Delphine Lespinasse,
D'UNE
TÉNÈBRE À UNE AUTRE
Les
âges de la vie, la fuite du temps et la mort
dans Pet Semetary et Bag of
Bones de Stephen
King.
Deuxième partie.
Le temps
et ses manifestations
"Tic-Tac, tic-tac ", peut-on
entendre à l'approche du crocodile dans Peter Pan. Celui-ci
avait avalé un réveil en voulant dévorer le
capitaine Crochet désormais prévenu des intentions de
son ennemi par ce bruit incessant, symbole de
l'irréversibilité du temps et rappelant, à
chaque instant la condition précaire de la vie humaine. Depuis
toujours, la fuite du temps a été l'une des principales
préoccupations de l'espèce humaine. Les hommes sont
souvent blessés par son passage, et tentent de l'analyser afin
de mieux comprendre leur condition mortelle. Les écrivains ont
donc un rôle dans cette approche, car ils sont les messagers
des joies, des peines et angoisses de l'homme. En ce qui concerne
Stephen King, nous pourrions dire que son angoisse vis-à-vis
de la fuite du temps et de la mort est révélée
de façon implicite dans son oeuvre. Sans tomber dans une
analyse psychologique, que nous serions d'ailleurs bien incapables de
mener, nous tenterons de comprendre ce qu'est la fuite du temps, et
en quoi on peut la rapprocher des ouvrages kingiens. Puis, nous
verrons qu'elle est sa relation avec l'espace et la nature. Pour
finir, nous porterons un oeil averti sur les trois temps du temps :
le passé, le présent et le futur.
1. Le Temps
?
1.1. Essai de
définition
Les noms " temps, time " proviennent
de la racine indo-européenne : " tem " qui signifie " couper
". Cette racine peut également être trouvée en
grec : " temno : couper,
temonos : l'enclos divin, epitome : le corpuscule
indivisible. " (1) Le
schème diaïrétique durandien est
omniprésent et prouve le décalage qui existe entre
l'homme et le temps. Si l'on nous demandait si l'on savait ce qu'est
le temps, nous répondrions par l'affirmative, et pourtant
définir le temps de façon précise relève
de la gageure. C'est une notion abstraite et inapprivoisée,
qui fuit. Les témoins de son passage sont les jours, les mois,
les saisons... Contrairement aux animaux, l'homme a besoin de
matérialiser le temps, et le fait grâce aux clepsydres,
aux cadrans solaires, aux horloges, aux montres. Pour diviser un
jour, on utilise arbitrairement les heures, les minutes, les
secondes. Devant l'internationalisation actuelle, il existe une
tentative d'instauration d'une nouvelle unité du temps sur le
Web : le beat : 1000 beats = 24 heures. Le but de cela est d'annuler
le décalage horaire : un new-yorkais pourra rencontrer, par
ordinateur interposé, un japonais à 45 beats, sans se
soucier des heures respectives des deux pays. En bref, malgré
l'omniprésence du temps, il est si abstrait que l'homme, ayant
besoin de repères, doit le matérialiser. C'est sans
doute le plus fidèle compagnon des êtres vivants, car il
ne les quitte jamais. Il peut être un allié, permettant
d'acquérir de l'expérience, mais il est plus souvent
considéré comme un ennemi, car il est la cause du
vieillissement, et de la mort.
Définir le temps est une mission quasi-impossible, c'est la
raison pour laquelle, nous allons parler de ses principales
caractéristiques.
1.2.
L'irréversibilité
La première observation que
nous aimerions faire, concerne le poids de la
négativité de ce subtantif :
IR-réversibilité. Le préfixe négatif
témoigne d'un regret, d'une déception. L'impuissance de
l'homme est immense face à cette caractéristique du
temps. Rien ne peut se réitérer en étant les
deux fois la première. Même le processus de
résurrection ne vainc pas : le ressuscité revient soit,
mais rien ne peut effacer le fait qu'il ait appartenu à un
moment donné au royaume des morts. Les aptitudes
physico-psychiques du retour de Gage montrent la
véracité de cette affirmation. La notion
d'irréversibilité est scandaleuse pour l'esprit humain,
mais elle est, et rien ni personne ne peut
l'éradiquer.
"L'homme est un
irréversible incarné : tout son être est
destiné à devenir [...] et par surcroît il
devient, ( advient, survient, quelquefois même se souvient),
mais il ne revient jamais. "
(2)
Si le temps est si difficile à définir, en dépit
de ses principales caractéristiques, c'est parce que tout est
relatif.
1.3. Le temps
objectif et le temps subjectif
Le temps objectif est celui que nous
avons tenter de définir plus haut : c'est le temps arbitraire.
Il existe aussi, un temps subjectif, car chacun a sa propre notion
par rapport à ce qu'il est en train de vivre. Ainsi, le temps
peut passer vite si l'on profite du moment présent, mais si
l'on s'ennuie, le temps donne l'impression de s'être
arrêté. La théorie einsteinnienne de la
relativité est transposable au passage du temps. Le temps peut
aider quelqu'un à oublier, mais, Louis pense que : "
[d]ix ans, cela fait un
sacré bout de temps, mais ça n'avait pas suffit
à atténuer le goût nauséabond qui lui
avait rempli la bouche au moment où [le père de Rachel]
avait glissé une main sous le revers de cette grotesque veste
d'intérieur pour en extraire le chéquier qu'elle
dissimulait " (3), afin de
lui demander de s'éloigner de sa fille. Irwin Goldman est un
vieil homme machiavélique, et Louis ne lui pardonnera pas ce
geste. Le marché qu'il a proposé à Louis a
été un tel choc que Louis a encore le souvenir du "
goût nauséabond " alors que cette sensation est
sensée être éphémère. Après
la mort de Gage, Louis n'assume pas la responsabilité
supposée lui revenir de consoler son épouse. Tout le
monde attend de lui qu'il fasse un geste réconfortant envers
Rachel après qu'elle a éclaté en sanglots :
" [a]u bout d'un moment (qui
fut sans doute très bref en durée réelle mais
que Louis perçu comme atrocement long aussi bien sur le coup
qu'en y resongeant par la suite), Steve passa un bras autour des
épaules de Rachel et il l'étreignit tendrement
[...] " (4) La
relativité du temps est explicite dans cette citation et
montre bien la différence qui existe entre le temps
arbitraire, subjectif, celui de l'horloge, et le temps subjectif :
celui de l'horloge personnelle de chaque individu.
Un autre aspect du temps subjectif peut être ressenti lors de
moments de suspense et quand les personnages sont impuissants face
aux événements. Tel est le cas de Mike lorsque Rogette
Whitmore a kidnappé Kira. Il se demande : " A combien de temps cela remontait-il ? A une
éternité [avait-il] l'impression, mais quelque chose
[lui] disait qu'il s'était en réalité
écoulé peu de temps, moins de cinq minutes, sans
doute. " (5) Mike a si peur
qu'il a l'impression que le temps s'est arrêté. Rachel,
lorsqu'elle revient à Ludlow a le même sentiment que
Mike, elle se demande si " cette nuit finirait jamais ". (6)
Le temps subjectif appartient à chacun d'entre nous. Qu'il
défile ou passe lentement, il reste omniprésent.
Et il est partout.
2. Le temps
se manifeste dans l'espace et dans la nature
2.1. L'espace et
le temps
Nous avons vu auparavant que le temps
était si abstrait que l'homme ressentait le besoin de le
matérialiser. L'espace peut être une métaphore du
temps. Michel Siffre qui a passé trois mois dans une grotte
pour des expériences, parle de " désorientation temporelle " (7) . Dans Sac d'os, la
retraite de Mike à Sara Laughs apparaît comme une
retraite temporelle. Métaphoriquement parlant, cette maison
est située dans le passé. Son
déménagement est un symbole du retour introspectif aux
racines de son existence.
"C'est le souvenir de cette
vie maintenant disparue qui augmente la sensation de silence et de
mort que l'on connaît actuellement lorsque l'on franchit le
seuil. La maison vide est alors une fenêtre avec vue sur le
passé, un rappel constant de faits révolus, un appel de
la fin inéluctable qui attend ses visiteurs. Si cette morbide
prise de conscience est en soi source d'une crainte diffuse, ne nous
étonnons pas qu'une maison qui évoque des souvenirs de
meurtres ou de suicides soit à fortiori cause d'une grande
terreur. " (8)
En ce qui est de
Simetière, nous
pouvons établir un schéma montrant en quoi il existe un
lien spatio-temporel.
Le cimetière MicMac = LE PASSE
La maison des Creed = LE PRESENT
La maison des Crandal = LE FUTUR
Ce qui ressort de ce schéma,
c'est la matérialisation verticale du temps.
L'irréversibilité temporelle est indubitable : le
retour au cimetière Micmac est donc contre nature, car c'est
une tentative de retour au passé, de renversement de
l'irréversible. Et cette transgression mènera les Creed
à leur ruine.
2.2. Le temps
et la nature
Qui n'a jamais céder à
comparer les âges de la vie aux saisons ?
printemps
été automne hiver
enfance âge adulte vieillesse mort
Pourtant, cette comparaison
s'achève avec le décès de l'homme. La
supériorité de la nature ne peut être mise en
cause. Après l'hiver, elle revient à la vie, le mythe
de l'éternel retour est présent :
ETE
PRINTEMPS AUTOMNE
HIVER
Dans Simetière, nous voyons qu'une " journée de mars [...] s'échinait à
se parer des éclatantes couleurs d'avril [...] " (9) La nature se
régénère, ressuscite en quelque sorte alors que
l'être vivant une fois mort ne peut revenir. Mais, une fois
mort, il y a une certaine harmonie entre l'homme et la nature. Les
rites funéraires d'ensevelissement renvoient le défunt
à la matrice originelle, à la terre mère. La
nature se nourrira ensuite de la décomposition organique, et
transformera le corps animal mort en végétal.
Cependant, en règle générale la relation entre
l'homme et la nature est chaotique.
La fuite du temps laisse ses empreintes dans la nature, sur ce qui
demeure. A son arrivée à Sara Laughs, Mike voit "
[...] que la mousse commence
à envahir les rondins qui constituent le corps central du
logis, et que trois grands tournesols ont poussé entre les
planche du petit perron donnant du côté de
l'allée. L'impression générale n'est pas de la
négligence, cependant, mais de l'oubli. " (10) Nous comprenons bien ici que
l'environnement est le témoin de la fuite du temps.
L'harmonie entre la fuite du temps et la nature est
révélée dans la citation suivante :
"Les arbres se pressent et se
penchent sur le chemin. Le ciel crépusculaire se réduit
à une fente entre les cimes. [Mike] va bientôt voir
scintiller les premières étoiles. Le soleil est
couché. Les grillons stridulent. Les plongeons poussent leurs
cris sur le lac. De petites bestioles - sans doute des tamias, ou des
écureuils - font bruire les feuilles, dans le
bois. " (11)
Les manifestations du temps dans l'espace et la nature sont plus ou
moins évidentes, mais elles témoignent de la condition
mortelle des hommes.
3. Le
passé, le présent et le futur
3.1 Le
passé
La vie est cruelle souvent les " joies [sont] très vite effacées par
d'inoubliables chagrins ".
(12)
Il peut sembler préférable de ne pas réveiller
les fantômes du souvenir. Nous traiterons cela de façon
plus détaillée dans la partie sur l'immortalité.
Nous pouvons dores et déjà affirmer que les
conséquences d'une mort violente peuvent mener le
défunt à l'errance fantomatique.
3.2. Le
présent
Le passé est la racine du
moment présent. L'arbre généalogique est un bon
exemple de cette affirmation. Mike découvre qui sont ses
ancêtres après une longue investigation. Il prend ainsi
conscience de son lien au présent. Avant de se rendre compte
de cela, il ne parvenait pas à vivre l'instant présent
car il était au prise entre un passé et un futur
sombres. Il était de ceux qui, " marqués par la mort du passé, [...]
anticipe[nt] affectivement la disparition du présent
éventuel et projette[nt] sur le futur le néant du
passé ". (13)
3.3. Le
futur
Parmi les projets qui peuvent être faits pour le futur, il y en
a un auquel on ne veut penser et qui pourtant est inéluctable
: c'est la mort. " Toutes les
heures blessent, la dernière tue. " (14) Le futur contenant l'inconnu, notre mort peut
donc prendre le visage de tous les dangers. Ce qui est devient,
nécessairement. Et Mike, après la perte de sa femme a
beaucoup de mal à se projeter dans le futur. Sa rencontre avec
Mattie, et Kira lui permettra d'y parvenir.
Après avoir essayer de définir le temps, nous avons vu
en quoi cette notion était liée à l'espace et
à la nature. Nous avons, ensuite traité des trois temps
du temps séparément dans un souci de clarté et
de simplification, et surtout afin de mieux comprendre
l'interpénétration du passé, du présent
et du futur. La relation entre l'homme et le temps n'est pas
satisfaisante : le passé est mort, le présent passe
trop vite, et le futur est associé à l'inconnu.
"Arrétez toutes les horloges ". (15) Ce fantasme de puissance
par rapport au temps qui passe ne sera sans doute jamais assouvi. La
volonté de lutter contre la fuite du temps et la mort est
quasi-omniprésente chez l'homme, et particulièrement
à notre époque. A l'aube du troisième
millénaire (16), le comportement de nombreux individus est
influencé par la peur millénariste. Quel pouvoir
avons-nous, pour lutter contre le temps de façon individuelle
? Nous tenterons de cerner cette question avant de considérer
le rôle de la science et de la médecine. Enfin, nous
nous attarderons sur les différents refuges qui
existent.
La lutte
contre le temps
1. Quel
pouvoir avons nous ?
1.1. Pouvoir
physique
Paradoxalement, le suicide peut
être une façon de lutter contre la fuite du temps. En
commettant cet acte, l'homme devient maître de sa
longévité. Max Devory est un personnage
machiavélique. Son nom apporte d'ailleurs une indication non
négligeable sur sa personnalité. Par sa sonorité
on peut le relier au verbe " dévorer ". Dans la version
originale, d'ailleurs, son nom de famille est : " Devore ", mais cet
indice aurait été trop explicite dans la version
française et le traducteur à transformer le nom en "
Devory " lui donnant ainsi une sonorité anglophone, et
masquant un peu l'intention de King. Nous reviendrons
ultérieurement sur l'importance symbolique de ce nom. Devory
sera capable d'entreprendre tout ce qui est en son pouvoir, tant que
la fin justifie les moyens. C'est une des raisons pour lesquelles il
s'est suicidé, " [la]
tête dans un sac plastique et le corps plongé dans un
bain d'eau tiède. "
(17) Le suicide est ici à considérer comme la mort de
la Mort. " Il existe des
suicides de vieillards [...] comme si ces vieillards se tuaient pour
ne pas mourir. "
Le cas de celui qui résiste aux pulsions suicidaires est aussi
non négligeable. Louis ne se suicide pas à la fin de
Simetière, mais il se tue de façon indirecte. Il enterre
le corps de son épouse dans le cimetière Micmac, et
attend son retour alors qu'il est conscient du danger. L'auteur
laisse le lecteur libre d'imaginer le monstre de Rachel en train de
tuer Louis. Mais Simetière a été façonné afin que ce
dénouement vienne à l'esprit du lecteur. Dès la
rencontre avec le fantôme de Pascow, nous savions que le
docteur courait à sa ruine : il allait se détruire
après avoir détruit sa famille. Au retour de son
épouse, la calligraphie utilisée pour " Mon chéri " (19) montre au lecteur que Rachel est
désormais possédée et justifie l'idée que
l'on a de la mort imminente de Louis. Dans le film de Mary Lambert,
le spectateur voit le cadavre mutilé de Rachel revenir prendre
Louis dans ses bras avec une tendresse infinie. Nous pouvons alors
être enclins à penser que Louis a réussi : il
avait enterré sa femme assez rapidement pour qu'elle
ressuscite sans séquelles morales. Et pourtant, la
caméra fait un zoom sur la main de Rachel montrant ainsi le
poignard qu'elle tient. La fin du film est, par conséquent,
plus explicite que celle du livre, et l'on pourra se demander en quoi
le cinéma fantastique enlève l'effet-fantastique ?
Les rituels ont aussi une importance cruciale pour faire accepter
l'inacceptable. Leur fin est également d'accompagner les morts
dans leur nouveau royaume. Le passage qui exemplifie au mieux cette
prise de position est celui où Louis met Church en terre.
"Il passa dix minutes à
empiler l'une sur l'autre les grosse pierres que Jud lui passait. A
la fin, un tumulus modeste, de forme conique, surplombait la tombe de
Church, et Louis, malgré sa lassitude, en éprouva une
pointe d'euphorie. La vue de ce tumulus dressé parmi les
autres dans la clarté des étoiles lui donnait un
sentiment d'accomplissement.
" (20)
La forme du cairn peut être comparée à celle
d'une pyramide, et nous développerons plus loin la valeur
symbolique de cette forme. Nous pouvons déjà remarquer
que ce rituel est fait pour permettre aux morts de ressusciter, comme
si le temps passé, et l'énergie dépensée
pour la construction de cette pyramide miniature devaient être
récompensés par le retour du défunt. Les rituels
se teintent ici de la couleur de la lutte contre la fuite du temps,
car grâce à eux, l'homme peut faire perdurer une image
concrète du mort.
Ces façons de lutter sont, somme toute, relativement physiques
; il existe des manières plus spirituelles.
1.2. Pouvoir
spirituel
La passion peut avoir une certaine emprise sur le temps. Le
passionné, tant que l'objet de sa passion vit, profite du
moment présent, sans se soucier du passé et du futur.
Il croit aux rêves et à l'éternité.
L'amour refuse la fuite du temps en ce sens qu'il montre que le
passé ne meurt pas, que l'absent est toujours présent,
d'une certaine façon dans la tête et le coeur du
survivant. L'amour perdure au-delà de la mort dans
Sac d'os. A la mort de Jo, Mike refuse de vivre dans
le présent car il contient la mort de la personne
aimée. Ce n'est qu'après sa rencontre avec Mattie que
son attitude vis-à-vis du présent change : il accepte
de ne plus vivre dans le passé.
L'humour noir est aussi une méthode pour dédramatiser
la fuite du temps. Ce n'est souvent qu'un masque voilant de profondes
cicatrices. Nous pensons que Louis est possédé par le
cimetière indien lorsqu'il exhume son petit garçon, car
l'humour noir qu'il est très déplacé.
"Je viens d'apercevoir le
gamin le plus vieux et le plus lourd du monde en train d'escalader la
clôture du cimetière [...] Il a dû se dire qu'il
était temps d'enterrer sa vie de garçon. Ou alors c'est
qu'il avait envie d'une petite bière. [...] ça
tombe sous le sens. Je suis sûr que c'est une affaire qui
mérite d'être creusée. " (21)
Tous les jeux de mots sont morbides, et participent de
l'ambiguïté qui met en emphase l'état d'esprit de
Louis. Dans nombre de situations, l'humour est une façon
d'oublier la cruauté de la fin de la vie.
"L'humour noir n'est-il pas
parfois [...] une sorte de pirouette devant l'épaisseur
humaine de la mort ? Le jeu de la mort et du sourire auquel on se
livre, n'est-il pas un recours pour camoufler la peur de la mort et
le désespoir qu'elle inspire ? " (22)
Le sommeil est une autre façon de passer dans un monde
où le temps ne règne pas, et à travers les
rêves, l'inconscient peut se révéler. Le
rêve est nécessaire, un homme qui ne rêverait pas
deviendrait fou et mourait. Dans ses rêves, Mike retourne au
coeur du passé, et ressent un décalage spatio-temporel,
il ne se demande pas où il est mais quand. Le passé
semble être un refuge, mais se révèle être
un piège. En bref, les rêves permettent de
s'évader de la tragédie existentielle.
La littérature permet aussi d'échapper à la
fuite du temps. Qu'il soit ou non omniscient, le lecteur voyage dans
d'autres lieux, dans d'autres époques et avec d'autres
personnes, en demeurant dans la même localisation
spatio-temporelle. Stephen King utilise cela, et créé
un pont virtuel reliant ses oeuvres entre elles. Il y a ainsi une
connexion à établir entre Cujo et
Simetière
; La part des
ténèbres, Insomnie et Sac d'os.
Jud permet d'établir
le premier lien :
"On a eu pas mal d'alerte
à la rage dans le Maine ces temps derniers. Il y a deux ou
trois ans, dans le sud de l'Etat, un gros Saint Bernard l'a
attrapée et il a tué quatre personne. " (23)
Dans Sac d'os, Mike fait référence à
un écrivain dans lequel nous reconnaissons Thad Beaumont. Nous
apprenons qu'il s'est suicidé. Mike rencontre aussi un
personnage du nom de Ralph, qui lui dit qu'il a mauvaise mine et
que,
"[s]i c'est de l'insomnie,
[il] peu[t] sympathiser [...] (sic.)" (24)
Ces digressions sont très instructives, et
intéressantes pour le lecteur assidu. Il prend ainsi
conscience que les personnages continuent à exister
après qu'il a fermé le livre. Le temps est assassin
dans le monde romanesque crée par King.
L'écrivain aussi échappe au temps. Grâce à
ses oeuvres, il est immortalisé, et laisse son empreinte dans
l'histoire.
"Grâce aux mots et aux
images, à la vivacité des évocations, le lecteur
recréer une réalité ancienne. Celle-ci prend
vie, se renouvelle inlassablement par la lecture, se revivifie, comme
par opération magique. Cette réalité
échappe ainsi au temps et à son pouvoir d'oubli. Enfin,
la littérature a le pouvoir d'immortaliser. " (25)
Pour Mike, l'écrivain peut être comparé à
une femme enceinte. Il pense que l'écriture est comparable
à l'accouchement, aux " angoisses de la création multipliées par
dix... des douleurs d'un accouchement
prématuré... "
(26) La naissance est explicite bien que métaphorique, et plus
tard, Mike a " huit ou neuf
mois avant que Harold et Debbie ne se mettent à [le] harceler
pour [son] roman suivant. "
(27) La précision du nombre de mois qu'il lui reste
véhicule une connotation évidente : les livres
immortalisent leur auteur de la même façon que leur
progéniture.
Les enfants sont une partie des ancêtres, celle qui perdure
pour témoigner du passage d'un être humain sur la
terre.
"Pour que la mort ne signifie
pas une rupture totale, il importe que les hommes aient une
descendance, [...] dans [laquelle] ils continuent à
vivre. " (28)
Le fils est souvent considéré comme crucial, car
derrière lui se profilent les symboles de reproduction et de
la continuité du nom. Ce peut-être une des causes qui
poussent Louis à commettre l'irréparable afin de
perpétuer son sang. L'importance que revêt
l'immortalité à travers la reproduction est implicite
mais indéniable chez Louis : il refuse que Church se fasse
castrer. Cette mutilation apparaît aux yeux de Louis comme la
fin d'une propension à l'immortalité. Dans
Sac d'os, l'immortalité par la
progéniture revêt deux formes. Kira est le témoin
du passage éphémère de ses parents. Sa
mère, à l'agonie, en est consciente : "
...Ki... Ki...', Ce furent ses
dernières paroles en ce bas monde. " (29) L'autre forme d'immortalité est
indirecte, et incluse dans les liens sanguins qui relient les enfants
aux ancêtres. Le fantôme de Sara Laughs utilise cette
connexion à des fins vengeresses.
L'être humain semble avoir besoin de laisser une empreinte de
son passage sur terre. La volonté de perdurer est
supérieure aux moyens qu'à l'homme pour lutter contre
le temps. Le refus de la réalité temporelle fait partie
de la nature humaine et se transcrit dans un sentiment d'impuissance.
Par conséquent, l'homme peut être enclin à
chercher des solutions dans la science.
2. La science
et la médecine
2.1. Les
expérimentations
Dans Simetière, le personnage principal est le docteur Creed. Il
rappelle étrangement le docteur Frankenstein, pour qui les
expériences comptent plus que tout. L'aspect rationnel de son
travail devrait mener Louis à accepter la mort comme il le
fait au début de l'histoire quand il explique à Ellie
qu'elle fait partie intégrante de la vie. Cependant, plus
tard, les rôles sont inversés et l'enfant devient plus
sage que son père. Ellie se rappellera toujours de Gage, il
restera dans son coeur. Le souvenir et la dignité sont
certainement les meilleures façons d'appréhender la
mort, mais Louis commet l'irréparable. Le prix qu'il aura
à payer pour cette
transgression suprême sera la destruction de sa famille et des
personnes qui lui sont chères.
2.2. Lorsque la
médecine dépasse les limites.
La médecine à outrance peut être à
dénoncer, lorsque l'excès de zèle de certains
docteurs est supérieur au respect de la dignité des
mourants.
"Le malade doit être
soigné jusqu'à l'extrême et suprême limite
et jusqu'au dernier soupir et jusqu'à l'ultime battement de
coeur [...] comme s'il pouvait non pas revivre mais
survivre. " (30)
Cette dégradation doit être encore plus difficile
à supporter qu'une mort violente, car les proches voient la
personne qu'ils aiment se faner jour après jour. Tel est le
cas de Zelda, la soeur de Rachel, atteinte d'une méningite
cérébro-spinale. Lorsque Rachel parle à Louis du
stade final, deux questions sont soulevées : la
médication outrancière et l'euthanasie.
"Quand ses douleurs sont
devenues vraiment sérieuses, on s'est mis à lui donner
des drogues ; d'abord des antalgiques relativement anodins, puis de
la morphine, à doses de plus en plus élevées,
qui auraient sans doute fait d'elle une junkie si elle avait
survécue. Mais bien sûr, tout le monde savait qu'elle ne
survivrait pas. " (31)
Comment peut-on vouloir faire survivre quelqu'un à tous prix ?
En dépit de ce que peut endurer le malde, les proches ? Au
lieu d'une marche de la vie, à la mort, c'est la mort qui
empiète sur le territoire de la vie. La maladie et la mort de
Zelda sont devenues tabous, car ses proches espéraient que la
mort la délivre, et les délivre, de tant de
souffrances.
Quand la mort frappe, il ne reste que le souvenir.
3. Le
souvenir, la doctrine du " carpe diem ", et l'espoir
3.1. Le
passé et le souvenir
Lorsque la mort d'un proche demeure
insupportable malgré le temps qui passe, le survivant peut
trouver refuge dans le passé : avant le moment où le
présent est devenu synonyme de douleur. Malgré tout,
les jours précédant cette perte irréversible
peuvent paraître emprunts d'une grande tristesse, car "
[i]l n'est pas de plus grande
douleur que de se souvenir des jours heureux dans la
misère " (32) . Les
objets qui ont appartenu au défunt sont enclins à
rouvrir des cicatrices trop mal refermées, et à faire
resurgir les souvenirs de joies trop vite effacées. Lorsque
Mike retourne à Sara Laughs, il se " rendi[t] compte à quel point il avait
redouté cette arrivée. Redouté de voir [son]
chagrin ravivé devant les témoignages de la vie
brusquement interrompue de Johanna. " (33)
En gardant à l'esprit que " le passé est le siège des heures
heureuses " (34), on peut
comprendre combien le retour à la réalité peut
être difficile pour celui qui rêve du temps où il
était heureux. Tel est le cas de Louis :
"[c']est le 24 mars 1984 que
Louis Creed connut sa dernière journée de
véritable bonheur. Sept semaines séparaient encore les
Creed des événements tragiques que le destin tenait
suspendus au-dessus de leurs têtes comme la lame d'une
gigantesque guillotine [...]
" (35)
Louis peut donc tenter de se remémorer cette journée
lorsqu'il est triste, et trouver ainsi un refuge dans le souvenir.
Mais, le retour à la réalité n'en est que plus
cruel, et cela le mènera à transgresser les lois de la
nature. Il cédera à la tentation de ramener le
passé.
3.2. " Carpe
Diem "
Il est très difficile de
profiter du moment présent. Il part dès qu'il arrive,
et ne prend jamais le temps de s'arrêter. Il faudrait parvenir
à faire sienne chaque minute qui passe, la faire sienne comme
si c'était la dernière. Les regrets et l'espoir sont
des stratégies employées pour refuser la fuite du
temps, mais elles ne permettent aucunement d'appliquer le fameux "
carpe diem ".
"Imaginez le temps
accéléré. Pfout, vous naissez,
éjectés de votre mère tel un vulgaire noyau de
cerise. Tchac, tchac, vous vous empiffrez de milliers de plats
multicolores, [...] Paf, vous êtes mort.
Qu'avez vous fait de votre vie ?
Pas assez, sûrement.
Agissez ! Faites quelque chose, de minuscule peut être, mais
bon sang ! Faites quelque chose de votre vie avant de
mourir " (36)
Si, à sa mort, quelqu'un a
l'impression que sa vie n'était pas assez remplie, c'est
probablement, car il n'a pas profiter du jour présent. Vivre
le moment présent sans regretter les erreurs du passé
correspond quasiment à faire un pied de nez à
l'irréversibilité du temps. Les moments où Louis
et Mike ont été le plus heureux sont, à
posteriori, ceux pendant lesquels ils ont inconsciemment
appliqué la doctrine du " Carpe Diem ".
3.3. Le futur
et l'espérance
Avant d'étudier Kira, nous pouvons remarquer que Mattie
était sensée avoir la vie devant elle. Après le
premier baiser entre elle et Mike, ce dernier pense que "
après devenait une
possibilité très réelle " (37). Tout d'abord, on peut penser que leur
relation est faite pour durer, mais si l'on interprète cette
citation, on est mené à supposer qu'il reste de
nombreuses années à Mattie.
Dans l'épilogue, nous apprenons que Mike a engagé une
procédure juridique afin d'obtenir la garde de Kira, et cela
montre en quoi Mike arrive désormais à se projeter dans
le futur. L'attente est difficile pour lui car rien n'est sûr,
mais il espère néanmoins. " L'espérance, fleur fragile, est une humble chance
blottie dans la région des possibles. " (38)
A la mort de Gage, Louis essaie de mettre en oeuvre toutes ses
connaissances afin qu'elles saillent à son projet. Il sait que
Gage ne reviendra pas sans séquelles, il est peut-être
même conscient que son fils sera devenu un monstre.
Néanmoins, Louis tente de se persuader qu'il détient la
clé de son futur succès : " l'aventureuse espérance, la très
aléatoire, n'a pas besoin de tant de garanties : une chance
sur cent suffit à justifier son risque et le pari
méritoire qui en découle " (39). Louis n'a pas la moindre chance de parvenir
à ses fins, mais il va la tenter tout de même, et
transgresser les lois de la nature. Malheureusement, Chronos et
Thanatos sont toujours les grands vainqueurs.
La lutte contre le passage du temps paraît vaine. Les pouvoirs
individuels qui permettraient de lutter sont illusoires, et suffisent
à peine à masquer la réalité de la vie :
sa fragilité. La science et la médecine viennent
secourir l'homme, mais elles peuvent être excessives. Le
meilleur remède pour lutter contre la fuite du temps est de
profiter de l'instant présent. Mais c'est aussi le plus
difficile à appliquer, car pour y parvenir, il faut arriver
à ne pas regretter. La vie est une rose qui se fane, et le
temps emporte tout sur son passage : rires, joies, pleurs et
peines.
"Regrettant votre
amour et votre fier dédain
Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain :
Cueillez dès aujourd'hui les roses de la vie. " (40)
"J'ai beau m'dire que rien
n'est éternel,
J'peux pas trouver ça tout naturel. " (41)
Tels sont les mots d'un fossoyeur, un
homme confronté chaque jour à la fin
irréversible des êtres humains. La fuite du temps et la
mort sont inconcevables pour l'esprit humain, mais ils font partie de
la vie, et nous y sommes tous soumis. Nous comprendrons que les
regrets sont le lot de tous les jours, avant d'analyser les
différentes fuites de l'homme par rapport au temps. Pour
finir, nous verrons en quoi le temps emmène l'oubli.
La
soumission au temps
1.
Hélas ! Le temps des regrets
1.1. la
nostalgie
Le passé ne reviendra jamais. L'homme, confronté
à ce fait peut être enclin à ressentir une
certaine tristesse et des regrets pour les temps révolus. Le
passé est idéalisé simplement parce qu'il est
passé. Malheureusement, les moments pendant lesquels l'homme
sombre dans la nostalgie ne reviendront pas non plus et sont ainsi
gaspillés. Certains se plaisent dans la nostalgie car cet
état est relativement proche de la méditation. Mike,
par contre, parle des " années vides [...] passées sans Johanna,
sans amis, sans [son] travail. " (42) Aussi triste que cela puisse paraître,
Mike doit tourner la page de l'histoire d'amour qu'il a vécu
avec Jo. " Le passé est
objet de nostalgie parce qu'il est, si médiocre soit il notre
passé, notre irremplaçable passé.
" (43)
Les regrets sont pires encore que la nostalgie. Le sentiment de
culpabilité engendre des remords, c'est un véritable
poids moral qui entraîne le rejet de l'irréversible.
Pourtant, telle est la vie des hommes : allant du passé au
présent, et du présent au futur. Les regrets et les
remords engendrent une douleur aussi lourde à supporter
qu'elle est inutile. Après la mort de Gage, Louis se
remémore la façon dont il a raté son fils au
moment crucial :
"Il vit ses doigts. Ses
propres doigts à lui, Louis. L'extrémité de ses
doigts avait effleuré le dos du blouson de Gage. Et puis le
blouson de Gage s'était volatilisé. Et Gage
s'était volatilisé aussi. " (44)
1.2.
Hélas !
Ce mot résume à lui seul toute la détresse d'un
homme face à la mort de son enfant.
"Hélas ! Ce petit mot,
en même temps qu'il exprime l'impuissance de l'homme devant
l'insoluble, traduit la vanité d'un effort voué
dès le commencement à l'échec : toute tentative
pour revivre le passé échappe à l'inhumaine
force des choses [...] Hélas !... Ce mot qui ne dit rien et
qui dit tout sans rien expliquer, ce mot qu'on prononce avec un
soupir [...] Ce petit mot si court qui en dit si
long. " (45)
Au moment où Mike est face à Mattie mourante, il pense
: " Hélas est le mot
qui correspond, dans les grilles de mots croisés, à un
mot de cinq lettres exprimant un grand chagrin. " (46)
Après la soudaineté de la mort, et les cicatrices
qu'elle laisse, il ne reste plus que les rituels, dont la fonction
euphémisante est incontestable. Ils servent en quelque sorte
à dédramatiser le passage entre l'ici-bas et
l'au-delà.
La nostalgie engendrée soumet l'homme au passage du temps, et
l'oblige à admettre que ce qui est peut un jour ne plus
être.
2. D'autres
fuites
2.1. La fuite dans
l'intemporalité
L'intemporalité peut être un refuge pour celui qui
refuse la réalité de la vie. Le retour de Mike,
à Sara Laughs n'est pas seulement une allégorie d'un
retour au passé, mais aussi une soumission au passage du
temps. Pendant le rêve, le temps n'est plus à l'oeuvre,
comme si la nuit mettait un flou sur la temporalité. Le
parallèle entre le rêve de Mike et son retour à
Sara Laughs est évident, et les différences qu'il
perçoit sont basées sur le phénomène
freudien d'" inquiétante
étrangeté
".
2.2. La
faiblesse de l'homme est révélée
Lorsque Mike pénètre dans sa maison, il est conscient
que " Brenda Meserve avait
fait du bon boulot - et un boulot humain - en faisant
disparaître ces traces et ces signaux, mais elle n'avait pas pu
tout repérer. " (47)
Le décalage, qui existe entre la personne
décédée qui n'est plus et les objets qui lui ont
appartenus et qui demeurent dans un temps universel, est
douloureux.
L'homme est prisonnier de la roue du temps. Afin de le
délivrer, même la mort n'est pas suffisante, car le
passage du temps se manifeste alors par la décomposition. La
plupart des êtres humains voudrait une longévité
sans les inconvénients de la vieillesse. Le temps passe,
emportant l'enfance, l'âge adulte, et la vieillesse de
façon inéluctable. Au moment de la crise cardiaque de
Norma, Louis se rend compte qu'elle " avait jadis été une fille de dix-sept ans
avec des seins que guignaient tous les garçons du voisinage,
trente-deux dents fermement plantées et sous sa robe à
corsage monté un petit coeur gonflé à
bloc ". (48) Cela montre
combien la vie humaine est fragile et
éphémère.
La vie passe, les être humains sont emportés dans la
roue du temps, jusqu'à ce que l'oubli remplace le
souvenir.
3.
L'oubli
3.1. Le temps
efface tout
Nous pouvons trouver cette idée dans les deuils symboliques
à travers lesquels les parents doivent passer. "
Durant la première
quinzaine de classe, une rumeur alarmante s'était
répandue à travers toute la maternelle : le père
Noël n'existait pas ! "
(49) Les parents doivent tourner les pages du livre de
l'évolution de leurs enfants, les bébés
grandissent et deviennent adultes à leur tour. "
Le jour vint aussi où
Gage dut subir la première coupe de cheveux de sa vie, et
lorsque Louis s'aperçut que les cheveux de son fils
repoussaient plus foncés, il affecta d'en plaisanter, mais, au
fond de son coeur il en éprouvait une peine
poignante. " (50)
Le pire de tout est peut-être que la douleur passe aussi. Il
peut sembler paradoxal d'affirmer qu'il est triste de voir les
souvenirs des mauvais moments s'effacer, et pourtant, cela montre
combien le temps est fort : il efface tout sur son passage même
ce qu'on se plaisait à croire voué à
l'éternité. Quatre ans après la mort de Jo, Mike
tombe amoureux de Mattie et parvient à faire son deuil.
3.2.
Même la passion est vouée à
l'échec
Même après la mort, l'infidélité
apparaît comme un échec. Après que Jo a eu une
rupture d'anévrisme et qu'elle en est morte, Mike souffre de
la panne de l'écrivain. La femme est souvent la source
d'inspiration, la muse de l'écrivain, et Mike
s'aperçoit que " ce
n'est pas le blocage [qu'il] redoute, mais de défaire le
blocage ". (51) L'oubli est
la pire chose qu'il puisse arriver à un couple, mais le temps
est assassin. Combien de temps l'amour peut-il durer lorsqu'une
partie du couple n'est plus ? La date anniversaire du départ
d'un être cher, ou du décès de la personne
aimée, est sensée rouvrir les blessures, mais il arrive
que le survivant ne soit plus aussi triste.
"Je mouillais mon
mouchoir en souvenir de vous...
Or, nous y re-voilà, mais je reste de pierre,
Plus une seule larme à me mettre aux paupières
Le vingt-e-deux septembre aujourd'hui je m'en fous
Et c'est triste de n'être plus triste sans
vous. " (52)
2.3. Certaines
fois, l'oubli est préférable
Il faut laisser les morts reposer en paix. Voulant les ressusciter,
Louis fait revenir des monstres, et les conséquences sont
terribles.
Pendant son investigation, Mike est prévenu par le gardien de
la maison. La citation qui suit a une connotation biblique qui
implique que fouiller dans le passé relève de la
transgression.
"Pour le salut de votre
âme, faites machine arrière et laissez les choses aller
leur cours. C'est de toute façon ce qui arrivera, que vous le
vouliez ou non. Ce fleuve -là est presque arrivé
à la mer ; ni vous, ni vos semblables ne pourront y faire
barrage. Laissez tomber, Mike. Pour l'amour du
Christ. " (53)
A ce niveau, la soumission à la fuite du temps apparaît
être une question de vie ou de mort. Il ne faut pas
réveiller un chien qui dort. Malgré cela, Mike va mener
son enquête et découvrir la raison de la mort de sa
femme, de Mattie, et la cause de tous ses maux. Même si,
à première vue, il semble préférable de
laisser les morts reposer et de tenter d'oublier, c'est la lutte qui
va sortir gagnante, mais pour cela, des forces surnaturelles ont
dû intervenir.
Symbolisme.
Le plus souvent, les regrets, et les
remords accompagnent l'homme à travers son existence. La fuite
dans l'intemporalité nous a montré combien la condition
humaine était précaire. Nous avons aussi vu que des
forces surnaturelles étaient requises pour que l'oubli ne soit
pas le grand vainqueur. Sinon, il est inexorable quoi que l'on pense,
quoique l'on fasse, quoique l'on dise.
L'imagination est l'une des seules caractéristiques, avec la
conscience de la fuite du temps et de la mort qui différencie
l'homme de l'animal. Les ouvrages sélectionnés pour
cette étude vont nous permettre de voir en quoi la dimension
surnaturelle peut véhiculer une richesse symbolique
indubitable. En pénétrant dans le monde imaginaire,
nous pourrons mieux appréhender l'inconscient de l'auteur.
Nous verrons aussi le symbolisme végétal et animal,
avant d'arriver aux symboles " par excellence ". Avant de
développer ces deux parties, nous entamerons un voyage dans
l'imagination humaine.
1.
L'imagination humaine et la création du symbolisme
1.1. La
mythologie
"Tempus edax rerum " (54) : le temps dévore tout.
Chronos est le fils indomptable de Gaea. Il détrôna son
père Ouranos, et le castra. Par conséquent, nous
comprenons que le règne d'Ouranos s'achève à
cause du principe temporel. Les adjectifs qui qualifient Chronos sont
" megas, aghraos, et ajuitomhtis " (55). Ils signifient
respectivement : grand, par rapport à l'importance de son
rôle ; qui ne vieillit pas ; et qui a une intelligence immense.
Chronos peut être représenté avec des ailes ou
comme serpent, symbolisant les mondes ouraniens ou chtoniens. Afin
d'éviter que le destin de son père ne se
répercute sur lui , Chronos dévorera ses propres
enfants . mais sa femme, Rhea et sa mère remplaceront un de
ses fils, Zeus, par une pierre, et ce dernier fera régurgiter
ses frères à Chronos.
En nous attardant sur l'histoire de Chronos, nous retrouverons un
symbolisme similaire dans les oeuvres de King : la castration, les
ailes, le serpent, les pierres etc. Le surnom de Chronos : le
dévoreur, est aussi à mettre en relation avec le nom du
grand-père de Kira : Max Devory.
L'angoisse de castration se retrouve dans Simetière, car Jud conseille à Louis de faire castrer
Church. Pour Louis, c'est une décision difficile à
prendre, et il pense que Rachel et Ellie ne peuvent pas comprendre ce
qu'il ressent. Bien qu'il dise que " ce [n'est] pas pour la simple raison qu'il assimilait sa
propre virilité à celle du gros chat mâle de sa
fille [...] " (56), on peut
penser que ce peut être, inconsciemment, la raison pour
laquelle il a annulé le rendez-vous pris chez le
vétérinaire. Nous pouvons établir un
parallèle entre la castration de Church et celle d'Ouranos.
Chronos utilisa une faucille pour castrer son père. Le
symbolisme de cette dernière est ambigu, il peut être
celui de la mutilation, de la mort et peut aussi être
l'emblème de la récolte, de la production, de la
reproduction, de la naissance et de la renaissance : indirectement,
ce geste peut être associé à la
résurrection, et préfigurer le processus par lequel
Church va devoir passer.
1.2. Les
conséquences de la naissance
L'importance du sommeil est
indéniable. C'est un régulateur de la vie, un rythme
nécessaire pour que l'être vivant recharge ses
batteries.
Il arrive qu'au bord du sommeil, l'homme sursaute. L'explication
rationnelle justifie ce phénomène par le fait que les
nerfs se relâchent. Mais, si l'on reste dans le monde
imaginaire, on peut penser que l'inconscient a stocké la
terrible sensation de la naissance, et reproduit l'expulsion, car les
ténèbres qui envahissent la cerveau peuvent rappeler le
monde intra-utérin. Le passage d'un monde humide,
tiède, et calme à un monde bruyant, à la
lumière crue est engrammé dans le cerveau. Cette
sensation de chute, peut nous mener à nous arrêter sur
le schème catamorphe durandien.
Entre le cimetière des animaux et celui des Micmacs, il y a
une pile de bois mort. Ellie l'escaladait au risque de tomber et de
se blesser. Jud la prévient, et elle descend de cette pile de
bois qui représente la frontière à ne pas
dépasser. Nous comprenons alors qu'Ellie sera sauvée,
car elle évite la chute (La Chute).
L'imagination humaine a créé des symboles pour
matérialiser cette notion abstraite qu'est le temps. En
littérature, le symbolisme permet à l'imagination des
lecteurs et des auteurs de travailler de façon
quasi-inconsciente.
2. Le
symbolisme végétal et animal
2.1. Le symbolisme
végétal
Le champ végétal du
symbolisme est souvent utilisé afin de représenter la
métamorphose. L'homme peut ressentir la
supériorité du végétal, qui est en
quelque sorte immortel. Les traitements homéopathiques
permettent à l'homme d'ingérer les bienfaits des
plantes. Les fleurs sont d'ailleurs récurrentes dans les
oeuvres que nous étudions. Louis offre un bouquet à
Norma après sa crise cardiaque, ce cadeau - commun pour les
personnes malades -, témoigne du caractère
éphémère de la personne vivante, mais est aussi
là pour dire que les choses évoluent : naissent,
vivent, se fanent soit, mais elles renaissent aussi. Dans
Sac d'os, une importance toute particulière est
véhiculée par les tournesols. Ces fleurs suivent la
course du soleil, et sont des petits soleils sur terre. "
Lex mea sol : le soleil est ma
loi " (57), pourrait
être la devise des tournesols. Ces fleurs ont un lien
étroit avec le soleil et symbolisent ainsi le passage du
temps. Leur première apparition intervient dans un rêve
de Mike : " trois grands
tournesols ont poussé entre les planches du petit perron
donnant du côté de l'allée. L'impression
générale n'est pas de la négligence, cependant,
mais de l'oubli. " (58)
L'impression " d'oubli " pourrait être transformée en
impression d'immortalité. D'ailleurs, la numérologie
est importante à remarquer. En effet, les tournesols sont au
nombre de trois, comme les fantômes qui hantent la maison :
Sara Laughs, son fils et Jo.
Nous aimerions aussi faire remarquer la géo-psychologie, car
les paysages influencent l'état d'esprit des personnages. Si
nous mentionnons cela, c'est parce que, plus on s'éloigne de
la civilisation, plus on s'éloigne du monde dirigé par
la course contre la montre. Derrière la maison de Louis Creed,
il y a un champ et, " [u]n
sentier d'un peu plus d'un mètre de large, nettement
délimité, soigneusement aplani,[qui] s'ouvrait en
bordure du pré à l'endroit précis où le
gazon entretenu faisait place à l'herbe haute
d'été et gravissait un coteau en sinuant à
travers des buissons bas et un bosquet de jeunes bouleaux avant de
disparaître à la vue ". (59) Plus loin encore, il y a le bois, qui pourrait
être considéré comme " une réflexion des ténèbres
existentielles de l'homme, et de l'inclination de l'homme à
pécher. [...] Le déplacement à travers les pins
sombres devient une métaphore pour le voyage
introspectif " (60).
Les déplacements récurrents de Louis sont des indices
de sa transformation. L'histoire de Dr Jekyll et Mr Hyde n'est pas
très éloignée de celle de Louis. Nous pourrions
même penser à un état schizophréne, mais
Louis est en fait possédé par l'esprit malin du
cimetière Micmac, il perd tout repère temporel
dès qu'il pénètre dans les terres
mystérieuses.
2. 2. Le
symbolisme animal
Ces symboles sont très
nombreux, et nous pouvons les classer en commençant par le
royaume aquatique jusqu'à celui des cieux.
Dans Sac d'os, il y a une évocation implicite des
poissons qui se trouvent certainement dans le lac. Ils sont les
témoins muets de terribles meurtres et d'infanticides qui ont
pris place dans le T.R.
"L'évocation des
poissons, qui muets, ne donnent rien à entendre et que la
profondeur et l'opacité de l'eau dérobent aux regards.
Ils sont là sans être perçus [...] De tout temps,
ils ont symbolisé une vie ralentie et 'froide' mais longue et
tenace. Peut-être même répondent-ils à
quelques fantasmes de régression à l'état
foetal. " (61)
Cette citation est une bonne synthèse de l'ambivalence des
poissons.
L'importance du chat est incontestable. Ils sont " oscillants entre les tendances
bénéfiques et maléfiques " (62). Church véhicule cette
même ambivalence. La fuite du temps l'a marqué de son
sceau. Il été " chaton, une adorable petite boule de poils [ et pourtant
], Louis l'avait vu harceler sans trêve un oiseau à
l'aile brisée avec dans ses yeux verts une lueur de
curiosité et aussi [...] une flamme glaciale de pure
cruauté ". (63) Le
chat d'Ellie est un " personnage " important, il est le premier
à revenir à la vie. Après sa
résurrection, il tue un corbeau, et nous pouvons
établir un parallèle entre ce combat et celui de
l'aigle et du serpent. Dans certaines traditions, le chat et l'aigle
sont associés. Après le retour son retour, le
côté diabolique de Church prend le dessus.
Une espèce d'oiseau apparaît dans Simetière et Sac
d'os : les passereaux. Ces
derniers semblent être omniscients et vouloir prévenir
Louis et Mike des dangers de la fuite du temps qui entraînent
ces protagonistes vers des fins tragiques. Les chouettes semblent,
quant à elles faire office de protection contre le danger
contenu dans le futur.
Le symbolisme végétal et thériomorphe
était très important afin d'interpréter le texte
de façon cohérente. Mais certains symboles sont encore
plus récurrents.
3. Les
symboles par excellence
3.1.
L'eau
L'eau était utilisée
dans les clepsydres afin de mesurer le temps dont la fluidité
est indéniable. Elle peut, aussi bien véhiculer une
connotation positive que négative, et nous allons traiter les
deux de façon respective.
Tout d'abord, nous pouvons l'appréhender comme le sang de la
terre, elle contient donc la vie. De plus, l'imagination humaine peut
la relier au liquide amniotique, et cela lui donne une valeur
régénérante. Nous pouvons porter un oeil averti
sur la récurrence des bains que prend Louis. Cela nous
confronte au schème d'avalage : après que Louis a
été témoin de la mort de Pascow, le docteur
ressent le besoin de se relaxer, de se ressourcer, car il s'est
trouvé impuissant devant l'achèvement de la vie de ce
jeune homme. Le bain prend donc sa valeur " purificatrice et
régénératrice ". (64) Cette même sensation est ressentie par
Mike, lorsqu'il se baigne dans le lac :
"Je descendis jusqu'au lac et
m'avançai dans l'eau. Sa fraîcheur fut plus que
simplement agréable pour mon corps surchauffé ; elle
fut synonyme de résurrection. " (65)
Cette renaissance peut sembler paradoxale si l'on prend en compte le
fait que l'eau est " fraîche ", au lieu de la tiédeur
associée au monde intra-utérin. Mais la
température joue ici un second rôle par rapport à
la liquidité, car cette dernière réconforte Mike
comme le ferait une mère : " L'eau nous porte, l'eau nous berce, l'eau nous endort,
l'eau nous rend notre mère. " (66)
La rivière est aussi profondément symbolique. On ne se
baigne jamais deux fois dans la même eau, car la course qu'elle
suit ne s'arrête jamais. Dans la conception linéaire du
temps, la rivière devient facilement la flèche que nous
utilisons pour matérialiser le temps :
Passé >
Présent > Futur
Le gardien qui s'occupe de la maison
de Mike utilise une métaphore pour le prévenir de ne
pas faire resurgir les démons du passé : "
Ce fleuve-là est
presque arrivé à la mer. " (67)
RIVIERE : La mémoire des ancêtres MER : L'oubli de la
progéniture
Passé
Présent
Futur
"L'eau, à travers la mémoire de l'homme
garde en son sein les traces de tout le mal qui y est passé.
Stephen King ne fait que se servir de cette mémoire diabolique
et rappelle à la surface des entités qui ne sont pas de
ce monde. L'eau est le catalyseur des forces maléfiques, mais
aussi une force en elle-même qui semble vouloir s'exprimer, et
montrer qu'il faut compter sur elle. " (68)
Le lac dans lequel Mike est
projeté par Rogette Whitmore et Max Devory peut être
considéré comme l'oeil de la terre, et le témoin
des meurtres qui y ont été
perpétrés.
La forme circulaire du lac peut nous
mener à développer le cercle.
3.2. Le
cercle
La roue est facilement
connectée au passage du temps. Dans Simetière et Sac
d'os, nombre d'objets font
indirectement référence à la roue. Nous allons
citer un des passages dans lequel Mattie est encerclée par la
fuite du temps l'emmenant inexorablement à sa mort. Lorsque
Mike arrive, " il la souleva
de terre et la fit tournoyer pendant qu'elle s'accrochait à
son cou. " (69). Dans ce
chapitre, l'omniprésence de la forme circulaire
préfigure la fin tragique, car l'inexorabilité et
l'inéluctabilité sont inscrites dans ce symbolisme.
Une autre forme circulaire digne d'intérêt est celle de
la lune. La nuit où le fantôme de Victor Pascow vient
prévenir Louis, " la
lune surgit de derrière un nuage, inondant la chambre d'une
lumière froide et blafarde [...] " (70). Il est vrai que la lune a été la
première à matérialiser le temps, et de nombreux
calendriers portent encore la trace de l'importance qu'elle
véhicule.
"Le symbolisme lunaire
apparaît [...] comme étroitement lié à
l'obsession du temps et de la mort. Mais la lune est non seulement le
premier mort, mais encore le premier mort qui ressuscite. La lune est
donc [...] promesse explicite de l'éternel retour. [...]
Mythes cycliques,
mythes du déluge, du
renouveau, liturgie de la naissance et de la croissance, mythes de la
décrépitude de l'humanité s'inspirent toujours
des phases lunaires. "
(71)
Ce n'est donc, évidemment pas par hasard que la lune
apparaît au même moment que Pascow, qui est le premier
à revenir sous forme fantomatique après sa mort.
La forme des horloges imite celle de la lune, et il y a des
références aux horloges dans les deux ouvrages
sélectionnés. Après le retour du monstre de
Gage, Louis rentre dans la maison de Jud où des meurtres
sanglants ont été commis par le petit garçon
ressuscité.
"Gage ?
Rien. Même le tic-tac du gros régulateur du salon avait
cessé. Personne ne l'avait remonté ce
matin. " (72)
Comme si le royaume de l'au-delà était privé de
temps. De plus, on peut noter que dans la maison d'un mort, l'horloge
est symboliquement arrêtée. L'homme souhaite que le
temps suspende son vol lorsqu'une personne chère n'est plus.
Une autre horloge revêt une importance non négligeable :
celle de Jo. C'est un chat qui remue la queue et qui est en fait un
compte à rebours. Quand les événements sont
allés trop loin pour changer le cour du destin, Mike
découvre " cette
stupide horloge Félix le chat, achat de Johanna. La queue
avait fini ses allées et venues, et ses gros yeux en plastique
gisaient sur le sol. Ils avaient littéralement jailli de sa
tête. " (73)
L'imagination humaine s'est créé des symboles temporels
afin de matérialiser, d'une certaine façon, cette
notion si abstraite. La peur de la fuite du temps prend racine au
moment de la naissance, et continue pendant toute la vie d'un homme.
Nous avons vu que le symbolisme végétal ou animal
recouvrait une importance cruciale pour un oeil averti. Les symboles
du temps sont d'une aide appréciable afin de
pénétrer dans le royaume de Chronos. Démystifier
le texte passe inévitablement par une étude approfondie
du domaine de l'imaginaire. Ce voyage dans l'imagination, dans la
partie inconsciente de l'auteur, et dans celle du lecteur nous a
montré que la fuite du temps est souvent implicite, mais
omniprésente dans l'oeuvre kingienne.
©
- Courrier éventuel
à : <delph.lespinasse@libertysurf.fr>
Notes.
(1) Malabou, Catherine
: Le temps. Paris, Hatier, 1985, p. 5
(2) Jankélévitch, Vladimir : L'irréversible et la nostalgie. op. cit. p. 8
(3) King, Stephen : Simetière. op.cit. p. 135
(4) Ibid, p. 282
(5) King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 572
(6) King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 415
(7) Siffre, Michel : Hors du
temps. Paris, Julliard, 1963,
p. 101
(8) Kauffman, Christophe : " De l'angoisse à la peur " in
Les dossiers de
Phénix. France,
Lefrancq, 1995, p. 142
(9) King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 257
10. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 52
11. Ibid, p. 51
12. Pagnol, Marcel : Le
château de ma mère. Poitiers, Pastorelli, 1988, p. 249
13. Vergotte, Antoine : " Réciprocité du temps et
éternité " in Temporalité et aliénation. Paris, Aubier, 1975, p. 96
14. Sabbah, Hélène : La fuite du temps. Paris, Hatier, 1985, p. 7
15. Traduction de l'auteur de : " Stop all the clocks ". Auden, W.H
: Stop all the Clocks
in The English Auden, London,
Faber and Faber, 1968, p. 15
16. La présente étude a été
originellement écrite en 1999
17. King, Stephen : Op. cit. p. 367
18. Bianchi, Henry. Le moi et
le temps. Paris, Bordas,
1987, p. 102
19. King, Stephen :
Simetière. Op. cit.
p.477
20. Ibid, p. 159
21. Ibid, p. 380
22. Jean Potel cité par Louis-Vincent Thomas : Anthropologie de la mort. Paris, Payot, 1975, p. 328
23. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 29
24. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 74
25. Sabbah, Hélène : La fuite du temps. Paris, PUF, 1985
26. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 50
27. Ibid, p. 80
28. Martin-Achar, Robert : De
la mort à la résurrection. Neuchâtel : Delachaux&Niestle, 1956, p.
25
29. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 495
30. Jankélévitch, Vladimir : L'irréversible et la nostalgie. Paris, Flammarion, 1974, p. 162
31. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 234
32. Gargam, Georges : L'amour
et la mort. Paris, Seuil,
1959, p. 101
33. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 109
34. Poulet, Georges : Les
métamorphoses du cercle. Paris, Libraire Plon, 1961, p. 143
35. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 253
36. Werber, Bernard : Le jour
des fourmis. Paris, Albin
Michel, 1992, p. 23
37. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 397
38. Jankélévitch, Vladimir. op.cit. p. 163
39. Jankélévitch, Vladimir : L'aventure, l'ennui, le sérieux. Paris, Montaigne, 1963, p. 173
40. Pierre de Ronsard, cité par Hélène Sabbah.
op. cit. p. 20
41. Brassens, Georges : Le
fossoyeur. Paris, Phonograph,
1953
42. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 273
43. Jankélévich, Vladimir : L'irréversible et la nostalgie. op. cit. p. 374
44. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 282
45. Jankélévich, Vladimir : L'irréversible t la nostalgie. op.cit. p. 190-191
46. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 495
47. King, Stephen : Ibid, p. 109
48. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 125
49. Ibid, p. 216
50. Ibid, p. 253
51. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 79
52. Brassens, Georges : Le 22
septembre. Paris, Phonograph,
1964
53. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 441
54. Ovide cité par Jean Pucelle : Le temps. Paris,
PUF, 1955, p. 124
55. Brisson, Luc : Mythes et
représentation du temps. Paris : édition du CNRS, 1985, p. 43
56. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 30
57. Pucelle, Jean. op. cit. p. 128
58. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 52
59. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 21
60. Traduction de l'auteur de " a reflexion of the self's essential darkness and the
human affinity to sin [...] The journey into the dark pines becomes a
metaphor for the journey into the self ". Magistrale, Anthony : The Moral Voyages of Stephen King. USA, Starmont House, 1989, p. 50
61. Hulin, Michel : La face
cachée du temps.
Paris, Fayard, 1985, p. 80
62. Chevalier, Jean ; Gheerbrant, Alain : Dictionnaire des symboles. Paris, Robert Laffont, 1996, p. 214
63. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p.
56
64. Chevalier, Jean ; Gheerbrant, Alain. op. cit. p. 96
65. King, Stephen : Sac
d'os ; op.cit. p. 274
66. Bachelard, Gaston : L'eau
et les rêves. Paris,
Fayard, 1985, p. 178
67. King, Stephen : Sac
d'os ; op.cit. p. 441
68. Labbe, Denis : " L'eau chez King, une matrice de l'horreur " in
Les dossiers de
Phénix. op.cit. p.
103
69. King, Stephen : Sac
d'os. op. cit. p. 481
70. King, Stephen :
Simetière. op. cit. p.
95
71. Durand, Gilbert : Les
structures anthropologiques de l'imaginaire. Paris, Dunod, 1969, p. 337
72. King, Stephen : Simetière. op. cit. p. 460
73. King, Stephen :
*Delphine Lespinasse est
étudiante à Grenoble III. Elle a passé ce
mémoire de maîtrise de maîtrise LLCE anglais
(originellement écrit en anglais, et traduit par la
suite) sous la direction de Jean Marigny soutenu le 10 juin 1999 sous
le titre : From
Womb to Tomb" in Stephen King's Pet Sematary and Bag of
Bones ( "We fall from womb to tomb, from one darkness and
into another, remembering nothing of the one, and knowing nothing of
the other."
Trad. de
Jean-Daniel Brèque : "D'une matrice à une autre, d'une
ténèbre à une autre, ayant presque tout
oublié de l'une et ignorant tout de l'autre.", Pages Noires,
216).
Elle travaille
actuellement sur un DEA
sous la direction d
'André Siganos ( Grenoble III. Stendhal) : Vers une thanatologie
fantastique. Le cas de trois auteurs contemporains : Serge Brussolo,
Valerio Evangelisti et Stephen King.
d.grepilloux@nomade.fr
autres textes de cet auteur
:
Considérations sur le
mythe. saison printemps
2003
|
.. du site Imaginaire