Delphine Lespinasse,

D'UNE TÉNÈBRE À UNE AUTRE

 

Les âges de la vie, la fuite du temps et la mort

dans Pet Semetary et Bag of Bones de Stephen King.

 

Deuxième partie.

LE PASSAGE DU TEMPS

Le temps et ses manifestations 

 

 "Tic-Tac, tic-tac ", peut-on entendre à l'approche du crocodile dans Peter Pan. Celui-ci avait avalé un réveil en voulant dévorer le capitaine Crochet désormais prévenu des intentions de son ennemi par ce bruit incessant, symbole de l'irréversibilité du temps et rappelant, à chaque instant la condition précaire de la vie humaine. Depuis toujours, la fuite du temps a été l'une des principales préoccupations de l'espèce humaine. Les hommes sont souvent blessés par son passage, et tentent de l'analyser afin de mieux comprendre leur condition mortelle. Les écrivains ont donc un rôle dans cette approche, car ils sont les messagers des joies, des peines et angoisses de l'homme. En ce qui concerne Stephen King, nous pourrions dire que son angoisse vis-à-vis de la fuite du temps et de la mort est révélée de façon implicite dans son oeuvre. Sans tomber dans une analyse psychologique, que nous serions d'ailleurs bien incapables de mener, nous tenterons de comprendre ce qu'est la fuite du temps, et en quoi on peut la rapprocher des ouvrages kingiens. Puis, nous verrons qu'elle est sa relation avec l'espace et la nature. Pour finir, nous porterons un oeil averti sur les trois temps du temps : le passé, le présent et le futur.

1. Le Temps ?

1.1. Essai de définition

Les noms " temps, time " proviennent de la racine indo-européenne : " tem " qui signifie " couper ". Cette racine peut également être trouvée en grec : " temno : couper, temonos : l'enclos divin, epitome : le corpuscule indivisible. " (1) Le schème diaïrétique durandien est omniprésent et prouve le décalage qui existe entre l'homme et le temps. Si l'on nous demandait si l'on savait ce qu'est le temps, nous répondrions par l'affirmative, et pourtant définir le temps de façon précise relève de la gageure. C'est une notion abstraite et inapprivoisée, qui fuit. Les témoins de son passage sont les jours, les mois, les saisons... Contrairement aux animaux, l'homme a besoin de matérialiser le temps, et le fait grâce aux clepsydres, aux cadrans solaires, aux horloges, aux montres. Pour diviser un jour, on utilise arbitrairement les heures, les minutes, les secondes. Devant l'internationalisation actuelle, il existe une tentative d'instauration d'une nouvelle unité du temps sur le Web : le beat : 1000 beats = 24 heures. Le but de cela est d'annuler le décalage horaire : un new-yorkais pourra rencontrer, par ordinateur interposé, un japonais à 45 beats, sans se soucier des heures respectives des deux pays. En bref, malgré l'omniprésence du temps, il est si abstrait que l'homme, ayant besoin de repères, doit le matérialiser. C'est sans doute le plus fidèle compagnon des êtres vivants, car il ne les quitte jamais. Il peut être un allié, permettant d'acquérir de l'expérience, mais il est plus souvent considéré comme un ennemi, car il est la cause du vieillissement, et de la mort.
Définir le temps est une mission quasi-impossible, c'est la raison pour laquelle, nous allons parler de ses principales caractéristiques.

1.2. L'irréversibilité

La première observation que nous aimerions faire, concerne le poids de la négativité de ce subtantif : IR-réversibilité. Le préfixe négatif témoigne d'un regret, d'une déception. L'impuissance de l'homme est immense face à cette caractéristique du temps. Rien ne peut se réitérer en étant les deux fois la première. Même le processus de résurrection ne vainc pas : le ressuscité revient soit, mais rien ne peut effacer le fait qu'il ait appartenu à un moment donné au royaume des morts. Les aptitudes physico-psychiques du retour de Gage montrent la véracité de cette affirmation. La notion d'irréversibilité est scandaleuse pour l'esprit humain, mais elle est, et rien ni personne ne peut l'éradiquer.
"
L'homme est un irréversible incarné : tout son être est destiné à devenir [...] et par surcroît il devient, ( advient, survient, quelquefois même se souvient), mais il ne revient jamais. " (2)
Si le temps est si difficile à définir, en dépit de ses principales caractéristiques, c'est parce que tout est relatif.

1.3. Le temps objectif et le temps subjectif

Le temps objectif est celui que nous avons tenter de définir plus haut : c'est le temps arbitraire. Il existe aussi, un temps subjectif, car chacun a sa propre notion par rapport à ce qu'il est en train de vivre. Ainsi, le temps peut passer vite si l'on profite du moment présent, mais si l'on s'ennuie, le temps donne l'impression de s'être arrêté. La théorie einsteinnienne de la relativité est transposable au passage du temps. Le temps peut aider quelqu'un à oublier, mais, Louis pense que : " [d]ix ans, cela fait un sacré bout de temps, mais ça n'avait pas suffit à atténuer le goût nauséabond qui lui avait rempli la bouche au moment où [le père de Rachel] avait glissé une main sous le revers de cette grotesque veste d'intérieur pour en extraire le chéquier qu'elle dissimulait " (3), afin de lui demander de s'éloigner de sa fille. Irwin Goldman est un vieil homme machiavélique, et Louis ne lui pardonnera pas ce geste. Le marché qu'il a proposé à Louis a été un tel choc que Louis a encore le souvenir du " goût nauséabond " alors que cette sensation est sensée être éphémère. Après la mort de Gage, Louis n'assume pas la responsabilité supposée lui revenir de consoler son épouse. Tout le monde attend de lui qu'il fasse un geste réconfortant envers Rachel après qu'elle a éclaté en sanglots : " [a]u bout d'un moment (qui fut sans doute très bref en durée réelle mais que Louis perçu comme atrocement long aussi bien sur le coup qu'en y resongeant par la suite), Steve passa un bras autour des épaules de Rachel et il l'étreignit tendrement [...] " (4) La relativité du temps est explicite dans cette citation et montre bien la différence qui existe entre le temps arbitraire, subjectif, celui de l'horloge, et le temps subjectif : celui de l'horloge personnelle de chaque individu.
Un autre aspect du temps subjectif peut être ressenti lors de moments de suspense et quand les personnages sont impuissants face aux événements. Tel est le cas de Mike lorsque Rogette Whitmore a kidnappé Kira. Il se demande : "
A combien de temps cela remontait-il ? A une éternité [avait-il] l'impression, mais quelque chose [lui] disait qu'il s'était en réalité écoulé peu de temps, moins de cinq minutes, sans doute. " (5) Mike a si peur qu'il a l'impression que le temps s'est arrêté. Rachel, lorsqu'elle revient à Ludlow a le même sentiment que Mike, elle se demande si " cette nuit finirait jamais ". (6)
Le temps subjectif appartient à chacun d'entre nous. Qu'il défile ou passe lentement, il reste omniprésent.


Et il est partout.

2. Le temps se manifeste dans l'espace et dans la nature

 

2.1. L'espace et le temps

Nous avons vu auparavant que le temps était si abstrait que l'homme ressentait le besoin de le matérialiser. L'espace peut être une métaphore du temps. Michel Siffre qui a passé trois mois dans une grotte pour des expériences, parle de " désorientation temporelle " (7) . Dans Sac d'os, la retraite de Mike à Sara Laughs apparaît comme une retraite temporelle. Métaphoriquement parlant, cette maison est située dans le passé. Son déménagement est un symbole du retour introspectif aux racines de son existence.
"
C'est le souvenir de cette vie maintenant disparue qui augmente la sensation de silence et de mort que l'on connaît actuellement lorsque l'on franchit le seuil. La maison vide est alors une fenêtre avec vue sur le passé, un rappel constant de faits révolus, un appel de la fin inéluctable qui attend ses visiteurs. Si cette morbide prise de conscience est en soi source d'une crainte diffuse, ne nous étonnons pas qu'une maison qui évoque des souvenirs de meurtres ou de suicides soit à fortiori cause d'une grande terreur. " (8)
En ce qui est de
Simetière, nous pouvons établir un schéma montrant en quoi il existe un lien spatio-temporel.

Le cimetière MicMac = LE PASSE

La maison des Creed = LE PRESENT

La maison des Crandal = LE FUTUR

Ce qui ressort de ce schéma, c'est la matérialisation verticale du temps. L'irréversibilité temporelle est indubitable : le retour au cimetière Micmac est donc contre nature, car c'est une tentative de retour au passé, de renversement de l'irréversible. Et cette transgression mènera les Creed à leur ruine.

2.2. Le temps et la nature

Qui n'a jamais céder à comparer les âges de la vie aux saisons ?

printemps été automne hiver
enfance âge adulte vieillesse mort

Pourtant, cette comparaison s'achève avec le décès de l'homme. La supériorité de la nature ne peut être mise en cause. Après l'hiver, elle revient à la vie, le mythe de l'éternel retour est présent :

ETE

PRINTEMPS AUTOMNE

HIVER

Dans Simetière, nous voyons qu'une " journée de mars [...] s'échinait à se parer des éclatantes couleurs d'avril [...] " (9) La nature se régénère, ressuscite en quelque sorte alors que l'être vivant une fois mort ne peut revenir. Mais, une fois mort, il y a une certaine harmonie entre l'homme et la nature. Les rites funéraires d'ensevelissement renvoient le défunt à la matrice originelle, à la terre mère. La nature se nourrira ensuite de la décomposition organique, et transformera le corps animal mort en végétal. Cependant, en règle générale la relation entre l'homme et la nature est chaotique.
La fuite du temps laisse ses empreintes dans la nature, sur ce qui demeure. A son arrivée à Sara Laughs, Mike voit "
[...] que la mousse commence à envahir les rondins qui constituent le corps central du logis, et que trois grands tournesols ont poussé entre les planche du petit perron donnant du côté de l'allée. L'impression générale n'est pas de la négligence, cependant, mais de l'oubli. " (10) Nous comprenons bien ici que l'environnement est le témoin de la fuite du temps.
L'harmonie entre la fuite du temps et la nature est révélée dans la citation suivante :
"
Les arbres se pressent et se penchent sur le chemin. Le ciel crépusculaire se réduit à une fente entre les cimes. [Mike] va bientôt voir scintiller les premières étoiles. Le soleil est couché. Les grillons stridulent. Les plongeons poussent leurs cris sur le lac. De petites bestioles - sans doute des tamias, ou des écureuils - font bruire les feuilles, dans le bois. " (11)

Les manifestations du temps dans l'espace et la nature sont plus ou moins évidentes, mais elles témoignent de la condition mortelle des hommes.

3. Le passé, le présent et le futur

3.1 Le passé


La vie est cruelle souvent les "
joies [sont] très vite effacées par d'inoubliables chagrins ". (12)
Il peut sembler préférable de ne pas réveiller les fantômes du souvenir. Nous traiterons cela de façon plus détaillée dans la partie sur l'immortalité. Nous pouvons dores et déjà affirmer que les conséquences d'une mort violente peuvent mener le défunt à l'errance fantomatique.

3.2. Le présent

Le passé est la racine du moment présent. L'arbre généalogique est un bon exemple de cette affirmation. Mike découvre qui sont ses ancêtres après une longue investigation. Il prend ainsi conscience de son lien au présent. Avant de se rendre compte de cela, il ne parvenait pas à vivre l'instant présent car il était au prise entre un passé et un futur sombres. Il était de ceux qui, " marqués par la mort du passé, [...] anticipe[nt] affectivement la disparition du présent éventuel et projette[nt] sur le futur le néant du passé ". (13)

3.3. Le futur


Parmi les projets qui peuvent être faits pour le futur, il y en a un auquel on ne veut penser et qui pourtant est inéluctable : c'est la mort. "
Toutes les heures blessent, la dernière tue. " (14) Le futur contenant l'inconnu, notre mort peut donc prendre le visage de tous les dangers. Ce qui est devient, nécessairement. Et Mike, après la perte de sa femme a beaucoup de mal à se projeter dans le futur. Sa rencontre avec Mattie, et Kira lui permettra d'y parvenir.


Après avoir essayer de définir le temps, nous avons vu en quoi cette notion était liée à l'espace et à la nature. Nous avons, ensuite traité des trois temps du temps séparément dans un souci de clarté et de simplification, et surtout afin de mieux comprendre l'interpénétration du passé, du présent et du futur. La relation entre l'homme et le temps n'est pas satisfaisante : le passé est mort, le présent passe trop vite, et le futur est associé à l'inconnu.

"Arrétez toutes les horloges ". (15) Ce fantasme de puissance par rapport au temps qui passe ne sera sans doute jamais assouvi. La volonté de lutter contre la fuite du temps et la mort est quasi-omniprésente chez l'homme, et particulièrement à notre époque. A l'aube du troisième millénaire (16), le comportement de nombreux individus est influencé par la peur millénariste. Quel pouvoir avons-nous, pour lutter contre le temps de façon individuelle ? Nous tenterons de cerner cette question avant de considérer le rôle de la science et de la médecine. Enfin, nous nous attarderons sur les différents refuges qui existent.

La lutte contre le temps

 

1. Quel pouvoir avons nous ?

1.1. Pouvoir physique

Paradoxalement, le suicide peut être une façon de lutter contre la fuite du temps. En commettant cet acte, l'homme devient maître de sa longévité. Max Devory est un personnage machiavélique. Son nom apporte d'ailleurs une indication non négligeable sur sa personnalité. Par sa sonorité on peut le relier au verbe " dévorer ". Dans la version originale, d'ailleurs, son nom de famille est : " Devore ", mais cet indice aurait été trop explicite dans la version française et le traducteur à transformer le nom en " Devory " lui donnant ainsi une sonorité anglophone, et masquant un peu l'intention de King. Nous reviendrons ultérieurement sur l'importance symbolique de ce nom. Devory sera capable d'entreprendre tout ce qui est en son pouvoir, tant que la fin justifie les moyens. C'est une des raisons pour lesquelles il s'est suicidé, " [la] tête dans un sac plastique et le corps plongé dans un bain d'eau tiède. " (17) Le suicide est ici à considérer comme la mort de la Mort. " Il existe des suicides de vieillards [...] comme si ces vieillards se tuaient pour ne pas mourir. "
Le cas de celui qui résiste aux pulsions suicidaires est aussi non négligeable. Louis ne se suicide pas à la fin de
Simetière, mais il se tue de façon indirecte. Il enterre le corps de son épouse dans le cimetière Micmac, et attend son retour alors qu'il est conscient du danger. L'auteur laisse le lecteur libre d'imaginer le monstre de Rachel en train de tuer Louis. Mais Simetière a été façonné afin que ce dénouement vienne à l'esprit du lecteur. Dès la rencontre avec le fantôme de Pascow, nous savions que le docteur courait à sa ruine : il allait se détruire après avoir détruit sa famille. Au retour de son épouse, la calligraphie utilisée pour " Mon chéri " (19) montre au lecteur que Rachel est désormais possédée et justifie l'idée que l'on a de la mort imminente de Louis. Dans le film de Mary Lambert, le spectateur voit le cadavre mutilé de Rachel revenir prendre Louis dans ses bras avec une tendresse infinie. Nous pouvons alors être enclins à penser que Louis a réussi : il avait enterré sa femme assez rapidement pour qu'elle ressuscite sans séquelles morales. Et pourtant, la caméra fait un zoom sur la main de Rachel montrant ainsi le poignard qu'elle tient. La fin du film est, par conséquent, plus explicite que celle du livre, et l'on pourra se demander en quoi le cinéma fantastique enlève l'effet-fantastique ?
Les rituels ont aussi une importance cruciale pour faire accepter l'inacceptable. Leur fin est également d'accompagner les morts dans leur nouveau royaume. Le passage qui exemplifie au mieux cette prise de position est celui où Louis met Church en terre.
"
Il passa dix minutes à empiler l'une sur l'autre les grosse pierres que Jud lui passait. A la fin, un tumulus modeste, de forme conique, surplombait la tombe de Church, et Louis, malgré sa lassitude, en éprouva une pointe d'euphorie. La vue de ce tumulus dressé parmi les autres dans la clarté des étoiles lui donnait un sentiment d'accomplissement. " (20)
La forme du cairn peut être comparée à celle d'une pyramide, et nous développerons plus loin la valeur symbolique de cette forme. Nous pouvons déjà remarquer que ce rituel est fait pour permettre aux morts de ressusciter, comme si le temps passé, et l'énergie dépensée pour la construction de cette pyramide miniature devaient être récompensés par le retour du défunt. Les rituels se teintent ici de la couleur de la lutte contre la fuite du temps, car grâce à eux, l'homme peut faire perdurer une image concrète du mort.
Ces façons de lutter sont, somme toute, relativement physiques ; il existe des manières plus spirituelles.

1.2. Pouvoir spirituel


La passion peut avoir une certaine emprise sur le temps. Le passionné, tant que l'objet de sa passion vit, profite du moment présent, sans se soucier du passé et du futur. Il croit aux rêves et à l'éternité. L'amour refuse la fuite du temps en ce sens qu'il montre que le passé ne meurt pas, que l'absent est toujours présent, d'une certaine façon dans la tête et le coeur du survivant. L'amour perdure au-delà de la mort dans
Sac d'os. A la mort de Jo, Mike refuse de vivre dans le présent car il contient la mort de la personne aimée. Ce n'est qu'après sa rencontre avec Mattie que son attitude vis-à-vis du présent change : il accepte de ne plus vivre dans le passé.
L'humour noir est aussi une méthode pour dédramatiser la fuite du temps. Ce n'est souvent qu'un masque voilant de profondes cicatrices. Nous pensons que Louis est possédé par le cimetière indien lorsqu'il exhume son petit garçon, car l'humour noir qu'il est très déplacé.
"
Je viens d'apercevoir le gamin le plus vieux et le plus lourd du monde en train d'escalader la clôture du cimetière [...] Il a dû se dire qu'il était temps d'enterrer sa vie de garçon. Ou alors c'est qu'il avait envie d'une petite bière. [...] ça tombe sous le sens. Je suis sûr que c'est une affaire qui mérite d'être creusée. " (21)
Tous les jeux de mots sont morbides, et participent de l'ambiguïté qui met en emphase l'état d'esprit de Louis. Dans nombre de situations, l'humour est une façon d'oublier la cruauté de la fin de la vie.
"
L'humour noir n'est-il pas parfois [...] une sorte de pirouette devant l'épaisseur humaine de la mort ? Le jeu de la mort et du sourire auquel on se livre, n'est-il pas un recours pour camoufler la peur de la mort et le désespoir qu'elle inspire ? " (22)
Le sommeil est une autre façon de passer dans un monde où le temps ne règne pas, et à travers les rêves, l'inconscient peut se révéler. Le rêve est nécessaire, un homme qui ne rêverait pas deviendrait fou et mourait. Dans ses rêves, Mike retourne au coeur du passé, et ressent un décalage spatio-temporel, il ne se demande pas où il est mais quand. Le passé semble être un refuge, mais se révèle être un piège. En bref, les rêves permettent de s'évader de la tragédie existentielle.
La littérature permet aussi d'échapper à la fuite du temps. Qu'il soit ou non omniscient, le lecteur voyage dans d'autres lieux, dans d'autres époques et avec d'autres personnes, en demeurant dans la même localisation spatio-temporelle. Stephen King utilise cela, et créé un pont virtuel reliant ses oeuvres entre elles. Il y a ainsi une connexion à établir entre
Cujo et Simetière ; La part des ténèbres, Insomnie et Sac d'os. Jud permet d'établir le premier lien :
"
On a eu pas mal d'alerte à la rage dans le Maine ces temps derniers. Il y a deux ou trois ans, dans le sud de l'Etat, un gros Saint Bernard l'a attrapée et il a tué quatre personne. " (23)
Dans
Sac d'os, Mike fait référence à un écrivain dans lequel nous reconnaissons Thad Beaumont. Nous apprenons qu'il s'est suicidé. Mike rencontre aussi un personnage du nom de Ralph, qui lui dit qu'il a mauvaise mine et que,
"
[s]i c'est de l'insomnie, [il] peu[t] sympathiser [...] (sic.)" (24)
Ces digressions sont très instructives, et intéressantes pour le lecteur assidu. Il prend ainsi conscience que les personnages continuent à exister après qu'il a fermé le livre. Le temps est assassin dans le monde romanesque crée par King.
L'écrivain aussi échappe au temps. Grâce à ses oeuvres, il est immortalisé, et laisse son empreinte dans l'histoire.
"
Grâce aux mots et aux images, à la vivacité des évocations, le lecteur recréer une réalité ancienne. Celle-ci prend vie, se renouvelle inlassablement par la lecture, se revivifie, comme par opération magique. Cette réalité échappe ainsi au temps et à son pouvoir d'oubli. Enfin, la littérature a le pouvoir d'immortaliser. " (25)
Pour Mike, l'écrivain peut être comparé à une femme enceinte. Il pense que l'écriture est comparable à l'accouchement, aux "
angoisses de la création multipliées par dix... des douleurs d'un accouchement prématuré... " (26) La naissance est explicite bien que métaphorique, et plus tard, Mike a " huit ou neuf mois avant que Harold et Debbie ne se mettent à [le] harceler pour [son] roman suivant. " (27) La précision du nombre de mois qu'il lui reste véhicule une connotation évidente : les livres immortalisent leur auteur de la même façon que leur progéniture.
Les enfants sont une partie des ancêtres, celle qui perdure pour témoigner du passage d'un être humain sur la terre.
"
Pour que la mort ne signifie pas une rupture totale, il importe que les hommes aient une descendance, [...] dans [laquelle] ils continuent à vivre. " (28)
Le fils est souvent considéré comme crucial, car derrière lui se profilent les symboles de reproduction et de la continuité du nom. Ce peut-être une des causes qui poussent Louis à commettre l'irréparable afin de perpétuer son sang. L'importance que revêt l'immortalité à travers la reproduction est implicite mais indéniable chez Louis : il refuse que Church se fasse castrer. Cette mutilation apparaît aux yeux de Louis comme la fin d'une propension à l'immortalité. Dans
Sac d'os, l'immortalité par la progéniture revêt deux formes. Kira est le témoin du passage éphémère de ses parents. Sa mère, à l'agonie, en est consciente : " ...Ki... Ki...', Ce furent ses dernières paroles en ce bas monde. " (29) L'autre forme d'immortalité est indirecte, et incluse dans les liens sanguins qui relient les enfants aux ancêtres. Le fantôme de Sara Laughs utilise cette connexion à des fins vengeresses.


L'être humain semble avoir besoin de laisser une empreinte de son passage sur terre. La volonté de perdurer est supérieure aux moyens qu'à l'homme pour lutter contre le temps. Le refus de la réalité temporelle fait partie de la nature humaine et se transcrit dans un sentiment d'impuissance. Par conséquent, l'homme peut être enclin à chercher des solutions dans la science.

 

2. La science et la médecine

2.1. Les expérimentations


Dans
Simetière, le personnage principal est le docteur Creed. Il rappelle étrangement le docteur Frankenstein, pour qui les expériences comptent plus que tout. L'aspect rationnel de son travail devrait mener Louis à accepter la mort comme il le fait au début de l'histoire quand il explique à Ellie qu'elle fait partie intégrante de la vie. Cependant, plus tard, les rôles sont inversés et l'enfant devient plus sage que son père. Ellie se rappellera toujours de Gage, il restera dans son coeur. Le souvenir et la dignité sont certainement les meilleures façons d'appréhender la mort, mais Louis commet l'irréparable. Le prix qu'il aura à payer pour cette
transgression suprême sera la destruction de sa famille et des personnes qui lui sont chères.

2.2. Lorsque la médecine dépasse les limites.


La médecine à outrance peut être à dénoncer, lorsque l'excès de zèle de certains docteurs est supérieur au respect de la dignité des mourants.
"
Le malade doit être soigné jusqu'à l'extrême et suprême limite et jusqu'au dernier soupir et jusqu'à l'ultime battement de coeur [...] comme s'il pouvait non pas revivre mais survivre. " (30)
Cette dégradation doit être encore plus difficile à supporter qu'une mort violente, car les proches voient la personne qu'ils aiment se faner jour après jour. Tel est le cas de Zelda, la soeur de Rachel, atteinte d'une méningite cérébro-spinale. Lorsque Rachel parle à Louis du stade final, deux questions sont soulevées : la médication outrancière et l'euthanasie.
"
Quand ses douleurs sont devenues vraiment sérieuses, on s'est mis à lui donner des drogues ; d'abord des antalgiques relativement anodins, puis de la morphine, à doses de plus en plus élevées, qui auraient sans doute fait d'elle une junkie si elle avait survécue. Mais bien sûr, tout le monde savait qu'elle ne survivrait pas. " (31)
Comment peut-on vouloir faire survivre quelqu'un à tous prix ? En dépit de ce que peut endurer le malde, les proches ? Au lieu d'une marche de la vie, à la mort, c'est la mort qui empiète sur le territoire de la vie. La maladie et la mort de Zelda sont devenues tabous, car ses proches espéraient que la mort la délivre, et les délivre, de tant de souffrances.


Quand la mort frappe, il ne reste que le souvenir.

3. Le souvenir, la doctrine du " carpe diem ", et l'espoir

3.1. Le passé et le souvenir

Lorsque la mort d'un proche demeure insupportable malgré le temps qui passe, le survivant peut trouver refuge dans le passé : avant le moment où le présent est devenu synonyme de douleur. Malgré tout, les jours précédant cette perte irréversible peuvent paraître emprunts d'une grande tristesse, car " [i]l n'est pas de plus grande douleur que de se souvenir des jours heureux dans la misère " (32) . Les objets qui ont appartenu au défunt sont enclins à rouvrir des cicatrices trop mal refermées, et à faire resurgir les souvenirs de joies trop vite effacées. Lorsque Mike retourne à Sara Laughs, il se " rendi[t] compte à quel point il avait redouté cette arrivée. Redouté de voir [son] chagrin ravivé devant les témoignages de la vie brusquement interrompue de Johanna. " (33)
En gardant à l'esprit que "
le passé est le siège des heures heureuses " (34), on peut comprendre combien le retour à la réalité peut être difficile pour celui qui rêve du temps où il était heureux. Tel est le cas de Louis :
"
[c']est le 24 mars 1984 que Louis Creed connut sa dernière journée de véritable bonheur. Sept semaines séparaient encore les Creed des événements tragiques que le destin tenait suspendus au-dessus de leurs têtes comme la lame d'une gigantesque guillotine [...] " (35)
Louis peut donc tenter de se remémorer cette journée lorsqu'il est triste, et trouver ainsi un refuge dans le souvenir. Mais, le retour à la réalité n'en est que plus cruel, et cela le mènera à transgresser les lois de la nature. Il cédera à la tentation de ramener le passé.

3.2. " Carpe Diem "

Il est très difficile de profiter du moment présent. Il part dès qu'il arrive, et ne prend jamais le temps de s'arrêter. Il faudrait parvenir à faire sienne chaque minute qui passe, la faire sienne comme si c'était la dernière. Les regrets et l'espoir sont des stratégies employées pour refuser la fuite du temps, mais elles ne permettent aucunement d'appliquer le fameux " carpe diem ".

"Imaginez le temps accéléré. Pfout, vous naissez, éjectés de votre mère tel un vulgaire noyau de cerise. Tchac, tchac, vous vous empiffrez de milliers de plats multicolores, [...] Paf, vous êtes mort.
Qu'avez vous fait de votre vie ?
Pas assez, sûrement.
Agissez ! Faites quelque chose, de minuscule peut être, mais bon sang ! Faites quelque chose de votre vie avant de mourir
" (36)

Si, à sa mort, quelqu'un a l'impression que sa vie n'était pas assez remplie, c'est probablement, car il n'a pas profiter du jour présent. Vivre le moment présent sans regretter les erreurs du passé correspond quasiment à faire un pied de nez à l'irréversibilité du temps. Les moments où Louis et Mike ont été le plus heureux sont, à posteriori, ceux pendant lesquels ils ont inconsciemment appliqué la doctrine du " Carpe Diem ".

3.3. Le futur et l'espérance


Avant d'étudier Kira, nous pouvons remarquer que Mattie était sensée avoir la vie devant elle. Après le premier baiser entre elle et Mike, ce dernier pense que " après
devenait une possibilité très réelle " (37). Tout d'abord, on peut penser que leur relation est faite pour durer, mais si l'on interprète cette citation, on est mené à supposer qu'il reste de nombreuses années à Mattie.
Dans l'épilogue, nous apprenons que Mike a engagé une procédure juridique afin d'obtenir la garde de Kira, et cela montre en quoi Mike arrive désormais à se projeter dans le futur. L'attente est difficile pour lui car rien n'est sûr, mais il espère néanmoins. "
L'espérance, fleur fragile, est une humble chance blottie dans la région des possibles. " (38)
A la mort de Gage, Louis essaie de mettre en oeuvre toutes ses connaissances afin qu'elles saillent à son projet. Il sait que Gage ne reviendra pas sans séquelles, il est peut-être même conscient que son fils sera devenu un monstre. Néanmoins, Louis tente de se persuader qu'il détient la clé de son futur succès : "
l'aventureuse espérance, la très aléatoire, n'a pas besoin de tant de garanties : une chance sur cent suffit à justifier son risque et le pari méritoire qui en découle " (39). Louis n'a pas la moindre chance de parvenir à ses fins, mais il va la tenter tout de même, et transgresser les lois de la nature. Malheureusement, Chronos et Thanatos sont toujours les grands vainqueurs.


La lutte contre le passage du temps paraît vaine. Les pouvoirs individuels qui permettraient de lutter sont illusoires, et suffisent à peine à masquer la réalité de la vie : sa fragilité. La science et la médecine viennent secourir l'homme, mais elles peuvent être excessives. Le meilleur remède pour lutter contre la fuite du temps est de profiter de l'instant présent. Mais c'est aussi le plus difficile à appliquer, car pour y parvenir, il faut arriver à ne pas regretter. La vie est une rose qui se fane, et le temps emporte tout sur son passage : rires, joies, pleurs et peines.

"Regrettant votre amour et votre fier dédain
Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain :
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie.
" (40)
"
J'ai beau m'dire que rien n'est éternel,
J'peux pas trouver ça tout naturel
. " (41)

 

Tels sont les mots d'un fossoyeur, un homme confronté chaque jour à la fin irréversible des êtres humains. La fuite du temps et la mort sont inconcevables pour l'esprit humain, mais ils font partie de la vie, et nous y sommes tous soumis. Nous comprendrons que les regrets sont le lot de tous les jours, avant d'analyser les différentes fuites de l'homme par rapport au temps. Pour finir, nous verrons en quoi le temps emmène l'oubli.

 

La soumission au temps

 

1. Hélas ! Le temps des regrets

1.1. la nostalgie


Le passé ne reviendra jamais. L'homme, confronté à ce fait peut être enclin à ressentir une certaine tristesse et des regrets pour les temps révolus. Le passé est idéalisé simplement parce qu'il est passé. Malheureusement, les moments pendant lesquels l'homme sombre dans la nostalgie ne reviendront pas non plus et sont ainsi gaspillés. Certains se plaisent dans la nostalgie car cet état est relativement proche de la méditation. Mike, par contre, parle des "
années vides [...] passées sans Johanna, sans amis, sans [son] travail. " (42) Aussi triste que cela puisse paraître, Mike doit tourner la page de l'histoire d'amour qu'il a vécu avec Jo. " Le passé est objet de nostalgie parce qu'il est, si médiocre soit il notre passé, notre irremplaçable passé. " (43)
Les regrets sont pires encore que la nostalgie. Le sentiment de culpabilité engendre des remords, c'est un véritable poids moral qui entraîne le rejet de l'irréversible. Pourtant, telle est la vie des hommes : allant du passé au présent, et du présent au futur. Les regrets et les remords engendrent une douleur aussi lourde à supporter qu'elle est inutile. Après la mort de Gage, Louis se remémore la façon dont il a raté son fils au moment crucial :
"
Il vit ses doigts. Ses propres doigts à lui, Louis. L'extrémité de ses doigts avait effleuré le dos du blouson de Gage. Et puis le blouson de Gage s'était volatilisé. Et Gage s'était volatilisé aussi. " (44)

1.2. Hélas !

Ce mot résume à lui seul toute la détresse d'un homme face à la mort de son enfant.
"
Hélas ! Ce petit mot, en même temps qu'il exprime l'impuissance de l'homme devant l'insoluble, traduit la vanité d'un effort voué dès le commencement à l'échec : toute tentative pour revivre le passé échappe à l'inhumaine force des choses [...] Hélas !... Ce mot qui ne dit rien et qui dit tout sans rien expliquer, ce mot qu'on prononce avec un soupir [...] Ce petit mot si court qui en dit si long. " (45)
Au moment où Mike est face à Mattie mourante, il pense : " Hélas
est le mot qui correspond, dans les grilles de mots croisés, à un mot de cinq lettres exprimant un grand chagrin. " (46)
Après la soudaineté de la mort, et les cicatrices qu'elle laisse, il ne reste plus que les rituels, dont la fonction euphémisante est incontestable. Ils servent en quelque sorte à dédramatiser le passage entre l'ici-bas et l'au-delà.

La nostalgie engendrée soumet l'homme au passage du temps, et l'oblige à admettre que ce qui est peut un jour ne plus être.

2. D'autres fuites

2.1. La fuite dans l'intemporalité


L'intemporalité peut être un refuge pour celui qui refuse la réalité de la vie. Le retour de Mike, à Sara Laughs n'est pas seulement une allégorie d'un retour au passé, mais aussi une soumission au passage du temps. Pendant le rêve, le temps n'est plus à l'oeuvre, comme si la nuit mettait un flou sur la temporalité. Le parallèle entre le rêve de Mike et son retour à Sara Laughs est évident, et les différences qu'il perçoit sont basées sur le phénomène freudien d'"
inquiétante étrangeté ".

2.2. La faiblesse de l'homme est révélée


Lorsque Mike pénètre dans sa maison, il est conscient que "
Brenda Meserve avait fait du bon boulot - et un boulot humain - en faisant disparaître ces traces et ces signaux, mais elle n'avait pas pu tout repérer. " (47) Le décalage, qui existe entre la personne décédée qui n'est plus et les objets qui lui ont appartenus et qui demeurent dans un temps universel, est douloureux.
L'homme est prisonnier de la roue du temps. Afin de le délivrer, même la mort n'est pas suffisante, car le passage du temps se manifeste alors par la décomposition. La plupart des êtres humains voudrait une longévité sans les inconvénients de la vieillesse. Le temps passe, emportant l'enfance, l'âge adulte, et la vieillesse de façon inéluctable. Au moment de la crise cardiaque de Norma, Louis se rend compte qu'elle "
avait jadis été une fille de dix-sept ans avec des seins que guignaient tous les garçons du voisinage, trente-deux dents fermement plantées et sous sa robe à corsage monté un petit coeur gonflé à bloc ". (48) Cela montre combien la vie humaine est fragile et éphémère.

La vie passe, les être humains sont emportés dans la roue du temps, jusqu'à ce que l'oubli remplace le souvenir.

3. L'oubli

3.1. Le temps efface tout


Nous pouvons trouver cette idée dans les deuils symboliques à travers lesquels les parents doivent passer. "
Durant la première quinzaine de classe, une rumeur alarmante s'était répandue à travers toute la maternelle : le père Noël n'existait pas ! " (49) Les parents doivent tourner les pages du livre de l'évolution de leurs enfants, les bébés grandissent et deviennent adultes à leur tour. " Le jour vint aussi où Gage dut subir la première coupe de cheveux de sa vie, et lorsque Louis s'aperçut que les cheveux de son fils repoussaient plus foncés, il affecta d'en plaisanter, mais, au fond de son coeur il en éprouvait une peine poignante. " (50)
Le pire de tout est peut-être que la douleur passe aussi. Il peut sembler paradoxal d'affirmer qu'il est triste de voir les souvenirs des mauvais moments s'effacer, et pourtant, cela montre combien le temps est fort : il efface tout sur son passage même ce qu'on se plaisait à croire voué à l'éternité. Quatre ans après la mort de Jo, Mike tombe amoureux de Mattie et parvient à faire son deuil.

3.2. Même la passion est vouée à l'échec


Même après la mort, l'infidélité apparaît comme un échec. Après que Jo a eu une rupture d'anévrisme et qu'elle en est morte, Mike souffre de la panne de l'écrivain. La femme est souvent la source d'inspiration, la muse de l'écrivain, et Mike s'aperçoit que "
ce n'est pas le blocage [qu'il] redoute, mais de défaire le blocage ". (51) L'oubli est la pire chose qu'il puisse arriver à un couple, mais le temps est assassin. Combien de temps l'amour peut-il durer lorsqu'une partie du couple n'est plus ? La date anniversaire du départ d'un être cher, ou du décès de la personne aimée, est sensée rouvrir les blessures, mais il arrive que le survivant ne soit plus aussi triste.

"Je mouillais mon mouchoir en souvenir de vous...
Or, nous y re-voilà, mais je reste de pierre,
Plus une seule larme à me mettre aux paupières
Le vingt-e-deux septembre aujourd'hui je m'en fous
Et c'est triste de n'être plus triste sans vous.
" (52)

2.3. Certaines fois, l'oubli est préférable


Il faut laisser les morts reposer en paix. Voulant les ressusciter, Louis fait revenir des monstres, et les conséquences sont terribles.
Pendant son investigation, Mike est prévenu par le gardien de la maison. La citation qui suit a une connotation biblique qui implique que fouiller dans le passé relève de la transgression.
"
Pour le salut de votre âme, faites machine arrière et laissez les choses aller leur cours. C'est de toute façon ce qui arrivera, que vous le vouliez ou non. Ce fleuve -là est presque arrivé à la mer ; ni vous, ni vos semblables ne pourront y faire barrage. Laissez tomber, Mike. Pour l'amour du Christ. " (53)
A ce niveau, la soumission à la fuite du temps apparaît être une question de vie ou de mort. Il ne faut pas réveiller un chien qui dort. Malgré cela, Mike va mener son enquête et découvrir la raison de la mort de sa femme, de Mattie, et la cause de tous ses maux. Même si, à première vue, il semble préférable de laisser les morts reposer et de tenter d'oublier, c'est la lutte qui va sortir gagnante, mais pour cela, des forces surnaturelles ont dû intervenir.

Symbolisme.

Le plus souvent, les regrets, et les remords accompagnent l'homme à travers son existence. La fuite dans l'intemporalité nous a montré combien la condition humaine était précaire. Nous avons aussi vu que des forces surnaturelles étaient requises pour que l'oubli ne soit pas le grand vainqueur. Sinon, il est inexorable quoi que l'on pense, quoique l'on fasse, quoique l'on dise.
L'imagination est l'une des seules caractéristiques, avec la conscience de la fuite du temps et de la mort qui différencie l'homme de l'animal. Les ouvrages sélectionnés pour cette étude vont nous permettre de voir en quoi la dimension surnaturelle peut véhiculer une richesse symbolique indubitable. En pénétrant dans le monde imaginaire, nous pourrons mieux appréhender l'inconscient de l'auteur. Nous verrons aussi le symbolisme végétal et animal, avant d'arriver aux symboles " par excellence ". Avant de développer ces deux parties, nous entamerons un voyage dans l'imagination humaine.

1. L'imagination humaine et la création du symbolisme

1.1. La mythologie

"Tempus edax rerum " (54) : le temps dévore tout.
Chronos est le fils indomptable de Gaea. Il détrôna son père Ouranos, et le castra. Par conséquent, nous comprenons que le règne d'Ouranos s'achève à cause du principe temporel. Les adjectifs qui qualifient Chronos sont " megas, aghraos, et ajuitomhtis " (55). Ils signifient respectivement : grand, par rapport à l'importance de son rôle ; qui ne vieillit pas ; et qui a une intelligence immense. Chronos peut être représenté avec des ailes ou comme serpent, symbolisant les mondes ouraniens ou chtoniens. Afin d'éviter que le destin de son père ne se répercute sur lui , Chronos dévorera ses propres enfants . mais sa femme, Rhea et sa mère remplaceront un de ses fils, Zeus, par une pierre, et ce dernier fera régurgiter ses frères à Chronos.
En nous attardant sur l'histoire de Chronos, nous retrouverons un symbolisme similaire dans les oeuvres de King : la castration, les ailes, le serpent, les pierres etc. Le surnom de Chronos : le dévoreur, est aussi à mettre en relation avec le nom du grand-père de Kira : Max Devory.
L'angoisse de castration se retrouve dans
Simetière, car Jud conseille à Louis de faire castrer Church. Pour Louis, c'est une décision difficile à prendre, et il pense que Rachel et Ellie ne peuvent pas comprendre ce qu'il ressent. Bien qu'il dise que " ce [n'est] pas pour la simple raison qu'il assimilait sa propre virilité à celle du gros chat mâle de sa fille [...] " (56), on peut penser que ce peut être, inconsciemment, la raison pour laquelle il a annulé le rendez-vous pris chez le vétérinaire. Nous pouvons établir un parallèle entre la castration de Church et celle d'Ouranos. Chronos utilisa une faucille pour castrer son père. Le symbolisme de cette dernière est ambigu, il peut être celui de la mutilation, de la mort et peut aussi être l'emblème de la récolte, de la production, de la reproduction, de la naissance et de la renaissance : indirectement, ce geste peut être associé à la résurrection, et préfigurer le processus par lequel Church va devoir passer.

1.2. Les conséquences de la naissance

L'importance du sommeil est indéniable. C'est un régulateur de la vie, un rythme nécessaire pour que l'être vivant recharge ses batteries.
Il arrive qu'au bord du sommeil, l'homme sursaute. L'explication rationnelle justifie ce phénomène par le fait que les nerfs se relâchent. Mais, si l'on reste dans le monde imaginaire, on peut penser que l'inconscient a stocké la terrible sensation de la naissance, et reproduit l'expulsion, car les ténèbres qui envahissent la cerveau peuvent rappeler le monde intra-utérin. Le passage d'un monde humide, tiède, et calme à un monde bruyant, à la lumière crue est engrammé dans le cerveau. Cette sensation de chute, peut nous mener à nous arrêter sur le schème catamorphe durandien.
Entre le cimetière des animaux et celui des Micmacs, il y a une pile de bois mort. Ellie l'escaladait au risque de tomber et de se blesser. Jud la prévient, et elle descend de cette pile de bois qui représente la frontière à ne pas dépasser. Nous comprenons alors qu'Ellie sera sauvée, car elle évite la chute (La Chute).

L'imagination humaine a créé des symboles pour matérialiser cette notion abstraite qu'est le temps. En littérature, le symbolisme permet à l'imagination des lecteurs et des auteurs de travailler de façon quasi-inconsciente.

2. Le symbolisme végétal et animal

2.1. Le symbolisme végétal

Le champ végétal du symbolisme est souvent utilisé afin de représenter la métamorphose. L'homme peut ressentir la supériorité du végétal, qui est en quelque sorte immortel. Les traitements homéopathiques permettent à l'homme d'ingérer les bienfaits des plantes. Les fleurs sont d'ailleurs récurrentes dans les oeuvres que nous étudions. Louis offre un bouquet à Norma après sa crise cardiaque, ce cadeau - commun pour les personnes malades -, témoigne du caractère éphémère de la personne vivante, mais est aussi là pour dire que les choses évoluent : naissent, vivent, se fanent soit, mais elles renaissent aussi. Dans Sac d'os, une importance toute particulière est véhiculée par les tournesols. Ces fleurs suivent la course du soleil, et sont des petits soleils sur terre. " Lex mea sol : le soleil est ma loi " (57), pourrait être la devise des tournesols. Ces fleurs ont un lien étroit avec le soleil et symbolisent ainsi le passage du temps. Leur première apparition intervient dans un rêve de Mike : " trois grands tournesols ont poussé entre les planches du petit perron donnant du côté de l'allée. L'impression générale n'est pas de la négligence, cependant, mais de l'oubli. " (58)
L'impression " d'oubli " pourrait être transformée en impression d'immortalité. D'ailleurs, la numérologie est importante à remarquer. En effet, les tournesols sont au nombre de trois, comme les fantômes qui hantent la maison : Sara Laughs, son fils et Jo.
Nous aimerions aussi faire remarquer la géo-psychologie, car les paysages influencent l'état d'esprit des personnages. Si nous mentionnons cela, c'est parce que, plus on s'éloigne de la civilisation, plus on s'éloigne du monde dirigé par la course contre la montre. Derrière la maison de Louis Creed, il y a un champ et, "
[u]n sentier d'un peu plus d'un mètre de large, nettement délimité, soigneusement aplani,[qui] s'ouvrait en bordure du pré à l'endroit précis où le gazon entretenu faisait place à l'herbe haute d'été et gravissait un coteau en sinuant à travers des buissons bas et un bosquet de jeunes bouleaux avant de disparaître à la vue ". (59) Plus loin encore, il y a le bois, qui pourrait être considéré comme " une réflexion des ténèbres existentielles de l'homme, et de l'inclination de l'homme à pécher. [...] Le déplacement à travers les pins sombres devient une métaphore pour le voyage introspectif " (60).
Les déplacements récurrents de Louis sont des indices de sa transformation. L'histoire de Dr Jekyll et Mr Hyde n'est pas très éloignée de celle de Louis. Nous pourrions même penser à un état schizophréne, mais Louis est en fait possédé par l'esprit malin du cimetière Micmac, il perd tout repère temporel dès qu'il pénètre dans les terres mystérieuses.

2. 2. Le symbolisme animal

Ces symboles sont très nombreux, et nous pouvons les classer en commençant par le royaume aquatique jusqu'à celui des cieux.
Dans
Sac d'os, il y a une évocation implicite des poissons qui se trouvent certainement dans le lac. Ils sont les témoins muets de terribles meurtres et d'infanticides qui ont pris place dans le T.R.
"
L'évocation des poissons, qui muets, ne donnent rien à entendre et que la profondeur et l'opacité de l'eau dérobent aux regards. Ils sont là sans être perçus [...] De tout temps, ils ont symbolisé une vie ralentie et 'froide' mais longue et tenace. Peut-être même répondent-ils à quelques fantasmes de régression à l'état foetal. " (61)
Cette citation est une bonne synthèse de l'ambivalence des poissons.
L'importance du chat est incontestable. Ils sont "
oscillants entre les tendances bénéfiques et maléfiques " (62). Church véhicule cette même ambivalence. La fuite du temps l'a marqué de son sceau. Il été " chaton, une adorable petite boule de poils [ et pourtant ], Louis l'avait vu harceler sans trêve un oiseau à l'aile brisée avec dans ses yeux verts une lueur de curiosité et aussi [...] une flamme glaciale de pure cruauté ". (63) Le chat d'Ellie est un " personnage " important, il est le premier à revenir à la vie. Après sa résurrection, il tue un corbeau, et nous pouvons établir un parallèle entre ce combat et celui de l'aigle et du serpent. Dans certaines traditions, le chat et l'aigle sont associés. Après le retour son retour, le côté diabolique de Church prend le dessus.
Une espèce d'oiseau apparaît dans
Simetière et Sac d'os : les passereaux. Ces derniers semblent être omniscients et vouloir prévenir Louis et Mike des dangers de la fuite du temps qui entraînent ces protagonistes vers des fins tragiques. Les chouettes semblent, quant à elles faire office de protection contre le danger contenu dans le futur.

Le symbolisme végétal et thériomorphe était très important afin d'interpréter le texte de façon cohérente. Mais certains symboles sont encore plus récurrents.

3. Les symboles par excellence

3.1. L'eau

L'eau était utilisée dans les clepsydres afin de mesurer le temps dont la fluidité est indéniable. Elle peut, aussi bien véhiculer une connotation positive que négative, et nous allons traiter les deux de façon respective.
Tout d'abord, nous pouvons l'appréhender comme le sang de la terre, elle contient donc la vie. De plus, l'imagination humaine peut la relier au liquide amniotique, et cela lui donne une valeur régénérante. Nous pouvons porter un oeil averti sur la récurrence des bains que prend Louis. Cela nous confronte au schème d'avalage : après que Louis a été témoin de la mort de Pascow, le docteur ressent le besoin de se relaxer, de se ressourcer, car il s'est trouvé impuissant devant l'achèvement de la vie de ce jeune homme. Le bain prend donc sa valeur "
purificatrice et régénératrice ". (64) Cette même sensation est ressentie par Mike, lorsqu'il se baigne dans le lac :
"
Je descendis jusqu'au lac et m'avançai dans l'eau. Sa fraîcheur fut plus que simplement agréable pour mon corps surchauffé ; elle fut synonyme de résurrection. " (65)
Cette renaissance peut sembler paradoxale si l'on prend en compte le fait que l'eau est " fraîche ", au lieu de la tiédeur associée au monde intra-utérin. Mais la température joue ici un second rôle par rapport à la liquidité, car cette dernière réconforte Mike comme le ferait une mère : "
L'eau nous porte, l'eau nous berce, l'eau nous endort, l'eau nous rend notre mère. " (66)
La rivière est aussi profondément symbolique. On ne se baigne jamais deux fois dans la même eau, car la course qu'elle suit ne s'arrête jamais. Dans la conception linéaire du temps, la rivière devient facilement la flèche que nous utilisons pour matérialiser le temps :

Passé > Présent > Futur

Le gardien qui s'occupe de la maison de Mike utilise une métaphore pour le prévenir de ne pas faire resurgir les démons du passé : " Ce fleuve-là est presque arrivé à la mer. " (67)

RIVIERE : La mémoire des ancêtres MER : L'oubli de la progéniture

Passé

Présent

Futur

"L'eau, à travers la mémoire de l'homme garde en son sein les traces de tout le mal qui y est passé. Stephen King ne fait que se servir de cette mémoire diabolique et rappelle à la surface des entités qui ne sont pas de ce monde. L'eau est le catalyseur des forces maléfiques, mais aussi une force en elle-même qui semble vouloir s'exprimer, et montrer qu'il faut compter sur elle. " (68)

Le lac dans lequel Mike est projeté par Rogette Whitmore et Max Devory peut être considéré comme l'oeil de la terre, et le témoin des meurtres qui y ont été perpétrés.

La forme circulaire du lac peut nous mener à développer le cercle.

3.2. Le cercle

La roue est facilement connectée au passage du temps. Dans Simetière et Sac d'os, nombre d'objets font indirectement référence à la roue. Nous allons citer un des passages dans lequel Mattie est encerclée par la fuite du temps l'emmenant inexorablement à sa mort. Lorsque Mike arrive, " il la souleva de terre et la fit tournoyer pendant qu'elle s'accrochait à son cou. " (69). Dans ce chapitre, l'omniprésence de la forme circulaire préfigure la fin tragique, car l'inexorabilité et l'inéluctabilité sont inscrites dans ce symbolisme.
Une autre forme circulaire digne d'intérêt est celle de la lune. La nuit où le fantôme de Victor Pascow vient prévenir Louis, "
la lune surgit de derrière un nuage, inondant la chambre d'une lumière froide et blafarde [...] " (70). Il est vrai que la lune a été la première à matérialiser le temps, et de nombreux calendriers portent encore la trace de l'importance qu'elle véhicule.
"
Le symbolisme lunaire apparaît [...] comme étroitement lié à l'obsession du temps et de la mort. Mais la lune est non seulement le premier mort, mais encore le premier mort qui ressuscite. La lune est donc [...] promesse explicite de l'éternel retour. [...] Mythes cycliques, mythes du déluge, du renouveau, liturgie de la naissance et de la croissance, mythes de la décrépitude de l'humanité s'inspirent toujours des phases lunaires. " (71)
Ce n'est donc, évidemment pas par hasard que la lune apparaît au même moment que Pascow, qui est le premier à revenir sous forme fantomatique après sa mort.
La forme des horloges imite celle de la lune, et il y a des références aux horloges dans les deux ouvrages sélectionnés. Après le retour du monstre de Gage, Louis rentre dans la maison de Jud où des meurtres sanglants ont été commis par le petit garçon ressuscité.
"
Gage ?
Rien. Même le tic-tac du gros régulateur du salon avait cessé. Personne ne l'avait remonté ce matin.
" (72)
Comme si le royaume de l'au-delà était privé de temps. De plus, on peut noter que dans la maison d'un mort, l'horloge est symboliquement arrêtée. L'homme souhaite que le temps suspende son vol lorsqu'une personne chère n'est plus. Une autre horloge revêt une importance non négligeable : celle de Jo. C'est un chat qui remue la queue et qui est en fait un compte à rebours. Quand les événements sont allés trop loin pour changer le cour du destin, Mike découvre "
cette stupide horloge Félix le chat, achat de Johanna. La queue avait fini ses allées et venues, et ses gros yeux en plastique gisaient sur le sol. Ils avaient littéralement jailli de sa tête. " (73)

L'imagination humaine s'est créé des symboles temporels afin de matérialiser, d'une certaine façon, cette notion si abstraite. La peur de la fuite du temps prend racine au moment de la naissance, et continue pendant toute la vie d'un homme. Nous avons vu que le symbolisme végétal ou animal recouvrait une importance cruciale pour un oeil averti. Les symboles du temps sont d'une aide appréciable afin de pénétrer dans le royaume de Chronos. Démystifier le texte passe inévitablement par une étude approfondie du domaine de l'imaginaire. Ce voyage dans l'imagination, dans la partie inconsciente de l'auteur, et dans celle du lecteur nous a montré que la fuite du temps est souvent implicite, mais omniprésente dans l'oeuvre kingienne.


© - Courrier éventuel à : <delph.lespinasse@libertysurf.fr>
Notes.

(1) Malabou, Catherine : Le temps. Paris, Hatier, 1985, p. 5
(2) Jankélévitch, Vladimir :
L'irréversible et la nostalgie. op. cit. p. 8
(3) King, Stephen :
Simetière. op.cit. p. 135
(4) Ibid, p. 282
(5) King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 572
(6) King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 415
(7) Siffre, Michel :
Hors du temps. Paris, Julliard, 1963, p. 101
(8) Kauffman, Christophe : " De l'angoisse à la peur " in
Les dossiers de Phénix. France, Lefrancq, 1995, p. 142
(9) King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 257
10. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 52
11. Ibid, p. 51
12. Pagnol, Marcel :
Le château de ma mère. Poitiers, Pastorelli, 1988, p. 249
13. Vergotte, Antoine : " Réciprocité du temps et éternité " in
Temporalité et aliénation. Paris, Aubier, 1975, p. 96
14. Sabbah, Hélène :
La fuite du temps. Paris, Hatier, 1985, p. 7
15. Traduction de l'auteur de : " Stop all the clocks ". Auden, W.H :
Stop all the Clocks in The English Auden, London, Faber and Faber, 1968, p. 15
16. La présente étude a été originellement écrite en 1999
17. King, Stephen : Op. cit. p. 367
18. Bianchi, Henry.
Le moi et le temps. Paris, Bordas, 1987, p. 102
19. King, Stephen :
Simetière. Op. cit. p.477
20. Ibid, p. 159
21. Ibid, p. 380
22. Jean Potel cité par Louis-Vincent Thomas :
Anthropologie de la mort. Paris, Payot, 1975, p. 328
23. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 29
24. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 74
25. Sabbah, Hélène :
La fuite du temps. Paris, PUF, 1985
26. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 50
27. Ibid, p. 80
28. Martin-Achar, Robert :
De la mort à la résurrection. Neuchâtel : Delachaux&Niestle, 1956, p. 25
29. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 495
30. Jankélévitch, Vladimir :
L'irréversible et la nostalgie. Paris, Flammarion, 1974, p. 162
31. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 234
32. Gargam, Georges :
L'amour et la mort. Paris, Seuil, 1959, p. 101
33. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 109
34. Poulet, Georges :
Les métamorphoses du cercle. Paris, Libraire Plon, 1961, p. 143
35. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 253
36. Werber, Bernard :
Le jour des fourmis. Paris, Albin Michel, 1992, p. 23
37. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 397
38. Jankélévitch, Vladimir. op.cit. p. 163
39. Jankélévitch, Vladimir :
L'aventure, l'ennui, le sérieux. Paris, Montaigne, 1963, p. 173
40. Pierre de Ronsard, cité par Hélène Sabbah. op. cit. p. 20
41. Brassens, Georges :
Le fossoyeur. Paris, Phonograph, 1953
42. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 273
43. Jankélévich, Vladimir :
L'irréversible et la nostalgie. op. cit. p. 374
44. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 282
45. Jankélévich, Vladimir :
L'irréversible t la nostalgie. op.cit. p. 190-191
46. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 495
47. King, Stephen : Ibid, p. 109
48. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 125
49. Ibid, p. 216
50. Ibid, p. 253
51. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 79
52. Brassens, Georges :
Le 22 septembre. Paris, Phonograph, 1964
53. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 441
54. Ovide cité par Jean Pucelle :
Le temps. Paris, PUF, 1955, p. 124
55. Brisson, Luc :
Mythes et représentation du temps. Paris : édition du CNRS, 1985, p. 43
56. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 30
57. Pucelle, Jean. op. cit. p. 128
58. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 52
59. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 21
60. Traduction de l'auteur de "
a reflexion of the self's essential darkness and the human affinity to sin [...] The journey into the dark pines becomes a metaphor for the journey into the self ". Magistrale, Anthony : The Moral Voyages of Stephen King. USA, Starmont House, 1989, p. 50
61. Hulin, Michel :
La face cachée du temps. Paris, Fayard, 1985, p. 80
62. Chevalier, Jean ; Gheerbrant, Alain :
Dictionnaire des symboles. Paris, Robert Laffont, 1996, p. 214
63. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 56
64. Chevalier, Jean ; Gheerbrant, Alain. op. cit. p. 96
65. King, Stephen :
Sac d'os ; op.cit. p. 274
66. Bachelard, Gaston :
L'eau et les rêves. Paris, Fayard, 1985, p. 178
67. King, Stephen :
Sac d'os ; op.cit. p. 441
68. Labbe, Denis : " L'eau chez King, une matrice de l'horreur " in
Les dossiers de Phénix. op.cit. p. 103
69. King, Stephen :
Sac d'os. op. cit. p. 481
70. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 95
71. Durand, Gilbert :
Les structures anthropologiques de l'imaginaire. Paris, Dunod, 1969, p. 337
72. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p. 460
73. King, Stephen :


*Delphine Lespinasse est étudiante à Grenoble III. Elle a passé ce mémoire de maîtrise de maîtrise LLCE anglais (originellement écrit en anglais, et traduit  par la suite) sous la direction de Jean Marigny soutenu le 10 juin 1999 sous le titre : From Womb to Tomb" in Stephen King's Pet Sematary and Bag of Bones ( "We fall from womb to tomb, from one darkness and into another, remembering nothing of the one, and knowing nothing of the other." Trad. de Jean-Daniel Brèque : "D'une matrice à une autre, d'une ténèbre à une autre, ayant presque tout oublié de l'une et ignorant tout de l'autre.", Pages Noires, 216).

Elle travaille actuellement sur un DEA sous la direction d 'André Siganos ( Grenoble III. Stendhal) : Vers une thanatologie fantastique. Le cas de trois auteurs contemporains : Serge Brussolo, Valerio Evangelisti et Stephen King.

d.grepilloux@nomade.fr

 

autres textes de cet auteur :

D'UNE TÉNÈBRE À L'AUTRE :

1- LES AGES DE LA VIE dans Simetiere et Sac d'os.

2- LE PASSAGE DU TEMPS

3- LA MORT

 

DU FANTASTIQUE À LA «LITTÉRATURE DE L'INDICIBLE»

1 - Rapport entre le degré de littérarité et «l'effet-fantastique»

2 - Une «archaïcité moderne»

 3 -  Voyeurisme morbide ou réflexion cathartique ? saison automne 2002

4- L'engramme de l'orifice. saison hiver 2002

 

Considérations sur le mythe. saison printemps 2003

 .. du site Imaginaire

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