Delphine Lespinasse.
D'UNE
TÉNÈBRE À UNE AUTRE
Les
âges de la vie, la fuite du temps et la mort
Première partie : LES ÂGES DE LA VIE
dans Pet Semetary et Bag of
Bones de Stephen
King.
Introduction.
Année 1999 : le
déclin du millénaire sera témoin de
l'achèvement de cette étude. Certes, c'est une pure
coïncidence, la peur millénariste peut néanmoins
faire figure d'atmosphère adéquate pour que se
déroule une exploration du passage du temps et de la mort.
Notre monde va entrer dans le troisième millénaire et
nombreux sont ceux qui se sentent dépassés par une
évolution qui n'est pas toujours aussi contrôlée
qu'elle le devrait. Les questions existentielles sont le lot de
l'espèce humaine, et l'angoisse réside en grande partie
dans la prise de conscience de la fuite du temps et de la mort. Ce
n'est ni une inclination morbide ni, non plus, une volonté
cathartique qui m'ont menée a ce sujet, mais la
nécessité de comprendre et d'analyser avec un support
littéraire la plus grande peur de l'homme : la fuite du
temps le menant inexorablement à sa mort... «Dr King
l'exorciste»1, va nous faire passer dans un royaume où force
humains détesteraient errer, dans le royaume où
l'angoisse est hantée par la fuite du temps et la mort. Le
choix de Stephen King peut se justifier par l'utilisation
omniprésente de la peur, qui marque de son sceau le
schème temporel de ses oeuvres. Grâce à cet
auteur, il nous sera possible
« d'embarquer pour un voyage ténébreux, de
descendre dans le trou noir [...] et de remonter à la surface
sains et saufs, d'avoir effleuré le bord de la rivière
de la mort. En effet, notre passeur a une main de
maître. »2
Maintenant que j'ai clarifié
la motivation des choix du sujet et de l'auteur, je souhaiterais
donner l'explication de la sélection de Simetière et Sac d'os
parmi l'oeuvre
particulièrement prolifique de Stephen King. Le premier traite
directement de ce royaume de malaise dans lequel je voulais
pénétrer. En fait, Simetière
va même si loin dans la catharsis que King, en premier lieu, ne
souhaitait pas le faire publier, il ne l'a d'ailleurs jamais relu. Il
aborde différents thèmes pertinents pour cette
étude. Sans « interpréter à
outrance », mais en utilisant les méthodes
adaptées, le message sous-jacent nous révélera
la cohérence de Simetière
au sein de notre corpus. Le choix de Sac d'os est
encore plus simple à justifier. Ce roman traite aussi de
nombreux aspects que je souhaitais analyser et développer dans
ce mémoire, et lors de la sélection des ouvrages,
c'était le dernier roman de Stephen King.3 Par conséquent, aucune critique
n'avait encore était faite, et l'intérêt de cette
recherche en était enrichi par la motivation d'explorer des
territoires vierges.
Nous allons donc entrer dans les
mondes de Simetière
et de Sac d'os. Lors de l'étude de Simetière, nous rencontrerons les Creed. La famille
idéale : Louis est docteur, sa femme, Rachel est superbe
et attentionnée, ils ont deux enfants : Ellie
âgée de sept ans et Gage, un adorable petit
garçon de deux ans. Church les accompagne car c'est
l'inséparable chat d'Ellie. Depuis qu'ils ont
emménagé à Ludlow, ils ont rencontré Jud
et Norma un couple de personnes âgées. Mais, il ne
faudra pas longtemps avant que le malheur frappe, et que la dimension
fantastique s'installe... Sac
d'os commence par le
décès de la femme de Mike Noonan :Jo. Avec les
thèmes de l'amour perdu, et du blocage de l'écrivain,
nous voyagerons au coeur de l'amour, au coeur de la romance au coeur
d'une histoire hantée. Après sa retraite dans sa maison
au bord du lac, Mike rencontre non seulement Mattie et Kira, mais
aussi le cruel Max Devory. La lutte que Mike entreprend contre les
conséquences ineffaçables de son passé se
révélera comme un contexte approprié pour la
manifestation de forces sinistres et pour l'agrément de mon
travail. Comment ce peut-il que l'homme soit né pour
mourir ? J'essaierai d'éclaircir ce mystère
à travers cette présente étude. Dans la partie
sur les âges de la vie, je suivrai l'évolution
chronologique de la vie de l'espèce humaine à travers
l'enfance, l'âge adulte et la vieillesse. Ensuite, dans la
deuxième partie, ma préoccupation sera de comprendre
les manifestations du passage du temps, la lutte que l'homme engage
pour contrer cet ennemi. Pourtant, l'homme est encerclé par la
roue du temps, en proie à sa fuite parce que destiné
à vieillir et à - mourir... Nous analyserons, à
la fin de cette partie, le symbolisme du passage du temps. La mort
est le lot de tout homme. La fatalité entraîne
l'arrivée de Thanatos, et outre-tombe, une immortalité
fantomatique peut mener certains morts à l'errance. Enfin, le
symbolisme de la mort nous prouvera combien l'imagination et
l'interprétation sont cruciales afin de permettre la
compréhension
approfondie du texte. Maintenant, laissons nous guider dans les
royaumes où Chronos et Thanatos règnent en
maîtres.
Première partie.
l'enfance,
l'âge adulte, la vieillesse.
« Le Monde entier est un théâtre, et tous,
hommes et femmes, n'en sont que les acteurs. Tous ont leurs
entrées et leurs sorties, et chacun y joue successivement les
différents rôles d'un drame en sept âges. C'est
d'abord l'enfant vagissant et bavant [...] La scène finale,
qui termine ce drame historique, étrange et accidenté,
est une seconde enfance, état de pur oubli ; sans dents,
sans yeux, sans goût, sans rien ! »3a
Voici la vie, résumée en ce superbe monologue. Nous
rencontrerons des personnages d'âge divers dans Simetière et Sac
d'os, et nous nous
attarderons particulièrement sur : l'enfance, l'âge
adulte et la vieillesse. Afin de pénétrer au coeur du
texte, nous ne souhaitons pas relever tous les âges de la vie,
une telle analyse friserait le catalogue, et comme Todorov nous
préférons « laiss[er] l'exhaustivité à ceux qui s'en
contentent ». Nous
tenons à préciser que le développement qui sera
fait se réfère essentiellement à Simetière et Sac d'os,
certaines remarques ne sont,
par conséquent pas applicables à
l'intégralité de l'oeuvre kingienne. Ellie, Gage et
Kira nous présenteront leur monde. Celui d'une enfance
synonyme d'innocence mais pour qui le Malin est moins refoulé
qu'il ne l'est par leurs aînés. Une enfance
idéalisée, car ces trois enfants sont de
« vrais petits anges ». Les adultes, hommes ou
femmes, célibataires ou mariés, nous permettront de
faire une étude, proche de la personnification banale, mais
néanmoins nécessaire. Cet âge de la vie, pendant
lequel il ne reste plus grand chose de l'enfance, et à l'issue
duquel on s'effraie de la fuite du temps et de la mort, nous
révèlera son importance coordonnatrice.
« L'antichambre de
la mort »3b
s'ouvrira enfin à nous. C'est une vieillesse bienveillante ou
aigrie à laquelle nous serons confrontés. La
malveillance de certaines personnes âgées dans
Simetière
et Sac d'os, peut être occasionnée par cette
mort qui les aspire lentement pour les happer
inévitablement.
a. L'enfance
Les opinions des auteurs divergent énormément
dès lors que le thème de l'enfance est abordé.
William Golding considère les enfants comme étant
cruels, ils « n'ont jamais été doués
pour obéir à leurs aînés, mais ne rateront
pas une occasion de les imiter ».4 Dans Simetière
et Sac d'os, nous découvrirons en quoi l'enfance
est synonyme d'innocence, avant d'étudier leurs pouvoirs
extralucides face au Malin. Pour finir, nous considérerons
cette enfance idéalisée.
1.
L'enfance :
stade de l'innocence
1.1. L'enfance : étape
précédant l'expérience et la connaissance
L'enfance, dans les oeuvres que nous
traitons, est autant synonyme d'innocence qu'elle est
éphémère. Les enfants ne sont pas conscients de
cette caractéristique. La seule chose importante à
leurs yeux est de profiter du moment présent, et d'exprimer
leurs sentiments véritables. Ils sont eux-mêmes. C'est
la raison pour laquelle, il ne faut pas
« gronde[r un
enfant] parce qu'[il]dit la vérité, [...] Vous savez
bien que les enfants disent toujours la vérité. Sans
ça ce ne seraient pas de enfants. »5
L'hypocrisie n'est pas encore ancrée dans leur for
intérieur, et comme les enfants ne sont pas réellement
conscients de l'altruisme (du moins jusqu'à trois ans), ils ne
se soucient guère de ce que les autres pensent d'eux. De plus,
comme nous le voyons ici avec cette phrase formulée par Norma,
certaines personnes sont enclines à être indulgentes
simplement parce qu'elles sont face à des enfants.
1.2. Leurs premiers pas dans le
monde
Chaque jour apporte à l'enfant de nouvelles
expériences, il n'y a pas longtemps qu'ils ont vu le jour et
leur connaissance du monde est encore très limitée.
Pendant cet âge de la vie, la dépendance envers les
adultes prévaut. Ce stade, considéré comme celui
de « l'oralité », entraîne une
relative dépendance quant à la nourriture. Relative car
les enfants savent quand ils ont faim, et parviennent à ce
gérer sur ce point :
« Ce n'était
pas l'heure de la tétée et Gage connaissait son horaire
aussi bien (sinon mieux) que sa mère ;elle lui offrit
tout de même le sein, et il s'empressa de la mordre avec ses
dents toutes neuves. »6
Mais, la plus importante des évolutions pour un enfant de deux
ans se fait dans le domaine du langage. Les progrès dont le
lecteur est témoin tout au long du livre prouvent bien la
véracité de cette prise de position. A leur
arrivée à Ludlow,
« Cela faisait
bientôt un mois qu[e Gage] avait commencé à dire
« M'man »,et il s'était essayé une
fois ou deux à articuler quelque chose qui ressemblait
vaguement à « Papa »[...] Mais là,
accident ou volonté délibérée
d'imitation, [Gage] avait bel et bien dit quelque chose. Il avait
dit :chez nous. »7
Plus loin dans le livre, Louis est au téléphone avec
Rachel qui lui passe Gage, et
« [p]endant une
demi-minute environ, Gage lui déversa à l'oreille un
flot de borborygmes et de glouglous joyeux entrecoupés d'un
certain nombre de mots distincts, tels que maman, Ellie, mammy, papy,
auto, camion, caca. Son vocabulaire s'enrichissait sans
cesse. »8
Je souhaite ici faire une remarque concernant une carence de la
version traduite. En effet, dans le texte original, une remarque
mentale est faite par Louis au sujet de la prononciation du mot
voiture, Gage imite parfaitement l'accent Yankee :
« [...] car (pronounced in the best Yankee tradition as
kaaa [...]) »9 Cela a une importance dans notre propos. Un
bébé a le potentiel de produire bien plus de sons que
ses parents, même certaines sonorités qu'il n'a jamais
entendues au préalable. Un nourrisson a un éventail de
sons supérieur à celui d'un enfant plus
âgé. Ce fait peut s'expliquer par
l'autorégulation du cerveau qui se débarrasse des sons
dont il n'aura pas l'utilité, et la précision que Louis
apporte ancre le récit dans la réalité.
Les premiers pas dans le monde ne sont pas des plus faciles, mais ils
sont fructueux. Les enfants font d'énormes progrès, ils
apprennent de nouvelles compétences, et prennent conscience de
leur être. Les adultes et les personnes âgées les
aident sur le chemin de l'apprentissage. Nous pouvons donc affirmer
que l'enfance est un stade de dépendance nécessaire
à l'autonomie future parce que le champ de l'inné chez
l'homme est très limité.
11.3. La prise de
conscience de la fuite du temps et de la mort peut être
considérée comme acquise.
Les enfants peuvent prendre
conscience de l'inexorabilité de la vie par le biais d'une
explication ou par une expérience personnelle directe, cela
peut passer par différentes phases. Lorsque Ellie va à
l'école pour la première fois à Ludlow, le
lecteur se rend compte d'une compréhension inconsciente et
symbolique du passage du temps.
« Ellie se retourna
brièvement vers ses parents et leur lança un
drôle de regard implorant comme pour leur demander s'il
n'était pas encore temps d'enrayer cette mécanique
impitoyable qui était en train de l'aspirer.[...] Elle tourna
la tête et gravit le marchepied de l'autobus, dont la porte se
referma sur elle en projetant au-dehors une légère
vapeur qui faisait songer à l'haleine d'un
dragon. »10
Cette citation nous éclaire sur
l'irréversibilité de certaines étapes de la vie.
De manière implicite au début, mais cela devient
symboliquement explicite (quel étrange oxymore ) avec
« [...] l'haleine de
dragon », car nous
savons que le dragon est le symbole thériomorphe par
excellence de la fuite du temps. Nous développerons ce point
dans le détail ultérieurement.
Cette prise de conscience du passage du temps et de la mort peut
frapper un enfant de diverses façons. C'est ce qui arrive
lorsque les Creed suivent Jud au cimetière des animaux.
Là-bas, Ellie est confrontée à la
mort :
« Souvent, ce
cimetière d'animaux est leur premier face-à-face avec
la mort [...] Bien sûr, ils voient des gens mourir à la
télé, mais ils savent bien que c'est de la blague
[...] »11
Cette rencontre avec Thanatos mène Ellie à admettre que
quelqu'un qui est ne
sera pas
toujours. Sa réaction
est comme une bombe à retardement, elle réagit avec une
grande violence, et nous pouvons d'ailleurs remarquer la similitude
de la réaction d'Ellie avec celle de son père qui,
lorsqu'il fut confronté à la mort pour la
première fois, et qu'il comprit ce que signifiait
être
mort, hurla :
« Elle ne peut pas
être morte ! MAMAN, ELLE NE PEUT PAS ËTRE
MORTE ? JE L'AIME ! »12 Dans cette exclamation l'égocentrisme de
l'enfant est révélé. Comment peut-il être
possible que quelqu'un meure s'il était aimé ?
Cela accentue toute l'horreur de la mort. L'enfance est souvent
considérée comme « le puits de l'être »13 et lorsqu'un enfant comprend que la vie
s'achève, des réactions insoupçonnables peuvent
surgir. Pour Ellie, la crise cardiaque de Norma n'est pas injuste. La
mort lui paraît normale tant qu'elle ne frappe que des
personnes âgées. Mais, à la mort de son petit
frère, elle se renferme complètement sur
elle-même, et son inconscient se manifeste lors de ses
rêves, mais nous verrons cela plus loin.
La prise de conscience de Kira est différente en ce sens que
la mort a frappé directement sa famille. Nous pouvons voir la
façon dont elle se rend parfaitement compte de la mort de sa
mère quand Mike
« [...] vi[t] son
désir d'être contente, vi[t] aussi qu'elle prenait
conscience que Mattie n'était plus là pour se
réjouir avec [eux. Il] vi[t] que l'idée que Mattie ne
serait plus jamais là pour se réjouir avec [eux] lui
effleurait l'esprit... et [il] senti[t] qu'elle la repoussait. [...]
et Kira se remit à pleurer. »14
Pour beaucoup l'innocence de l'enfance s'arrête au moment
où l'enfant prend conscience de la fuite du temps et de la
mort, mais cela peut néanmoins paraître trop
simpliste.
L'innocence est peut-être l'une des principales
caractéristiques de l'enfance, du moins dans les oeuvres que
nous étudions, mais cela n'implique en aucune manière
que les enfants n'ont pas de capacités...
2.
Les enfants et
les visions extralucides
2. 1.
Extra-sensibilité : l'enfance est l'âge de la vie
le plus proche du néant.
Par conséquent, leur
mémoire inconsciente du néant est bien plus
récente qu'elle ne peut l'être pendant l'âge
adulte. C'est la raison pour laquelle les « enfants sont de
meilleurs auditeurs aux histoires contées, et y sont plus
réceptifs »15
2. 2. Leur sensibilité au
Malin est supérieure à celle des adultes.
Tout d'abord, nous pouvons appuyer
sur le fait que l'attitude manichéenne de certains adultes
n'échappe pas aux enfants. Kira comprend exactement ce que les
« bonhommes du
ré-fri-gé-ra-teur »16 veulent lui dire : « nana blanche ne [l'aime] pas
vraiment ».17
Les prémonitions sont une autre formes
d'extra-sensibilité. C'est le cas de Ki, lorsqu'elle a un
mauvais pressentiment alors que tout le monde s'amuse à la
petite fête organisée par Mattie pour
célébrer la fin de leurs problèmes. C'est la
raison pour laquelle elle demande : « Mike [...] Tu t'occuperas de
moi ? »18 Le futur est un temps que les enfants n'emploient que
très rarement, il témoigne donc ici d'une angoisse
relative au temps qui passe entraînant inexorablement la
mort : celle de sa maman, Mattie... Ellie aussi a des
prémonitions. Elles se manifestent par ses rêves,
(cauchemars...). Elles sont récurrentes après la mort
de Gage :
« [Ellie a]
rêvé qu'[ils] été à l'enterrement
de Gage et que quand le croque-mort ouvrait son cercueil, le cercueil
était vide. Après [elle a] rêvé qu'elle
étai[t] à la maison et qu' [elle] regardai[t] dans le
lit de Gage. Il était vide aussi, mais il y avait de la terre
dedans. »19
C'est une préfiguration de l'exhumation que Louis projette et
de la résurrection de Gage. « L'isomorphisme
« sépulcre-berceau » »20 montre la future renaissance.
Nous pouvons aussi considérer que les enfants sont élus
en tant que porte-parole par des forces surnaturelles.
« Les enfants sont ceux qui comprennent le mieux le
déroulement du mal, mais sont aussi ceux qui ont le moins de
pouvoir pour l'enrayer. »21 Le fantôme de Victor Pascow tente de
prévenir Louis, mais en vain. Il choisit ensuite Ellie qui
réagit violemment. Elle ne peut rien faire pour aider Louis et
en parle à sa mère. Malgré la
révélation d'Ellie, Rachel essaie de rationaliser. Elle
ne peut faire confiance à son intuition avant d'avoir
vérifié que ce que lui disait Ellie n'était pas
une réaction au terrible accident de Gage. Le même
fossé sépare ici l'enfance de l'âge adulte et
l'intuition de l'action.
Dans le champ de l'extra-sensibilité, il est certain que les
enfants sont supérieurs aux adultes. Lorsque Kira se confie
à Mike et qu'elle lui avoue sa mauvaise prémonition, il
y a une inversion dans les rôles joués par l'enfant et
l'adulte. En effet, à l'arrivée de Mattie, la petite
fille dit : « Voilà maman. »22 Le ton qu'elle emploie rappelle à Mike
« la réplique
classique Pas devant les enfants. »23
L'extra-sensibilité des enfants dans Simetière et Sac
d'os est incontestable.
Grâce à leurs intuitions nous avons des indices sur le
déroulement de l'histoire. Cela nous prouve aussi que
malgré leur plus petite taille et leur expérience
limitée, les enfants sont supérieurs aux adultes dans
certains domaines.
3. L'idéalisation de l'enfance nous mène
à penser que
« l'enfant est le père de
l'homme »
3.1. L'enfance comme
« fondement de l'être au
monde »
24
Etant le premier âge de la vie,
l'enfance a une importance à travers toute l'existence d'un
homme. « L'enfance
[...est un] fondement de l'être au monde qui ne cesse de
parcourir les âges. »25 La façon dont un enfant agit peut
préfigurer l'adulte qu'il deviendra. La digression que je suis
menée à faire ici n'est pas gratuite, mais
nécessaire pour accentuer ce que je souhaite
démontrer.
C'est l'histoire d'un scorpion qui veut traverser une rivière,
mais, ne sachant nager il se voit obligé de demander de l'aide
à une grenouille. Celle-ci n'accepte qu'après une
longue discussion car elle craint d'être piquée. Le
scorpion lui jure donc de ne pas lui faire de mal, et monte sur son
dos. Arrivés au milieu de la traversée, la grenouille
ressent une douleur intense sur son dos, et comprend qu'elle a
été piquée. Elle a juste le temps de demander au
scorpion : « Pourquoi ? », et
d'ajouter : « Maintenant nous allons nous noyer tous
les deux.» Et lui de répondre : « parce
que c'est dans ma nature. »
« Les gens changent
parfois.
-Possible, mais le contraire est plus
fréquent. »26
C'est le cas de Max Devory, le grand-père de Ki, qui
enfant :
« [...] était entré par effraction dans la
cabane de pêche de Scant Larribee, un hiver, parce qu'il
voulait la luge, une Flexible Flyer, que Scant avait offerte à
son fils Scooter pour Noël. [...] Devory s'était
entaillé les deux mains en cassant la vitre, mais il avait
tout de même pris la luge. »27
Cette attitude machiavélique restera sienne car,
jusqu'à sa mort, la fin justifiera les moyens pour avoir la
garde de sa petite-fille.
3. 2. L'enfance est
considéré comme l'âge d'or
Comme il est habituel d'entendre : « quand
j'étais enfant, quand j'étais jeune... c'était
le bon temps... » Même si les années
passées n'étaient pas si belles, elles revivent dans
notre mémoire avec une aura qui les fait paraître
magnifiques, parfaites. Elles sont tout simplement
irremplaçables et cela les rend superbes.
« Mes
vingt ans sont morts à la guerre
De l'autre côté du champ d'honneur,
Si j'connus un temps de chien, certes,
C'est bien le temps de mes vingt ans !
Et pourtant je pleure sa perte,
Il est mort, c'était le bon temps ! »28
Ce sentiment peut être
expliqué par notre condition de mortel. L'enfance est
idéalisée car elle nous apparaît comme un refuge.
Celui du passé.
« L'aura esthétique qui nimbe l'enfance, l'enfance
étant toujours et universellement souvenir d'enfance
étant archétype de l'être euphémique
ignorant de la mort parce que chacun d'entre nous a été
enfant avant d'être homme. »29
La description physique suivante est une vue matérialiste de
la notion que nous venons de développer. Regardant Ki, Mike
pense : « C'est
leur peau qui est incroyable ; le grain est d'une telle finesse
qu'on croirait qu'elle n'a pas de pores. »30
Après avoir considéré l'enfance comme
« fondement de
l'être », et
comme un âge d'or, nous pouvons comprendre la tristesse d'un
thème tel que celui de la mort de l'enfant.
3.3. La mort de
l'enfant
Dans la pensée occidentale, l'enfance est
préférée à la vieillesse. Cela est
radicalement différent dans d'autres traditions où la
vieillesse peut tendre à être
vénérée. Au regard d'autres traditions, le
décès d'un enfant est bien moins grave que celui d'une
personne adulte, ou pire d'une personne âgée. Mais, pour
les occidentaux, il n'est rien de pire que de perdre un enfant. Ce
thème sera bien plus détaillé dans notre partie
traitant de la mort, mais nous pouvons d'ores et déjà
considérer les différentes morts qui frappent un enfant
dans
Simetière et
Sac d'os. Chronologiquement, la première
à perdre la vie est la soeur de Rachel : Zelda. Mais, le
lecteur n'est pas réellement attaché à elle car
Zelda est un personnage secondaire. Pourtant, elle a beaucoup
souffert, sa mort a été très pénible et
longue à venir. Elle « a succombé à une méningite
cérébro-spinale »31Rachel ajoute que : « Jour après jour, Zelda se
détériorait devant [leurs] yeux [...] »32 Sa mort a été ressentie comme un
soulagement, mais les cicatrices qu'elle a laissées chez
Rachel, alors qu'une enfant se rouvrent facilement et resteront
à jamais présentes... Rachel a une peur phobique de la
mort, elle en est terrorisée comme d'un monstre. Dans
Simetière, elle se met en position foetale à plusieurs
reprises. Dès qu'elle est confrontée à la mort,
cette position montre combien elle lui permet de
« remonter le temps
et retrouver les quiétudes
prénatales. »33 Après qu'ils sont allés au
cimetière des animaux, la réaction
quasi-hystérique d'Ellie effraie Rachel qui, lorsque Louis va
se coucher, « dormait à l'extrême bord du lit,
recroquevillée en position de foetus avec le
bébé dans ses bras »34 Nous imaginons Rachel et Gage emboîtés et
cela nous rappelle le « schème d'avalage »
durandien.
Nous souhaiterions parler ici d'une autre mort, celle d'un foetus.
Cela aurait pu ne pas être si émouvant que dans
Sac d'os, pourtant ce qui accroît la tristesse
ressentie c'est le fait que Mike ignorait que Jo était
« enceinte . De six ou sept semaines, d'après le...
tu sais...l'autopsie. »35 Dans ce cas précis, la mort frappe avant la
naissance, ce paradoxe souligne le lien direct qu'entretient la vie
avec la mort.
« Nous tombons d'une
matrice à une autre, d'une ténèbre à une
autre, ayant presque tout oublié de l'une et ignorant tout de
l'autre... »36
La mort de Gage est tragique car c'est le décès d'un
petit garçon que nous avions appris à aimer et à
voir avec le regard de ses parents. De plus elle frappe avec une
grande violence et n'en est que plus injuste.
« Oh oui, tout s'est
passé très vite, excessivement vite, pas de doute,
c'est d'ailleurs pour cela que le cercueil est fermé : on
n'aurait rien pu faire pour rendre Gage présentable, [...]
à un certain moment Gage était sur la route, et la
minute d'après il était étendu par terre, une
centaine de mètres plus loin [...] Le camion l'a
heurté, l'a tué, et ensuite il l'a traîné
avec lui et pour être rapide ça a été
rapide, ça, vous pouvez me croire. »37
Nous ne ferons pas de commentaires sur cette citation afin de laisser
le sentiment d'absence, d'injustice et de vide atteindre son
apogée.
L'innocence de l'enfance dans ces deux oeuvres de King est
incontestable. Les enfants n'ont pas eu assez de temps afin
d'accumuler autant d'expérience que les adultes car ils font
leur premiers pas dans le monde. Les adultes sont donc pour eux des
guides sur le chemin de la vie. Les enfants ne comprennent pas
exactement les notions de fuite du temps et de mort, mais leur manque
d'expérience rationnelle peut leur permettre de faire plus
confiance à leur sensibilité. L'idéalisation de
l'enfance est chose commune, car c'est, en quelque sorte une des
racine de l'être, elle contient de nombreux souvenirs. Pour la
pensée occidentale, la mort de l'enfant est aussi horrible que
cette étape de la vie est éphémère.
Lorsqu'elle frappe, elle enlève toute planification pour le
futur de cet enfant qui ne rentrera jamais dans l'âge adulte.
b. L'âge adulte
Cette partie risque
d'apparaître aux yeux de certains comme une simple
personnification. Mais, elle est nécessaire afin d'avoir une
meilleure compréhension des personnages principaux qui seront
classifiés dans l'âge adulte. Bien que, sans l'enfance
et la vieillesse, l'étude de cet âge de la vie ne soit
pas aussi pertinente, nous y trouverons des caractéristiques
dont l'importance se révélera. Nous étudierons
en premier lieu les hommes, ensuite les femmes avant d'en arriver aux
couples qu'ils peuvent former. Aucun jugement sexiste relatif
à ce plan ne doit être fait. La justification est
simple : les hommes sont étudiés en premier pour
respecter la chronologie des romans Simetière
et Sac d'os.
1. Les
hommes
1.1. Leur
apparence physique
Les personnages principaux masculins ne sont pas décrits
physiquement. Cela est moins étonnant dans Sac d'os car Mike est le narrateur, qu'en ce qui concerne Louis
Creed. C'est positif dans le sens où le lecteur
créé une image mentale des personnages, il les
façonne en fonction de leurs actions, de leurs professions,
etc. En fait, Stephen King fait confiance à son lecteur qui
fera un rapprochement quasi-systématique du rapport au monde
du personnage et de sa physionomie.
D'un autre côté, les personnages secondaires sont
décrits plus précisément. L'avocat de Mattie est
« [...] un grand
rouquin maigre [... qui] avait la peau claire et tâchée
de son, le genre qui ne bronze jamais mais brûle et pèle
en grandes plaques comme de l'eczéma. Il avait les yeux verts
[...] Il devait avoir au moins trente ans mais il paraissait avoir
l'âge de Mattie [...] »38
Si nous ne savons pas comment sont Louis et Mike physiquement, nous
connaissons, en revanche, leurs professions. Respectivement, nous
avons affaire à un docteur, et à un écrivain.
Cela s'avère être primordial quant au
développement des histoires. Louis est censé avoir
l'esprit rationnel, aider les gens dans leurs souffrances, avoir
été le témoin direct de plusieurs
décès. Mais il a aussi un goût poussé pour
l'expérimentation, il veut aller au-delà des limites
malgré les conséquences pouvant dépasser
l'entendement, prenant le risque que la science prenne sa revanche.
Un parallèle peut d'ores et déjà être
établi entre le docteur Creed et le docteur Frankenstein.
Leurs expériences contre nature les mènent tous deux
à leur perte. Leurs attitudes démiurgiques les font
transgresser l'ordre suprême. Cependant, Louis accepte ses
responsabilités alors que le docteur Frankenstein les fuit
dès qu'il a devant les yeux sa créature. Lorsque Louis
bute contre le corbeau que lui apporte comme offrande Church, il
pense qu' « il
ne lui restait plus qu'à nettoyer ça. [...] il fallait
bien qu'il assume ses responsabilités. C'était son
affaire, et la sienne seule. Il l'avait implicitement admis (ou en
tout cas son subconscient le lui avait fait admettre)
[...] »39 Il se peut que nous soyons plus indulgents envers Louis
Creed que nous ne le sommes envers le docteur Frankenstein, car Louis
est possédé par le cimetière Micmac.
En ce qui concerne Mike, cet écrivain célèbre
n'est pas loin de nous rappeler Stephen King. Nous pouvons même
nous demander si certaines parties ne sont pas autobiographiques. Par
exemple, lorsque Mike est en compétition avec Mary Higgins
Clark. De plus, le blocage de l'écrivain dont souffre Mike
après le décès de son épouse est
redouté par Stephen King.
1.2. La
retraite
A la mort de Gage, Louis n'assume aucunement la responsabilité
qui consisterait à consoler son épouse et sa fille. A
une occasion, Rachel éclate en sanglots et Louis se sent
dévisagé par toutes les personnes présentes,
« ils attendaient
qu'il réconforte sa femme. Mais il en était incapable.
Il voulait le faire. Malgré cela, il ne pouvait
pas. »40 Rachel et Ellie ont toutes deux besoin de lui, mais il
ne peut les aider pendant cette période de deuil.
La retraite de Mike est plus facile à détecter. Elle
n'intervient pas au détriment de qui que ce soit. Il
décide de quitter l'endroit qu'il partageait avec Jo à
Derry afin de rejoindre la maison qu'il possède dans le T.R.
Sa retraite géographique est un voyage métaphorique
introspectif et temporel.
1.3. Les
actions pendant leurs retraites
De façon assez paradoxale, c'est pendant leurs périodes
de retraite que Louis et Mike sont les plus actifs. Après
avoir « persuad[é ... Rachel] de vider les
lieux [...] »41, Louis est libre de prendre en main ce qu'il avait
projeté d'entreprendre, cette expérience qui depuis un
certain temps n'est plus enfouie si profondément dans son
inconscient : il exhumera le cadavre de son propre fils et
l'emportera au cimetière Micmac.
L'action dans laquelle Mike s'engage est très
différente de celle de Louis. Son objectif est positif, mais
il faudra qu'une longue période s'écoule afin qu'il
prenne conscience de ce qu'il doit entreprendre : permettre aux
esprits fantomatiques de Sara Laughs et de son fils de reposer en
paix. En règle générale, la personnalité
d'un écrivain est bien moins rationnelle et plus imaginative
que ne l'est celle d'un docteur, mais face à des
événements surnaturels, Mike a besoin de temps pour
s'adapter. Grâce à son acception des
phénomènes paranormaux, il sera capable d'annuler la
malédiction pesant sur Sara Laughs, et de libérer sa
femme.
Ces deux hommes ont des partenaires féminins sans lesquels ils
n'auraient pas le même charisme.
2. Les
femmes
2.1. La
beauté comme caractéristique
récurrente
Jo est très attirante comme nous pouvons conclure après
la description que fait Mike d'une photo :
« Elle venait juste
de sortir de l'eau et était toute mouillée ; elle
portait un maillot de bain deux-pièces, [...] elle riait et
repoussait ses cheveux trempés en arrière,
dégageant son front et ses tempes. Le bout de ses seins
était visible sous le soutien-gorge ; on aurait dit une
actrice sur une affiche de cinéma... »42
L'importance donnée à l'eau prend dans cette citation
une connotation érotique. Les descriptions relatives aux
femmes sont toujours faites d'un point de vue masculin, par
conséquent elles sont la plupart du temps sensuelles.
La beauté des femmes dans Simetière
et Sac d'os est indiscutable, et leur physionomie est en
accord avec leur personnalité. Elles sont en effet
bienveillantes.
2.2.Elles sont
aussi éphémères qu'un bouquet de
fleurs
Notre classification pourrait apparaître morbide, elle ne
respecte pas la chronologie des ouvrages car nous souhaitons parler
en premier lieu de la plus jeune femme qui meurt. Avant de
développer ce point, nous pouvons remarquer que Mattie, Jo et
Rachel sont toutes trois frappées par des morts
prématurées et violentes accentuant ainsi l'injustice
de Thanatos.
Mattie est assassinée d'une balle de revolver, mais elle ne
meurt pas sur le coup. Alors qu'elle agonise, une description
très crue est donnée :
« Un
côté de sa tête [...] présentait un aspect
normal, mais le gauche était en capilotade. Un oeil bleu
sidéré me regardait entre des mèches de cheveux
ensanglantées. Des fragments de boîte crânienne
s'étaient émiettés sur son épaule
bronzée, [...] »43
Le caractère « gore » correspond à
l'éphémère conception de l'espèce
humaine. Une minute vivante et magnifique, celle d'après
épouvantable et morte. Ce n'est là qu'une fiction, mais
la réalité n'en est pas moins cruelle : aux
Etats-Unis, la violence prévaut, les
« shootings » sont le lot de tous les jours.
Beaucoup d'individus sont tués, en majorité des
pauvres. Nous ne sommes, socialement, pas égaux devant la
mort.
Le décès de Jo n'est pas, à première vue
un meurtre, mais un accident cérébral : une
rupture d'anévrisme. Sa « mort avait sans doute été
instantanée, d'après [...] l'assistant du
légiste, mais s'était tout de même produite de
manière bien prématurée... et elle n'avait pas
souffert. Juste une grande nova noire, la perte de toute sensation,
de toute pensée, avant même de toucher le
sol. »44 Sa mort ne paraît pas aussi horrible que celle de
Mattie si ce n'est qu'elle était seulement âgée
de trente-cinq ans et qu'elle attendait un enfant. Nous verrons
ultérieurement que le décès de Jo a en fait
été occasionné par une force surnaturelle et
vengeresse.
Concernant Rachel, elle est assassinée par son propre fils
ressuscité d'entre les morts. Louis la découvre,
« il aperçut
sa femme - à qui il avait apporté un jour une rose
entre ses dents - étendue, morte [...] On l'avait
poignardée à coups répétés - dix
fois ? vingt fois ? [...] Louis Creed se mit à
hurler comme un damné. Ses hurlements se répercutaient
d'un mur à l'autre et leurs échos stridents roulaient
à travers les pièces vides de cette maison où
n'habitait plus que la mort. »45 La violence de la mort, l'éphémère
de la vie de Rachel sont renforcés par la connotation de
douceur et de fragilité contenu dans la
« rose ».
Les morts atroces de ces trois femmes
sont décrites par leurs partenaires masculins.
3. Les
couples
3.1. Les couples
mariés
Nous ressentons, à travers Simetière
et Sac d'os que le mariage est une institution
importante. Même si la racine religieuse n'est plus sa seule
raison d'être, il apparaît comme un pas
considérable dans les étapes de l'amour.
Nous pouvons nous référer à une reprise
symbolique lorsque Louis et Rachel vont visiter le cimetière
des animaux guidés par Jud : « [...]
ils passèrent sous
l'arcade d'un même mouvement en se prenant instinctivement par
la main comme deux futurs mariés qui franchissent le porche
d'une cathédrale. »46 L'arche symbolise ici l'harmonie, et c'est ainsi qu'ils
vivaient avant d'être coincés dans la roue de la
fatalité. Leur mariage était un succès. Rachel
remplissait vraiment le rôle de l'épouse qui peut
consister certaines fois à remplacer la mère. Nous
voyons que lorsque Louis rentre de sa terrible journée pendant
laquelle il a été confronté à la mort de
l'un des étudiants du campus sur lequel il travaille, Rachel
« lui fit couler un
bain brûlant, le déshabilla lentement [...] elle avait
préparé un boeuf Stroganoff qui avait mijoté
à feu doux [...] »47 Le bain chaud nous rappelle le monde
intra-utérin, et notre point de vue peut être mis en
emphase par la citation suivante :
« Nous souffrons de
nous voir perdus au milieu d'êtres qui ne nous aiment pas, nous
nous souvenons de cette femme, qui d'abord nous donna tout sans rien
exiger en échange, et qui, peu à peu, nous repoussa,
semblant nous exposer aux dangers, nous obliger à devenir des
hommes. Peut-être l'essence de l'amour masculin est-elle un
désir de retrouver cette mère des premiers jours, de
revivre à rebours la naissance, de se fondre à nouveau
en celle dont le temps nous a séparés. »48
Pourtant, au fur et à mesure que l'histoire se
développe, un fossé semble s'immiscer entre Louis et
Rachel.
Nous ne savons rien au sujet de la manière dont les Creed se
sont connus, mais nous lisons à propos de Jo et Mike qu'ils
avaient « tous deux
suivi des études de lettres à l'université du
Maine et, comme tant d'autres il faut bien le dire, [ils
étaient] tombés amoureux des sonorités de
Shakespeare et du cynisme d'Edwin Arlington Robinson »49 Le parallélisme entre leur amour et
l'écriture est évident, et peut être l'une des
explications du blocage de l'écrivain dont souffre Mike
après le décès de Jo : elle était sa
muse comme le sont bien des femmes pour les auteurs. Mike pense que
« tout bon mariage
est un territoire secret, un espace nécessairement
laissé en blanc sur la carte de la société. Ce
que les autres en ignorent est précisément ce qui en
fait le vôtre. »50 Cette conception implique qu'un décès
prenant place au sein d'un couple, entraîne forcément
dans la mort une partie du survivant.
Nous vivons dans une société matérialiste, il
serait donc faussement romantique de parler d'un couple et d'en
ignorer sa richesse patrimoniale. Il serait candide d'affirmer que de
nos jours on peut vivre « d'amour et d'eau
fraîche ». Louis et Mike ont tous deux des
professions enviables. Mike est honnête à ce
propos : « Alors que j'avais à peine trente et un ans, nous
possédions déjà deux maisons : la
ravissante vieille baraque édouardienne de Derry, et un chalet
en rondins au bord d'un lac, tellement grand qu'on aurait pu en faire
une auberge. De plus, nous les détenions en toute
propriété, sans emprunt, à une époque de
la vie où la plupart des couples se sentent déjà
privilégiés d'avoir obtenu, souvent haute lutte, un
prêt bancaire. » 51
Mais, l'argent ne pourra jamais combler ce manque laissé par
l'être aimé qui n'est plus.
3.2. Les
couples non mariés
L'infidélité n'est pas mise en cause après la
mort du conjoint. Néanmoins, lorsque Mike rencontre une femme
dont « une main
aventureuse [...] tripota à l'endroit où personne autre
que [lui] n'avait touché depuis près de trois ans et
demi »52,et qu'il ajoute : « Ce fut un sacré choc, mais pas
entièrement désagréable »53, nous pouvons ressentir une tromperie envers Jo, car il
est difficile d'admettre que personne n'est irremplaçable.
Après sa rencontre avec Mattie, nous sommes menés
à penser que l'amour tend à faner, il ne peut perdurer
éternellement après la mort de l'une des personnes du
couple. C'est la raison pour laquelle il arrive parfois que certains
couples préfèrent se suicider. Ainsi, leur amour reste
aussi intense qu'au moment où Thanatos les a
emportés.
3.3.
L'âge adulte : étape de la vie où l'on
conçoit une famille
Mike et Jo ont tenté pendant des année d'avoir un
enfant, mais en vain. Ce n'est qu'après la mort de Jo que Mike
apprend qu'ils allaient avoir une fille. Lance et Mattie ont
donné naissance à Kira, « [l]e plus précieux petit bout de chou
au monde. »54, aux yeux de sa mère. Louis et Rachel ont deux
enfants : Ellie et Gage. Dans les deux livres que nous
étudions, les couples perpétuent l'espèce.
3.4.
L'âge adulte : lien entre les deux extrêmes de la
vie
Pour finir, nous aimerions considérer l'âge adulte comme
l'étape de la vie qui fait office de pont entre l'enfance et
la vieillesse. Alors qu'il franchit l'entrée du
cimetière des animaux, « Louis v[o]it Jud et Ellie passer sous une espèce
d'arcade [...] »55 Cette arcade peut évoquer une
matérialisation des âges de la vie. La première
partie de la vie étant ascendante : Ellie, et la seconde
phase descendante : Jud. La valeur symbolique de l'arcade nous
montre bien combien la connexion entre l'enfance et la vieillesse est
rendue possible grâce à l'âge adulte.
Après avoir noté que l'apparence physique des hommes
n'était pas tellement détaillée, nous nous
sommes arrêtés sur leur retraite et les actions qui les
caractérisent. Au sujet des femmes, nous avons vu combien
elles étaient magnifiques mais éphémères.
Nous pouvons néanmoins nous demander si ce n'est pas justement
l'éphémère qui leur procure cette magnificence
post-mortem, comme si la mort les rendait encore plus
désirables.
« Il est toujours joli, le temps
passé.
Une fois qu'ils ont cassé leur pipe,
On pardonne à tous ceux qui nous ont
offensés :
Les morts sont tous des braves types. »56
Malgré cette
considération, la bienveillance des femmes dont nous avons
parlé est incontestable. La rencontre entre les hommes et les
femmes peut mener aux couples, qu'ils soient officiels ou non, et
enfin à la constitution d'une famille. Passons maintenant au
dernier âge de la vie que nous avons choisi de
développer : la vieillesse.
c. La vieillesse
La vieillesse est une preuve du
développement diachronique de la vie. C'est une
perpétuelle transformation, une lente usure des organes et
tissus. Cette transformation paraît injuste, opposée, en
tous points de vue à l'idée que nous nous faisons du
miracle. Et, quel futur s'offre à une personne
âgée ? La mort. Néanmoins, l'être
humain a le choix de bien vieillir, ou de mal vieillir.
Respectivement, en acceptant l'irréversibilité de la
vie, ou en essayant d'inverser les aiguilles du temps, de ralentir la
lente progression de la décrépitude. La vision que nous
avons d'une personne âgée peut être
évocatrice d'une « invitation au voyage »,
le voyage vers l'au-delà, l'invitation à la
mort.
1. Bien
vieillir
Dans notre esprit, la vieillesse peut
prendre la connotation positive de la vie qui s'étiole
sereinement. Les personnes âgées véhiculent une
douce idée de confort, et de lenteur. Lorsque l'on
pénètre chez elles, on fait un pas dans un royaume de
paix, un royaume où la vie a déjà fait son
travail, un royaume où le passé appartient au
présent, un royaume de nostalgie.
1.1.Les vieux
ont été jeunes - eux aussi -
Il arrive parfois que l'on oublie que les personnes
âgées, elles aussi, ont eu une jeunesse. Les regrets ne
doivent pas hanter l'esprit de quiconque, car ils sont inutiles. Il
est nécessaire d'accepter l'irréversibilité de
la vie.
« J'ai eu votre
âge, moi aussi ; moi aussi après tout, j'ai
été jeune ; moi aussi j'ai vécu,
aimé, espéré [...] J'ai eu mon temps moi aussi,
ma part et ma saison ; je ne mourrai pas sans avoir connu, au
moins pendant quelques brèves années, ce qui rend la
vie digne d'être vécue. »1
Comme la vie des personnes
âgées est derrière elles, leur esprit est rempli
de souvenirs. Jud raconte à Louis deux histoires
différentes à propos de la mort de son chien Spot. Il
est soit mort « d'une infection consécutive à des
blessures qu'il s'était faites en s'accrochant à de
vieux barbelés rouillés. »2soit, « [...] mort de sa belle mort
[...]»3 Louis tente
alors de se convaincre que Jud «est vieux, et que les vieux ont souvent la
mémoire qui flanche [...]»4 Nous savons,
cependant que cela ne peut être vrai car les personnes
âgées souffrent bien plus de la perte de mémoire
proche dans le temps. C'est-à-dire que les souvenirs d'antan
ne sont pas altérés. A la mort de Norma,
Jud
« se mit à débiter un flot
ininterrompu de souvenirs et d'anecdotes ; ils étaient
clairs, vibrants de couleur et de vie, captivants même. Et
entre deux évocations du passé, le vieil homme
affrontait le présent avec une énergie que Louis
trouvait admirable. »5
Jud est moralement fort,
car même en racontant le passé, il n'évacue pas
totalement le présent. La jeunesse de Norma,
« Ah, si vous
l'aviez vu à seize ans, [...] quand elle revenait de
l'église avec son caraco déboutonné... Vous
auriez fait des yeux comme des soucoupes. Pour quelqu'un comme elle,
le Diable se serait fait moine. »6,
sa vieillesse, sa mort...
Le temps reprend la vie qu'il a prêtée à
l'être vivant sans le moindre remords. Ce qui reste de Norma
est dans le coeur de Jud. A sa mort, seuls leurs noms sur les pierres
tombales témoigneront de leur passage sur terre, car ils
n'avaient pas d'enfants.
1.2. Les
principales caractéristiques des personnes
âgées
Les vieux sont souvent plus indulgents que les adultes. Norma demande
à Louis de ne pas gronder Ellie lorsque la petite fille dit
que les pommes que lui offrent Norma sont répugnantes.
Les personnes âgées sont aussi censées être
plus « sages ». Elles ont acquis une
expérience et un recul importants, et connaissent les
« coups durs de la vie ». Elles tentent
d'être réalistes, et honnêtes, comme l'est Jud
avec Louis : « Vous aviez sauvé la vie de Norma, je voulais
faire quelque chose pour vous en échange, et l'endroit a fait
dévier mes bonnes intentions de façon à ce
qu'elles se prêtent à ses abominables desseins.[...] Je
crains qu'il ne m'ait utilisé pour vous atteindre à
travers votre fils Louis. »7
Jud est cru avec Louis car
il sait que le docteur Creed veut aller exhumer son fils afin de
tenter l'expérience : l'enterrer au cimetière
Micmac pour que Gage ressuscite d'entre les morts. Ce travail de
sagesse que Jud exerce n'est pas négligeable car il oblige Jud
à oublier sa fierté personnelle.
De la même manière que l'enfance, la vieillesse peut
être caractérisée par une certaine
extra-sensibilité. Contrairement à l'enfance, c'est par
son expérience que la vieillesse perçoit mieux les
schémas intrinsèques de l'âme. Louis a
l'impression que le vieil homme lit « dans ses pensées comme dans un
livre. »8 Ce sentiment
d'être mis à nu par Jud est récurrent, et nous
mène réellement à penser que les personnes
âgées - du moins Jud - sont extralucides. Elles
connaissent si bien le coeur humain.
Cela n'est pas gênant tant que ce « don »,
est celui d'une personne âgée bienveillante, mais peut
être alarmant dès lors qu'un personnage négatif a
cette capacité.
2. Mal
vieillir
Certaines personnes n'acceptent pas
l'idée de la vieillesse. Elles tentent donc de tricher afin
que leur apparence extérieure ne trahisse pas leur
âge.
2.1. Les
changements physiologiques déguisés
Afin de prouver cette affirmation, nous allons utiliser un
contre-exemple : celui de Rogette Whitmore. Les descriptions qui
lui sont relatives mènent le lecteur à penser qu'elle
est vieille. Ce n'est pas avant l'épilogue que nous apprenons
qu'
« [e]lle
était atteinte d'une leucémie [...] Chez les gens de
son âge - au fait, elle n'avait que cinquante-sept ans -
l'issue est fatale deux cas sur trois, mais elle suivait une
chimiothérapie. D'où la perruque. » 9 Afin de
dissimuler les traces de sa maladie, Rogette portait une perruque.
Cela dénonce bien l'importance que revêt l'apparence
extérieure dans nos sociétés modernes. Quelle
somme certaines personnes sont-elles prêtes à
dépenser pour de la chirurgie esthétique ?
2.2. Les
secrets à ne pas communiquer aux jeunes
générations
Dans Simetière
et Sac d'os, Stephen King traite des secrets des
populations locales. Les personnes âgées sont enclines
à remplacer un manuel d'histoire, elles sont d'authentiques
témoins du passé qui reste longtemps dans la
mémoire des communautés. Mais elles ne veulent pas
transmettre certains secrets pour ne pas rouvrir des blessures trop
mal cicatrisées. Paradoxalement, leurs explications seraient
bien plus utiles que leurs dissimulations, mais rompre certains
secrets serait considéré comme une trahison.
2.3.Le passage
du temps et ses conséquences destructrices sur les
hommes.
Norma avait compris qu'elle ne pouvait pas lutter contre
l'irréversibilité du temps : elle acceptait son
arthrite. Max Devory est par contre très aigri. Il nous
apparaît comme un monstre.
« Le vieillard
anéantit la raison, la théorie, l'explication, et leurs
efforts. Il est monstre précisément, parce qu'il n'a
rien à expliquer, mais qu'à être là pour
que trop soit dit. »10
La première, et
dernière, rencontre de Mike avec Max Devory,
révèle la monstruosité de la vieillesse de cet
homme.
« En travers de ses
genoux était posée une canne en bois noir. Elle se
terminait par une poignée de bicyclette en caoutchouc rouge
vif. Les doigts qui s'y agrippaient paraissaient avoir de la force,
mais ils prenaient la nuance noire de la canne. Sa circulation
sanguine se dégradait, et [Mike] préférai[t] ne
pas imaginer de quoi ses pieds et ses jambes avaient
l'air. »11
Cette description est
effrayante, et certaines personnes peuvent même
préférer mourir plus jeune afin d'éviter ce
stade de décrépitude.
2.4. Les
vieilles personnes peuvent devenir sadiques
Quelqu'un qui souffre peut être enclin à torturer
moralement ses proches, à tirer partie de son image.
« Par le jeu sadique
qu'il fait du signifiant qu'il constitue pour l'autre, [... le
vieillard peut] jouir des marques cachées ou éclatantes
de l'horreur qu'il inspire. »12
La vue que Max Devory et
Rogette Whitmore inspire à Mike, et au lecteur, peut procurer
la chair de poule, car tous deux véhiculent vraiment
l'emprunte du tombeau.
Si la vision qu'ils inspirent est si répugnante, c'est parce
que la vieillesse entretient une relation directe avec la
mort.
3. Une
invitation à mourir
3.1. Les
symptômes de la mort
En occident, la vieillesse apparaît souvent comme une maladie
irrémédiable. Cela est terrible, et projette force
hommes dans un paradoxe certain : ils veulent la
longévité sans les inconvénients de la
vieillesse. A la vue d'une personne âgée qui refoule son
vieil âge, nous pouvons entr'apercevoir une personnification de
la mort: « la
vieillesse est l'antichambre de la mort »13, et nous
avons vraiment cette impression dans la description suivante :
« Maigre à faire peur, les lèvres bleues, la
peau d'une nuance de violet tirant sur le noir autour des yeux et aux
commissures des lèvres, Max Devory avait l'air du genre de
truc que les archéologues trouvent dans les chambres
mortuaires des pyramides [...] »14
A la vue de certaines
personnes âgées, l'impression d'être face à
Thanatos peut nous envahir. Les vieux sont souvent confrontés
à la mort. Ils s'y habituent, ou plutôt s'y adaptent.
Ils sont les témoins de la mort de leurs proches, et sont
menés à penser à la leur. Le soir de leur
arrivée, Louis regarde la maison de Jud et pense :
« Il est toujours
là [...] Il n'ira sans doute pas se coucher avant un bon
moment. Les vieux ont du mal à dormir. On dirait qu'il monte
la garde. On dirait qu'il guette quelque chose.
Mais quoi ? »15
Peut-être
guettent-ils la venue de Thanatos... Et le mystère est
levé par le parallélisme établi entre cette
citation et la fin du texte, quand Jud essaie de guetter et qu'il est
assassiné par Gage ressuscité.
Le dégoût perceptible chez certaines personnes, à
la vue d'un vieux peut s'expliquer par le fait que la vieillesse est
le pôle extrême de la vie. Mais un pôle vers lequel
nous tendons tous...
3.2. La
vieillesse : l'extrême vers laquelle nous tendons
tous
Quelle pensée désagréable ! Comment
admettre que l'on deviendra un « sac d'os » quand
nous aimons et profitons de la vie ? Nous sommes passifs face
à la fuite du temps qui nous fait vieillir inexorablement.
Cette notion de passivité est implicite lorsque Mike est
précipité dans le lac par Max et Rogette. Luttant pour
ne pas couler, Mike prend une peur panique «
Le garçon, le petit
garçon s'est noyé ici ! Et s'il m'attrapait et
m'entraînait ? »16 Cette peur
semble relever de la paranoïa, mais elle révèle
bien notre passivité face au vieillissement et à la
mort - «le petit
garçon [...] noyé» - qui nous tireront dans l'au-delà quoi que l'on
fasse. «La mort, la
destruction et la destinée nous attendent tous à la fin
du voyage - dans la vie comme dans la littérature
d'horreur.»17
Nous avons vu que l'homme peut bien ou mal vieillir selon qu'il
accepte ou non son infériorité face à la fuite
du temps. La seule vue d'une personne âgée peut nous
rappeler notre condition mortelle. Lorsqu'elle a accompli sa vie sur
terre, seule la mort se présente comme futur. Nous terminerons
cette partie par deux citations qui mettent en emphase l'injustice de
la vie.
« Le temps d'apprendre à vivre, il est
déjà trop tard,
Que pleurent dans la nuit nos coeurs à
l'unisson. »18
La seconde amplifie encore cette
notion :
« Il ne
faut pas neuf mois, il faut soixante ans pour faire un homme,
soixante ans de sacrifices, de volonté, de... de tant de
choses ! Et quand cet homme est fait, quand il ne reste en lui
rien de l'enfance, ni de l'adolescence, quand vraiment, il est homme,
il n'est plus bon qu'à mourir. »19
©
- Courrier éventuel
à : <delph.lespinasse@libertysurf.fr>
la suite à
la
deuxième partie.
Notes:
1 Traduction de l'auteur de :
« Dr King the exorcist », Underwood,
Tim : « The Skull beneath the Skin » in
Kingdom of Fear. USA :Signet, 1987
2 Traduction de l'auteur
de :« embark upon a night journey, make the descent
down the dark hole [...] and return in safety to the surface-to the
near shore of the river of death. For our boatman has a master's
hand. »Winter, Douglas E. « The Night Journey of
Stephen King » in Fear Itself.
USA :Plume, 1984
3 Ce travail a été
originellement écrit en anglais avec les oeuvres
originales : Pet
Sematary et Bag of Bones. Lors du choix, Bag of Bones
venait d'être publié.
3a Shakespeare,
William : Comme il vous
plaira. Paris :
Garnier-Flammarion, 1964, p. 252-253 (traduction de
François-Victor Hugo).
3b Dimowski, Eva :
Eros et
Thanatos. Grenoble :
thèse, 1984, p. 217
4 Traduction de l'auteur de :
« They have never been good at listening to their elders,
but have never failed to imitate them. » Baldwin
cité par Laurent Bourdier: L'enfance et l'adolescence dans l'oeuvre de Stephen
King. Grenoble :
thèse,1998,p.245
5 King, Stephen :
Simetière. (traduit de l'américain par François
Laspin ), Paris : Albin Michel, 1985, p.120
6 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p. 13-14
7 Ibid, p. 16
8 Ibid, p. 166
9 King, Stephen :
Pet Sematary. New York : Signet, 1984, p.145
10 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p. 35
11 Ibid, p.66-67
12 King, Stephen : Op. Cit. p.
73
13 Bachelard, Gaston :
La poétique de la
rêverie. Paris :
PUF, 1968, p. 98
14 King Stephen : Sac d'os,
(traduit de l'américain par William Olivier Desnod),
Paris : Albin Michel, 1999, p. 513
15 Traduction de l'auteur de :
« children are best at listening to stories and being
affected by them » Ryan, Alan : « The
Marsten House in Salem's Lot » in Fear Itself. Op.
Cit. p. 187
16 Stephen, King :
Sac d'os. Op. Cit. p. 385
17 Ibid, p. 385
18 Ibid, p. 484
19 Stephen, King :
Simetière. Op. Cit. p.354
20 Durand,
Gilbert : Les structures
anthropologiques de l'imaginaire. Paris : Dunod, 1992, p. 270
21 Traduction de l'auteur de :
« [...] children, who often understand the intrisics of
evil best have the least power to change it. » Bosky,
Bernadette : « The Mind's a Monkey » in
Kingdom of
Fear. Op. Cit. p. 250
22 King, Stephen :
Sac d'os. Op. Cit. p. 482
23 Ibid, p. 482
24 Bosetti, Gilbert :
« L'enfance, âge du mythe » in
Les âges de la
vie. Grenoble : CRI,
1994, p. 31
25 Bossetti, Gilbert : Op. Cit.
p. 31
26 King,
Stephen : Sac
d'os. Op. Cit. p. 165
27 Ibid, p.165
28 Brassens, Georges :
Le temps
passé. Paris :
Intersong, 1957
29 Durand, Gilbert : Op. Cit.
p.467
30 King, Stephen :
Sac d'os. Op. Cit. p. 127
31 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p. 233
32 Ibid, p. 234
33 Durand, Gilbert. Op. Cit. p.
62
34 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p. 70
35 King, Stephen :
Sac d'os. Op. Cit. p. 17
36 King, Stephen :
Anatomie de
l'horreur. Paris : J'ai
lu, 1995, p. 282
37 King Stephen ;
Simetière. Op. Cit. p. 276
38 King, Stephen :
Sac d'os. Op. Cit. p. 288-289
39 King, Stephen :
Simetère.
Op. Cit. p. 219
40 Ibid, p. 282
41 Ibid, p. 415
42 King,
Stephen : Sac
d'os. Op.Cit. p. 82
43 Ibid, p. 495
44 Ibid, p. 15
45 Ibid, p. 463
46 Ibid, p. 46
47 Ibid, p. 92-93
48 Alquié, Ferdinand :
Le désir
d'éternité.
Paris : PUF, 1966, p.47
49 King,
Stephen : Sac
d'os. Op. Cit. p.
22-23
50 Ibid, p. 110
51 Ibid, p. 30
52 Ibid, p. 58
53 Ibid, p. 58
54 Ibid, p.122
55 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p.46
56 Brassens, Georges :
Le temps
passé. Op.
Cit.
Notes
vieillesse:
1 Jankélévitch,
Vladimir : L'irréversible et la nostalgie. Paris : Flammarion, 1974, p. 207
2 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p. 164
3 Ibid, p. 164
4 Ibid, p. 165
5 Ibid, p. 225
6 Ibid, p. 225
7 Ibid, p. 318
8 Ibid, p.24
9 King, Stephen : Sac d'os. Op. Cit. p. 592
10 Bianchi,
Henry : Le Moi et le
temps. Paris : Bordas,
1987, p. 80
11 King, Stephen :
Sac d'os. Op. Cit. p. 332
12 Bianchi, Henry. Op. Cit. p.
81
13 Dimcowski,
Eva : Eros et
Thanatos. Grenoble,
thèse, 1984, p. 217
14 Ibid, p. 331
15 King, Stephen :
Simetière. Op. Cit. p.32-33
16 King, Stephen :
Sac d'os. Op.Cit. p. 337
17 Traduction de l'auteur de :
« Death ,
destruction and destiny await us all in the end of the journey- in
life as in horror fiction. » Winter E. Douglas : « The
Night Journey of Stephen King », in Fear Itself. Op. Cit. p. 247
18 Aragon, Louis :
Il n'y a pas d'amour
heureux in Aragon : l'oeuvre poétique
IV. Paris : Messidor,
1990, p. 345
19 Malraux, André :
La condition
humaine. Paris, Gallimard,
1946, p. 403
Plan de
l'étude.
Saison Hiver 1999.
Introduction.
Première
partie : Les âges de la vie.
L'enfance
L'enfance synonyme
d'innocence
L'enfance et la perception du Malin
L'idéalisation de l'enfance
L'âge
adulte
Les hommes
Les femmes
Les couples
La vieillesse
Bien vieillir.
Mal vieillir.
Une invitation à la mort.
Saison Printemps
2000.
Deuxième
partie : Le
passage du temps.
Le temps
et ses manifestations
Essai de définition.
Le temps et ses manifestations dans l'espace et
dans la nature.
Passé-Présent-Futur.
La lutte contre
le temps
Pouvoir individuel.
La science et la médecine.
La mémoire- Le « carpe
diem-L'espoir.
La soumission au
temps
Hélas ! Le temps des
regrets.
Les autres fuites.
L'oubli.
Symbolisme.
L'imagination humaine et la
création des symboles.
Les symboles végétaux et
animaux.
Les symboles par excellence.
Parution Saison
Été 2000.
Troisième
Partie :
La mort.
La
fatalité.
Les pulsions internes.
Les pressions extérieures.
Le choc.
La mort
elle-même.
La mort cette inconnue.
Une vue sur la mort.
La mort comme scandale.
L'immortalité.
Pourquoi les fantômes
existent-ils ? A quoi ressemblent-ils ?
Leurs actions.
Quelle signification se cache derrière
les fantômes ?
La
résurrection.
Le réveil des
morts-vivants.
La résurrection elle -même.
Les rites de passage, l'initiation.
Symbolisme.
La mort est tapie et attend sa
proie.
Le symbolisme récurrent.
L'éternel non repos.
Conclusion.
Index.
Bibliographie.
Delphine Lespinasse est
étudiante à Grenoble III. Elle a passé ce
mémoire de maîtrise de maîtrise LLCE anglais
(originellement écrit en anglais, et traduit par la
suite) sous la direction de Jean Marigny soutenu le 10 juin 1999 sous
le titre : From
Womb to Tomb" in Stephen King's Pet Sematary and Bag of
Bones ( "We fall from womb to tomb, from one darkness and
into another, remembering nothing of the one, and knowing nothing of
the other."
Trad. de
Jean-Daniel Brèque : "D'une matrice à une autre, d'une
ténèbre à une autre, ayant presque tout
oublié de l'une et ignorant tout de l'autre.", Pages Noires,
216).
Elle travaille actuellement sur un
DEA sous la direction d 'André Siganos ( Grenoble
III. Stendhal) :
Vers une thanatologie fantastique. Le cas de trois auteurs
contemporains : Serge Brussolo, Valerio Evangelisti et Stephen
King.
d.grepilloux@nomade.fr
autres textes de cet auteur
:
Considérations sur le
mythe. saison printemps
2003
|
.. du site Imaginaire