même quand il devenait le
loup-garou, il conservait sa coupe de cheveux en catogan. L' autre
était cette espèce d'affreux branleur, joué par
Gary Conway, ramené à la vie par un descendant de
Frankenstein, qui jetait en pâture tout ce qu'il ne gardait pas
à des alligators installés dans son sous-sol.
Également au programme : des actualités avec les
dernières modes de Paris et la plus récente explosion
au décollage d'une fusée Vanguard à Cape
Carnaveral, deux dessins animés, et BIENTÔT SUR NOS ÉCRANS. Avec entre autres J'ai épousé un
monstre venu de l'espace
et The
Blob, que Richie inscrivit
immédiatement sur ses tablettes." (340)
40 ans plus tard, Aladdin est toujours debout. Mais on veut le détruire : "«Pour faire encore une banque?» demanda Bill, moitié amusé, moitié stupéfait à cette idée. Il n'arrivait pas à imaginer que quelqu'un de bon sens ait pu envisager la destruction de ce dôme majestueux avec son grand lustre de verre, son escalier à double révolution conduisant au balcon, et son rideau de scène titanesque, qui, au lieu de s'ouvrir en deux au début du spectacle, s'élevait en plis magiques allant s'empilant, tandis que des projecteurs le paraient d'en-dessous de toutes les couleurs et que les poulies, dans les coulisses, cliquetaient et grinçaient. Non, pas l'Aladdin! protesta-t-il en lui-même. Comment pouvait-on envisager une seconde de détruire l'Aladdin pour construire une BANQUE à la place?" "Ils avaient tous les papelards du conseil municipal, les autorisations, tout. Mais une bande de types a formé un comité - des gens qui vivaient à Derry depuis longtemps - pour préparer des pétitions, organiser des marches et faire un tel raffut, qu'il a fallu organiser une séance publique du conseil." (466) C'est Mike Hanlon, bibliothécaire, ancien du Club des Ratés qui a organisé la protestation.
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"Le clown avait disparu. A sa
place se tenait Dracula, mais pas le Dracula
du film - ni Bela Lugosi, ni Christopher Lee, ni Frank Langella ou
aucun autre. Une chose vaguement humaine à la figure tordue
comme une racine, mortellement pâle, les yeux rouge-mauve comme
des grumeaux de sang, le regardait du palier de l'escalier de gauche.
Sa bouche s'ouvrit toute grande et révéla une double
rangée de lames Gillette enfoncées dans les gencives
sous des angles divers; on avait l'impression d'être en face
d'un labyrinthe de miroirs dans lequel le moindre faux pas pouvait
être mortel.
La chose poussa un cri strident et referma brusquement ses
mâchoires. Du sang noirâtre se mit à couler de sa
bouche, des fragments de ses lèvres entaillées
tombèrent sur la soie blanche étincelante de sa chemise
de soirée et laissèrent en glissant des
traînées d'escargot sanguinolentes." (529)
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Ainsi Mike, qui a vu la veille au
soir à la télé le film Rodan12 (276) se voit agressé par un oiseau gigantesque :
"L'oiseau ne ressemblait pas
à Rodan, mais il sentait que c'était le même
esprit qui venait de jaillir de la fosse." (280) Et, preuve qu'il s'agit bien d'un avatar de Ça,
sur la langue de l'oiseau "étaient posés un certain nombre de pompons
orange." (283) En fait, la
peur de Mike ne vient pas seulement du film de la veille :
"Il ne s'en souvenait pas
consciemment, mais sa mère aurait pu lui dire d'où
venait l'oiseau qu'il avait vu aux aciéries. Alors qu'il
n'avait que six mois, elle l'avait laissé endormi dans son
berceau, d'un côté de la cour, pendant qu'elle
étendait draps et couches sur le fil à linge. Elle
avait accouru à ses cris. Un gros corbeau s'était
posé sur le rebord du berceau et picorait le
bébé comme une créature diabolique dans un conte
de fées. Il hurlait de souffrance et de terreur, incapable de
chasser l'oiseau qui avait senti la faiblesse de sa proie.
(...) Le souvenir était resté enfoui
dans la mémoire profonde de l'enfant - bébé
minuscule, oiseau gigantesque - et lorsque Ça l'avait
attaqué, Mike avait vu de nouveau le monstre
d'autrefois." (991)
"Et soudain lui revint
à l'esprit le seul film d'horreur qui lui eût jamais
réellement fait peur quand il était gosse,
peut-être à cause de tous les emmerdements que lui
valaient ses lunettes et du temps passé à s'occuper de
ses yeux. Il s'agissait de L'oeil qui rampe, avec Forrest Tucker. Pas fameux. Les autres gosses
avaient hurlé de rire, mais lui n'avait même pas souri.
Il était resté de marbre et muet, pour une fois
incapable de faire appel à l'une de ses voix,
tandis qu'un oeil gélatineux bardé de tentacules
surgissait du brouillard synthétique d'un studio de
cinéma anglais. La confrontation avec cet oeil avait
été catastrophique; il incarnait de multiples peurs et
angoisses pour Richie. Peu de temps après, une nuit, il avait
rêvé qu'il se regardait dans un miroir et
enfonçait une grosse aiguille dans l'iris de son oeil,
lentement, sentant un écoulement aqueux et paralysant au fond
de son orbite remplie de sang. Il se rappelait (oui, il se le
rappelait, maintenant) s'être réveillé pour
découvrir qu'il avait mouillé son lit. Qu'il se soit
senti soulagé et non pas honteux devant son incontinence
nocturne prouve à quel point le cauchemar avait
été épouvantable pour lui; il s'était
accroché au drap mouillé de tout son corps,
bénissant la réalité de ce qu'il
voyait."
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"La momie! Oh, mon Dieu, c'est la
momie! fut sa première pensée, accompagnée d'un
tel sentiment d'horreur qu'il dut étreindre le parapet du pont
pour ne pas s'évanouir. Bien sûr, ce n'était pas
la momie, ce ne pouvait pas être la momie. Des momies
égyptiennes, il en avait tant qu'on voulait, il le savait,
mais sa première pensée avait été qu'il
s'agissait de la momie, le monstre poussiéreux joué par
Boris Karloff dans ce vieux film qu'il avait vu le mois dernier
à la télé - il s'était même
couché très tard pour ça.
Non, ça ne pouvait être cette momie-là, les
monstres de cinéma n'existent pas, tout le monde sait cela,
même les petits enfants." (220)
Ça se transforme ainsi successivement en lépreux, en
momie, "avec des effluves de
cannelle et d'épices, de suaires pourrissants
imprégnés de drogues étranges, de sable et d'un
sang si vieux qu'il s'était desséché en granules
de rouille..." (220), en
Créature du Lagon Noir qui assassine le jeune Eddie.
Mort-vivant
"C'était le Roteur mais
aussi le lépreux, une créature hideuse sortie de son
tombeau humide après des années. La chair de son lourd
visage pendait en lambeaux putréfiés. Une de ses
orbites était vide. Des choses grouillaient dans sa chevelure.
Il tenait à la main un gant de base-ball couvert de mousse. Il
passa les doigts pourrissants de son autre main à travers les
trous de la grille de métal, et quand il les replia, Eddie
entendit un ignoble bruit de liquide qui giclait, le tendant presque
fou. (...)
Le visage du Roteur se
transforma. Le nez bulbeux et gélatineux s'effondra,
révélant les deux conduits sanguinolents qu'Eddie avait
vus dans ses rêves. Ses cheveux s' épaissirent et
reculèrent sur ses tempes, prenant une couleur de toile
d'araignée. La peau en couverte d'une membrane muqueuse, comme
le verre trouble d'une lampe-torche." (539)
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Ça apparaît sous la
forme d'un loup-garou parce que Richie, dans sa peur, l'a vu ainsi :
"C'était comme dans un
film d'horreur et pourtant pas vraiment. La momie lui avait paru
différente, à certains points de vue... des points de
vue qui confirmaient sa réalité fondamentale. Il en
allait de même avec le loup-garou : de cela il pouvait en
témoigner.
(...)
Il avait plongé les
mains dans les crins ébouriffés de son pelage, il avait
aperçu une petite lueur orange maléfique (comme un
pompon!) briller dans l'un de ses yeux verts. Ces choses
étaient... comment dire? des rêves
concrétisés. Et une fois que de tels rêves
accédaient à la réalité, ils
échappaient à la maîtrise du rêveur et
acquéraient une autonomie mortelle leur permettant d'agir
indépendamment."
(844/5)
Les émotions humaines ont une force telle que la peur peut,
par participation, revêtir une réalité en dehors
de l'esprit humain qui l'a éprouvée. Certains ont peur
des fantômes, et leurs fantômes imaginaires deviennent
réels. L'enfant, qui regarde la nuit le vêtement
accroché à la porte de son placard, peut trouver que sa
forme ressemble à celle d'un monstre. Et tant qu'il pense
cela, il y a un monstre à la porte du placard. Quand il
s'imagine entendre le bruit d'une respiration dans le noir, la
respiration devient réelle, avec l'image particulière
qu'elle évoque, et tant qu'il en a peur, l'objet
évoqué par l'image conservera une existence
réelle.
Parfois ces transformations auraient un aspect risible si elles
n'étaient pas terrifiantes. Richie a vu un loup-garou le
samedi précédent, sur l'écran du cinéma
Aladdin. "Sauf que ce
n'était pas Michael Landon13, le visage
grimé, le corps couvert d'une fausse fourrure. C'était
bien réel." (373) Le
loup-garou a la veste d'écolier de Landon; mais elle ne
comporte aucun système de fermeture : "Au lieu de cela, il y avait ces espèces
de gros boutons orange, duveteux comme des pompons. Le
deuxième détail était encore pire; il fut sur le
point de lui faire perdre connaissance, ou du moins, il faillit
s'abandonner au monstre et se laisser tuer. Un nom, cousu avec du fil
d'or, apparaissait sur le revers de la veste - le genre de truc qu'on
peut se faire faire chez Machen's pour un dollar si la fantaisie vous
en prend.
Sur la partie gauche et ensanglantée de la veste,
tachés mais lisibles, figuraient les mots RICHIE
TOZIER." Son nom.
(376)
Savoir.
Certains objets tirent leur vertu de la tradition du genre, comme des
moyens connus de lutte contre certains monstres : "Que faire pour se débarrasser d'un
monstre?
D'après les films, lui tirer dessus une balle d'argent
était une solution radicale." (684) Que les balles d'argent soient efficaces est une
conviction bien ancrée : "Pour tout ce qui est loups-garous, vampires et autres
entités qui ne rôdent qu'à la lumière des
étoiles, c'est de l'argent qu'il faut, du bon argent. Il faut
de l'argent pour arrêter un monstre." (174) Mais est-on bien certain que le truc fonctionne
toujours? "Les gosses qui
fondent des balles d'argent, c'est des trucs romanesques, des trucs
de BD, même... en un mot, que c'était que dale. Bien
sûr, ils pouvaient toujours essayer. Dans un film, ça
marcherait, ouais. Mais..."
(704) Au delà du doute, ils y croient et fondent
eux-mêmes les balles. Qui obtiennent le résultat voulu :
"La bille d'argent avait
été efficace parce qu'ils partageaient tous les sept la
conviction absolue qu'elle le serait. Mais elle n'avait pas
tué Ça. Et la prochaine fois, Ça se
présenterait sous une autre forme, sur laquelle les billes
d'argent seraient sans aucun pouvoir." (844/5) Procédé efficace, mais puissance
redoutable. Il faudra essayer autre chose.
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"Ben eut l'impression qu'il pouvait devenir fou; il
s'imaginait un grillon géant tapi derrière la porte,
comme dans ces films où la radioactivité transforme les
insectes en animaux géants - The Beginning of the End, peut-être, ou The Black Scorpion, ou encore celui sur les fourmis qui
envahissent les égouts de Los Angeles. Il aurait
été incapable de courir." (833)
Imagination.
Ces divers faits sont l'oeuvre de Ça, qui «hante» la
petite ville de Derry, apparu la première fois dans le roman
sous la forme d'un clown : "George se pencha et regarda de nouveau. Il n'en croyait
pas ses yeux; c'était comme dans un conte de fées, ou
comme dans ces films où les animaux parlent et dansent. Il
aurait eu dix ans de plus, il serait resté incrédule :
mais il avait six ans, et non seize.
Un clown se tenait dans l'égout. (...)
Un clown, comme au cirque, ou
à la télé. (...) Le visage du
clown était tout blanc; il avait deux touffes marrantes de
cheveux rouges de chaque côté de son crâne chauve
et un énorme sourire clownesque peint par-dessus sa propre
bouche.
Il tenait d'une main un assortiment complet de ballons de toutes les
couleurs, comme une corne d'abondance pleine de fruits
mûrs." (23/4) Le clown est
habillé d'un ample vêtement avec des gros pompons orange
en guise de boutons, et porte des gants de dessins animés.
Sentiments
éprouvés
"«Nom d'une pipe, Meule
de Foin, j'ai bien cru que tu t'étais dégonflé.
Tu vas voir, mon vieux, ces films vont bien te faire perdre cinq
kilos et à la fin t'auras les cheveux tout blancs! Et tu vas
tellement trembler de frousse qu'il faudra une civière pour te
sortir." (351)
"George s'imaginait maintenant que
son bateau était une vedette lance-torpilles comme celles
qu'il voyait dans les films de guerre au cinéma de Derry le
samedi en matinée, avec son frère.
John Wayne contre les
Japs." (17)
"Bill était bon. Stupide de penser une chose
pareille (il la sentait d'ailleurs davantage qu'il ne la pensait),
mais le fait était là. Bonté et force semblaient
émaner de Bill. Il était comme le chevalier d'un de ces
vieux films." (360)
Films également
cités dans Ça :
Godzilla
(558)
Golem (998)
Dents de la mer
(574)
Graine de
violence (231, 914)
Alien (1021)
Roland Ernould, © août 2000.
Ces opinions n'engagent que leur auteur, qui reçoit avec reconnaissance toutes les remarques qui pourraient lui être faites.
Références des
films : Cinéguide, 20.000
films de A à Z, par
Eric Leguèbe,
édition 1997, © Omnibus.
Mes plus vifs remerciements à Gérard Mangin, auteur du livre : Affiches du cinéma fantastique, 1990 et à son éditeur ©
Henri Veyrier.
1 "Je considère cette idée comme totalement spécieuse - de tels jugements psychologiques à l'emporte-pièce sont aussi sérieux à mes yeux que l'horoscope des quotidiens." (Ana, 102)
2 La troisième expédition (Mars is Heaven), nouvelle des Chroniques Martiennes (The Martian Chronicles, 1951), Denoël, 1960.
3 "La radio, bien entendu, est le media «aveugle» par excellence, et on sut exploiter cette cécité pour en tirer le maximum d'effets." King raconte la célèbre émission de La guerre des mondes d'Orson Welles, diffusée en 1938, soir de Halloween, de 20 h à 21 h, et la panique qui s'ensuivit. "Nos oreilles modernes, bien entendu, ont vite fait de repérer les conventions nécessaires de ce media qui ont fini par devenir obsolètes (...), mais ce sont là des conventions que le public de l' époque acceptait sans problème. (...) Parmi les conventions figure l'utilisation de la narration dans l'agencement de l'intrigue. Ainsi que la description dialoguée, une technique nécessaire à la radio mais que le cinéma et la télé ont rendue caduque."
4 King cite un extrait de narration radiophonique et le commente : "A la télé, un tel dialogue serait considéré comme risible et redondant; voire kitsch. Mais si on l'écoute dans l'obscurité, il est redoutablement efficace." (Ana, 149)
5 La firme EC (Educational Comics) s'était cantonnée à des ouvrages édifiants, comme des récits tirés de La Bible, jusqu'à la mort en 1947 de son fondateur Max C. Gaines. Son successeur se tourna alors avec succès vers la bande dessinée d'horreur et de science-fiction.
6 Harvey Kurtzman, Frank Frazetta, Wallace Wood, Al Williamson et Graham Ingels.
7"Après le départ de mon père, ma mère s'est débrouillée comme elle pouvait pour joindre les deux bouts (...). On n'a jamais eu de voiture (et on n'a eu une télé qu'en 1956), mais jamais on ne sautait un repas." (Ana, 112). Steve avait neuf ans.
8 Rod Serling, le créateur de The Twilight Line, a écrit soixante-deux épisodes sur les quatre-vingt-douze premiers et son influence a été déterminante sur l'ensemble de la série. La série compte 156 épisodes et fait figure aujourd'hui de série-culte.
9 Jack Finney, L'Invasion des profanateurs (Invasion of the Body Snatchers, 1955), Le Voyage de Simon Morley (Time and Again, 1970), Denoël, Présence du Futur, nos 546) est un auteur que King a longuement médité et auquel il a emprunté un certain nombre de procédés techniques. Auteur hanté par le voyage dans le temps et les univers parallèles, il joint l'humour et la poésie à la maîtrise de la progression dramatique.
10 King cite d'autres auteurs : des nouvelles signées Frank Belknap Long (Les Chiens de Tindalos), Zelia Bishop (La Malédiction de Zig), ainsi que des textes provenant des premiers temps de la revue Weird Tales. Et deux romans d'Abraham Merritt, Brûle, sorcière, brûle! et Le Monstre de métal. F. B. Long (1903-I994), disciple et ami de Lovecraft, est un des six dédicataires de l'Anthologie de l'horreur. Lovecraft corrigea des textes de Z. Bishop (1895-?) pour la revue populaire bon marché Weird Tales imprimée sur du papier de mauvaise qualité (pulps) consacrée à la littérature fantastique et d'horreur, le légendaire Weird Tales publia de nombreux d'auteurs de premier plan, parmi lesquels H. E Lovecraft et Robert Bloch.
11 Oeuvres complètes, tome 1, Robert Laffont, collection Bouquins, ou. Denoël, Présence du Futur.
12 RODAN, Japon, 1957, n.b. 79 mn Réalisateur : Inoshiro Honda. Interprètes : Kenji Sahara, Akihro Hirata. Yumi Shirakawa. Au fond d une mine, un jour, surgit un monstre sous la forme d'une chenille géante que la police détruit. Dans les jours qui suivent, de curieux phénomènes se produisent dans le ciel.
13 I Was a Teenage Werewolf, suivi de The Curse of the Werewolf (1960), inspira à King en 1965 I Was a Teenage Robber, sa première nouvelle publiée (dans un fanzine). On notera l'importance prise par ces films d'épouvante dans l'imaginaire de King, qui les a vus quand il avait l'âge des préadolescents de Ça.
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