Les extraterrestres dans Dreamcatcher.

SÉDUCTIONS ET FAIBLESSES DU TERRIEN

"C'étaient donc ça, les maîtres de l'univers que
tant de films nous avaient appris à redouter?
D'impitoyables conquérants qui voyageaient entre les étoiles
mais ne savaient pas couler un bronze ou calculer un pourboire?"
(Dreamcatcher, 494)

Avec Dreamcatcher 1, King retrouve la science-fiction qu'il a cultivée dans ses premières nouvelles, publiées en fanzine 2, et son premier roman, jamais publié, The Aftermath, écrit en même temps à seize ans que Rage (1977). Il n'a fait qu'effleurer sans grande originalité le genre dans d'autres nouvelles, comme Une sale grippe ou Comme une passerelle 3. Le thème de la fin du monde a été utilisé dans Le Fléau 4. Le seul roman où King aurait pu aborder plus à fond le genre a été Les Tommyknockers 5 , roman qui a été jugé raté par la critique. On en avait conclu que la manière de King n'était pas adaptée à la science-fiction. Et voici le dernier essai avec Dreamcatcher, le plus réussi, encore que le roman, hybride plus encore que Les Tommyknockers, participe de plusieurs genres.

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Dans Les Tommyknockers, les extraterrestres ne participaient pas à l'action et n'envahissaient pas la Terre. Ils appartenaient à une civilisation d'ingénieurs plutôt que de scientifiques, et même de bricoleurs plutôt que d'ingénieurs. Ils n'étaient peut-être pas stupides, mais paraissaient tels suivant les normes de l'intelligence terrienne. En tous cas, on ne trouvait pas trace d'intelligences supérieures, et on pouvait même se demander comment des amateurs aussi farfelus avaient pu construire un vaisseau cosmique. Une force mystérieuse s'exerce à partir de l'immense engin, enfoui dans la propriété de Bobby Anderson, dont elle prend peu à peu le contrôle. Des voix se font entendre dans sa tête, et cette contagion s'étend au village de Haven. Mentalement et physiquement, les habitants deviennent des monstres d'outre-espace. Ce vaisseau, disposant d'une volonté particulière et utilisant l'énergie mentale des terriens, veut soudainement quitter la terre et rentrer dans sa planète d'origine. Les tommyknockers venus avec le vaisseau sont morts dans l'engin, et n'interviennent donc pas directement dans l'action au contraire de Mr Gray, le Gris télépathe et d'apparence indéterminée, doué d'une forme d'intelligence supérieure. Dreamcatcher appartient à la famille des romans paranoïaques d'irruption, consacrés à l'invasion de la Terre par des extraterrestres. Mr Gray est présent pratiquement du début à la fin du récit. Il dispose de pouvoirs particuliers, auxquels s'opposeront, dans l'ambivalence particulière à King, les parades et la ruse d'humains prédisposés.

Un extraterrestre à la biologie compliquée.

Les visiteurs de King sont ambivalents dans leur présence imposée. On ne connaît pas bien leurs intention, mais les températures froides 6 les empêchent de vivre, comme leur mode de vie parasitaire détruit les humains contaminés. King a déjà utilisé le motif de la moisissure dans Matière grise 7, où un épicier constate que les billets remis par un enfant sont couverts d'une "mousse grisâtre semblable à l'écume qui se forme sur la confiture pendant la cuisson." (Danse Macabre, 154). Elle provient d'une bouteille de bière corrompue bue par son père alcoolique qui le transforme peu à peu en une "gelée grise..., une vraie bouillie."(158) et le métamorphose en "blob" 8. L'espèce de "moisissure rouge doré qui poussait sur tous les arbres du secteur de l'opération Blue Boy. et sur les gens" dans Dreamcatcher est aussi un champignon, mais qui se transforme en autre chose qu'en blob. Il a été baptisé par les techniciens "le champignon Ripley" en s'inspirant de la "supernana que jouait Sigourney Weaver dans la série des Alien. La plupart d'entre eux étaient trop jeunes pour se souvenir des autres cas de Ripley, ceux qui avaient contribué à la chronique des INCROYABLE MAIS VRAI de certains journaux. INCROYABLE MAIS VRAI avait disparu, à présent; trop dérangeant, sans doute, pour le politiquement correct du vingt et unième siècle. Mais le nom convenait à la situation, se dit Kurtz. Lui allait comme un gant. À côté, les soeurs siamoises et les veaux à deux têtes, dans l'ancienne revue Ripley's Believe it or not, paraissaient pratiquement des choses normales." (238) On trouve là une allusion aux recueils de faits et d'anecdotes étranges publiés en livre de poche : Ripley's Believe It or Not (Incroyable, mais vrai), que King lit avec fascination en étant gamin. Il y trouve d'innombrables curiosités, des faits merveilleux, mais aussi des monstres animaux ou humains, ces aberrations tératologiques qui écoeurent ou effraient les hommes depuis toujours : "C'est dans le Ripley's Believe It or No que j'ai commencé à voir pour la première fois à quel point pouvait être ténue la ligne qui sépare le fabuleux de l'ordinaire, aussi que la juxtaposition des deux faisait autant pour jeter une lueur nouvelle sur les aspects ordinaires de la vie que pour éclairer ses manifestations les plus aberrantes." (Rêves &Cauchemars, 11)

Les métamorphoses d'une moisissure.

La moisissure, la "
saleté rouge" est nommé "byrus" un terme qui signifie "terreau de vie" (404), pour les aliens, appelés "grisâtres" 9. Il s'attrape par contact ou par ingestion. Dans certaines conditions, ces champignons peuvent faire pousser les implants, les fouines-merde : "Elles naissent du byrus, mais se reproduisent ensuite en pondant des oeufs. Elles se dispersent, pondent d'autres oeufs, et ainsi de suite." Elles sont saprophytes, des parasites gênant de notre point de vue, quand elles ralentissent le développement des végétaux (le mildiou des légumes ou arbustes), rendent malades les animaux (le «muguet»), ou gâtent nos aliments. Mais aussi bénéfiques, toujours de notre point de vue, quand elles permettent de fabriquer des fromages ou fabriquer de la pénicilline ou ses dérivés... Nous en possédons des quantités dans notre organisme, explique King 10 : "Nous offrons le gîte au microbe, et il nous donne quelque chose en échange. Dans le cas des bactéries des produits laitiers, c'est une amélioration de la digestion. Ces fouines, dans des circonstances normales - normales sur d'autres planètes, je suppose, où l'écologie diffère de la nôtre dans des proportions que je suis bien incapable d'imaginer - atteignent une taille qui est celle d'une petite pièce de monnaie, à peu près. Il semble qu'elles peuvent interférer dans la reproduction, chez les sujets femelles, mais elles ne tuent pas. En principe. Elles se contentent de vivre dans les intestins. L'hôte donne de la nourriture, elles offrent la télépathie. C'est le marché d'habitude. Sauf qu'elles nous transforment aussi en appareil de télé. Télégrisâtre, c'est nous." (404) La télépathie est en effet une caractéristique des "grisâtres" 11.

King n'est pas plus précis. On ne voit pas bien, à ce stade, quel est l'intérêt des "grisâtres" dans l'installation de ce processus. Leur survie? Sans doute. En quelques mots est évoqué l'ensemencement effectué auparavant sans succès sur d'autres planètes (384). Alors qu'un terrien particulier est en contact avec un "grisâtre" dont il tient les renseignements fournis plus haut, on ne sait rien de précis sur la finalité du processus d'invasion.

Les fouines, à la queue de serpent particulièrement redoutable, sont comparées aussi à des murènes, se révèlent agressives et carnivores sur terre. Leurs oeufs : "
une centaine, sinon davantage, d'une couleur orangée tirant sur le brun. Ils avaient la taille de grosses billes et étaient enduits d'une humeur visqueuse qui faisait penser à de la morve sale." (275) 12 King, jamais en retard d'un détail horrible, décrit même que, pas plus grosse qu'un poil dans les oeufs translucides, les embryons "essayaient de foudroyer [un terrien] du regard, avec leurs yeux pas plus gros que des têtes d'épingles." (276)... Ce terrien doit avoir une vue particulièrement aiguisée...

On apprendra ultérieurement, après tous les suspenses souhaités, que ce processus n'est pas adapté aux conditions terrestres : "C'est en tout cas ainsi que ça doit marcher, en théorie. Mais ici, les oeufs n'arrivent pratiquement jamais à maturité. J'ignore si c'est le froid, l'atmosphère, ou autre chose. Toujours est-il que dans notre système écologique, il n'y a que le byrus qui s'adapte." (406) Mais après quelques jours, même le byrus lui-même dépérit et disparaît.

Lié à l'invasion, un objet et son symbole, qui reviendront en leitmotiv dans le livre, a été trouvé avec le dreamcatcher 13, l'attrapeur de rêves, "un objet magique indien" accroché à une poutre du chalet de chasse, constitué généralement d'une sorte de rosace tissée en toile d'araignée à laquelle sont suspendus des pendentifs : "En principe, il est là pour vous protéger des cauchemars." (64) Le dreamcatcher, comme les autres meubles, les tapis et le sol du chalet sont couverts de la mousse de l'invasion : "Le plus désolant était peut-être de voir l'espèce de toile d'araignée dorée qui pendait au-dessus du tapis navajo, que Henry fixa quelques secondes avant de comprendre qu'il s'agissait de l'attrape-rêves. (...) Une chose était sûre : cette fois, l'attrape-rêves avait pris un véritable cauchemar dans son filet." (270)

Une invasion préparée.

Cela fait des années, selon King, que les grisâtres cherchent le contact. L'un des personnages du récit qui a fait des études universitaires de psychologie, se montre sceptique, jouant le rôle classique que King fait toujours tenir aux savants, qui ne croient ni aux OVNIs, ni aux monstres, pour fustiger leurs prétentieuses certitudes : "
Quand les idées hystériques ont-elles le plus de chances de trouver créance? Une fois les récoltes rentrées et le mauvais temps revenu, pardi. Là, on a tout le temps de colporter des ragots et de faire du mal. (...) T'en fais pas, va, le monde est plein de phénomènes bizarres." (94) Apprenant l'invasion, il se montre beau joueur : "On est bien dans le cas de figure que tous ces crétins attendaient, dit-il. Rencontre du troisième type Hé, du quatrième ou du cinquième, tant qu'on y est. Désolé de m'être payé ta tête, Pete. Tu avais raison et j'avais tort. Bon Dieu, c'est encore pire que ça : ce vieux chnoque de Gosselin avait raison et j'avais tort! C'est bien la peine d'avoir été à Harvard..." (292) Car depuis des années déjà, des singularités ont été remarquées dans la région, des rumeurs ont couru de chasseurs disparus, de lumières dans le ciel : "Avec quel entrain le Grand Psychanalyste américain les avait rejetées, se gaussant de l'hystérie sataniste qui avait secoué l'État de Washington, de l'hystérie du Delaware, où l'on s'était mis à voir des pédophiles partout. Jouant les psy je-sais-tout sûrs de soi côté façade, tandis que côté cour, son esprit jouait avec l'idée de suicide comme un bébé qui vient tout juste de découvrir ses orteils dans son bain. Il avait tenu un discours parfaitement plausible, une argumentation qui aurait été au point pour n'importe quelle émission de télé voulant consacrer soixante minutes à l'interface entre inconscient et inconnu... mais les choses avaient changé. Il faisait à présent partie des chasseurs manquants. Et, de plus, il avait vu des choses que personne n'aurait trouvées sur Internet, même avec le plus gros des moteurs de recherche." (292)

Comme chaque automne, quatre amis d'enfance sont partis chasser dans le nord du Maine. Ils se trouvent pour leur malheur dans le périmètre atteint par les grisâtres. Ils constatent divers phénomènes insolites, un chasseur recueilli dans un état anormal, qui signale plusieurs de ses amis disparus, des cercles lumineux intenses, croisant lentement dans le ciel : "
Henry sentit une peur atavique l'envahir soudain." (105), celle qu'éprouvent les animaux qui fuient la zone. Divers incidents trop nombreux à relever apparaissent : l'extension du byrus, la naissance d'une fouine, sortie du ventre d'un chasseur contaminé après son incubation humaine, des dents perdues, les montres à pile tournant à l'envers, puis s'arrêtant alors que les montres à remontoir fonctionnent normalement, etc. Des phénomènes télépathiques sont éprouvés par tous. Un cas de possession psychique, celui d'un enseignant, Jonesy, qui a eu il y a peu un accident de voiture, qui le fait disposer d'un mental particulier 14. Il sera «habité» par un grisâtre,M. Gray, qui occupe son corps sans maîtriser toutes ses facultés mentales : "Jonesy est fan de films d'horreur, il a regardé L'Intrusion des morts-vivants (...) et il ne se fait pas d'illusions sur ce qui se passe. Son corps a été envahi, et envahi des pieds à la tête, en large et en travers" estime son ami Henry. (315)

éditionhollandaise

Si le double Gray/Jonesy occupe une place de choix dans le roman, ainsi que la télépathie, certains de ces éléments seront vite abandonnés, comme les faux-éclairs, éléments pittoresques momentanés pour amateurs d'effets spéciaux, dont on ne connaît pas bien le rôle, ni la fonction : "La plupart sont maintenant dispersés dans les bois. Ils se désintègrent assez rapidement une fois qu'ils n'ont plus de jus. Ceux que nous avons pu récupérer ont l'air de boîtes de conserve sans étiquette. Étant donné leur taille, ils font un sacré numéro, non?" (238) En tous cas, ils impressionnent et font peur. Une fonction nous est un moment proposée, celle de guide : "Jonesy vit une boule de lumière d'un jaune très clair immobile en l'air, à trente centimètres à peine au-dessus du sol. Elle les attendait. Elle paraissait aussi chaude que la flamme qui sort de la torche d'un soudeur, mais ce n'était qu'une illusion; sans quoi la neige aurait fondu en-dessous." (323) Elle indique la direction du sud à suivre par la motoneige de M. Gray./Jonesy : "C'est l'un des derniers, peut-être le dernier" dit Gray. Il épuise son énergie au bout d'une heure, pâlit, puis s'éteint définitivement . Sa disparition s'accompagne d'un petit bruit d'explosion, "comme celui d'un sac en papier rempli d'air qu'on écrase." (325) La réaction des humains est celle de l'effroi, résumée par le hurlement d'une femme ("Ils reviennent! s'était écriée Becky, comme la petite fille assise devant la télé, dans le vieux film de Steven Spielberg" 296 ). L'appel : Ils sont de retour!, est associé depuis longtemps au thème de l'invasion, et a servi au cours de l'histoire à signaler toutes les agressions. Des centaines de personnes fuient la zone où se trouvent les grisâtres, bientôt bouclée par l'armée.

Les plus réfléchis se posent les bonnes questions : "Qu'est-ce qu'ils veulent? Veulent-ils vraiment nous faire du mal? Le vent que nous avons semé apporterait-il aujourd'hui la tempête ? Qu'est-ce qui s'est passé lors de toutes les rencontres précédentes, les ovnis, les faux-éclairs, les chutes de cheveux d'ange et de poussière rouge, les enlèvements qui avaient débuté à la fin des années soixante, pour que les puissances en place aient aussi peur?Avait-on réellement essayé de communiquer avec ces créatures?
Et la dernière question, la question la plus importante: les grisâtres étaient-ils comme nous? Étaient-ils humains d'une manière ou d'une autre ? S'agissait-il de véritables assassinats?"
(245)
Le premier engin venu de l'espace a été mis en scène par King dans
Les Tommyknockers, une soucoupe venue d'Altaïr 4 il y a 25.000 ans, minutieusement décrite, y compris à l'intérieur. On ne connaît pas l'origine du vaisseau spatial de Dreamcatcher. Vu d'hélicoptère, il se présente comme une "plaque titanesque grise mesurant presque quatre cent mètres de large, avait culbuté et arraché les arbres morts au milieu du marécage." (247) Il est entouré d'une soixantaine de grisâtres, qui n'ont pas l'air menaçants, souffrant du froid et de l'atmosphère : "Les grisâtres, comme la moisissure qu'ils avaient importée avec eux, avaient manifestement du mal à vivre ici." (247)

La mise en quarantaine d'un vaste secteur par l'armée par "précaution" est accompagnée d'un démenti sur le danger réel. Les rumeurs étaient toutes fausses" et "contradictoires" selon les déclarations officielles.

King une fois encore contre la raison d'État.

La raison d'État est la mise en avant de considérations d'intérêt supérieur par un gouvernement: la sauvegarde de l'intérêt public est invoquée pour prendre des mesures contraires à la loi et la justice, à l'encontre en particulier des garanties de liberté individuelle. La raison d'État est alléguée pour justifier une action illégale ou injuste en matière politique.

Voir le texte : LA RAISON D ' ÉTAT dans Charlie


La raison d'État entraîne comme conséquence le secret d'État, qui interdit la divulgation d'informations nuisibles aux intérêts généraux, entre autres les secrets de défense nationale.
L'ambiguïté de la position de King dans ce roman vient de ce qu'on ne connaît pas les intentions des grisâtres, mais que leur seule présence entraîne des dommages pour les humains, alors qu'ils sont peut-être pacifistes. Des éléments dans le texte font état de cette possibilité. Mais, pour régler la question tout en laisant subsister le doute (King n'a pas tout à fait oublié les bons sentiments de Steven Spielberg
15). King prendra appui sur la présence de Kurtz, l'officier qui dirige l'opération militaire, pour suggérer que le principe de précaution de l'État, érigé en dogme, entraîne le sadisme. Quand l'opération est lancée, les responsables militaires et politiques savent qu'il y aura des morts : aussi bien les grisâtres que les Américains se trouvant dans la zone seront éliminés par les forces armées ou les services spéciaux, puisqu'ils sont décidés, sans avoir pu examiner la question, à éliminer d'avance toutes sources de troubles, biologiques ou autres.

Henri, le psychiatre, survivant du quatuor d'amis avec Jonesy, le professeur habité par un grisâtre, est le reflet de la position de King : "
Les choses commencèrent à se mettre en place. Un objet s'était posé ou s'était écrasé au sol. La réaction du gouvernement des Etats-Unis avait été d'envoyer l'armée. Expliquait-on au reste du monde ce qui se passait? Probablement pas, ce n'était pas leur genre, mais quelque chose lui disait que ça n'allait pas durer longtemps." (292) Henry sait qu'il y a environ 1.000 personnes dans la zone, et il ne connaît pas leurs réactions.

Les grisâtres sont-ils dangereux? Pour ceux que leur mode de reproduction sophistiqué a contaminés et tués, c'est sans discussion. Mais King suggère qu'il suffisait d'attendre patiemment que l'élimination des grisâtres se fasse naturellement : "
Savait-il autre chose? Pas impossible, et peut-être plus que que savaient les types dans les hélicoptères et les escouades chargées du massacre." Il est pour lui évident qu'ils croient avoir affaire à quelque chose de contagieux, mais Henry ne pense pas pour son compte que ce soit aussi dangereux qu'il y paraissait à première vue : "Le truc se déclenchait, croissait... puis mourait. Même le parasite qui s'était trouvé dans la femme était mort.". Il formule l'hypothèse d'un crash accidentel et non pas d'une invasion : "Les lumières dans le ciel? Et les implants ? Pendant des années, des gens avaient prétendu avoir été enlevés par des extra-terrestres.; on les aurait déshabillés... examinés... obligés à recevoir des implants... des idées tellement freudiennes qu'elles en étaient presque risibles." (293)

Henry se retrouve dans le camp des troupes spéciales américaines, éclairé par quantité de projecteurs qu'il compare aux illuminations de l'armée qui lui plaisent encore moins que les lumières qu'il avait vues dans le ciel :
"Voilà comment ça devait être, autour des bases aériennes entourant l'Irak, avant le déclenchement de l'opération Tempête du Désert. (...) Cela voulait-il dire que les États-Unis d'Amérique venaient de déclarer la guerre à des êtres venus d'un autre monde? Se trouvait-il propulsé au milieu d'un roman de H.G. Wells? Il sentit quelque chose se serrer brusquement et palpiter sous son sternum." (294) "Tous ces moteurs, toutes ces génératrices paraissaient... affamés." (296) On ne sait pas ce qu'apportent les extraterrestres, mais les troupes spéciales n'ont pour fonction que d'apporter la mort.

Le subordonné de Kurtz, qui a déjà travaillé avec lui en Bosnie, est plus humain que son chef, et ne souhaite pas leur élimination brutale, voudrait d'abord connaître les intentions des extraterrestres : "
S'ils devaient faire ce qu'ils s'apprêtaient à faire, il voulait que les gars de Kurtz (baptisés Skyhook en Bosnie, Blue Group ici, autrement le prochain coup, mais c'était toujours les mêmes têtes, jeunes, farouches) entendent les grisâtres une dernière fois. Les voyageurs venus d'un autre système stellaire, peut-être même d'un autre univers ou d'un autre flux temporel, possesseurs d'un savoir qui échapperait toujours à leurs hôtes (ce dont Kurtz se fichait). Qu'ils entendent la clameur des grisâtres (...) en appelant à ce qu'ils avaient innocemment espéré être une meilleure nature." (248) Mais leur élimination se fait, brutale et totale, sans contact ni dialogue, par les mitrailleuses des hélicoptères : "Elles déchiquetèrent les grisâtres qui s'étaient avancés, bras levés. des membres étaient arrachés aux corps rudimentaires, laissant échapper une sorte de sève rosâtre. Les crânes explosaient comme des grenades, aspergeant les autres et le vaisseau d'une matière rougeâtre qui n'était pas du sang, mais toujours la même moisissure, comme si les têtes n'étaient pas vraiment des têtes mais des paniers remplis d'une gadoue immonde. Plusieurs furent coupés en deux à mi-corps et s'effondrèrent, les mains encore levées en signe de reddition. Dès qu'ils touchaient le sol, les corps gris prenaient des nuances d'un blanc sale et paraissaient bouillir." (258) Mais avant de mourir, ils font sauter leur vaisseau spatial.

Le cycle évolutif des grisâtres.

La description des grisâtres près de leur vaisseau est la seule qui est faite. Ils ont les caractéristiques et l'apparence conventionnelle des "Gris". Réalité ou moyen de communication, sous une apparence que les Terriens connaissent bien? Le seul extraterrestre vu par un homme l'est par Jonesy, qui en sera habité, un homme gris qui a l'aspect sous lequel Jonesy s'attendait à le voir : "
Un étranger, qui n'était pas si étrange que cela. Johnesy l'avait vu représenté dans les centaines de séries télévisées «fantastiques» (...), dans des films comme E. T., Rencontres du troisième type et Feu dans le ciel; Mister Gray, l'équivalent majeur des X-Files." (204) Mais cette forme n'est qu'une apparence. Le procédé a déjà été utilisé, notamment dans Ça, où l'entité se montre aux hommes sous une des formes horribles la mieux adaptée à leur imaginaire de peur, l'araignée par exemple, objet de répulsion courant, dont Ça a pris l'apparence, en subissant alors ses lois physiques et biologiques qui régissent la vie de l'arachnéide.

Voir mon étude : LA COSMOGONIE DE Ça.

L'extraterrestre est ainsi sans originalité aucune sur le plan physique, l'image classique de l'humanoïde à la peau grise ou terne, au corps malingre et aux membres fragiles : "
Toutes ces images avaient au moins raison sur un point : les grands yeux noirs. Des yeux exactement comme ceux de la saleté (...) et une bouche fermée qui se réduisait à une vague fente, rien de plus, mais sa peau grisâtre pendait sur lui en replis mous, comme celle d'un éléphant mourant de vieillesse. De ces replis s'écoulait paresseusement une sorte de sécrétion vaginale blanchâtre; la même substance sourdait comme des larmes de ses yeux dépourvus d'expression." (204)

Ce grisâtre est maintenant le seul survivant de l'astronef. Sa fonction serait "
d'être un dispositif pour apporter le byrus" sur une planète (408). Il ne vit plus que sous forme d'esprit, en utilisant le corps de Jonesy. On le reverra un moment sous cette forme dans une séquence onirique se passant à l'hôpital (306/322). Il mourra, de nouveau dans l'hôpital imaginaire de Jonesy sous la même forme classique (648). Mais divers éléments ont été utilisés pour le pittoresque, faisant évoluer le germe initial du végétal au grisâtre (dont la forme réelle restera inconnue), par l'élément commun qu'est cette mousse, sorte de "mildiou rosé et rougeâtre" qui précède ou suit à la trace l'évolution. L'animal reptilien, étape de la métamorphose est (ou ressemble) à un animal carnivore, alors que Mr Gray se dit végétarien : mais il se met à raffoler ultérieurement de la viande.... Certains humains porteurs du byrus développent, en quelques jours de gestation pénible, l'animal de transition reptilien, que King a orné de toutes sortes de caractéristiques fantaisistes. Il a d'abord préparé cette naissance d'un festival de pets et de rots, jamais développés avec cette ampleur et cette quantité de détails nauséeux qu'il adore comme un gamin aime le fécal.

Voir mon article : KING TRIVIAL

Dans une puanteur violente "
où se mêlaient l'huile de vidange, l'éther et le méthane" la même odeur que les pets, la chose a été expulsée dans la cuvette des toilettes par un chasseur malade accueilli dans la cabane de chasse : "La chose avait été à l'intérieur de McCarthy, il n'y avait pas le moindre doute. Elle s'était développée dans son corps comme une sorte de ténia géant dans un film d'horreur. Comme un cancer, un cancer qui aurait eu des dents. Et sa croissance terminée, ou suffisante, (...) elle s'était ouvert un passage avec ses dents." (202) Le mot "cancer" est utilisé plusieurs fois par King lors du processus d'accouchement qui sera répété : l'amateur attentif de King se souvient qu'avant la fin de la rédaction du livre, le titre provisoire donné était "cancer". L'épouse de King, Tabitha, trouvant ce titre "laid" et une "invitation à la malchance" King l'a changé lors de la publication. La bête apparaît comme "un ver géant" (197) ou une sorte de "fouine monstrueuse, sans pattes, mais dotée d'une queue dorée tirant sur le rouge. La bête n'avait pas de tête, rien qu'un nodule poisseux troué de deux yeux noirs fiévreux qui le fixaient." La queue est "lisse et sans poil sur le dessus, mais épineuse dessous, comme si elle était tapissée de crochets faits d'amas chitineux." (198), "préhensile". La bête est agressive : "La partie inférieure du nodule se fendit en deux, laissant apparaître une nichée de crocs. La bête frappa en coup de fouet comme un serpent, nodule en avant, sa queue glabre agrippée au jambage de la porte." (198) Elle tue facilement l'être humain agressé. (199)

Un autre humain est agressé par la bête : "
Il s'empara de quelque chose qui lui fit l'effet d'une gelée froide et couverte de fourrure (...). Pete put juste voir un bref moment deux yeux noirs sans expression - des yeux de requin, des yeux d'aigle - avant qu'elle enfonce sa pelote de dents-aiguilles dans la main qui avait voulu la saisir et qu'elle entreprit de déchiqueter." (221) King joue ainsi sur une apparence polymorphe empruntée au bestiaire symbolique de la terreur : les comparaisons avec le serpent antique, le symbole du mal biblique (il n'a pas de membre, mord, est ovipare), ou le mammifère carnassier. Le terme utilisé dans le roman sera "fouine" mais les connotations resteront chtoniennes, opposées donc à l'idée de l'espace aérien d'où viennent les extraterrestres.

Deux modes de reproduction sont ainsi proposés. Du végétal à l'animal, avec un processus rapide : le byrus peut, dans certaines conditions, germer dans l'être humain et donner une "fouine". De l'animal à l'animal : la fouine peut pondre des oeufs (parthénogénèse, occasionnelle chez certains reptiles), avec un processus d'incubation très rapide, d'où naîtront d'autres fouines, utilisant alors le mode de reproduction animal que nous connaissons. Le tout dans les conditions favorables, qui paraissent être l'humidité et la chaleur. On ne connaît trop le temps d'incubation des fouines, ou du cycle reproductf de l'animal sur la planète d'origine ou d'autres planètes : "Toujours, ils remodelaient à leur image les mondes dans lesquels ils débarquaient. C'était ainsi qu'il en avait toujours été, c'était ainsi que les choses devaient toujours se passer. Mais à présent..." (384)

L'action sur les humains.

Physiquement, King n'a pas innové par rapport à
Les Tommyknockers. L'arrivée des extraterrestres produit les mêmes effets physiques : hémorragies et perte des dents, à quoi il faut rajouter l'infection immédiate des blessures et pour certains des manifestations cutanées. Même effet psychologique : les hommes infectés ou proches des extraterrestres (y compris de l'humain cultivant sa fouine) deviennent télépathes. Un seul cas de possession intervient, puisqu'il ne reste plus opportunément qu'un seul extraterrestre vivant après leur extermination. Il concernera un personnage central, Jonesy, qui a rencontré, l'extraterrestre mourant. Sa tête explose et il "en surgit un nuage rouge-orangé de particules empestant l'éther. Jonesy les inhala." (205) À partir de cet instant, Jonesy est "possédé" par Mr. Gray qui occupe son corps, mais il parviendra, comme Seth vis-à-vis de Tak dans Les Régulateurs 16, à se conserver une partie de son imaginaire. En jouant sur les données de son esprit, celles possédées par Mr Gray et celles qui lui sont cachées, il parvient à se réserver, comme Seth, une certaine autonomie qui lui permet de l'emporter sur l'extraterrestre.17

Une deuxième manifestation est spectaculaire, mais ne dure que quelques pages dans le récit, et ces impressions ne seront pas reprises ultérieurement. Elle concerne le déplacement de Mr Gray/Jonesy sur le motoneige, perçu par Henri, à l'imaginaire également développé au cours de son enfance, et dont le roman fait état. On se sait trop ce que ces impressions doivent à la fatigue d'Henry, qui vient de parcourir un bon bout de chemin en courant difficilement sur une route enneigée, ou à l'atmosphère inquiétante dans laquelle il se trouve : "
Quelque chose de nouveau rôdait juste devant le seuil de sa conscience (...), mais la chose venait de faire irruption en poussant un cri épouvantable, exigeant d'être reconnue." (172) Cri réel? Imaginé? Suivi d'une vision : "Il y a un nuage... une sorte de nuage... je ne puis dire de quoi il s'agit au juste, mais je le sens... je n'ai jamais rien ressenti aussi clairement de toute ma vie. (...) Il y a un film d'horreur dans le nuage, de ceux qu'aime Jonesy. Les films d'horreur." C'était le "nuage rouge-noir avec le film qu'il contenait, une énergie noire terrible qui se précipitait vers lui." (172)

Les peurs de son enfance se réveillent
(173), ce qui laisse supposer que l'esprit d'Henry est fortement perturbé, ou victime d'une sensibilité particulièrement exacerbée par les circonstances : "Toutes ces choses étaient contenues dans le nuage rouge-noir qui se précipitait sur lui comme le cheval de l'Apocalypse, toutes ces choses et d'autres encore. Toutes les mauvaises choses qu'il avait entrevues se dirigeaient à présent vers lui. (...) Non pas la mort, mais pire que la mort. C'était Mister Gray." (173) Il est significatif qu'Henry, marqué par la mythologie contemporaine, y voit, comme Jonesy, Mister Gray.

Cette vision d'un personnage pourtant standard du thème de l'invasion de la terre s'accompagne d'images qui sont celles de la plupart des guerres terrestres : "
Henry se mit à gémir d'impuissance tandis que se rapprochaient les ténèbres. On aurait dit qu'elles envahissaient son esprit comme une éclipse, le privant de toutes les pensées et les remplaçant par des images terribles (...) : des corps décharnés et des yeux fixes derrière des barbelés, des femmes écorchées, des hommes pendus. Un moment, le monde tel qu'il le comprenait parut se mettre à l'envers, se retourner comme une poche, et il prit conscience que tout était contaminé... ou pouvait l'être. Absolument tout." (175) On ne sait trop comment ont été provoquées ces visions qui font pleurer Henry.

édition finlandaise

 

Original : un extraterrestre entre le rationnel et le dionysiaque.

 

De l'hostilité aux émotions...

À ma connaissance, aucun auteur n'a consacré autant de place à montrer quelles tentations notre société de consommation pouvait exercer sur un extraterrestre. Que leurs intentions soient bonnes ou mauvaises, la venue des Grisâtres ne s'est traduite dans les faits que par des morts, humains comme extraterrestres, les uns les autres s'infligeant la mort mutuellement. Bien sûr, King essaie de faire un distinguo : il n'est pas certain que les Grisâtres voulaient nous nuire, alors que les militaires avaient pour mission de les exterminer - en même temps que bon nombre des leurs, civils ou militaires. Il est intéressant de constater que, dans ce roman, King ne manifeste pas son manichéisme habituel, une entité entièrement maléfique contre un groupe ou un sauveur voués au Bien. Certes, Mr Gray a la mission de propager son espèce, ce qui ne peut se faire qu'au détriment des humains. C'est une loi biologique, occuper le plus d'espace possible, presque toujours au détriment des autres, le moteur de l'évolution. Mais cet envahisseur, champignon pensant qui paraît manifester une rationalité particulière
"
créature à peu près dépourvue d'émotions appartenant à une espèce à peu près dépourvue d'émotions" (384), découvre la sensibilité humaine à l'égard de laquelle ses réactions sont d'abord faites d'incompréhension : "Ni enfance, ni ami n'étaient des termes ayant une résonance affective pour Mr Gray, même s'il comprenait ce qu'ils signifiaient." (378) Sa cohabitation avec Jonesy ne le satisfait pas : "Avoir ce mutiné barricadé tout au fond de ce qui aurait dû être l'esprit de Mr Gray, et de Mr Gray seul, devenait de plus en plus irritant. Pour commencer, il n'aimait pas ces appellations, Mr Gray, grisâtre; ce n'était pas ainsi qu'il se voyait, et encore moins ainsi qu'il voyait l'espèce mentale à laquelle il appartenait; il n'aimait pas davantage penser à lui-même au masculin, car il était les deux sexes, ou plutôt aucun. Il se trouvait cependant emprisonné dans ces concepts et le resterait tant que le noyau dur de Jonesy n'aurait pas été cassé et digéré. Une pensée terrible lui vint à l'esprit: et si c'était ses concepts à lui qui n'avaient aucun sens? Il avait horreur de se trouver dans cette situation." (380)

Sans comprendre comment c'est arrivé, il se laisse peu à peu submerger par les sentiments du corps de Jonesy. Lors d'une contestation avec la partie rétive du cerveau de son hôte, il pique une crise de rage, alors que Mr Gray/Jonesy conduit : "
Mr Gray martelait le volant, ayant cette décharge affective en horreur (...), mais y prenant aussi plaisir. Prenant plaisir à entendre l'avertisseur quand il le frappait avec les poings de Jonesy, prenant plaisir aux battements du sang de Jonesy dans les tempes de Jonesy, prenant plaisir à la manière dont le coeur de Jonesy battait plus fort, au son de la voix de Jonesy hurlant : «Espèce de branleur, espèce de branleur!» comme s'il n'allait jamais s'arrêter.
Même au milieu de sa rage, une partie de lui-même ayant gardé son sang-froid comprenait où résidait le vrai danger pour lui.
(...) Il m'arrive quelque chose, se dit Mr Gray, conscient, au moment même où il se la formulait, que cette pensée était fondamentalement «jonesienne». Je commence à devenir humain.
Le fait que cette idée n'était pas sans attrait remplit Mr Gray d'horreur."
(384)

Examinant les informations stockées dans le mémoire de Jonesy, Mr Gray s'étonne que pour une créature qu'il estime posséder des ressources réflexives limitées, Jonesy dispose de capacités d'archivage exceptionnelles : "
Question académique, à remettre à plus tard: pourquoi des êtres aussi peu doués intellectuellement avaient-ils une telle mémoire? Cela avait-il un rapport avec leur structure émotionnelle surdimensionnée? Et ces émotions s'étaient dérangeantes. Il trouvait celles de Jonesy très dérangeantes. Toujours là. Toujours prêtes à jaillir. Et il y en avait tellement!
«Guerre... famine... nettoyage ethnique... tuer pour faire la paix... massacrer les païens au nom de Jésus... Les homosexuels battus à mort... des microbes dans des conteneurs, ces conteneurs placés au sommet de missiles pointés sur toutes les grandes villes du monde..."
(379) Cette confusion mentale le remplit d'abord d'horreur.

au goût pour les "nourritures terrestres". 18 .

Mr Gray habite Jonesy, mais méprise d'abord son corps, qui n'est pour lui qu'une enveloppe sans importance
19. Entre autres, il ignore la faim de Jonesy, ou le froid qui le transit Jonesy : "Pourquoi s'en serait-il soucié, d'ailleurs? Jonesy était un véhicule de bas de gamme : il pouvait le brutaliser autant qu'il le voulait." (430) Mais peu à peu des changements s'opèrent en lui, que King seul, partagé depuis toujours entre l'apollinien et le dionysiaque pouvait mettre en scène : "En dépit des efforts qu'il déployait pour se retenir, Mr Gray se gavait de la chimie émotionnelle de Jonesy." (429) Voir mon étude sur ce conflit.


Mr Gray se rend compte que finalement, les hommes ne sont pas si désagréables à vivre. Certainement pas gourmet, Mr Gray se découvre gourmand, ce qui causera ultérieurement sa perte. Jonesy a déjà tenté de le séduire, espérant «civiliser» l'extraterrestre :"
Vous êtes déjà à moitié humain; pourquoi ne pas le devenir entièrement? Quelque chose me dit que nous pourrions cohabiter. Je vous montrerai tout. La crème glacée, c'est délicieux. la bière, c'est encore meilleur. (...) Il soupçonna Mr Gray d'être tenté, comme seule pouvait l'être une créature fondamentalement dépourvue de forme à qui l'on en propose une - un marché sorti tout droit d'un conte de fées." (441) Tenté, mais pas suffisamment encore. Contraint par Jonesy d'aller se substanter dans un relais routier, Mr Gray doit puiser dans les fichiers du cerveau du corps qu'il occupe les informations nécessaires pour comprendre le sens du menu, la fonction des couverts, etc. : "Mr Gray ne savait même pas ce qu'était le goût (des aliments) Comment aurait-il pu? Quand on y regardait de près, il n'était rien d'autre qu'un champignon doté d'un QI élevé." (490) Il adore la nourriture. Mr Gray avait dit à Jonesy que les Grisâtres étaient végétariens (même si la fouine est cependant carnivore et il découvre le plaisir de la chair dans la chère : "On aurait presque cru entendre la voix de la créature venue d'ailleurs, dans quelque nanar datant des années trente. De la chair! De la chair! C'est le goût de la chair!
Très drôle... mais peut-être pas si drôle que ça, au fait. Un peu horrible, aussi. Les croassements d'un vampire fraîchement converti."
(492)
Mr Gray/Jonesy ne pourra pas s'empêcher de goûter à la gastronomie américaine (du bacon et du faux sirop d'érable!) une deuxième fois, ce qui le rendra malade, le retardera et donnera à ses poursuivants terrestres la possibilité de le rejoindre. Jonesy se fait la réflexion qu'il devait "
sans doute savoir, à présent, ce qu'avait ressenti Satan quand il avait emporté Jésus en haut de la montagne pour le soumettre à la tentation de tous les attraits de la terre." (493)

Le rire est le propre de l'homme.

"
Pour ce que rire est le propre de l'homme" suivant la formule de Rabelais dans l'Avis aux lecteurs de Gargantua, Mr Gray ignore ce que c'est que le rire. À un moment, le corps habité de Jonesy éclate de rire : "Pourquoi faites-vous ça? Pourquoi faites-vous ce bruit?
Jonesy prit conscience d'une chose stupéfiante, à la fois touchante et terrifiante : Mr Gray souriait avec sa bouche. Pas beaucoup, juste un petit peu, mais c'était un sourire. Il n'a aucune idée de ce que c'est que rire, pensa-t-il. Certes, il n'avait pas su non plus ce qu'était la colère, mais il avait montré qu'il pouvait apprendre remarquablement vite; il était à présent capable de piquer sa crise comme n'importe qui."
Jonesy lui dit qu'une situation lui avait parue comique, mais que peut bien signifier le mot pour un extraterrestre? Jonesy est embarrassé : "Il souhaitait que Mr Gray éprouve toute la gamme des émotions humaines, soupçonnant qu'humaniser cet usurpateur allait peut-être se révéler, en fin de compte, sa seule chance de survie. (...) Mais comment explique-t-on le concept de comique à un ramassis de moisissures débarquées d'un autre univers? Et qu'y avait-il de comique à ce que les Prés Secs se proclament le meilleur relais routier du monde?" (480)

Mr Gray ne comprend pas de quoi il est question, rumine. La plaisanterie des habitués du coin est d'appeler le restaurant routier (les Prés Secs) les Pets Secs, ainsi que le nomme habituellement Jonesy. Jonesy lui explique que c'est une tradition, que son père l'appelait aussi comme ça : "
Et c'est comique?
Plus ou moins. C'est un jeu de mots, un calembour, exactement, basé sur une similitude de sons. Les calembours sont la forme la plus primaire de l'humour."
(481)

Élève obéissant, Mr Gray essaie de rire, sans grand succès : "
Jonesy frissonna. C'était un son qui fichait les boules. On aurait dit un fantôme essayant de se rappeler comment être humain." (482)

On notera que les références de Jonesy, grand amateur de films d'horreur, l'amènent naturellement à symboliser l' «autre», l'alien, l'extraterrestres, par les mots qui désignent les «autres», surnaturels ceux-là : vampire à propose de la nourriture, fantôme à propos du rire. Puisque les fantômes rient aussi, paraît-il, autant chercher une cause...

De la pudeur des entités ou des extraterrestres Kingiens..

Le lecteur que rappelle que King a déjà utilisé dans
Les Régulateurs l'excrétion et et les vécés comme le point faible du démon Tak, qui occupe le corps de Seth, comme Mr Gray occupe le corps de Jonesy. Tak a horreur d'être dans Seth quand son hôte "se soulage les boyaux" acte qu'il trouve "dégoûtant" : "Dans les toilettes adjacentes à la cuisine, il entend le garçon. Le garçon émet des grognements porcins que Tak en est venu à associer avec la fonction d'excrétion; pour lui, même ces bruits sont révoltants et l'acte lui-même avec ses contractions et ses sensations de glissement, d'expulsion incontrôlable est hideux" (71).

De même, dans
Dreamcatcher, Mr Gray, qui semble tout ignorer de notre fonctionnement physiologique, ne prend pas le même intérêt à l'excrétion qu'à l'ingestion : "Mr Gray prenait plaisir à s'enivrer des émotions humaines, Mr. Graty prenait plaisir à la nourriture des humains, mais Mr Gray ne prenait aucun plaisir à soulager les intestins de Jonesy. Il refusa de jeter le moindre coup d'oeil au sous-produit de sa digestion et se contenta de relever son pantalon." (520) sans s'essuyer ni se laver les mains.
Exploitant jusqu'à la nausée cette idée qui semble faire partie d'un blocage psychologique, King ne nous passe rien des conséquences d'une monstrueuse ingestion de Bacon, petite gourmandise que Mr Gray s'offre pour la deuxième fois, suivie de ses conséquences attendues : vomissements et surtout l'évacuation de "
ce qui bouillonnait dans les entrailles de Jonesy" diarrhée répétitive, tantôt sur le bas côté de l'autoroute, une fois dans les toilettes d'une station service : "Un panneau, devant la station-service, annonçait fièrement : ESSENCE PAS CHÈRE - TOILETTES PROPRES; cette information devint caduque après le départ de Mr Gray." (615)

Le goût de meurtre.

Contrôlé par un policier, Mr Gray, à l'imitation de Tak dans
Désolation 20, lui pénètre l'esprit et l'oblige à se frapper la tête sur un mur jusqu'à la mort. Il puise ensuite dans la mémoire de Jonesy ses connaissances en matière de dissimulation ou d'élimination des cadavres : "Il était bien tombé, il faut le dire, sur un filon. Passionné depuis longtemps de films d'horreur, de polars et de suspense divers, Jonesy était, si on peut dire, un expert. (...)

Voir mon étude KING ENFANT ET LE CINÉMA dans Ça

Une partie de l'esprit de Jonesy faisait repasser le traitement subi par le cadavre de Freddy Miles dans Monsieur Ripley - dans le roman de Patricia Highsmith 21" De multiples scènes de meurtres se succèdent ainsi, donnant à Mr Gray une vue très originale sur les goûts profonds des humains, au point que Jonesy en a "le tournis. (...) Ce n'était pas le pire cependant. Avec l'aide de Jonesy, ce surdoué de Mr Gray venait de découvrir quelque chose qui lui procurait plus de plaisir que le bacon bien grillé, plus encore que de se régaler d'une crise de rage.
Il venait de découvrir les joies de l'assassinat."
(523)

Jonesy se rend compte que Mr Gray veut changer de véhicule, au prix d'un meurtre éventuellement, ce qui "
n'était pas un problème pour cet envahisseur de plus en plus humain." (525). et poussant sa réflexion plus loin, il se rend compte qu'il a participé au meurtre précédent, qui a fait disparaître momentanément sa fatigue "à grandes giclées d'endomorphines". Participant obligé, mais responsable : "Pas seulement du fait de son savoir-faire en matière de dissimulations sanguinaires du Ça, sous le glaçage caramélisé du «c'est pas vrai». (...) C'était lui le moteur.
Nous méritons peut-être d'être annihilés, pensa Jonesy.
(...) Peut-être méritons-nous d'être transformés en un nuage de spores emportés par le vent. Ce serait peut-être un mieux." (523/4) Réflexion d'autant plus juste que Mr Gray, à la réflexion, juge son maître trop peu avancé dans l' "humain".

L'apprenti sorcier.

Bénéficiant de la mémoire de Jonesy et en faisant le tour à la vitesse de la lumière, Mr Gray estime que Jonesy n'est pas un humain en forme pour un homme de son âge : "
Cela tenait en partie à son accident, mais aussi à son travail. C'était un «intellectuel»". Il semble à Mr Gray, décidément fort tenté par les joies terrestres, qu'il a largement ignoré les aspects les plus physiques de la vie, ce que déplore ce débutant prometteur : "Ces créatures étaient composées à soixante pour cent d'émotions, à trente pour cent de sensations, et à dix pour cent de pensées (et en disant dix pour cent, Mr Gray s'estimait généreux). Ignorer son corps comme l'avait fait Jonesy, voilà qui relevait de l'entêtement, sinon de la bêtise, aux yeux de Mr Gray. Mais évidemment, ce n'était pas son problème. Ni celui de Jonesy, d'ailleurs. Ou ne l'était plus. Jonesy bénéficiait maintenant, en apparence, de ce qu'il avait toujours voulu: être un pur esprit. À en juger par ses réactions, ce n'était pas un état qui l'inspirait beaucoup depuis qu'il y était parvenu." (562) (L'ancien Jonesy n'habite plus son corps, sa personnalité s'étant réfugiée dans une partie de son esprit où elle ne vit que par son imaginaire).

Mr Gray se rend compte qu'il est affligé lui aussi d'un virus, du "byrus" propre à la Terre, qui commence par des émotions, puis l'éveil des sens : "
Le goût de la nourriture, le plaisir sauvage et incontestable qu'il avait pris à obliger le tropper à se cogner la tête contre le mur des toilettes, ce son creux, beum-beum, pour arriver à de que Jonesy appelait la pensée supérieure. C'était une plaisanterie, du point de vue de Mr Gray, dans le même esprit qu'appeler la merde «nourriture recyclée» et un génocide «nettoyage ethnique». Et néanmoins, la pensée avait des attraits pour un être qui avait toujours existé en tant que partie d'un esprit végétatif, une sorte de non-conscience hautement intelligente." (598)

Par intérêt personnel, solution d'attente, Jonesy lui a suggéré à diverses reprises d'abandonner sa mission et de se contenter de jouir de son nouvel état d'être humain. Mr Gray découvre maintenant que ce désir lui est devenu personnel, qu'il l'a intégré. Son ancien esprit était harmonieux, mais il commence "
à se fragmenter, à se transformer en un choeur de voix discordantes, certaines voulant A, d'autres B, d'autres Q au carré et divisé par Z. Il aurait cru une telle cacophonie horrible, une recette pour devenir fou. Au lieu de cela, il se rendait compte qu'il y prenait plaisir.
Il y avait le bacon. Il y avait « faire l'amour avec Carla », ce qui, dans l'esprit de Jonesy, était se livrer à une activité superlativement jouissive, une fête des sens accompagnée d'émotions intenses. Il y avait le plaisir de conduire vite, etc."
(598)

Mr Gray redécouvre le sens du choix humain, le partage entre le plaisir et le devoir. Il peut suivre la suggestion de Jonesy, qui n'est pas sans attraits. Mais il y a aussi sa mission, ensemencer un monde nouveau. Il peut l'abandonner, et se contenter de jouir de la vie sur terre. D'autant plus que son esprit est constamment balayé par des formules dont il a trouvé le sens dans la mémoire de Jonesy : "
Un «slogan». Les slogans étaient des formules simples, allant directement à l'essentiel. La plus récente était : LE BACON N'EST QUE LE COMMENCEMENT. Et Mr Gray était sûr que c'était vrai : (...) Il avait compris que la vie, ici-bas, était tout à fait délicieuse. Mais l'impératif qui le poussait était profond et définitif: il devait ensemencer ce monde et mourir. Et s'il se tapait un peu de bacon en cours de route, tant mieux pour lui." (564)
Le contact de ceux de son monde, celui du byrum du chien à côté de lui qui en est atteint ne lui donne plus de satisfaction : "
Il n'éprouvait aucun plaisir à rencontrer cet esprit, il ne ressentait rien de la chaleur qui naît de la rencontre du même avec le même. L'esprit du byrum lui donnait une impression de froid... de rance." (599)

Mais conditionné par sa mission, Mr Gray la poursuit dans la contrariété, ralentissant son cours par la dualité qu'il doit satisfaire en lui, à défaut de pouvoir la surmonter. Son cas cornélien doit être unique, pour un extraterrestre, dans les annales de la science-fiction.


Avec ce roman, King ajoute un élément au vaste catalogue des êtres venus d'ailleurs, celui du Gris qui passe de la rationalité au dionysiaque exercice des dispositions humaines. Mr Gray découvre avec ravissement ce qui est objet de tentation pour King depuis son enfance. Une bonne partie de sa vie, King a vécu dans l'excès, mangeant beaucoup, buvant trop, fumant sans pouvoir s'arrêter. Sa convivialité s'appuiyait sur le pack de bouteilles de bière... Il a maintenant su renoncer ou modérer ses plaisirs, et on devine avec quels regrets. Mais son amour de la vie se traduit par le désir dionysiaque de peindre intensément les divers aspects les plus jouissifs de l'existence : "Ces sous-diacres autopromus de l'Église de la Littérature américaine réformée semblent considérer la générosité avec suspicion, la matière charnue avec dégoût" écrit-il dans l'introduction de Rêves et Cauchemars 22. Nul doute que ces critiques apprécieront à sa juste valeur le festival de pets, de rots et d'odeurs qui parfument le livre...

Ce roman est aussi révélateur de sa défiance à l'égard de la rationalité, jugée réductrice, au profit du vécu, du senti et de l'humain, dont il déplore les excès. La lucidité de King à l'égard des malheurs du monde le conduit à une ambiguïté qui se révèle plus riche en possibilités que le manichéisme simpliste dont il a fait longtemps preuve. La conduite de l'extraterrestre et du militaire Kurt sont du même ordre : tuer pour remplir sa mission. Mais là où un extraterrestre se montre sensible aux plaisirs humains, un bourreau psychopathe comme Kurt ne veut satisfaire que son sadisme et sa volonté de puissance, sans goûter à la vie. Finalement, l'extraterrestre est dans ce roman comme le monstre dans d'autres oeuvres : un révélateur de notre propre nature.

 

Il a fallu à King, sortant d'un accident qui a mis son talent en péril, une audace remarquable pour reprendre bon nombre des notions et des effets les plus éculés de la science-fiction, ainsi que beaucoup d'idées qu'il avait déjà mises en scène antérieurement, et pour réussir, avec ces éléments, à faire un récit qui se lit sans lassitude, en dépit de sa longueur. Mêlant fantastique et science-fiction, ce roman attrape-rêves s'amuse avec brio à manier les codes du genre, parfois rigolard devant l'abondance des références d'un cerveau encombré de références romanesques et cinématographiques qui a son équivalent dans celui de Jonesy. Mêlant aussi les séquelles de l'accident, de l'hôpital, de la tentation du suicide, de sa hargne contre l'agression, de la place de l'amitié, et beaucoup de tendresse pour l'exclusion, ce récit causera des difficultés aux spécialistes qui auront bien du mal à le classer. D'autant qu'il témoignait, en plus, quand il a été écrit juste après son accident (de novembre 1999 à mai 2001), d'une singulière prescience de la mentalité qui serait celle des Américains après les attentats de septembre 2001, ce qui explique le succès du livre. King nous annonce dans son roman d'autres malheurs possibles, en s'appuyant sur nos peurs d'aujourd'hui pour anticiper les peurs de demain 23. Que la vie serait belle si la part des ténèbres était moins exigeante...


Roland Ernould
© mars 2002.

Notes :

1 Dreamcatcher (Dreamcatcher). Première publication : 2001. Édition fr. Albin Michel 2002.

2 8 nouvelles parues dans le fanzine publié par King lui-même et son copain de classe Chris Chesley, à sa propre «maison d'édition» : Triad Publishing Company, 1960. Il a alors 13 ans. King aurait retrouvé une autre nouvelle de cette époque, publiée dans les mêmes conditions en 1964, Stars Invaders.

3 Une sale grippe (Night Surf). Première publication : 1969. Texte revu : 1974. Dans le recueil Danse Macabre. Comme une passerelle (I am the Doorway). Première publication : mars 1971. Dans le recueil Danse Macabre (Night Shift).

4 Le Fléau. Création : 1975/8, Première publication : 1978. Première édition. fr. Alta, 1981. The Stand, the Complete & Uncut Edition, version complète revue 1988/9. Postface oct. 1989. Publication : 1990. Édition. fr. Lattès 1991.

5 Les Tommyknockers (The Tommyknockers). Première publication : 1987. Édition fr. Albin Michel 1989.

6 Question : pourquoi débarquer en plein hiver, et non en été? "Les grisâtres ont de gros problèmes sur notre planète. C'est sans doute pour cette raison qu'ils ont attendu aussi longtemps - un demi-siècle - avant de se décider à agir." (406)

7 Matière grise (Gray Matter).Première publication : 1973. Fait partie du recueil Danse macabre (Night Shift), 20 nouvelles. Première publication : 1978. Édition fr. Alta, 1980.

8 The Blob, réalisateur : Irvin S. Yeaworth, 1958; Beware! The Blob, réalisateur : Lary Harry Hagman, 1972. Il arrive que le blob soit carnivore (Anatomie de l'horreur, 240).

9 Mais surtout pas astronègres... L'armée se propose de les exterminer, mais le règlement militaire interdit l'injure raciste : "L'emploi d'épithètes inappropriées, que ce soit pour des raisons raciales, ethniques ou de genre, est contre-productif pour le moral des troupes et est contraire au protocole du service armé. Quand leur usage est avéré, leur utilisateur passera immédiatement en cour martiale ou sera puni sur-le-champ par l'autorité responsab1e des opérations." 341.

10 King donne l'exemple de bactéries qui vivent dans notre système digestif, dans nos intestins par exemple, et que nous renouvelons lorsque "nous en avalons délibérément lorsque nous consommons des produits laitiers, laits caillés ou yaourts, par exemple." (404).

11 J'ai en préparation une étude sur la télépathie chez King.

12 Ça vient aussi d'un lointain espace, et son avatar "araignée" pond des oeufs. Ça (It). Première publication : 1986. Édition fr. Albin Michel 1988.

13 Ce nom a été donné au roman devant l'hostilité de l'épouse de King, Tabitha, au premier titre, Cancer.

14 La possession» sera utilisée plusieurs fois momentanément par Mr Gray : un militaire conduisant un véhicule, un serveur qui prête sa voiture, un policier qui se frappe la tête contre un mur.

15 Dans le film Rencontres du 3ème type (1977), le réalisateur Steven Spielberg, propose un extraterrestre qui veut établir un contact avec les hommes et les avertir qu'ils sont sur le point de se suicider collectivement. Il souhaiterait les sauver de cette perspective en leur faisant profiter de ses connaissances scientifiques (le messager venu du ciel est un symbolisme biblique évident).

16 Les Régulateurs (The Regulators) Richard Bachman. Première publication : 1996. Édition fr. Albin Michel 1996.

17 Je me propose de revenir sur ce sujet en réalisant ultérieurement une étude sur la mise en scène particulière que fait King de l'imaginaire, en m'appuyant sur Les Régulateurs et Dreamcatcher.

18 Du titre d'André Gide, Les Nourritures Terrestres, hymne à la joie et au plaisir qui fit scandale au début du XXème siècle.

19 Une indication incidente supplémentaire du sort qui aurait été d'abord celui des humains habités par les extraterrestres.

20 Désolation (Desperation). Première publication : 1996. Édition fr. Albin Michel 1996.

21 King est beau joueur, en citant ainsi une concurrente dans les chiffres de vente de livres que King a sans cesse dans le collimateur et qui lui servent à se rassurer...

22 Rêves et cauchemars (Nightmares and Dreamscapes). Première publication : 1993. Édition fr. Albin Michel 1994, introduction, 13.

23 " Nous mourons toujours, nous survivons toujours" dit Mr Gray. "Nous perdons toujours et nous l'emportons toujours. Que cela vous plaise ou non, Jonesy, nous sommes l'avenir" .(329)

article précédent : LES EXTRATERRESTRES dans l'oeuvre de King avant Dreamcatcher

ce texte a été publié dans ma Revue trimestrielle

 différentes saisons

saison # 15 - printemps 2002.

 

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