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Le roman de
Nostradamus,
trilogie 2.
Le
Piège
Payot, janvier 2000.
La quatrième de couverture :
Dans un XVIè
siècle minutieusement restitué, où intriguent
Rabelais, Catherine de Médicis, Henri II, Lorenzaccio,
Benvenuto Cellini ou le pape Paul III, une épopée
romanesque pleine de bruit et de fureur qui entraîne le lecteur
d'Aix-en-Provence à Venise, sur les traces du plus
célèbre des devins, Michel de Nostre-Dame, dit
Nostradamus.
Ce qui faisait la richesse et
l'originalité de la série des Eymerich, c'était
un mélange insolite des genres, propre à Evangelisti.
Les repères historiques étaient brouillés, dans
un jeu de correspondances qui plongeaient le lecteur dans la
perplexité et le ravissement. La critique sociale
sous-jacente, la psychologie subtile du personnage principal, les
grands problèmes de l'humanité apparaissant sous une
forme à la fois ancienne, actuelle ou future, avaient du
mordant, suscitaient la réflexion, créaient un ensemble
à nul autre pareil.
Avec ce second roman de la trilogie
de Nostradamus, on ne retrouve malheureusement plus ce cocktail si
excitant. Bien sûr, les problèmes de
société demeurent. Nostradamus, juif repenti, essaie de
s'intégrer le mieux possible dans la société, se
veut conforme. Il refuse d'abord la tentation de franchir avec
l'occultisme les barrières de l'inconnaissable. La
liberté de pensée est toujours un combat, il n'aime
guère se battre, et c'est malgré lui qu'il est
engagé dans un conflit d'importance cosmique.
Ce roman, comme le
précédent, se passe résolument dans la tradition
du roman d'aventures historiques du XIXème siècle et
l'auteur dont il se rapproche le plus est l'Alexandre Dumas de la
Renaissance et des guerres de religion. Cette brillante fresque
historique suscite l'attirance du pittoresque que certaines
périodes de l'histoire appellent plus que d'autres. Cette
époque troublée inspire, qui permet de rencontrer la
démonologie, la sorcellerie, la magie, l'astrologie, les
tractations et les machinations de toutes sortes. Sans compter
l'évolution des théologies et des philosophies chez les
lettrés, qui coexistent avec, pour le petit peuple, les
merveilles réconfortantes, fascinantes, ou terrifiantes, des
religions traditionnelles. La distanciation par rapport aux
événements permet une certaine latitude imaginative,
même si l'auteur s'efforce de procéder à une
information honnête. Evangelisti cite d'ailleurs ses sources en
fin de volume.
Dans ce récit, l'astrologie
tient la plus grande place. Est bien établie la croyance que
les étoiles régissent les caractères et les
affaires des hommes, et mages, astrologues,escrocs et fous de toutes
sortes foisonnent. La croyance est si générale que des
professeurs d'université publient chaque année des
prédictions basées sur l'astrologie, au plus grand
profit des imprimeurs. Nostradamus, féru de la kabbale juive,
de la philosophie occulte européenne et du gnosticisme
alexandrin, a évidemment sa partie à jouer. Il se
révèle en début de ce roman aussi
hésitant, incertain, contradictoire que dans le premier. Puis
peu à peu il s'affirme, et, sous l'influence positive de la
solide Jumelle qu'il a épousée, il trouvera force et
autorité. Evangelisti a présenté Nostradamus
comme le juif en quête permanente de légitimité,
qui a développé des techniques de survivance
l'empêchant de vivre pleinement sa vie.
Plus encore que pour le
précédent, ce roman est un véritable
théâtre d'acteurs, truculent, dramatique, humoristique,
pathétique, allègre, dans un climat de vitalité
et de vivacité surprenantes. Evangelisti fait défiler
quantité de personnages historiques, célèbres en
ce temps, Rabelais, Servet, Ferney, le cardinal cousin du
poète Du Bellay, Le poète l'Aretin, Benvenuto Cellini,
Ignace de Loyola, et bien d'autres. Comme au travers d'une lanterne
magique défilent des scènes dramatiques et des
épisodes cosmiques extraordinaires, des scènes de
charme avec les plus horribles massacres, dans une atmosphère
cruelle, cynique, superstitieuse.
Alors que dans les Eymerich le sexe
apparaissait peu, voire pas, on trouve dans Le Piège
trois caractères de femmes, qui tiennent une grande place,
aussi bien dans l'intrigue que dans l'équilibre du roman.
D'abord la duchesse Caterina sorte de furie, de bête fauve
cachée sous un aspect séduisant. Elle fait penser
irrésistiblement à Milady, l'intrigante sanguinaire des
Trois
Mousquetaires.
Créature diabolique comme les aimaient les romantiques, cette
aventurière attachée aux intérêts du
Saint-Empire manoeuvre par l'intrigue et par le sexe. Froide,
calculatrice, elle est d'abord mue par le désir d'assurer ses
vengeances. Puis, l'âge venant, sa seule passion est de
résister au temps, qui corrompt sa pensée et son
pouvoir, et qu'elle souffre comme une offense. Cette femme
fière et orgueilleuse finit par quémander les signes
d'intérêt les plus pervertis, comme la brutalité
ou l'agression psychologique, pour avoir l'illusion d'exister. Elle
doit assister à la montée en puissance de sa fille,
qu'elle a longtemps traitée comme une gourde, mais qui,
à l'école de sa mère, se révèle
être bientôt à son tour une redoutable
manipulatrice. Elle développe peu à peu son
intelligence des situations, et devient la rivale qui finit par
donner des leçons à sa mère. Et, à
l'opposé, on rencontre à nouveau l'extraordinaire
prostituée Jumelle, jeune femme réaliste et
effrontée, pleine de bon sens, qui aimera et comprendra
Nostradamus, au point de le défendre contre lui-même
tout en le soutenant dans ses entreprises. Jumelle l'amoureuse,
à qui il ne faut pas en compter, et qui, par sa force et sa
robuste façon de vivre, l'emportera sur les puissances
mauvaises.
Si les femmes ne sont pas nombreuses
dans les romans précédents d'Evangelisti,
l'érotisme est pratiquement inexistant. Ce n'est pas le cas
ici où la force de l'amour charnel de Jumelle
s'épanouit en transcendant Nostradamus, le pudique, le
réservé, qui a contribué à la mort de sa
première femme et de ses enfants par manque d'affection.
Nostradamus vaincu par les armes les plus simples de l'amour,
voilà qui est inattendu. Et plus encore la scène finale
: on s'en voudrait de révéler par quels moyens
singuliers Nostradamus viendra à bout d'Ullrich de Mayence,
dans un tourbillon d'événements étranges et de
sexe, à la fois torride et poétique, où le
réservé Evangelisti s'est rattrapé de ses
années d'abstinence érotique. L'amour plus fort que les
manipulations du temps...
Le chapitres les plus singuliers, les
plus surprenants, sont ceux où Nostradamus échoue dans
le monde archétypal à la recherche du démon
Ullrich. Il a peur de lui, mais il finit par l'affronter quand il
appréciera les désastres que ce démiurge peut
causer à l'ordre des choses, en étendant l'absence de
temps sur cette terre où la temporalité existe. Il est
significativement plusieurs fois question de l'année 1999. La
poésie cosmique, la danse des étoiles, les sillages des
astres, tourbillonnants et démentiels, les trois soleils et
l'univers étrange d'Abrasax avec ses sphères où
pénètrent Nostradamus et ceux de son entourage qui,
comme lui, se situent sans mourir en marge du temps, marquent nos
esprits.
Ce second Nostradamus, avec son
mouvement irrésistible, son intrigue nouée d'une poigne
solide, son tourbillon d'aventures qui tient le lecteur, haletant,
jusqu'au dénouement, en passant par des coups de
théâtre nombreux et surprenants, est, à mon sens,
supérieur au précédent.
Roland Ernould ©
2000
1. Le présage
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2..Le
piège
|
3. Le
Précipice
|
Étude : La trilogie
du Roman de Nostradamus : SÉLÉNÉ CONTRE
HÉLIOS.
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Le Présage est
dédié à Michel Zevaco
(1860-1918)
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Livre cité, Louis Schlosser
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Livre cité, Michel de Roisin
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.. du site Imaginaire : liste des auteurs
.. du site Différentes Saisons, revue trimestrielle
.. général
|
Revue Phénix #57, mai 2002.
Numéro spécial Valerio
Evangelisti, avec un chapitre
inédit des Chaînes d'Eymerich, une interview
inédite
et de
nomreux articles de Roland Ernould, l'auteur de ce
site.
Ce
copieux dossier de 140 pages comprend également un
article de Delphine Grépilloux et une bibliographie d'Alain
Sprauel.
Le dessin de
couverture est de Sophie
Klesen
En librairie : 13 ¤. La
revue Phénix
est éditée par la SARL Éditions
Naturellement, 1, place Henri Barbusse, 69700 Givors.
Directeur : Alain
Pelosato.
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