"L'homme en noir fuyait à travers le désert et le pistolero le poursuivait."
Le Pistolero, Postface
Stephen King est réputé pour être un des
spécialistes du genre "Fantastique horrifique". Mais il a
aussi écrit des oeuvres de Fantasy, d'abord peu nombreuses,
mais qui se sont multipliées avec ses expériences sur
La Tour Sombre. Il semble actuellement que la carrière du
maître de l'horreur s'achèvera dans la fantasy,
puisqu'il a prévu d'arrêter d'écrire après
la publication du septième volume de la saga, en 2004. Le
temps paraît venu de faire un bilan de la place que tient dans
sa production le genre littéraire le plus vieux de
l'humanité, le plus vieux puisque les légendes et les
récits mythiques ont nourri l'imagination des hommes
archaïques depuis des dizaines de millénaires.
Quels besoins
satisfait le merveilleux?
La plupart des hommes vivent dans l'existentiel concret de leur vie
ordinaire, qui demande, pour être passée dans de bonnes
conditions, avant tout de la pratique, donnée par
l'éducation et l'expérience. Ils ont des
difficultés à appréhender l'abstrait et à
mettre des significations derrière les concepts. Cette
inaptitude ou inexpérience à manier l'abstraction
explique que dès l'instant où ils doivent donner une
substance aux concepts, ils ne peuvent le faire - faute de manipuler
le langage et les outils de pensée adéquats - qu'en
cherchant des analogies avec leur voie quotidienne, leur "existence".
Voici un exemple de choix : que mettre derrière le concept
"existence", restituant autant que possible ses joies et ses
difficultés? "Vie"? Même problème que pour le
concept "existence" : comment caractériser concrètement
la "Vie"? L'Arbre de Vie, par exemple. Voilà une image
parlante, un symbole parfait : un arbre se développe, grandit
et meurt, comme un homme. L'Arbre peut devenir alors le symbole de la
création toute entière, et le concept d' "ascension"
s'en dégage naturellement : ascension vers le ciel (du bas
vers le haut : ainsi «grimpe» l'arbre), suivie de la
conception d'un «Être Supérieur»... On
comprend qu'on retrouve ensuite l'Arbre dans la mystique arabe, le
judéo-christianisme, l'ésotérisme et bien
d'autres croyances. Dans son Traité d'Histoire des Religions, Mircea Eliade 1 en a distingué 7, qui reprennent toutes
l'idée d'un cosmos vivant en perpétuelle
régénérescence. Dans cette perspective, un
glissement peut s'opérer : l'Arbre du Monde devient l' "Axe du
Monde" 2, dont parle sans cesse King dans ses romans de
fantasy...
Les humains ont ainsi inventé
les entités. Ils souffrent de la violence, de la guerre?
Comment concrétiser cette situation, la rendre
compréhensible pour des êtres illettrés?
L'identification permettra de le faire. La guerre sera
symbolisée par une entité, par exemple Arès, ou
Mars dans l'Antiquité (il y a des centaines de dieux de la
guerre de par le monde, chaque peuple ayant le sien). Par le jeu de
l'anthropomorphisme (attitude spontanée chez les enfants, qui
persiste chez les adultes), ce dieu se comporte comme un humain, avec
sa générosité et ses colères. Par des
cérémonies appropriées, on peut se le concilier.
On lui donnera un temple. On peut ainsi diviniser les
événements qui arrivent, ce qui leur donne un sens.
La peur intense, l'horreur devant le
Mal se sont concrétisées par un animal féroce,
un animal connu mais ayant des particularités exceptionnelles,
puis à caractère symbolique comme le dragon. Un
degré de plus, on obtient le démon, puis le diable.
Pour les espoirs satisfaits (gains, réussite, amour), on
invoquera les bons génies, la Fortune...
Pouvoirs et
forces.
Si des entités, ou des êtres fantastiques comme le
dragon, sont en mesure de donner sens et existence aux concepts,
c'est qu'ils disposent de moyens que l'homme n'a pas : des "pouvoirs"
ou des "forces". Quelquefois ils sont caractéristiques des
êtres appartenant à un même groupe, souvent
liés à des objets magiques : une cape ou un heaume
enchantés donneront l'invisibilité. Au niveau des
entités plus élevées, le concept
"Lumière"est associé à Zeus, ou Jupiter, le roi
des dieux, qui manie la foudre et peut donc, parce qu'il est le seul
à l'avoir, vous foudroyer. Dans La Bible, le premier acte de la création de Jahvé
est de répandre la lumière : "Que la lumière soit, et la lumière fut."
Dieu, divinité
judéo-chrétienne, étant associé au Bien,
la Lumière devint son symbole, et les ténèbres
furent réservées à son ennemi le Diable...
De par le monde, il y a donc les
outils nécessaires aux hommes ordinaires pour leurs actions
quotidiennes, et des accessoires pourvus de propriétés
particulières, exceptionnelles, soit par leur nature, soit
qu'ils aient été dotés d'un "pouvoir"par un
procédé ou un autre.
Toujours en fonction de désirs
à satisfaire ou de craintes à éviter, les hommes
ont depuis longtemps repéré parmi eux ceux d'entre eux
qui réussissaient mieux que les autres.
Généralisant le domaine de cette réussite, ils
leur ont donné la mission d'entrer en communication avec les
puissances invisibles, pour se les concilier. Le chamane est devenu
peu à peu un être à part, chargé d'une
fonction sociale (on dirait de nos jours un "métier", transmis
par cooptation ou par recrutement des doués de groupe social.
Historiquement, certains de ces chamanes devenus "magiciens",
prêtres, ont parfois constitué des castes
héréditaires, avec aussi des écoles
particulières où s'apprenaient les pratiques
magiques.
Le monde
enchanté.
Les opérations mentales collectives précédentes
se sont étalées sur des millénaires, et j'ai
bien conscience que résumer ainsi en quelques centaines de
mots l'aventure humaine comporte énormément de
simplification, voire de trahison. Certains croyants se
révolteront de voir ainsi leurs convictions
grossièrement réduites à des mécanismes
anthropologiques. Il y a des milliers de livres d'ethnologie et de
sociologie, affaires de spécialistes, qui expliquent savamment
tout cela. Le but de l'opération n'est pas de faire un cours
exhaustif (?), mais de montrer quelles sont les racines historiques
de la fantasy. Si les connaissances des hommes ont changé,
ceux-ci continuent à être mûs par leurs sentiments
et leurs passions. Et quelle proportion de l'humanité actuelle
a une formation rationaliste suffisante pour commencer à mieux
comprendre leur situation dans le monde? 3 Quelques pour cent?
Il reste à considérer
une conséquence des opérations mentales historiques
précédentes qui ont permis de passer du concret
à une certaine abstraction verbale. Les entités
étant ainsi inventées, le monde peut commencer à
s'expliquer par autre chose que le visible. Manifestement, puisqu'on
ne voit pas toutes ces entités et que beaucoup de choses
restent cachées, c'est qu'il y a un monde "à
côté", un monde invisible qui expliquerait le monde
visible. Par ailleurs, le rêve peut aussi s'expliquer par un
contact particulier avec ce monde invisible.
La perception du monde devient ainsi
double : d'une part le concret, le quotidien, l'existence ordinaire,
affreusement banals parce que faits de répétitions et
de routines. Et puis l'exceptionnel : ce qui explique
différemment le monde, ce qui lui donne un sens nouveau,
source d'émerveillement, le monde magique, enchanté des
croyances. De par leur nature, le concret et la rigueur scientifique
"désenchantent" le monde...
On exagère beaucoup de nos jours les vertus de ce monde
ancien, dont certains ont gardé la vision optimiste
inspirée de Jean-Jacques Rousseau
4. Pour avoir une idée de la manière dont
vivaient nos ancêtres, il suffit de regarder ce qui se passe
dans les pays sous-développés ou en voie de
développement, où l'essentiel des croyances anciennes
demeurent. On ne peut pas dire que, vivant dans l'ignorance et les
superstitions, leurs habitants nagent dans un bonheur
enchanté...
Mais nos contemporains
protégés par leur confort et leurs
sociétés protectrices (du moins pour la plupart), ont
tendance à regretter ce monde enchanté, où par
ailleurs ils retrouvent leur enfance. On voit dès lors la
place que tiennent dans notre système social les jeux de
rôle. L'enchantement est devenu artificiel, n'est plus "cru",
mais momentanément vécu, paré de tous les
prestiges du passé, et de choses devenues maintenant
impossibles. Les joueurs appliquent les recettes du monde
enchanté de naguère, avec son arsenal complet de
pouvoirs, de charmes, formules et sortilèges, pour
«rire», mais en excitant leur part d'inconscient collectif.
Les amateurs de fantasy (au cinéma comme en
littérature) permettent une évasion recherchée
en revivant les anciennes pratiques magiques...
La caractéristique de ces inventions de l'Imaginaire humain
est qu'elles n'ont, en dehors de leur réalité
historique de croyance, aucune possibilité d'être
vérifiée dans leur affirmation d'un monde invisible.
Leur existence n'est que le produit de l'imagination humaine, et ne
vit que par l'esprit, les traditions et les récits de ceux qui
sont morts maintenant. La magie, les dieux n'ont d'existence que tant
que l'Imaginaire humain le leur donne... Le propre de l'anthropologie
est d'étudier ces survivances et leur survie chez nous dans
l'inconscient collectif.
Naissance du
récit de fantasy.
Les «récit de fantasy» sont issus des
premières formes de narrations connues, alors orales, les
légendes et les contes, produit de l'imagination humaine
à une époque où les connaissances scientifiques
ne venaient pas contrarier les plus «fantaisistes»
inventions. Inspirés par des légendes archaïques,
ces récits mettent en scène dieux, démons,
talismans, pouvoirs, charmes, fantômes, dragons ou animaux
«fantastiques» 5. Leurs aventures se passent dans des contrées
lointaines surprenantes, peuplées d'hommes aux savoirs
étranges, et d'animaux inconnus. Les chamanes d'abord, puis
les aèdes et les poètes itinérants livraient
leurs récits, reproduisant la tradition 6 ou de pure invention, à des auditeurs
émerveillés ou fascinés. Toutes les
contrées du monde ont créé de telles
légendes 7 dont les composantes fantastiques sont
déterminantes. Les hommes sont de grands enfants, qui ont
toujours adoré les histoires qui les faisaient rêver ou
frémir.
La fantasy est restée
fidèle à ces anciennes perspectives. C'est une
littérature qui se déroule dans des mondes autres que
ceux de la réalité quotidienne, avec une
présence importante des entités et possibilités
d'un monde invisible inventé. Les récits
extraordinaires sont toujours aussi appréciés, ainsi la
fantasy de nos jours. Son fantastique, qui ne recherche aucune
explication, a toujours continué à proposer son
merveilleux de mythes, de magie et de sortilèges issus des
contes de fées. Alice et de
Le magicien
d'Oz, dont King s'inspire
constamment, sont des oeuvres apparues avec le triomphe du machinisme
et de la civilisation industrielle, alors que naissait, dans une
autre voie plus conforme, la science-fiction, dont les récits
sont imaginables (encore que parfois...) dans le cadre des
données scientifiques du moment. Du moins, ils ne s'en
éloignent pas de manière gênante.
Quelques
définitions.
Le merveilleux des contes
présente un monde imaginaire, autonome, cohérent,
homogène, dissocié du réel par ces quelques mots
: "Il était une fois... "La forme la plus moderne est la
fantasy. Ce terme a été repris des Anglo-Saxons, qui
renvoie pour eux à toute oeuvre d'imagination. Ils utilisent
aussi bien ce terme pour ce que nous appelons «fantasy» que
ce que nous appelons «fantastique».
Les Français,
cartésiens, semblent avoir davantage d'exigences. Dans son
récent essai Cartographie du merveilleux, André-François Ruaud
8 propose successivement deux définitions de la
fantasy. La première est de Terri Windling
9 , écrivaine, éditrice et anthologiste :
"La fantasy couvre un large
champ de la littérature classique et contemporaine, celui qui
contient des éléments magiques, fabuleux ou
surréalistes, depuis les romans situés dans des mondes
imaginaires, avec des racines dans les contes populaires et la
mythologie, jusqu'aux histoires contemporaines de réalisme
magique, où les éléments de fantasy sont
utilisés comme des mécanismes métaphoriques pour
mettre en lumière le monde que nous
connaissons.".
Ruaud donne à son tour sa définition,
qui servira au choix des auteurs retenus dans son essai :
"La fantasy est une
littérature fantastique incorporant dans son récit un
élément d'irrationnel qui n'est pas traité
seulement de manière horrifique, pré sente
généralement un aspect mythique et est souvent
incarné par l'irruption ou l'utilisation de la
magie."
Silverberg 10 en propose une autre : "La Fantasy peut se définir comme une
littérature qui décrit le monde au-delà de celui
de la réalité quotidienne, et la lutte de
l'humanité pour affirmer sa domination sur le monde."
Il cite comme le plus vieux
récit de fantasy qui soit parvenu jusqu'à nous la
légende sumérienne du héros Gilgamesh, qui
remonte à 2.700 ans avant notre ère11 .
Ce terme "Fantasy"est utilisé par les Anglo-Saxons, pour toute
oeuvre d'imagination. Ils utilisent aussi bien ce terme pour ce que
nous appelons «fantasy» que pour ce que nous appelons
«fantastique». On comprend mieux que King pratique, comme
Peter Straub, à la fois l'un et l'autre et les mêle dans
Le
Talisman et Les Territoires, ce que les auteurs français ou
américains de fantasy pure évitent de faire.
Merveilleux et
Fantastique.
Nous cherchons en effet à
distinguer le genre fantastique du genre merveilleux. Alors que
l'auteur fantastique utilise l'intrusion du surnaturel dans le
réel en le voyant comme une intrusion intolérable et en
cherchant à le justifier, les auteurs pratiquant le
merveilleux accueillent le surnaturel comme allant de soi dans leurs
créations. Ils dissocient totalement le monde merveilleux du
monde réel, tout en cherchant à ordonnancer leurs
oeuvres pour leur donner de la cohérence. L'intention du
récit merveilleux n'est pas de provoquer la terreur et
d'agiter des monstres, mais de dépayser et de séduire
le lecteur. Leurs histoires font plus rêver que les
récits fantastiques, excitent davantage l'imagination et se
terminent généralement bien.
Bref
historique.
Chronologiquement, sont d'abord apparus les récits
merveilleux, ceux des légendes, des contes traditionnels, des
Mille et une
Nuits aux contes pour enfants ou
adultes. La forme du merveilleux moderne la plus connue se rencontre
avec la féerie , que l'on retrouve dans les dessins
animés de Walt Disney.
La Fantasy est apparue avec ses caractéristiques depuis moins
d'un siècle, avec les histoires de Conan (1932) de Robert Howard, et a
pris sa pleine extension à partir du Seigneur des Anneaux (1954) de J. R. R. Tolkien. De
nombreux jeux de rôle ou vidéo reprennent actuellement
les caractéristiques de la fantasy.
Une composante de la fantasy,
l'heroic Fantasy (le space-opera en science fiction joue le
même rôle) a ses racines dans le roman d'aventures de
l'Antiquité, telle l'Odyssée homérique où Ulysse entame un long
périple méditerranéen il y près de 3.000
ans. Cette randonnée du héros à travers un monde
étrange, peuplé de créatures surprenantes et de
magiciens, c'est symboliquement le cours de la vie terrestre
jalonnée de difficultés, qui touche toutes les
sensibilités et a une profonde signification psychanalytique.
Revu, transformé, ce paradigme été repris comme
modèle au cours des siècles, enrichissant peu à
peu un immense imaginaire collectif. Devenue souvent initiatique
depuis la Quête du Graal 12, la randonnée du héros le conduit
à affronter les rigueurs naturelles, de multiples ennemis, un
dragon, des monstres, à chevaucher une licorne, à
s'allier à des elfes, à vivre dans un monde de
rêves prémonitoires, de charmes et de talismans, de
miracles imprévisibles dans des contrées
imaginées inattendues. Le Roland Furieux
d'Arioste
13, The Faerie Queen
d'Edmund Spencer
14, Le
Paradis Perdu de Milton 15 ont enrichi et transformé le genre,
débarrassé par le roman gothique anglais du
XIXème siècle de ses influences religieuses, mais tout
en gardant l'essentiel.
Au début des années 70 s'est produite une
déferlante qui a relancé remarquablement le genre, qui
s'essoufflait. Le livre de Tolkien16, édité en gros ouvrages reliés
onéreux, avait un lectorat confidentiel. L'édition en
livre de poche fut achetée par des millions de lecteurs en peu
de temps (c'est à cette époque, en 1970, que King lut
Tolkien), qui devinrent demandeurs de fantasy. En naquit une
véritable boulimie qui ne s'est pas encore apaisée. De
nombreux auteurs vieillissants furent remplacés par des
auteurs plus jeunes, actuellement en pleine production. Dans une
annexe, le lecteur intéressé trouvera les
références utiles.
La fantasy est devenue un monde multiforme, mais y subsiste le monde
des légendes traditionnelles, insérées ou non
dans notre réalité. Les auteurs cherchent à nous
charmer avec des héros affrontant dans des circonstances
diverses le dragon ou ses substituts, et de plus en plus souvent le
monstre humain métaphorique.
Caractéristiques générales du
genre.
Le monde imaginaire de la fantasy est dominé par le surnaturel. Mais s'il est totalement ou partiellement dissocié du monde réel, il doit rester ordonné et cohérent, en respectant les règles et moyens que l'auteur s'est lui-même donnés.
* Au contraire du fantastique, les
éléments "surnaturels" sont considérés
ici comme "naturels", sont acceptés comme tels. Par contre,
l'introduction du surnaturel dans le récit fantastique
provoque l'inquiétude ou l'effroi. Dans le monde imaginaire de
la fantasy, tout est possible. Il est admis que ce monde n'a rien
à voir avec notre monde. Il s'appuie nécessairement sur
les règles autres qui régissent un monde
différent, d'un autre "là et maintenant", pour
reprendre la formule de King (Ter, 84)
* Les auteurs créent un (ou des) univers
parallèle, généralement un monde
archaïsant, le plus souvent moyenâgeux. Il est
imaginé, peu documenté et ne cherche pas à
s'appuyer sur des références terrestres. Cet univers
est généralement organisé par analogie avec les
lois de la nature terrestre, ou alors les autres
référentiels sont indiqués par l'auteur.
* Ce monde est généralement
décrit par les auteurs avec une certaine nostalgie, celle d'un
âge d'or aujourd'hui perdu. Chacun a sa place dans ce monde,
vivant en symbiose avec l'univers. Cette remarque concerne surtout la
tendance féerique et moins la tendance
réaliste/magique. La fantasy comporte en effet deux tendances
: la tendance féerique et la tendance réaliste/magique,
à laquelle appartient Stephen King.
Les auteurs proposent souvent des mythologies particulières,
parfois totalement inventées , le plus souvent
inspirées des mythologies connues. Sont utilisées en
priorité les mythologies celtiques et nordiques, à
l'imitation de Tolkien, et les légendes arthuriennes des
chevaliers de la Table Ronde. Les divinités connues, comme
celles de l'Antiquité, sont parfois détournées.
Mais la mythologie mise en place, le récit doit
nécessairement s'y inscrire : l'auteur le raconte au premier
degré.
* Le combat entre le Bien et le Mal est au coeur
du récit, avec un héros qui s'engage, volontairement ou
non, dans une quête, un voyage, nécessairement
aventureux. Il y rencontre des êtres surnaturels ou
particuliers (magiciens, nécromanciens), qui lui viendront en
aide ou multiplieront les embûches.
* La place de la magie est un
élément obligé de la fantasy, notamment de
l'heroic fantasy. Comme la magie terrestre connue, elle est blanche
(favorable) ou noire (défavorable). La magie tient une part
considérable dans l'histoire. Presque toujours le
héros, grâce à sa force physique ou à son
intelligence, aidé par des alliés ou grâce
à des moyens suscités par des entités favorables
au Bien ou la Lumière, et surtout une bonne dose de magie
blanche, parvient à battre la magie noire et les
entités défavorables. À noter que le space
opera, branche de la science-fiction, n'utilise évidemment pas
la magie, en gardant l'essentiel de ce modèle.
* Les histoires de fantasy forment le plus
souvent des cycles, certains très longs, voire repris par
divers auteurs.
* L'intention des auteurs de fantasy est
d'émerveiller le lecteur et de le dépayser du quotidien
de sa société de consommation, avec un récit
mouvementé qui le divertit et qui, contrairement aux
récits fantastiques ou d'horreur, se termine
généralement bien.
La mise au point du paradigme.
Le
Fléau (The Stand), version abrégée. Création :
1975-78. 1ère édition 1978, trad. fr. Le Fléau, éditions Alta, Lattès, 1981.
(The Stand, the Complete & Uncut Edition), version
complète du roman de 1978, revu en 1988/9. Publication : 1990.
Édition fr. Lattès 1991.
Un incident dans une base militaire est à l'origine de
l'échappée mortifère d'un virus, qui provoque la
super-grippe, à laquelle de rares habitants vont survivre. Les
rescapés s'organisent entre deux pôles, celui des forces
du Bien, regroupées autour de la centenaire noire
Abigaël, chrétienne fervente; et celui des forces du Mal
autour du démon Randall Flagg, un être maléfique
qui, finalement vaincu par hasard, se retrouvera dans un autre monde
à essayer une nouvelle tentative de désordre.
Randall Flagg, l'Homme Noir qui suit
King depuis un poème écrit à
l'Université, se retrouvera dans de nombreux romans : dans
La Tour
Sombre, Les yeux du Dragon, et à plusieurs reprises, sous un nom dont les
premières lettres forment (R. F.), avec exceptionnellement
d'autres initiales dans Bazaar.
Si la première partie du roman a un caractère dramatique, politique et sociologique à l'allure d'un récit de science-fiction stigmatisant une Amérique obsédée de technologie, désorientée moralement, aux frontières de la destruction, la plus grande partie évolue complètement, avec les références à la Lumière et aux Ténèbres, aux enjeux clairement perçus par les uns et les autres. Ils sont visités par des rêves annonciateurs ou impératifs, et reçoivent télépathiquement de nombreux messages sur la nature du mal. Prédestination, les camps sont déjà établis quand ils reçoivent leurs premiers messages, venant du Bien ou du Mal. La mission théologique est assurée par Abigaël, et le lecteur s'aperçoit vite qu'il est mené par King au Livre de l'Apocalypse, avec la fin de toutes choses.
Le
Pistolero, La Tour Sombre I
(The
Gunslinger). Création
: 1972 à 81 (idée en (1970). 5 nouvelles.
Première publication en volume: 1982. Édition. fr. J'ai
lu 1991.1- Le Pistolero (The
Gunslinger), octobre 1978. 2-
Le Relais (The Way
Station), avril 1980. 3-
L'Oracle et les Montagnes (The
Oracle and the Mountains),
février 1981. 4- Les Lents Mutants (The Slow Mutants), juillet 1981. 5- le Pistolero et l'Homme en Noir
(The Gunslinger and the Dark
Man), novembre 81.
Comme il le signale dans la Postface à Le Pistolero, King utilise un matériau fourni par Robert
Browning : "Le
Chevalier s'en vint à la Tour Noire", phrase énigmatique dans son imprécision.
Sur cette mince donnée, King a greffé la saga de Roland
de Gilead, le dernier des Pistoleros17. Pour la première fois, on apprend explicitement
dans Les
Territoires, que depuis toujours,
la mission de protéger la Tour et les Rayons a incombé
à la fraternité guerrière de Gilead, dont les
membres sont appelés ici, et dans d'autres mondes, les
justiciers. Ils peuvent développer une force psychique capable
de contrer les "Casseurs", les agents des forces destructrices.
Malheureusement, il ne reste plus actuellement qu'un seul justicier
Roland, qui en a formé trois autres : "S'il avait été seul, les
Casseurs auraient abattu la Tour depuis longtemps. Tandis qu'à
eux quatre, ils génèrent assez de
force."(Territoires,
409).
Dans cette saga qui se passe à
divers moments de la vie du Pistolero, le lecteur trouve, aux
côtés d'une société à structure
féodale, en plein déclin, des vestiges d'une
civilisation à la technologie avancée. King mêle
des éléments de chevalerie à une conception
fantastique de divers mondes, où passé et futur se
mêlent. La chronologie des différents récits
n'est pas évidente à établir 18. Si la finalité de l'histoire s'est un
peu éclaircie avec Territoires, il
reste encore de vastes zones d'ombre.
Dans Le
Pistolero, Roland s'est
lancé à la poursuite de l'Homme en Noir, un sorcier
énigmatique, dans une région quasiment
désertique. Par plusieurs retours en arrière, le
lecteur apprend que Roland est le descendant des rois de Gilead,
noble lignée liée à la Tour Sombre, dont elle
protège les intérêts. Inversement, d'autres, dont
l'Homme en Noir, cherchent sa chute. En ne gardant que les
personnages qui se retrouveront ultérieurement dans le
récit, Roland rencontre Jake, un jeune garçon dont on
ne sait pas d'où il vient, qui semble mourir à la fin
de ce premier tome, mais réapparaîtra dans les suivants.
Sorte de réplique du Jack Sawyer du Talisman, il contribue à aider Roland à rattraper
l'Homme en Noir. Tournant de sa vie dont les conséquences se
manifesteront plus tard, Roland sacrifie Jack, apparemment pour
obtenir de l'Homme en Noir, alias le sorcier Walter, les
réponses aux questions qu'il se pose : le sens de sa
quête et la signification possible de la Tour. À la fin
de ce recueil, la Tour Sombre sera le lien mythique et mystique entre
plusieurs ouvrages, où elle est présentée, en
conformité avec d'anciennes cosmogonies terrestres, comme
assurant l'équilibre du monde19.
Combinant terreur et western, suggérant des relations entre des univers multiples et des mondes parallèles, avec un organe centralisateur qui serait la Tour, axe ou moyeu des mondes, cette saga héroïque conduit à une fantasy mêlée de quête épique. On est surpris de voir comment, à partir de l'apport minimal de Browning, King ait pu être habité si longtemps, pendant des dizaines d'années, par l'aventure du Pistolero.
Les Yeux du
Dragon (The Eyes of the Dragon). Première publication : 1984. Édition
fr. Albin Michel 1995.
Dans un passé moyenâgeux
indéterminé, profitant de la faiblesse du vieux roi de
Delain, Flagg le magicien cherche à renverser l'ordre
établi dans le royaume. Il en est empêché par le
fils aîné du roi, Peter, mais il s'est soumis son
frère Thomas, plus influençable. Flagg empoisonne le
roi, accuse Peter, et le fait emprisonner. Dans une forteresse
d'où toute fuite est impossible, Peter est emprisonné
de longs mois, pendant lesquels il prépare son évasion,
tandis que Thomas règne et que Flagg augmente ses pouvoirs. Le
rapport du sujet avec Le Fléau
et La Tour
Sombre est évident,
d'autant plus que Peter ressemble à Roland par son
énergie et sa résolution.
Il était une fois : par le début de son récit, King montre qu'il est capable de s'en tenir aux règles classiques de la fantasy, de la tradition des contes oraux racontés aux enfants. Histoire d'un roi, légendaire pour avoir tué le dragon, mais qui, avec l'âge, a sombré dans l'alcoolisme; d'une reine, vraiment gentille dans la fermeté, mais dont la destinée est tragique; de princes aux sorts différents; d'un magicien éminence grise vraiment épouvantable, ce conte de fées était destiné à sa fille, mais il intéresse aussi bien les adultes. Le pays souffre en l'absence du bon prince Peter, mais tout se rétablira quand Peter triomphera. Les relations avec le monde des Territoires, celui de Roland, est évident et on sait que Thomas et Dennis se sont lancés à la poursuite de Flagg - on les a vus à Lud (Terres Perdues) -, qu'ils ont rencontré plus tard Flagg, et l'ont affronté.
Le Talisman des
Territoires (The Talisman), en collaboration avec Peter Straub.
Création : 1982/84. Première publication : 1984.
Édition fr. Robert Laffont 1986.
Pour sauver sa mère souffrante, une ancienne actrice de
cinéma, Jack Sawyer est incité par un mystérieux
Noir, Speedy, à partir à la recherche d'un talisman,
seul susceptible d'assurer la guérison de sa mère, en
même temps - fait plus mystérieux - que celle de son
"double", une reine mourant d'une mystérieuse maladie dans un
ailleurs dans une autre dimension, qui est appelé les
Territoires. Jack entreprend une quête qui le met en
présence des pires dangers, la plupart suscités par le
maléfique associé de son père, Morgan. Morgan a
fait tuer son père il y a trois ans. Au cours de ce voyage, il
passera, quand les circonstances le demandent, du monde terrestre
pollué des Etats-Unis des années 80 à celui des
Territoires, restés moyenâgeux (on saura dans le second
volume Les
Territoires que le monde de
Roland s'y trouve). Dans ce monde, la magie remplace la science. Le
monde si bucolique des Territoires aperçu par Jack risque
d'être victime à nouveau d'une catastrophe comme celle
qui s'est produite jadis sur une partie de son sol, devenu un vaste
lieu de désolation et de destructions, appelé Terres
Brûlées".
On trouve dans ce roman la plupart des ingrédients de la Fantasy : la quête initiatique, l'objet magique à conquérir, la lutte entre les forces du Bien et du Mal, la magie et d'autres ingrédients mineurs. Le contraste entre le monde bucolique des Territoires avec la société actuelle, dégradant la planète et ne cherchant que les plaisirs et la consommation, est saisissant, de même que la fin promise à tous deux : de nouvelles "Terres Brûlées". Les influences de Mark Twain, Le Magicien d'Oz et Tolkien sont patentes. Mais le roman n'est pas de fantasy pure comme Les Yeux du Dragon. Il comporte des résonances lovecraftiennes, et cultive l'horreur dans la gamme habituelle de ses auteurs.
Les Trois
Cartes, La Tour Sombre 2
(The Drawing of the
Three) Création : 1985
(Postface déc. 1986). Première publication : 1987.
Édition fr. J'ai lu 1991.
Roland, diminué par l'assaut de créatures marines
monstrueuses (elles lui ont coupé plusieurs doigts de la main
droite), contaminé et malade, trouve sur la plage une "porte",
qui lui permet de parvenir dans notre monde à trois reprises,
à trois époques différentes, toujours dans la
ville de New-York. Il y rencontre de quoi former son "ka-tet", son
groupe de combat, trois personnalités atypiques qui seront
à former :
* dans les années 1980, Eddie, un junkie
qui passe de la drogue pour le compte de la Mafia.
* dans les années 1960, Susannah, une
jeune femme noire mutilée des jambes qui souffre d'un
dédoublement de la personnalité.
* dans les années 1970, il sauve la vie
de Jake, mais provoque par là même un paradoxe temporel
et une crise personnelle d'où il aura des difficultés
à sortir.
Roland a ramené Eddie et Susannah sur son monde. Jack est
toujours sur terre. Tous trois ont à lutter contre leurs
démons intérieurs et y parviennent en s'entraidant.
Eddie doit surmonter sa dépendance à la drogue et
régler ses problèmes affectifs qui se rapportent
à la mort de son frère. Susannah doit apprendre
à vivre avec ses deux personnalités qui se combattent
et à les surmonter : l'une, Odetta, secourable aux
défavorisés humiliés, qui vient au secours de
ses frères de la race noire; la seconde , Detta,
dominée par son racisme anti-blanc et psychopathe
sexuelle.
Peu à peu, les deux recrutés deviennent performants, et
le trio peut reprendre le chemin de la Tour en suivant le
Rayon.
Ça (It).
Première publication : 1986. Édition fr. Albin Michel
1988.
Cette histoire de sept adolescents qui entreprennent de lutter contre
la maléfique créature Ça, utilise de multiples
transpositions en correspondance avec diverses composantes :
* le mode de vie du chasseur, qui entend
continuer sa petite vie faite de prédation cyclique de
période de consommation de chairs et de peurs humaines, suivie
de longues périodes de repos (mode de vie du serpent), sur le
territoire de Derry, petite ville ordinaire, son territoire de
chasse.
* l'imaginaire enfantin moderne et ses peurs,
surtout constitué par la fréquentation du
cinéma, de la télévision, et, marginalement,
quelques livres.
* la découverte de la magie par les
adolescents, qui l'inventent, la pratiquent et réussissent,
avec l'appui de forces cachées, lors d'une quête
initiatique particulière.
L'univers magique n'est pas littéralement lié au cycle de la Tour Sombre, ni à aucun autre roman. Sans être vraiment de la fantasy - le réalisme fantastique y tient une place importante - la fantasy a sa place, avec l'invention du monstre Ça, dont les multiples apparences vont de sa populaire apparition en clown Grippe-Sous, à l'araignée monstrueuse à la toile meurtrière.
Terres
Perdues, La Tour Sombre 3
(The Waste
Lands). Création :
1988/91 (Postface mars 1991). Première publication : 1991.
Édition fr. J'ai Lu 1992.
La première partie décrit le parcours du ka-tet de
Roland sur le chemin du rayon : Susannah abat un cyborg/ours
géant, gardien fou du rayon, et Eddie parvient à faire
venir Jake de la terre. Jake a dû passer dans un endroit maudit
lovecraftien et traverser l'enfer pour rejoindre le monde de Roland.
Lequel a péniblement retrouvé son équilibre
mental, avec deux séries de souvenirs contradictoires dans son
esprit : Jake tombant dans le précipice, et Jake sauvé
par ses soins d'un accident de voiture, dans un inconciliable
paradoxe. Après avoir traversé un moment le monde rural
de Roland, le quatuor, augmenté d'Ote, un curieux animal qui
parle, arrive dans une cité, Lud, où subsistent de
nombreux restes d'une civilisation technologique avancée
détruite. Jake est enlevé par une secte
sévissant dans ces ruines, dirigée par un sbire de
Flagg (le mal incarné dans Le Fléau
et ailleurs). Jake est délivré par ses compagnons,
aidés des Ados, groupe rival de la secte. Ils échappent
à cette cité inquiétante avec son complexe de
machines du passé, dont certaines fonctionnent encore, en
proie à des pratiques de banditisme archaïques. Ils
utilisent pour fuir le monorail Blaine, dirigé par une
intelligence artificielle à la sensibilité humaine qui
a rendu son humeur suicidaire. Comme Tolkien avec ses énigmes
et ses jeux de langage, Blaine propose des devinettes à
résoudre qui seront le prix à payer s'ils veulent la
vie sauve. La machine se flatte d'avoir en mémoire toutes les
devinettes connues dans le monde.
À noter que dans ces romans de la Tour Sombre, on ne se sert
pas d'autres armes que des pistolets, ce qui contribue à leur
donner une allure de western particulière.
Bazaar (Needful Things).
Première publication : 1991. Édition fr. Albin Michel
1992.
Un démon prospère à Castle Rock, camouflé
sous les apparences d'un élégant vendeur d'un magasin
d'antiquités et curiosités. Il sème le trouble
d'abord, puis, très vite, le mal chez la plupart de ses
habitants, tous bien préparés à le recevoir.
Suscitant et cultivant habilement leurs désirs et leur besoin
de consommation pour satisfaire leurs rêves, il transforme des
sentiments humains médiocres en violence, haine et mort, par
des procédés tortueux, mais efficaces.
Dans ce récit, où humanité et péché sont confrontés, se mêlent l'horreur, la terreur, la fantasy et la magie, dans ce subtil alliage dont King a le secret. La confrontation entre le Bien et le Mal, qui fuit, mais reste invaincu, se déroule dans un final qui amène la destruction apocalyptique de Castle Rock.
Insomnie (Insomnia).
Première publication : 1994. Édition fr. Albin Michel
1995.
Ralph Roberts devient insomniaque et a des visions étranges.
Le manque de sommeil est provoqué par des subalternes des
"forces"de la Tour Sombre, qui ont besoin de lui pour une mission
particulière. Avec l'aide de son amie Lois, il doit sauver un
jeune garçon dont la mort aurait des conséquences
dangereuses et assurerait le déséquilibre des mondes.
Les références à la Tour Sombre sont explicites.
Le Roi Pourpre (l'équivalent de Satan, créature
vouée au rouge et au noir, comme son antagoniste, Dieu, est
représentée par le blanc et le bleu, associés
à la lumière (son spectre) et à la couleur du
ciel. Le Roi Pourpre, créature maléfique aux pouvoirs
considérables, maître des illusions comme le Diable,
sera plusieurs fois désigné comme le responsable de
tous les maux que subissent Les Territoires.
Ralph et Lois sont devenus des guerriers - ils ont d'ailleurs rajeuni, et leur tâche est momentanément aussi importante pour la survie de la Tour que le combat de Roland de Gilead. Comme dans tout bon roman de fantasy, ils trouvent en eux des possibilités insoupçonnées de force et de pouvoir.
Rose
Madder (Rose Madder).
Première publication : 1995. Édition fr. Albin Michel
1997.
Rosie est capable de passer une porte donnant sur un autre monde,
grâce à un tableau médiocre trouvé chez un
antiquaire, qu'elle a été irrésistiblement
poussée à acheter par une force inconnue. Ce passage,
emprunté à Alice au pays des Merveilles, effectué à deux reprises, lui permet de
se débarrasser de son mari tortionnaire, en échange
d'un service rendu à Rose Madder, marquée par une
maladie mystérieuse (qui vient peut-être des Terres
Dévastées). Rose Madder, qui a quelques pouvoirs
magiques, est son double, comme il en existe dans Les Territoires. Elle est en effet passée par le monde
de Roland, puisque sa servante fait une allusion à la ville de
Lud, de Terres
Perdues.
Désolation
(Desperation). Première publication : 1996.
Édition fr. Albin Michel 1996.
La partie fantasy du roman est réduite en apparence, tellement
elle est intégrée dans la vision réaliste d'une
bourgade minière désertée. Mais le mode
d'existence de l'entité Tak, qui domine ses habitants, plonge
bien cette oeuvre dans l'univers de la fantasy. Enfouie au fond d'une
mine, et libérée accidentellement, l'entité
s'empare des humains dont elle emprunte le corps et l'esprit pour
réaliser ses desseins, dans un combat entre le Bien et le Mal
qui rappelle Le
Fléau. David, l'élu
de Dieu dans La Bible, et Tak ont remplacé Mère
Abigaël et Flagg.
Un policier d'abord, puis d'autres habitants, sont successivement habités par cette force mystérieuse qui utilise leur énergie jusqu'à leur mort. Son action est heureusement contrecarrée par un enfant, David, néophyte en religion, qui, aidé par Dieu et ses compagnons, arrive à vaincre l'entité dangereuse. Avec Territoires, on se rend compte que Tak fait partie des créatures régentées par le Roi Pourpre.
Les
Régulateurs
(The
Regulators) Richard Bachman.
Première publication : 1996. Édition fr. Albin Michel
1996.
À nouveau l'entité maléfique Tak,
rencontrée sous une autre forme et d'avec d'autres desseins
dans Désolation. L'imaginaire d'un enfant démiurge, capable de
susciter une nouvelle réalité, est utilisé par
le démon. Grâce à cet esprit exceptionnel, Tak,
vampire psychique, réalise crimes et transformations d'un
quartier de la ville, suivant ses caprices, avant tout marqué
par une soumission intensive à certaines émissions de
télévision populaires aux USA.
Magie et
Cristal, La Tour Sombre 4
(Wizard and
Glass). Première
publication : 1997. Édition fr. J'ai Lu, 1997.
Le quatuor progresse vers la Tour Sombre. Il traverse d'abord une
région dévastée, sans habitants, de
l'Entre-deux-Mondes, qui rappelle les Terres Brûlées par
une explosion nucléaire. Puis il rencontre une
"tramée", une portion de l'espace particulière qui est
un effondrement des frontières qui séparent les
différents mondes, les espaces-temps, que King appelle les
"quand et les où". Roland croit que le monde court plus vite
à sa perte qu'il le croyait.
Pause dans le cycle, mais qui fournit un éclairage intéressant, une très longue parenthèse rappelle les souvenirs de jeunesse de Roland, et ses amours de jeunesse avec Susan Delgado, en même temps que sa découverte d'une conspiration en voie de constitution pour mettre fin au pouvoir en place dirigé par les Gilead. Si les conspirateurs sont mis en état de nuire, malheureusement Susan a été la victime des habitants du lieu, mort que Roland, une fois encore, aurait pu éviter. Les compagnons de Roland comprennent alors que Roland n'hésitera pas à les sacrifier pour remplir sa mission, comme il l'a fait dans le passé pour Jake (heureusement ressuscité!). En dépit de cette constatation amère, les compagnons reprennent la route en triomphant des sortilèges du palais de cristal, inspiré du Roi d'Oz, où ils ont retrouvé Maerlin (Merlin), l'ennemi de Roland et l'inspirateur de Walter (tome 1).
Les Petites Soeurs
d'Elurie (Little Sisters of Eluria : A Dark Tower
Novella). Première
publication : 1998 (recueil : Legends, The Book of Fantasy). Édition fr. Légendes, Éditions 84, 1999. Dans le recueil :
Everything's is
eventual, paru en mars 2002
aux USA, en cours de traduction.
La nouvelle met en scène Roland, qui, blessé, est
soigné dans un hôpital bizarre par des "petites soeurs",
qui se révèlent être des vampires. Le
récit se situe avant la poursuite du magicien Walter, l'Homme
en Noir. Aucune connaissance précise des autres ouvrages parus
concernant la Tour n'est nécessaire pour suivre cette
nouvelle.
Coeurs perdus en
Atlantide (Hearts in Atlantis). Première publication : 1999. Édition
fr. Albin Michel, 2001. 2 novellas et 3 nouvelles, formant un
ensemble. Nous intéresse la nouvelle : Crapules de bas étage en manteaux
jaunes (dont on trouve une vague
esquisse dans un petit récit de 1960) (Low Men in Yellow Coats), qui se rattache au Cycle de la Tour
Sombre.
Bobby vit avec sa mère veuve, une employée qui, pour
améliorer ses revenus, loue une chambre de son logement. Comme
avec David, dans Désolation; Seth, dans Les Régulateurs, nous voici donc revenus à Le Corps et à Ça :
même âge des protagonistes, mêmes problèmes
avec les adultes, leurs échappatoires dans leurs loisirs et
leurs sentiments d'enfants. Bien que ce type de récit kingien,
si souvent traité, ait perdu toute originalité, le
charme opère encore, et le lecteur est vite saisi par un
récit qui oppose la difficile entente d'un jeune garçon
avec sa mère veuve, et la richesse des rapports qui
s'établissent avec un vieil homme, Ted, venu habiter leur
logement. Avec Ted apparaissent des éléments
liés à la saga de la Tour Sombre. De mystérieux
êtres en jaune, aux formes changeantes comme certains
êtres du monde de la Tour, utilisant des voitures voyantes,
cherchent en effet à s'emparer du vieil homme, avec des
allusions (le roi Pourpre, les pétales de rose) que seuls les
kingiens avertis pourront comprendre. On saura dans Les Territoires que, sous ses apparences humanistes, Ted est
un "Casseur"redoutable.
Territoires
(Black House). Première publication : 1991.
Édition fr. Robert Laffont 2002.
Récit inclassable, composé de deux parties chacune
occupant la moitié de l'ouvrage, dans des genres
juxtaposés plutôt que confondus. La première
partie est un thriller d'horreur, dans lequel la présence des
Territoires et la désignation des véritables forces du
mal n'est qu'occasionnelle. Jack, la trentaine maintenant, est un
ex-policier qui s'est mis lui-même à la retraite. Il
aura l'occasion de retourner à nouveau dans les Territoires,
d'abord à la recherche d'un enfant enlevé par un
serial-killer, puis avec un projet nettement plus ambitieux.
La mythologie des Territoires, connue
par Le
Talisman, refait sa
réapparition. Ce monde parallèle, que Jack a parcouru
pour trouver le Talisman, est une terre de type
médiéval, où la magie est utilisée au
lieu de la science. Entre notre planète Terre et les
Territoires, des connexions sont établies. La magie tient dans
le récit une place prépondérante. Jack
réussit à empêcher les projets du Roi
Écarlate de se réaliser : il tue ses suppôts et
parvient à empêcher le "chaos" de "s'emparer des
mondes".
On trouve de nombreuses longueurs, surtout dans la première
moitié, qui n'est pas de la fantasy.. Par contre la seconde
partie, de la pure fantasy, mâtinée de terreur, est
beaucoup plus nerveuse et accrocheuse.
Bilan.
L'apport de King à la fantasy ne sera pas négligeable.
Ses oeuvres ne sont pas destinées aux puristes du genre :
elles sont trop mêlées aux nombreuses facettes de cet
écrivain qui, voulant pratiquer le mélange des genres,
n'a réussi que dans ses premières oeuvres à
écrire des romans qui satisfont aux canons d'un genre
particulier, le fantastique. À partir de ses recherches sur la
Tour Sombre, la magie se mêle souvent aux oeuvres, qui
deviennent composites. Les Yeux du Dragon, qu'il a écrit alors pour sa fillette, Naomi;
Le
Pistolero; Les Petites Soeurs d'Elurie; Magie et
Cristal sont les seuls
récits de fantasy pure. Les autres oeuvres sont
hybrides.
King a eu au moins le mérite
de créer un nouvel archétype du personnage
épique, dont l'objet de la quête est la sauvegarde du
futur. Mais cet immense projet ne lui a jamais fait perdre de vue le
temps où il vit. Ancré dans la société
contemporaine, King a constamment le souci de nous montrer nos
sombres obsessions, nos médiocres espoirs, nos rêves
ordinaires, nos petits succès, nos échecs mal
ressentis, et nos trop nombreuses frustrations, qui sont aussi les
siennes. Son héros Roland de Gilead, d'abord taillé
dans un roc inaltérable, a montré ses failles, et
reconnu ses faiblesses. Quoi qu'il fasse, King éprouve des
difficultés à sortir des difficultés de son
temps, à planer pleinement dans la fantasy. Ce qui explique
son besoin de constamment mêler les considérations
cosmiques les plus élevées à une
réalité souvent sordide.
Roland Ernould © 2003
Voir aussi : Légendes,
récits par les maîtres de la fantasy moderne
présentés par Robert Silverberg
XIIème siècle. Chrétien de Troyes, Lancelot, le chevalier à la charrette
XVIIème siècle : Charles Perrault, Contes
de ma mère l'Oye
XIXème siècle :
Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles, De l'autre
côté du miroir
George McDonald, The
Fairy Tales
Rudyard Kipling, Le
Livre de la jungle.
Première moitié du XXème siècle.
L. Franck Baum, Le Livre d'Oz
James M. Barrie, Peter
Pan
Lord Dusany, The Gods of Pegana, La fille du roi des
Elfes
Edgar Rice Burroughs, Le
Cycle de Mars, Le Cycle de Pellucidar
Abraham Merritt, La Nef
d'Ishtar
Robert E. Howard, Le Cycle
de Conan
T. H. White, Excalibur
Fritz Leiber, Le Cycle des Épées
Seconde moitié du XXème siècle.
C. S. Lewis, Le cycle de Narnia
J. R. R. Tolkien, Le
Seigneur des Anneaux
Leigh Brackett, Le Livre de Mars
Philip José Farmer, La Saga
des hommes-dieux
Katherine Kurt, Derynis
Elizabeth McCaffrey, La
Ballade de Pern
Jack Vance, Les Maîtres des dragons, La geste des
princes démons
Catherine L. Moore, Jirel de
Joiry
John Norman, Le Cycle de Gor
Ursula Le Guin, Le Cycle de Terremer
Roger Zelazny, Le Cycle des Princes d'Ambre
Gene Wolfe, Le Livre du Nouveau Soleil de Teur
Carolyn J. Cherryh, Le
Livre de Morgane, Le cycle de Chanur
Stephen R. Donaldson, Les
Chroniques de Thomas I'Incrédule
Diana Wynne Jones, Ma soeur
est une sorcière
Michael Moorcock, La
Saga d'Elric le Nécromancien, La Quête d'Erchosë,
La Légende d'Hawkmoon
Terry Goodkind, L'épée de
Vérité
Lee Tanith, Le Dit de la terre plate
Terri Pratchett,
Annales du Disque-Monde
Stephen King, La Tour Sombre
Robert Silverberg, Les
Chroniques de Majipoor
Raymond Feist, Les Chroniques de Krondor
Marion Zimmer Bradley, Les
Dames du lac
Orson Scott Card, Les
Chroniques d'Alvin le Faiseur
Robert Jordan, L'invasion des ténèbres
David Eddings, La Belgariode
Tad Williams, L'Arcane des épées
Philipp Pullman,
À la croisée des mondes
J. K. Rowling, Harry Potter
Robin Hobb, L'assassin royal
Notes :
1 Mircea Eliade, Traité d'Histoire des Religions, Préface de Georges Dumézil, Payot, 1989.
2 "Ferme soutien de l'univers, lien de toutes choses, support de toute la terre habitée, entrelacement cosmique, comprenant en soi toute la bigarrure de la société humaine. Fixé par les clous invisibles de l'Esprit pour ne pas vaciller dans son ajustement au divin; touchant le ciel du sommet de sa tête et affermissant le sol de ses pieds, et, dans l'espace intermédiaire, embrassant l'atmosphère de ses mains incommensurables."Tel est l'axe du monde décrit lyriquement au IVème siècle par le pseudo-Chrysostome, Cité par Henri de Lubac, Catholicisme, les aspects sociaux du dogme, 1941, p. 366). En remplaçant "clous invisibles"par "rayons", on retrouve la même idée chez King.
3 Qu'on ne sait d'ailleurs, faute des connaissances ou des outils nécessaires, jamais faire complètement
4 Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) est un des quatre grands écrivains-philosophes du XVIIIème siècle, auquel King ressemble. Opposé à un Voltaire rationaliste, Rousseau donne la priorité au langage du coeur et se méfie de l'intelligence et de la raison. Dans les deux Discours, il propose sa conception de l'homme bon de nature que la société corrompt. On s'est moqué en la dénaturant de cette vision du "bon sauvage"("Rousseau nous donne envie de marcher à quatre pattes", disait méchamment son ami/ennemi Voltaire), état de nature auquel Rousseau ne prétend pas retourner. Il a seulement affirmé l'ambivalence du progrès et de la civilisation, qui détruisent la morale naturelle et corrompent l'harmonie entre les hommes.
5 On remarquera la racine identique de ces deux mots,
inconnus l'un comme l'autre à l'époque, où les
croyances se confondaient avec les connaissances positives. Les
éléments surnaturels n'étaient pas vus comme
tels, étaient acceptés comme «naturels»,
faisant partie de l'ordre des choses.
«Fantasy» vient du grec «phantasia»,
«apparition», dont un mot dérivé est
«phantasma», qui a donné en Français
«fantasmagorie», ou «fantasme»
(«phantasme»), représentation imaginaire traduisant
des désirs plus ou moins conscients. «Fantastique» a
pour racine «phantastikos», qui concerne l'imagination. Le
point commun de tous ces mots est l'importance de
l'imaginaire.
6 La plus ancienne épopée est sumérienne (mésopotamienne). Elle raconte l'histoire du roi Gilgamesh, d'Uruk, il y a environ 4.500 ans. Les sagas islandaises sont aussi fort anciennes. L'Iliade et L'Odyssée, les deux épopées attribuées à Homère, ont 2.800 ans. Beowulf (dont le climat a inspiré La Tour Sombre, selon King -voir la postface de Le Pistolero) et La Chanson de Roland, datant du haut Moyen_Âge, sont les plus anciens écrits de fantasy Anglais et Français. On peut encore citer pour leurs influences Les Contes des Mille et Une nuits et le Shâh-Nam persan (Le Livre des Rois), épopée du poète persan Abou'l Quatsm Frirdousi (vers 1020).
7 La transmission des récits a d'abord été orale et l'aède devait être un homme de mémoire! Mais on devine que les histoires ont dû être modifiées dans les détails, peu à peu amplifiées, et enjolivées selon les réactions directes de l'auditoire. Ce n'est que tardivement qu'elles ont été fixées par l'écriture.
8 André-François Ruaud, Cartographie du merveilleux, éditions Denoël Folio SF, 2001, pp. 9/10.
9 Terri Windling, préface à The Year's Best Fantasy and Horror, vol.4, 1991. À lire son roman The Wood Life, 1996.
10 Robert Silverberg présente Légendes (Legends), onze récits inédits par les maîtres de la fantasy moderne, éditions 84, 1998; rééd. J'ai Lu, 2001.
11 L'épopée de Gilgamesh a été retrouvée en partie gravée sur des tablettes d'argile en écriture cunéiforme. Elle comporte 12 chants, dont le sujet essentiel est la quête de par le monde du roi légendaire d'Uruk, Gilgamesh, à la recherche de l'immortalité. Le onzième épisode présente des similitudes remarquables avec la Genèse de la Bible à laquelle il est antérieur. Les douze travaux qui inspireront la légende d'Hercule figurent dans cette épopée, où les dieux interviennent dans le vie des hommes. Monstres, rêves, et bon nombre objets magiques enrichissent le récit.
12 Les légendes du roi Arthur (roi de Galles organisant la résistance des Celtes à la conquête faite par les Angles et les Saxons, Vème-VIème siècles) et des Chevaliers de la Table Ronde ont été rédigées par divers auteurs dès le IXème siècle, notamment par les Français Marie de France (Les Lais, XIIème) et Chrétien de Troyes (vers 1135-1183). La Queste del Saint-Graal, roman allégorique et mystique, fut réécrit par un abbé de Citeaux, à partir des légendes celtiques païennes. L'abbé s'efforça de montrer l'effort du chrétien luttant contre le mal et défendant la cause de Dieu contre l'Ennemi, nom donné au Diable au Moyen-Âge, comme dans Le Fléau de Stephen King.
13 Ludovico Ariosto (1474-1533). Dans Rolando Furioso, on trouve notamment un voyage dans la Lune, avec pour monture un hippogriffe, pour ramener une fiole d'élixir qui doit guérir Roland.
14 Edmund Spenser (1552-1599), auteur de l'épopée allégorique La Reine des Fées et d'un poème pastoral Le Calendrier du berger.
15 John Milton (1608-1674), poète anglais, auteur d'oeuvres philosophiques et religieuses, connu par son long poème biblique Le Paradis Perdu, qui est un résumé de sa pensée.
16 John Ronald Reuel Tolkien (1892-1973) fut un spécialiste de littérature médiévale qui adapta pour les enfants les légendes qu'il étudiait en temps qu'érudit, avec Bilbo le Hobbit (1937). Son épopée de fantasy, Le Seigneur des Anneaux, l'occupa pendant de longues années et ne fut publiée qu'en 1954-55. Un grand nombre de manuscrits et d'ébauches diverses ont été réunis par son fils et publiés après sa mort.
17 Cet ensemble de nouvelles, écrites à des dates différentes, pose problème. On sait que c'est en mars 1970 (voir Postface, 252) que King tapa, sur sa vieille Underwood, la ligne aussi célèbre pour ses fans que la première phrase de À la recherche du Temps Perdu pour les proustiens : "L'homme en noir fuyait à travers le désert et le pistolero le poursuivait."Les nouvelles ont été publiées en revue de 1978 à 1981. King affirme dans sa Postface que le dernier segment, qui contient l'essentiel de la métaphysique de la Tour, a été écrit un an et demi avant sa publication, donc en 1980. L'idée de Le Fléau est venue à King en 1975 (qui avait abandonné le roman The House on the value Street, alors qu'il se trouvait à Boulder, où il passa presque un an (épisode longuement raconté dans Anatomie de l'horreur, pp. 202 à 209). Le roman a été publié en 1978, à la date du Pistolero, mais on ne sait pas exactement à, quelle date la nouvelle fut écrite (au plus tard, alors que Le Fléau était bien avancé).
18 Voir le travail de Lou Van Hille sur ce sujet sur le site de Steve's Rag.
19 Les rapports entre la Tour, et l'axe du monde de nombreuses cosmogonies de l'histoire humaine se trouvent sur le même site.
Autres textes sur King et la fantasy :
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