LE MONDE DE HARRY POTTER

POTTERMANIA :

Pourquoi vous êtes, ou vous serez atteint par le virus anglais H.P.

en séance de signature

.En janvier 2001, la nouvelle édition du Who's Who britannique offrait son entrée à l'écrivaine britannique J.K. Rowling, 35 ans, auteure des aventures de l'apprenti sorcier Harry Potter1, privilège réservé à quelques milliers de personnalités choisies. Voilà pourtant une femme très réservée, qui ne s'affiche pas sur la place publique, et plutôt secrète Elle est connue par de nombreuses interviews et par un petit livre d´entretiens d'une ancienne libraire d´Edimbourg, Lindsey Fraser, An Interview with J. K. Rowling, qu'a traduit et publié Gallimard. Cette dernière a épluché minutieusement les trente-cinq années de la vie de Rowling, de ses maladies d'enfant jusqu'à sa récente décoration par la reine d´Angleterre pour "services rendus à la littérature"2. Succès mondial de la littérature enfantine, les aventures de Harry Potter ont été traduites en plus d'une trentaine de langues. Déjà, en 1996, le succès du premier volume avait été immédiat et considérable, et sa créatrice peut maintenant se vanter d'avoir vendu près de 100 millions de livres dans le monde, battant les records de Mary Higgins Clark et Stephen King.

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Le phénomène «Pottermania»
3 est tel que le tome quatre, publié en novembre 2000 par Gallimard, tiré à 450.000 exemplaires, est sorti non plus en collection jeunesse mais en «Hors-série littérature» grand format, incitation évidente à la lecture par les adultes (indépendamment du gain réalisé avec les enfants en demandant le prix fort pour l'ouvrage.4) Aux USA, on avait en effet remarqué (enquête du Wall Street Journal) que 40 % des lecteurs de Harry Potter et la coupe de feu étaient des adultes.

Le personnage de Harry s'est mis à vivre pour le public il y a 5 ans. Le premier tome racontant son histoire a été édité en France en octobre 1998, deux ans après l'édition anglaise; le second en mars 1999 et le troisième en octobre 1999, tous publiés chez Folio junior avec un succès grandissant. Comme le remarque Hedwidge Pasquet, directrice générale de Gallimard Jeunesse : "Harry Potter est sorti de la sphère de l'édition pour devenir un phénomène de société. C'est important pour le secteur. J. K. Rowling a aujourd'hui le statut d'un chanteur ou d'une rock-star. Or, ce vedettariat qui s'empare des auteurs, tout le monde sans doute en bénéficiera. Et tant mieux." 5

L'HISTOIRE.

Orphelin depuis l'âge de deux ans, hébergé plutôt qu'élevé par une tante et la famille Dursley, qui ne l'aiment pas et qui portent toute leur attention sur leur adipeux fils et neveu, un odieux sacripant., Harry Potter, un jeune garçon de 11 ans, est tenu à l'écart. Mais il est promis à un bel avenir de magicien. Il vieillit d'un an par tome, ce qui est bien pratique puisqu'il grandit ainsi avec ses lecteurs. Son auteure compte le conduire jusqu'à dix-huit ans, et l'histoire comprendra alors 7 volumes. Ses parents sont prétendument morts dans un accident de voiture, dont lui-même a réchappé avec une cicatrice sur le front, en forme d'éclair. En réalité ses parents, sorciers réputés, ont été assassinés par le maléfique magicien Voldemort. Sans le savoir, Harry est lui-même sorcier et doué de pouvoirs magiques exceptionnels. Une mystérieuse convocation lui apprend, le jour anniversaire de ses onze ans, qu'il est attendu à l'école des sorciers Poudlard, quelque part en Ecosse. Il quitte le pays des «Moldus», les hommes ordinaires qui n'ont pas de pouvoirs magiques (un Muggle dans le jargon de Rowling), et qui sont considérés avec une certaine distance par les sorciers, pour aller se former à l'école malgré l'opposition de sa famille. Il y trouve l'ambiance et la considération qui lui manquaient, se lie d'amitié avec un garçon et une fille et se fait des ennemis, qui le suivront de tome en tome dans ses aventures.

Voir annexe 2 : l'école des sorciers.

La magie est un art qui s'apprend, supposant un savoir qui doit être maîtrisé. Qu'ils soient d'ascendance nobiliaire (enfants de sorciers) ou non (des enfants doués de Moldus), les jeunes apprentis sorciers ont besoin de passer par une école spécialisée. Dans ce milieu scolaire particulier, avec ses cours, son organisation et son règlement, Harry découvre la magie, des professeurs singuliers, un sport original, les chahuts et les fêtes, et de nombreux secrets, parfois liés à ses parents qu'il n'a pas connus.

Voir annexes 3 : les personnages,
et 4 :
les particularités du monde des magiciens.

Le thème central du tome 4 est un grand concours de magie organisé entre les trois plus grandes écoles européennes de sorcellerie : Poudlard, l'Académie Française de Deuxbâtons et l'École Bulgare de Durmstrang (composé de Sturm und Drang? 6)

Voir annexe 1 : résumé des ouvrages.

Chacune de ces écoles est représentée par son meilleur élève qui devra répondre à des exigences bien précises pour pouvoir être élu par une «coupe de feu» aux pouvoirs magiques. À la stupéfaction générale, la coupe de feu désigne un quatrième élu inattendu, Harry, qui ne correspond pas au critère d'âge imposé. Cet événement jette un grand trouble dans l'école et chez les concurrents, qui évoquent manipulation et tricherie. Pour le première fois depuis le début des récits, Harry est durablement en mauvaise posture. Le lecteur pense immédiatement à une machination de Voldemort, le maître des ténèbres, l'ennemi personnel de Harry, qui bénéficie de l'aide de ses Mangemorts.

LE POINT DE VUE DES LITTÉRAIRES.

S'il a été possible aux adultes de dédaigner pendant un certain temps le phénomène Potter, assimilé plus ou moins à un avatar de type Pokémon ou Digimon, il arrive un temps où l'ignorance commence à peser et la curiosité à se faire sentir. Sans fausse honte, j'ai donc lu à la suite l'ensemble de la série et me voici faisant partie de la tribu des Pottermanes. Et je dois reconnaître que j'y ai pris du plaisir, un peu condescendant dans les trois premiers tomes, mais nettement plus affirmé dans le quatrième, plus solide, plus structuré et surtout beaucoup mieux machiné. Il est d'ailleurs à remarquer que les filles ont été intéressées plus tôt que les garçons par les aventures de Potter, plus réticents devant ces livres de «bébé». Mais une fois qu'ils ont mordu à l'hameçon, les voilà ferrés comme les autres, et tout disposés à participer à ce nouveau culte planétaire. Les livres de Rowling sont une véritable incitation à la lecture, et on n'a pas assez remarqué d'ailleurs que la fréquentation de la bibliothèque des sorciers, un des lieux le plus fréquemment cité de l'école, est continuelle.

Bien des adultes - et pas seulement des parents consciencieux qui ont voulu s'assurer de la valeur des lectures de leur progéniture - sont entrés dans le jeu, les jeunes femmes étant les plus enthousiastes. Même les adolescents s'y mettent, quoique avec plus de réticence, ce qui est une sorte d'exploit compte tenu de leur allergie affichée à la lecture. C'est cependant chez les enfants de 10 à 14 ans que le phénomène se manifeste avec le plus de force. En Grande-Bretagne, des enseignants soucieux de corser leurs cours d'un peu de d'atmosphère sorcière ont même admis en classe capes noires, baguettes magiques et chapeaux pointus.

La création de Potter.

L'auteure n'a rien d'une personnalité qui, de près ou de loin, fait penser au maléfique. Elle paraît frêle, terne, secrète, se montre triste et tendue. Très effacée, elle semble bien plus à l'aise avec les enfants qu'avec les adultes. Elle a l'air un peu dépassée par ce qui lui arrive. Son histoire, à laquelle les journalistes ont eu vite faite de donner une allure pathétique, a tôt fait le tour du monde : jeune femme monoparentale divorcée, tombée dans la dépression et la pauvreté, et vivant de l'aide sociale. Le fait d'avoir écrit le premier Potter dans les cafés où elle allait pour se réchauffer a aidé à la faire entrer dans la catégorie des auteurs se sacrifiant pour leur oeuvre, ce qui a beaucoup contribué à ce que le public admette son enrichissement soudain sans trop s'occuper de son marketing foudroyant (elle a un agent remarquable et redoutable), voyant dans sa réussite un conte de fées moderne
7. Pas de formule magique en jeu cependant. Rowling a fait des études universitaires littéraires à l'université d'Exeter, a appris et enseigné le français et fait du secrétariat.

C'est à bord d'un train, raconte t-elle, en 1988, qu'elle a eu l'idée des aventures d'un gamin sorcier, et du nom de Potter, nom qui serait celui de voisins, amis d'enfance, avec lesquels elle aurait, petite, joué à des jeux de ce genre. Ce qui n'empêche pas une auteure américaine, Nancy Stouffer, de la poursuivre devant les tribunaux pour plagiat, l'accusant de s'être inspirée d'un de ses livres pour enfants, The Legend of Rah and Muggle, publié en 1984. Où non seulement on trouve le mot «Muggle», mais un personnage se nomme Harry. Cela semble de peu d'importance, mais les tribunaux américains sont imprévisibles dans leurs décisions et Joanne a été longtemps angoissée. Nancy Stouffer a finalement été déboutée de son procès en septembre 2002, à la grande satisfaction de Joanne, qui a consacré des années de travail à sa série, et que cette accusation blessait dans sa dignité d'écrivain.

En 1996, Rowling a terminé son roman, et a une idée claire de ce qu'elle pourrait faire de son récit et de sa suite s'il lui arrivait à trouver un éditeur. En tous cas, dès le début, elle a parlé de romans qui suivraient la scolarité d'Harry, année après année. Aucun des neuf (ou trois? les chiffres varient) premiers éditeurs sollicités n'apprécie le trésor qui lui est proposé. Ayant choisi un agent au hasard dans l'annuaire (vérité ou légende? Tout se déforme si vite...), son choix est le bon, un professionnel de réputation solide, Christopher
Little. Son créneau n'est pas précisément le livre-jeunesse, mais le roman lui plaît. Encore faut-il convaincre les éditeurs de Bloomsbury Children's Books, réputés non conformistes, qu'il a contactés. Hésitations : le problème vient du nombre de pages, inhabituel pour des livres ordinairement courts, aux gros caractères, et aérés. L'histoire est bien longue. Le coup est tenté, avec succès. Pourquoi des enfants gavés de télévision, qui rechignent à lire longtemps, ont-ils pu absorber avec plaisir quelque chose qui aurait pu leur paraître interminable? Il reste une part de mystère.

Les réactions des adultes.

Car le succès survient presque immédiatement. Dans les cours d'école, on parle des aventures d'Harry, on s'amuse de son vocabulaire spécial, des tours de magie, des formules d'incantation. Tout le monde tient à être au courant, et le livre devient bientôt un livre culte. Les parents et enseignants, ravis de voir leurs enfants délaisser un temps jeux vidéos et télévision, ne résistent pas aux sollicitations financières, pour les premiers livres pas très chers : à leurs yeux, Potter est le héros qui va sauver leur progéniture de l'assujettissement pernicieux à la télévision et aux jeux vidéos. Les grands-parents trouvent dans les romans une idée de cadeau, les livres de Rowling devenant le moyen d'encourager la lecture chez leur descendance. L'appui des parents et des enseignants
8 a ainsi joué un grand rôle en officialisant le phénomène. Ce qui n'aurait pas marché avec des adolescents, rétifs par principe aux demandes des adultes, fonctionne parfaitement avec de jeunes enfants encore malléables.

Et Harry s'exporte, chose inattendue. Pourtant le roman est un pur produit britannique, avec l'école à l'anglaise, l'humour caractéristique et le décor gothique écossais (château, lac). Les éditeurs américains ont des inquiétudes, car ils n'ignorent pas la distance culturelle qui persiste entre les deux lectorats anglo-saxons. Le titre anglais :
Harry Potter and the Philosopher's Stone, voit sa référence à la pierre philosophale gommée pour ne pas faire peur aux jeunes Américains, pour devenir banalement The Sorcerer's Stone. Mais le livre se vend très bien, et le caractère vieille Angleterre du livre devient même un argument en sa faveur. Les éditeurs du monde entier s'intéressent alors au pactole, surtout quand Harry eut paru en couverture du Times. Même Stephen King y est allé de sa recension9. Dans le New York Times Book Review (23 juillet 2000), il a publié un article sympathique sur le quatrième volume, Harry Potter and the Goblet of Fire. Il y souligne son mérite, mais curieusement avec une pointe d'envie envers ce Poucet devenu trop vite un géant, rappelant sans délicatesse que si ces romans sont indiscutablement les livres rêvés pour les jeunes enfants, il y a heureusement l'irremplaçable King pour les adolescents et les adultes... Un peu de mesquinerie apparaît toujours chez celui qui a trop l'oeil sur le chiffre des tirages, et qui voit sa place au box-office reculer régulièrement. Peut-être King se trompe-t-il et verra t-on les Potter figurer parmi ces livres pour la jeunesse, lus tout autant par les adultes, comme les Jules Verne, Carrol Lewis ou Tolkien... Car les romans de Rowling n'ont pas le simplisme calibré avec complaisance des livres courants pour les jeunes, et ont été conçus avec suffisamment d'indépendance et de richesse pour ne pas paraître naïfs ou simplistes aux adultes. Il est significatif que le volume 4 est pratiquement un livre pour adulte, et que, contrairement aux premiers, un jeune enfant ne pourra pas tout comprendre. King aurait pu corser son article, et faire référence à l'esprit d'enfance et l'émerveillement inhérents au plaisir du magique et du fantastique dont il parle dans Anatomie de l'horreur, et dans de nombreuses préfaces et articles. Ces ingrédients, qu'utilise spontanément, semble-t-il, Rowling, doivent tenir une place importante dans la faveur de la série auprès des adultes.

Les acteurs du film sorti en France le 5 décembre 2001

Le monde de Potter.

Suivant le renouveau de l'ésotérisme et le maintien de l'influence du fantastique en Occident au cours de cette décennie, ce monde de sorciers tombe on ne peut plus opportunément. Le cadre est pittoresque et amusant, et forme un petit univers à part, un peu simpliste, mais bien agencé. Les ingrédients que Rowling a réunis forment un ensemble au charme duquel il est difficile de résister. Une école qui demande aux élèves comme fournitures une baguette magique, un chaudron et un téléscope ne se trouve pas souvent. Dans l'école Poudlard, tout baigne dans l'irréalité, des objets incongrus surgissent, des solutions inattendues (un coup de baguette suffit pour faire venir les mets dans les assiettes, ou laver et ranger instantanément la vaisselle). Rowling crée de toutes pièces le monde romanesque qui est le sien, et chaque volume renouvelle partiellement ce qui fait déjà l'objet de copieux catalogues. Jamais en reste d'un objet doté de propriétés nouvelles, d'une formule magique inconnue (le fait que les jeunes sorciers sont en apprentissage favorise cette invention continuelle et facilite l'intégration par les jeunes lecteurs des nouvelles données). Les sorciers peuvent faire apparaître aussi bien de l'or que des mets délicieux. Selon les besoins, certains sorciers spécialisés font rajeunir ou vieillir à volonté, remettent les os en place quand ils sont fracturés, font pousser ou réduire les dents comme on veut, embellir. Avec une cape magique on se rend - ou on rend ses compagnons de trajet - invisibles; un groupe peut parcourir de très grandes distances en quelques secondes avec un Portoloin (en cas de panne, c'est le "commando magique des accidents de la circulation" qui intervient). Individuellement, le sorcier confirmé sait se téléporter, planer. Celui qui se trompe dans sa sorcellerie et commet une erreur grave comparaît devant la commission contre le mauvais usage de la magie. Tout cela s'apprend dans l'enseignement ou se trouve dans les livres, manuels de développement spécialisés dans les particularités de la magie.

Les enseignements des cours et les leçons des livres constituent pour les jeunes lecteurs aussi bien une initiation au fantastique, qu'une récapitulation jouissive : les potions, les trucs ou les formules miracles d'enchantements, les objets dotés de pouvoirs les plus variés, correspondent à de multiples désirs enfantins non réalisables, la pierre philosophale et autres choses suggestivement évocatrices et font références à des matériaux mythologiques mentaux vieux comme l'humanité. L'astuce est de ne pas se limiter à ces représentations traditionnelles, mais de les mêler d'horreurs dont raffolent tous les enfants volontiers petits diables : objets répugnants, farces et attrapes, mêlés de tours et de polissonneries diverses, qui côtoient des plantes répugnantes ou des monstres hideux. Il faut noter en passant que les noms donnés tant aux êtres, qu'aux animaux et aux aux choses inventés constituent un régal, renouvelé avec chaque volume puisque sans cesse des nouveautés apparaissent. Il y aurait tout un travail de sémantique à faire sur ce matériel tant il paraît approprié et percutant.10

Lieu de haute fantaisie, avec ses donjons, couloirs aux armures et aux portraits, passages et chambres secrètes, fantômes errants et elfes, l'école de sorciers Poudlard se trouve dans un univers parallèle au nôtre, auquel on ne peut accéder que par quelques portails connus. On ne peut se rendre à l'école qu'en prenant un train particulier à la gare de King's Cross, avec son quai invisible aux yeux des Moldus, qui côtoient journellement les sorciers sans s'en rendre compte. Quand un Moldu s'étonne devant un phénomène aux origines magiques incompréhensibles, il suffit au sorcier de lui jeter un sortilège d'oubli. Sauf curieusement pour le train, d'un modèle d'ailleurs ancien, la technologie moderne n'est pas utilisée. Le monde des sorciers est sans ordinateurs, télévision, téléphone, automobiles : on n'en a pas besoin, la magie y supplée. Pour se déplacer, l'élève apprend immédiatement à se servir d'un balai volant, moyen de transport individuel pratique, et qui permet toutes sortes d'exploits dès qu'on sait l'utiliser correctement. D'autres moyens individuels ou collectifs ont été vus plus haut. Des hiboux spécialement entraînés, propriété privée ou de l'école, livrent le courrier, plus ou moins rapidement selon leurs caractéristiques et leur humeur. Les «beuglantes» rappellent à l'ordre les indisciplinés. Les élèves y côtoient dragons, basilics, licornes, centaures, hippogriffes et autres , bestiaire classique de nos mythologies, mais aussi d'autres animaux inventés par Rowling, qui ne déparent pas l'ensemble comme le Scrout à pétards de Hagrid. Les géants, trolls, gnomes et loups-garous font partie de l'entourage. Des elfes sont chargés des corvées domestiques, tandis que des fantômes pittoresques créent de l'ambiance. Ce monde surprenant et ses pratiques étranges deviennent vite naturels et s'intègrent mentalement sans difficulté. Nous acceptons facilement cet univers magique dont les éléments existent déjà dans notre imaginaire.

Rowling fait vieillir ses ouvrages en même temps que ses personnages. De simple, presque minimal dans le premier, le monde des sorciers gagne en diversité, complique peu à peu son histoire et sa géographie, s'appuie sur son organisation et sa bureaucratie. Il est quasi impossible de lire la série des romans dans le désordre sans perdre une grande partie des intentions et des significations de l'auteur. Au fil des ouvrages, l'«idéal» magique perd sa simplicité, le combat entre les bons et les méchants gagne en complications et équivoques, ce qui devient particulièrement net dans le dernier volume. Il faut noter d'ailleurs que les jeunes enfants du début deviennent des adolescents, et gagnent eux aussi en complexité et en ambiguïté. Rowling semble augmenter d'ailleurs en proportion la longueur de ses romans (652 pages pour le tome 4) pour des intrigues de plus en plus complexes, en même temps que leurs conclusions deviennent particulièrement soignées dans les deux derniers volumes. Si les deux premiers romans se terminaient avec le succès de Harry, dans les deux autres le danger du sorcier maléfique qui veut la mort de Potter se trouve renforcé. Non seulement il retrouve sa vigueur passée et ses fidèles, mais Harry, comme ses deux amis, a perdu en netteté, vivant des sentiments contradictoires qui laissent d'eux, à la fin du quatrième volume, une image moins séduisante. Harry n'est plus le Tintin simpliste sans peur et sans reproche des premiers récits.

L'attitude des amis est constamment héroïque. S'ils sont surpris quand des présences insolites, des signes mystérieux, des sortilèges se manifestent, parfois démunis de moyens, Harry et ses amis Ron et Hermione sont prêts à conjurer les difficultés et les menaces, malgré les mises en garde de l'administration et les risques de renvoi. Harry ne refuse jamais une énigme à résoudre, et la recherche de la solution des problèmes est la passion, la vie d'Hermione, pour laquelle la bibliothèque est plus familière que sa chambre. Dans ce cycle initiatique, les combats, les menaces et les dangers, les peurs et les angoisses, les surprises et les déceptions se suivent de manière incessante et ne nous laissent jamais souffler jusqu'au dénouement. Les intrigues sont suffisamment bien menées pour soutenir l'intérêt , mais il faut reconnaître qu'une partie importante de l'agrément de la lecture vient du fourmillement de petits détails amusants et insolites.

LES PERSONNAGES.

Il faut à Rowling un rare talent pour mener des récits cohérents et passionnants dans un univers créé de toutes pièces, avec des inventions sans cesse renouvelées. Ses personnages y aident. Ils sont la fois bien dressés, avec des détails précis pour chacun, mais n'ont qu'une psychologie réduite, ce qui a l'avantage de ne pas ralentir l'action, et qui, de toute façon, et les considérations psychologiques trop étendues n'intéressent guère les enfants. Les adultes y trouvent moins leur compte. Il est facile de s'y identifier à eux, tellement leurs caractéristiques sont précises. Par contre, il est inutile d'essayer de dresser un portrait un peu fouillé de Harry, dont on ne participe pas à la vie intérieure. Sa psychologie ne peut que se définir à partir de ses comportements, attitude behavioriste courante dans les romans anglo-saxons d'action. Il faut surtout noter que, comme tous les enfants qui n'ont pas de vue d'ensemble des événements, ni de stratégie, il réagit aux événements davantage qu'il les conduit.

L'auteur prend d'ailleurs soin, au début de chaque roman, par contraste avec la forte présence de Harry à Poudlard, de nous le montrer malheureux dans sa famille d'adoption, ce qui le ramène pour les enfants à une stature normale. Comme l'
Oliver Twist de Dickens, ou la Cosette élevée par la famille Thénardier, Harry est l'orphelin classique maltraité par une famille d'adoption cruelle : obligé de coucher dans un placard sous l'escalier, binoclard, chétif, sous-alimenté, molesté, humilié par ses infâmes oncle et tante et son cousin. Le choix des cadeaux - très important, les cadeaux, pour les enfants - que sa famille lui offre pour ses anniversaires est significatif : un mouchoir de papier, une boîte de biscuits pour chiens ! Harry supporte avec résignation, voire bonne humeur, et, astuce aidant, se ménage des moments de plaisir.

À Poudlard, c'est l'inverse. Dans le monde des sorciers, du fait de ses parents, sorciers réputés, et aussi d'avoir survécu à Voldemort, Harry est quelqu'un, apprécié notamment - le symbole est intéressant - par un géant hirsute, haut en couleurs, fantaisiste, qu'Harry domine d'ailleurs sur certains plans : David et Goliath!. Rowling fait de Harry un surdoué dans le sport collectif des sorciers, le Quidditch, sport national, où Harry devient un champion (les fillettes françaises se font très bien à cette prédominance du sportif sur l'intellectuel, l'originalité de ce sport - qui se joue dans les airs à califourchon sur des balais volants - gommant les réticences qu'aurait par exemple pu susciter le base-ball). Mais, pour contrebalancer et donner du corps à son histoire, Rowling renverse aussi souvent les perspectives. Harry a la particularité de subir alternativement des louanges et des critiques par ses camarades, tantôt héros, tantôt souffre-douleur, suivant les vicissitudes du récit. Les prouesses sportives de Harry contribuent à diminuer l'importance de ses malheurs, et sont généralement le signal d'un revirement d'opinion à son égard, mais, à la réflexion, elles ne collent pas très bien avec l'image du maigrichon à lunettes qui nous est aussi donnée, et elles me semblent un peu artificiellement plaquées sur le personnage, Pour le reste, comme dans toute école d'élite anglaise, Harry doit travailler dur et obéir à des règles sévères, qu'il lui arrive d'ailleurs de bafouer plus qu'un autre, et, par chance et aussi avec le soutien du directeur, en échappant le plus souvent aux sanctions. À noter que Harry est souvent négligent, ne travaille généralement que ce qu'il faut, sauf pour ce qui lui plaît, ne suit pas toujours les cours.

Pour la première fois, il a des amis - chose à laquelle les enfants sont sensibles. Infériorisée par sa condition de Sang-de-Bourbe (autre nom des Moldus), ne faisant pas partie de l'aristocratie des fils de sorciers jaloux de leurs privilèges, Hermione est la bûcheuse, qui veut sortir de son rang par le savoir. Elle irrite souvent ses camarades par sa suffisance, alors qu'ils utilisent sans vergogne les connaissances qu'elle a accumulées lors des cours, ou glanées à la bibliothèque qu'elle fréquente assidûment. Garçon plutôt que fille dans les premiers volumes, jugée physiquement ingrate, son sexe ne joue un rôle dans l'histoire que dans le quatrième roman, où sa puberté naissante commence à susciter des remous. Jusque là indifférente à tout ce qui est apparence ou beauté, Hermione se fait rectifier les dents, et se soigne particulièrement pour son premier bal. Ron est le brave garçon un peu brouillon et étourdi, qui appartient à une famille sorcière nombreuse toujours fauchée et qui ressent difficilement sa pauvreté. Dans le trio, c'est souvent Hermione, intellectuelle et imbattable en classe, autoritaire, intransigeante, sermonneuse, qui a les idées.

Les professeurs forment une belle collection de caricatures des enseignants que les élèves peuvent connaître dans leurs classes, s'ils font l'effort de transposition nécessaire. Si le directeur Albus Dumbledore est le directeur idéal que tout élève voudrait avoir - il apprécie Harry qu'il protège, mais ne le montre pas trop; si Minerva McGonnagall, professeur de métamorphoses, et directrice de Gryffondor est le professeur modèle, sévère, mais juste, la plupart sont des originaux ou présentent des insuffisances. Severus Rogue par exemple, sadique professeur de potions, et directeur de Serpentard, fait preuve de partialité et persécute sans cesse Harry, parce que son père lui a fait des blagues jadis, quand ils étaient élèves à Poudlard. Remus Lupin, professeur de défense contre les forces du Mal, est un loup-garou coquet, narcisssique et fantaisiste. Sybille Trelawney, professeur un peu bizarre de divination dans un antre baroque, prédit sans cesse la mort à certains de ses élèves, ce qui ne se produit heureusement jamais. Il y en a d'autres, sans oublier Binns, le professeur qui enseigne l'ennuyeuse histoire de la magie, mort un jour sans s'en rendre compte, et qui, devenu spectre, continue depuis à donner son cours comme s'il ne s'était rien passé, comme ces professeurs lointains, vaguement absents, qui ignorent leurs élèves.

Malgré leur robe, leur chapeau pointu, leur baguette magique et leurs pouvoirs, ils restent absolument humains. Chez les sorciers, comme chez les hommes il y a des bons et des mauvais, et des caractères très divers, qui sont vraiment les nôtres. Ces sorciers vivent à peu près comme nous, et réagissent avec nos habitudes de comportement et notre sensibilité. On rencontre la fofolle qui prédit l'avenir, le géant au grand coeur, qui ne pense qu'à élever des dragons ou des animaux insolites, le chef de clan bienveillant et sage, les maîtres qu'on redoute, ceux qu'on vénère, ceux qu'on ridiculise ou qu'on chahute. Ils nous sont proches et attachants.

Il faudrait évoquer bien d'autres choses encore. Les tableaux représentant des personnages, qui s'ouvrent grâce à un mot de passe, et permettent l'entrée dans les dortoirs ou autres lieux, ou qui se promèment le long des murs selon leur humeur. Les fantômes familiers, Mimi Geignarde, qui hante les toilettes des filles et éprouve un tendre sentiment pour Harry, Nick Quasi-Sans-Tête, qui a des problèmes avec sa tête qui n'a pas été complètement tranchée lors de sa décapitation, ou le Baron Sanglant. Avec l'humanité, l'humour et l'ironie sont des constantes des romans, ainsi que le comique, celui par exemple des facéties des incorrigibles jumeaux Weasley, toujours à la recherche de farces nouvelles et qui n'ont d'autre dessein que de fournir plus tard le petit monde de Pouldard en farces et attrapes; ou encore le fantôme Peeves, toujours là où il ne faut pas à la recherche d'un mauvais tour à jouer..

Mais si l'humour persiste, la série prend une coloration romanesque plus sombre au fur et à mesure qu'elle progresse. L'ennemi suprême, Voldemort, Seigneur des ténèbres est maintenant clairement identifié et caractérisé, depuis qu'il est ressuscité. S'il représente le mal pour tous, il s'acharne particulièrement sur la famille Potter, et il veut éliminer Harry comme il a éliminé les parents. On n'ose pas le désigner par son nom, et on utilise des périphrases comme : « Vous-savez-qui » ou « Celui-dont-on-ne-prononce-pas-le-nom ». Il ne faut pas se cacher qu'il y a un déséquilibre, pour qui lit la série dans son entier, entre l'image de Voldemort dans le premier volume, dont Harry s'est facilement débarrassé quand il était nourrisson et l'être diabolique aux multiples pouvoirs qu'il est devenu.

Le génie de l'auteure est de faire apparaître tout ce supranaturel d'une façon qui ne dissout jamais le réel. Elle y parvient à cause de la présence très forte de tous ses personnages et de son atmosphère de roman de chevalerie, avec transposition du cheval par le balai et l'épée par la baguette magique, symbolique toujours efficace qui exalte l'individu dans le combat contre les difficultés, le sort contraire et le mal.

L'ÉVOLUTION DES ROMANS.

Sur ce point, tout le monde est d'accord pour remarquer les progrès effectués par Rowling de roman en roman. Le premier est réussi, c'est un bon livre pour jeunes, mais il ne possède rien de vraiment exceptionnel. Le second est plus diversifié et mieux structuré. Le gros progrès du troisième se remarque surtout dans les cent dernières pages, qui sont une réussite par rapport aux volumes précédents. Avec le quatrième, de tonalité plus grave, Rowling passe de la littérature pour jeunes à la littérature pour adultes, avec une intrigue solidement étoffée, qui n'est plus linéaire comme dans les autres romans, mais se met en place dès les premières pages avec de multiples ramifications et de nombreux rebondissements. L'intérêt nouveau est de constater, l'âge de la puberté aidant, un second parcours initiatique : Harry et ses amis découvrent les affres des premières amours. À nouveau les cent dernières pages sont les meilleures, menées avec maîtrise, et supérieures à celles du volume 3. Elles rejoignent celle des grands romanciers fantastiqueurs. Par ailleurs, Rowling a su ramener les adversaires sur un pied d'égalité, et étendre le combat contre le mal à la communauté des sorciers, en renforçant considérablement le maléfique Voldemort, qui rassemble dans la magie noire un certain nombre de partisans. En résumé, de bons romans pour la jeunesse, au sommet de cette production. Et surtout Rowling, loin de donner l'impression de s'essouffler, de devenir à court d'idées ou de se répéter, nous surprend avec chaque nouveauté. L'effet cumulatif produit par un monde en constant développement, accompagnant la maturation des personnages, donne aux aventures d'Harry Potter l'apparence d'un grand cycle de fantaisie, évolutif et cohérent.

LE POINT DE VUE DU PSY.

Les psychologues de l'enfance font remarquer que les enfants sont d'abord heureux de retrouver un monde un peu différent, mais semblable au leur. L'école des sorciers est le reflet en miroir d'un monde scolaire familier, dont les règles et les comportements ne dépaysent pas. Le vocabulaire «cool» va de soi, les réactions envers les professeurs et l'enseignement sont identiques aux leurs, leurs désirs et leurs sentiments de même nature. Comme les élèves de Poudlard, ils éprouvent dépit et envie, se laissent aller aux disputes, aux amitiés de clans, rivalisent entre eux. Le quatrième volume semble ouvrir d'autres voies et rappellent aux plus âgés les séries télévisées familières vouées aux amourettes et jalousies adolescentes. C'est sur ce levier de la familiarité du monde de Harry avec celui des élèves que jouent les enseignants qui se sont mis à étudier Potter en classe et qui remarquent que les enfants n'aiment plus guère, par manque de curiosité et perte du goût de l'effort, prendre la peine d'entrer dans des histoires trop éloignées de leur vie quotidienne.

Des psychiatres ont pensé que l'histoire d'un petit orphelin, timide, aux lunettes rafistolées, maltraité par sa famille jusqu'à ce qu'il apprenne qu'il est sorcier, pouvait plaire à des enfants dont la situation est très dissemblable. La plupart des enfants se sentent physiquement fragiles, comme Harry, ont peur de perdre leurs parents, et de se retrouver alors dans des familles où ils ne seraient pas bien soignés. Cela les rassure de rencontrer une institution qui leur permettrait de vivre convenablement et de s'en sortir. D'autres peuvent comprendre qu'ils ne sont pas les seuls à avoir perdu leurs parents, à avoir ressenti la solitude et l'angoisse, éventuellement à subir ou avoir subi de mauvais traitements. D'autres vivent dans des familles monoparentales recomposées, et ont l'impressiuon d'être mis à l'écart dans leur nouveau foyer. Harry est loin d'être physiquement une force qui s'impose et pourtant il fraie son chemin en balayant les obstacles, rêve secret de la plupart des enfants. Il n'est pas violent, mais n'hésite pas à prendre des risques. Il s'en tire par des qualités humaines, qui semblent aux enfants, toujours pleins de bonnes résolutions, faciles à mettre en oeuvre parce qu'elles ne demandent pas de compétence particulière. Harry est l'enfant positif, juste assez idéaliste, qui après avoir fait l'apprentissage de ses dons, les met au service de causes justes, et les enfants s'identifient à lui très facilement. Il est l'ami qu'ils voudraient avoir, dont ils achètent la figurine qui n'a pas un look de star et paraît plutôt piteuse à côté de celles des superhéros dopés aux hormones. Par lui, ils mettent en oeuvre des processus d'identification qui incitent les enfants ordinaires à progresser, et ces effets paraissent bénéfiques. L'explication psychanalytique a même été avancée d'un retour du mythe de l'enfant-dieu, chargé de vaincre le mal (mythe qu'on retrouve dans de nombreuses religions, dont la chrétienne), du héros, garçon orphelin et ordinaire, mais élu, qui a pris le contrôle de sa vie par ses propres moyens et qui, grâce à la magie, échappe à des situations périlleuses et fait de grandes choses.

Cette explication rejoint la précédente, en y ajoutant des prolongements symboliques.


Des psychiatres ont été jusqu'à remarquer que, dans leurs cabinets, quand des enfants à problèmes évoquent leurs difficultés, ils font de plus en plus souvent référence à des éléments de l'histoire de Harry. Les enfants, comme d'ailleurs les adultes, ont du mal à parler directement d'eux-mêmes. Ils évoquent certaines parties des livres pour illustrer ce qui leur arrive sans être capables de le dire directement. En fonction de leur âge, les enfants y trouvent des choses différentes, importantes pour eux, et significatives. Potter offrirait ainsi des solutions originales pour résoudre les problèmes psychologiques juvéniles. Le volume 4 a été particulièrement apprécié, parce qu'il permet de mettre en évidence les circonstances où le bon apparaît mauvais et inversement : que le criminel apparent puisse être un sauveur permet de faire prendre conscience à l'adolescent de sa propre ambiguïté.

Certains psychologues américains pour enfants organisent même des lectures à haute voix de Potter pour restructurer des enfants en difficulté, en affirmant que ses histoires transmettent de bonnes valeurs, comme être attentif à soi-même et aux autres, les respecter, se battre pour ce qui est juste, prendre des risques pour aider les autres. Si dans leur lutte contre le Mal, le jeune Potter et ses amis ont momentanément le dernier mot, ce n'est pas grâce à leur intelligence, à leur courage, ou leur science magique. Leurs ennemis en sont encore mieux pourvus. Mais parce qu'à ces armes qu'ils utilisent aussi, ils ajoutent celles plus puissantes de la loyauté, de la générosité et de l'amitié.

Certains aspects négatifs sont cependant mis en évidence. Il faudrait notamment faire état aussi du parti-pris de faire valoir les enfants par rapport aux adultes, remarque particulière à la sensibilité française. Si les adultes ont le savoir et le pouvoir, Rowling les présente souvent aux enfants de manière dévalorisée, voire un peu ridicule, du géant Hagrid, faire-valoir adulte de Harry, quelque peu attardé, à la famille Dursley, aux esprits étroits et tyranniques. Encore que le fait ne concerne pas que Rowling. Une idéalisation romantique excessive explique que les classiques pour la jeunesse, souvent anglais ou américains, prennent souvent le parti des enfants contre celui des adultes.
"Ces livres, écrit un critique américain11, sont, dans le sens le plus profond du terme, subversifs." Rowling semble, sur ce point, ne suivre que la sensibilité anglo-saxonne.

LE POINT DE VUE DE CERTAINS RELIGIEUX.

Dès l'instant où l'éducation massive des enfants est concernée, comme c'est le cas avec une série de livres qui, non seulement est lue massivement, mais a toute chance de continuer à l'être longtemps, certains esprits religieux s'inquiètent de ce qui pourrait germer sur ce terrain particulièrement réceptif. Plusieurs établissements anglais et américains ont interdit la lecture d'Harry Potter à leurs élèves, prétendument à cause des valeurs anti-chrétiennes véhiculées. Des porte-parole de l'extrême-droite religieuse accusent à demi-mot Rowling d'être vendue au diable et d'entraîner les enfants du monde dans la damnation et l'Empire des Ténèbres. Ils soupçonnent les histoires de Harry Potter d'être une entreprise de lavage de cerveaux liée la révolution menée par le New-Age.

D'abord, Potter vit dans un monde antichrétien, parfaitement païen même s'il n'est pas complètement exempt des anciennes valeurs naturelles et de références chrétiennes. Des institutions ou des qualités comme celles de famille, de parents, la fidélité, l'amitié et même l'esprit de sacrifice continuent à y jouer un rôle important. Les fêtes de Noël et de Pâques sont encore citées, à l'occasion des vacances qui y sont liées, faut-il ajouter, et non pour les symboles religieux que ces fêtes représentent. Quoique dans un contexte magique, de nombreuses préoccupations très actuelles sont abordées et développées,. mais l'ensemble se passe dans un milieu totalement coupé de ses racines religieuses traditionnelles. Les futurs sorciers ne font pas de mathématiques, de sciences, d'histoire ou de géographie, mais des matières telles que la connaissance des plantes à propriétés, des potions magiques, des soins aux créatures ensorcelées, de la divination, l'Histoire de la sorcellerie, la connaissance des métamorphoses ou du langage des serpents, le dressage des dragons, etc. Aucune morale.

Dans ce cadre ne peuvent que se répandre des pratiques mauvaises. Sont cités en vrac : le langage grossier des adolescents, leurs expressions souvent vulgaires, primaires, des sentiments bas comme la vengeance, l'envie, la jalousie, mais aussi la haine et le plaisir de tuer. Harry est cité en exemple pour illustrer ce dernier cas, puisqu'il a tout naturellement souhaité la mort d'un de ses professeurs, qu'il déteste. Tout en broyant des scarabées, il s'imagine que chacun d'eux a le visage de son professeur. Tel serait au fond le véritable visage de Potter qu'on veut nous proposer comme modèle. Les professeurs sont aussi menteurs, faux et hypocrites que leurs élèves. Dans la même scène, Harry pense que son professeur projette de l'empoisonner et prévoit de se défendre en lui jetant sa marmite à la tête. Peut-on encore parler de la valeur formatrice de ces romans?

romans de Harry Potter brulés à Mexico pour atteinte à la morale

Alors que les contes classiques, où le Bien est récompensé et le Mal toujours puni, possèdent une réelle valeur éducative, dans le cas présent, le mal est représenté par la lutte entre un sorcier rebelle et ses partisans, contre Harry, la Direction de l'école, le Ministère de la Sorcellerie, sans que ce conflit mette en jeu autre chose que ce qui se passe dans la cour de l'école quand les élèves jouent aux gendarmes et aux voleurs. Aucune vraie valeur n'est en jeu, et le combat n'existe que pour le combat.

Ainsi l'objet de l'éducation à l'école Poudlard n'est ni le bien, ni le vrai, ni le beau. L'efficacité prime dans un enseignement essentiellement pratique, qui néglige la réflexion. Parmi les sujets étudiés reviennent constamment la laideur, la vengeance et le mensonge. Par exemple, Rowling développe la description, avec de nombreux détails de couleurs et d'odeurs, d'une plante répugnante, sorte de mollusque avec des bubons remplis de pus, qu'il s'agit de faire éclater afin d'en récolter précautionneusement le contenu pour en tirer un remède. Les élèves, entre autres travaux rebutants, sont chargés de nourrir une créature hideuse sans qu'on en connaisse la finalité, une sorte de bête monstrueuse dangereuse qu'il s'agit cependant d'élever en la nourrissant d'oeufs de fourmis, de foies de grenouilles et de morceaux de couleuvres. Dans ces travaux sans perspective, on ne trouve qu'un goût malsain pour la saleté et la difformité.

Dissimulé derrière les apparences de jeu, qu'apprend-on à l'école et dans les livres de sorcellerie? À se servir par exemple du pouvoir de malédiction et à se nuire les uns les autres. Un professeur connaît et dit qu'il enseignera plus tard la malédiction irréversible qui assure une domination complète sur la victime. Un théologien a fait remarquer que, dans le tome 4, le point culminant est la description d'un rituel satanique dans un cimetière, qui comprend un meurtre d'enfant, la profanation de morts, un sacrifice sanglant et des blasphèmes. Voldemort n'est jamais désigné autrement que par «Vous-savez-qui», caricature du nom du dieu biblique
12, "réunit son esprit à un corps humain, se donnant ainsi lui-même une nouvelle vie. Les formules utilisées pour le rituel sont des formules blasphématoires et anti-trinitaires qui prétendent créer la vie, reproduire, copier, imiter l'acte divin de création d'une manière diabolique." 13

Les parents sont donc mis en garde contre ce monde païen, anti-chrétien, de sorcellerie, de magie et d'ésotérisme présenté à l'admiration du lecteur comme le monde normal.

LE POINT DE VUE DU SOCIOLOGUE.

L'école des sorciers de Pouldard n'est que le calque des établissements d'enseignement des sociétés industrielles avancées capitalistiques. L'argent y tient une place importante - les sorciers ont leur système de banque et leur monnaie - et la situation de Harry ne laisse au moins pas à désirer sur ce point. La fortune de ses parents était importante et il y puise sans compter. Il a même parfois honte de cette richesse quand il compare son sort à celui de son copain Ron, toujours désargenté, car dans les querelles entre condisciples, certains ne se gênent pas pour ridiculiser les pauvres. La seule loi officielle scolaire est le travail et le règlement, mais en fait les élèves, et particulièrement Harry, ne font que le minimum. Tous sont soumis à un classement, renforcé par un concours annuel entre les équipes. Les bons et mauvais points paraissent distribués avec un certain arbitraire par des professeurs, qui, comme dans notre système, ont leurs préférés et leurs boucs émissaires. La tricherie est généralisée, et tous les participants du concours entre les écoles nationales connaissent, d'une façon ou d'une autre, certaines caractéristiques des épreuves avant de les passer - ce qui est interdit - et s'y préparent activement. Pire, des autorités et des professeurs aident plus ou moins clandestinement les élèves. Harry est le seul à faire preuve de générosité envers un camarade, en le renseignant. Touché, celui-ci l'aide à son tour. Les élus sont recompensés par l'admiration générale, mais aussi par de l'argent. Il semblerait que pour réussir dans l'administration de l'école, feindre de se conformer au modèle soit la meilleure manière de réussir, et le zèle affiché dans les fonctions prime d'autres valeurs attendues, comme pour Percy, un frère de Ron qui veut devenir cadre sans beaucoup de charisme. Le règlement, en apparence très strict, est constamment contourné. Harry se promène dans les lieux défendus avec une cape d'invisibilité et l'approbation du directeur. Bref, un univers où les enfants doivent se sentir à l'aise, puisqu'il ne fait que reproduire, sans leur proposer un idéal plus élevé, celui plutôt relâché dans lequel ils vivent quotidiennement.

Des féministes et des minorités ethniques ont fait valoir d'autres arguments en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, dès que les premiers romans de Rowling ont été connus. Leurs partisans ont fait remarquer que dans cette école de magie se cachent divers stéréotypes sociaux, notamment du sexisme, des préjugés de classe et du racisme, arguments repris dans un livre par Pierre
Bruno, professeur à l'IUT de Dijon14. Il relève l'usage des qualificatifs dévalorisants pour les rares personnages féminins. Les filles et les femmes sont ou grosses ou maigres, au physique souvent ingrat, et seules les plus jolies sont recherchées, comme la fillette dont Harry est amoureux en secret. Hermione, la meilleure amie de Harry, donne d'abord une bien piètre image de son apparence qu'elle ne soigne pas, avec sa maigreur et ses longues dents. Elle est présentée comme une donneuse de leçons, une enquiquineuse et une élève laborieuse qui ne brille que par son savoir acquis dans les livres, le contraire de Harry, qui hérite d'un don qui lui permet de réussir sans apprendre. Quant aux adultes, ils ne sont pas mieux lotis. La mère du meilleur copain d'Harry, gentille pourtant, Mrs Weasley, a des humeurs changeantes et apparaît parfois comme une véritable hystérique. La tante de Harry et la tante Pétunia sont des personnages totalement négatifs. Les professeurs femmes sont caricaturalement décrits.

D'autres détails sont discriminatoires. La position des femmes, dans l'univers des Moldus comme dans celui des sorciers, est traditionnelle.
"L'image positive qui est donnée de la famille, c'est la mère qui s'occupe de sa nombreuse progéniture alors que seuls le père et les garçons travaillent. Même quand l'auteure, J.K. Rowling cherche à valoriser le rôle d'Hermione en l'impliquant dans la lutte contre l'injustice", fait remarquer Pierre Bruno, "elle la renvoie au domaine du foyer."

Les livres de Rowling seraient conservateurs, partisans des classes sociales, avec d'un côté les sorciers, sorte de peuple élu et de l'autre, les Moldus, privés de pouvoirs magiques et constamment caricaturés. La plupart du temps, ils sont dépeints de façon négative, pour le moins objets d'une pitié méprisante et très souvent ridiculisés, comme la famille de Harry, les Dursley. Selon Pierre Bruno, apparemment l'auteure reproduit un discours élitiste, à la fois anti-bourgeois, en donnant aux Dursley la position sociale des petits bourgeois, tout en détournant certains éléments qui correspondent à une caricature de la classe ouvrière, signifiant que les Dursley ne méritent pas leur statut en leur attribuant des traits généralement utilisés pour inférioriser. Les Dursley sont donc gros et vulgaires, sans imagination. Pierre Bruno explique que cette "sorte d'élitisme un peu artistique (...) permet à la fois de taper sur les bourgeois tout en exprimant des caractéristiques négatives généralement attribuées aux milieux populaires." Seuls les sorciers, descendants de sorciers, participant ipso facto de l'élite, seraient au-dessus de ces considérations.

Chez les sorciers même, on trouve un racisme de classe ambigu. L'école de sorcellerie que fréquente Harry Potter est très hiérarchisée. Les élèves, lorsqu'ils arrivent à Poudlard, sont répartis dans quatre classes concurrentes, dont les Gryffondors et les Serpentards. C'est sur cette rivalité entre les deux groupes que reposent les aventures d'Harry Potter. Les Serpentards, dignes héritiers de familles de sorciers réactionnaires, voudraient interdire Poudlard aux enfants issus d'une lignée moins prestigieuse. Comme dans nos sociétés, on trouve à Poudlard un discours de droite et un discours de gauche, le directeur Dumbledore étant à gauche, ce qui correspond parfaitement dans les romans à la distinction entre magie blanche et magie noire. Ce qui est mis littéralement en valeur, note Pierre Bruno, "c'est l'opposition entre le discours typiquement réactionnaire des Serpentards et le discours social plus avancé des Gryffondors, mais en même temps, on se rend compte que l'ordre social qui est représenté reste profondément conservateur." Dans tous les cas, la supériorité des sorciers sur les Moldus n'est donc jamais remise en question, pas plus que l'inégalité entre les hommes et les femmes.
Dans un article de
Solaris, Alain Bergeron15 fait remarquer que Hermione est marquée par sa condition de Moldu, admise non sans réticence à la même école que les petits "sang bleu". Drago Malefoy rappelle sans cesse au trio Harry que les parents d'Hermione ne sont pas des sorciers, et il semble que ce point de vue soit également exprimé dans certaines sphères dirigeantes du milieu des sorciers qui prônent l'exclusion de tous les Moldus. Cette question de la tolérance raciale et ethnique, posée en termes assez typiquement britanniques, joue un rôle de plus en plus important dans la série. Dumbledore, le directeur de Pouldard à l'esprit large, subit l'hostilité croissante de certaines factions qui lui reprochent d'ouvrir les portes de son école avec trop de libéralité - ce qui explique sans doute la présence d'élèves portant des noms d'Asiatiques comme Cho Chang et Parvati Patil. Mais il n'y a pas de Noirs à l'école de magie. Cette ouverture est déjà jugée trop importante par les conservateurs : dans la presse des sorciers, à sensation comme la nôtre, l'école est attaquée par une journaliste hostile, pour des raisons individuelles en apparence16 , mais en fait parce que son directeur lutte contre l'exclusion et l'oppression, s'intéresse à la solidarité et fait preuve d'ouverture dans l'interprétation du règlement. Dans le quatrième volume, on voit les partisans de Voldemort se transformer en une sorte de Ku Klux Klan monté sur balais afin de pourchasser ceux qui n'ont pas la pureté sorcière. Les divisions de caste entre sorciers, tous assurés de leur supériorité magique sur la supériorité technologique des laborieux Moldus, sont tels que cette situation est inévitable et inhérente au système. L'infériorité des Moldus est admise et reconnue, seule la générosité peut faire naître de la compréhension à leur égard. Voilà qui rappelle le «bon nègre» des plantations de coton du XIXè siècle.

Rowling ne se refuse pas à aborder le problème avec la condition des elfes serviteurs de maison, dont Hermione, qui semble s'éveiller d'un coup aux problèmes syndico-sociaux, s'occupe de manière généreuse, mais brouillonne, ce qui fait utilement diversion dans le récit. Les elfes sont gentils, mais bêtes et gaffeurs et entretiennent entre eux une mentalité d'esclaves heureux. Selon
Bergeron, Rowling manifeste une attitude un peu équivoque à propos de ces elfes. Quand Hermione se met en tête de fonder un mouvement d'émancipation des elfes de maison, elle n'obtient aucun succès, ni auprès de ses compagnons, ni auprès des elfes eux-mêmes. Cet épisode, traité sur le mode amusant, ne paraît guère politiquement correct, et on s'interroge sur sa signification. Offre-t-il une satire assez féroce de l'idéalisme adolescent, quand il se met à vouloir sauver malgré eux tous les canards boiteux du monde, interprétation que propose Alain Bergeron? Ou ne fait-il que reprendre la convention raciste du «bon» domestique, parfaitement satisfait de sa condition et de ses «bons» maîtres? Harry se montre complètement indifférent au problème, et Hermione, travaillée par sa puberté, oublie d'ailleurs son mouvement à la fin du roman...

POUR CONCLURE.

Comme on vient de le voir, les romans de Rowling ne laissent pas indifférents. Reste que l'on n'a pas véritablement expliqué la passion que leur vouent des millions de lecteurs dans le monde. Il semble que se soit produit une heureuse conjonction de l'ensemble des facteurs qui viennent d'être recensés ou analysés. Dans divers pays, les critiques ont aussi essayé de rattacher cet engouement à des caractères nationaux. Dans un article de la
New York Review of Books17, Alison Lurie a tenté d'éclairer ce phénomène par un argument que King a souvent repris, la nostalgie de l'enfance qu'éprouvent beaucoup d'Anglo-Saxons : "Dans les pays de langue anglaise, depuis la fin du XVIIIè siècle, poètes, philosophes et éducateurs soutiennent qu'il y a quelque chose (...) d'unique dans l'enfance. (...) Parce que celle-ci est considérée comme une condition supérieure, beaucoup d'Anglais et d'Américains ont du mal à l'abandonner."

Les Latins, qui lisent moins Potter que les Allemands
18 , seraient plus sensibles à l'humour des romans, au charme délicieux du monde des sorciers, ou à l'efficacité de conteur de Rowling, à son écriture allègre et malicieuse. Il y a chez elle une manière légère de traiter le merveilleux qui procure un dépaysement identique à celui d'Alice au pays des merveilles, un monde derrière le miroir qui paraît aussi réel que notre monde, avec sa cohérence et sa logique. Mais pour les autres nations? Pour les enfants, pas de problèmes. Ils ont inventé des jeux de devinettes, se posent des questions à propos de la formule des sortilèges ou des animagus. Et il faut bien dire que cet amusement sur des livres offre quand même des perspectives plus riches que les colles sur les Pokémon...

Il faut noter cependant qu'une relecture adulte attentive des Potter fait davantage prendre conscience de leur profondeur, et surtout d'une solide compréhension des problèmes de notre époque, habilement transposés dans le monde des sorciers. C'est le traducteur de Rowling, Jean-François
Ménard, lui-même romancier pour la jeunesse et spécialiste en sorcellerie, qui en fournit la meilleure perspective : "Ce sont des livres qui au-delà de leur caractère divertissant révèlent une profonde angoisse. Harry est perpétuellement en proie à la peur : école, environnement instable, beaux-parents hostiles, incertitudes des origines... Il est une métaphore, magistrale et universelle, de la situation des enfants d'aujourd'hui. Ajoutez à cela une grande finesse psychologique, une grande variété d'émotions, allant de la joie à la panique, et vous obtenez quelque-chose de très intense." 19 Les psychologues qui se servent des Potter pour aider leurs jeunes patients à résoudre leurs problèmes du moment ont compris cette situation.

Sans se compliquer la vie à de telles analyses, beaucoup de parents se contentent de louer la sorcière qui a réconcilié les enfants et les adolescents avec la lecture, tandis que des critiques anglo-saxons les rassurent littérairement en rattachant Rowling à la tradition littéraire et en dissertant sur le thème d'une résurgence de la grande tradition littéraire des contes fantastiques classiques reprenant une fois encore l'antique combat entre le Bien et le Mal, mais avec une mentalité dans le vent. Il est en tous cas acquis, encore que le phénomène soit dans son ensemble inexpliqué, que l'habile mélange d'ancien et de moderne, de surnaturel et de naturel, de magique et de réel, de rêve et de concret, le tout respirant l'air du temps, soit pour beaucoup dans cette fascination. Plus, évidemment, un zeste de magie.

Roland Ernould, juillet 2001.

Pour plus d'informations :

Gallimard a publié, sous des noms fantaisistes, deux petits manuels "inspirés" du monde de Poudlard, déja parus en Grande-Bretagne : Le Quidditch à travers les âges, de Kennilworthy Whisp, et Vie et habitat des animaux fantastiques, de Norbert Dragonneau.

2. 2. 2. 2.

L'organisation caritative British Comic Relief consacrera l'intégralité des bénéfices obtenues pour la vente à aider les enfants des pays les plus pauvres du monde.

 Notes :

1 Joanne K. ROWLING:
Harry Potter and the Philosopher's Stone (1997), trad. : Harry Potter à l'école des sorciers, Gallimard, 1998. Folio Junior, 2000.
Harry Potter and the Chamber of Secrets, (1998), trad. : Harry Potter et la chambre des secrets, Gallimard, 1999. Folio Junior, 2000.
Harry Potter and the Prisoner of Azkaban (1999), trad. : Harry Potter et le prisonnier d'Azkaban, Gallimard, 1999. Folio Junior (2000)
Harry Potter and the Goblet of Fire (2000), trad. : Harry Potter et la coupe de feu, Gallimard, 2000.

2 Officier de l'Ordre de l'Empire britannique, pour services rendus à la littérature de jeunesse.

3 La publication du dernier tome a été entourée de manifestations variées, dont un grand nombre a été organisé par Warner Bros et Coca Cola : défilés d'enfants déguisés, création d'un «fan-club» sur internet (le site reçoit chaque jour plusieurs milliers de visites). Un film (Warner Bros) et une adaptation théâtrale sont en préparation, des cassettes audio enregistrées, Harry Potter a fait la page de couverture de Time, de Newsweek. De nombreux produits commerciaux dérivés existent ou sont en fabrication (tee-shirts, chaussettes (Olympia; friandises (Cap Candy) ;jouets, panoplies, cartes, gadgets, jouets (Mattel), kits de construction (Lego) et jeux vidéo (Hasbro, des Pokemon) etc.) prévus pour fonctionner à la fois sur les plates-formes Nintendo (Game Boy Color et Game Boy Advance) et Sony (PlayStation One). Est également prévue une version PC, qui sera spectaculaire visuellement, grâce aux environnements 3D. Événement, dans une «nuit Potter», France-Culture a offert à ses auditeurs la lecture intégrale du tome 1 en novembre 2000.

4 En Grande-Bretagne, où le tome quatre a été disponible en juillet 2000, le premier tirage d'un million d'exemplaires a été épuisé en quelques semaines et une réimpression à 1,5 million a dû été effectuée. Aux Etats-Unis, le premier tirage quelques semaines plus tard a été de 5,3 millions (3 millions vendus dès le premier week-end). En Allemagne, 500.000 exemplaires ont été vendus le premier jour.
Pottermania ou hystérie générale : en Grande-Bretagne, comme aux Etats-Unis ou en France, les librairies ont été prises d'assaut et ont ouvert leurs portes en pleine nuit pour offrir le livre en primeur aux lecteurs.
Amazon.com, la cyberlibrairie américaine, a accueilli 9.000 camions qui lui ont livré 400.000 exemplaires pour les débuts de la vente La presse abonde en chiffres de ce genre, d'ailleurs pas tous cohérents.

5 Cité par Florence Noiville, Le Monde, 30 novembre 1999.

6 Expression peu traduisible (tempête et élan ou passion), nom d'un mouvement littéraire qui exerça une profonde influence sur la littérature allemande entre 1770 et 1790. En réaction contre le rationalisme, elle revendique les droits du sentiment sur la raison, et de l'originalité contre la convention. Goethe et Schiller jeunes furent influencés.

7 Elle a gardé de cette période un intérêt certain pour les déshérités. Selon Florence Noiville, elle a "donné cette année plus de 5 millions de francs au Conseil national pour les familles mono-parentales. Elle a aussi écrit deux livres à paraître en 2001 et dont les bénéfices seront versés à une association caritative de lutte contre la pauvreté des enfants. Et elle devait se produire dimanche 10 décembre, à Londres, lors du 52e anniversaire de la Déclaration des droits de l´homme, organisé par Amnesty international." Le Monde, 30 décembre 1999.

8 Depuis septembre 1999, des fiches de lecture sur les aventures d'Harry Potter font partie du «classeur pédagogique» qui a été envoyé aux 15.000 adhérents du Cercle Gallimard de l'enseignement, des professeurs de français et des documentalistes. Ce support imaginé pour aider les enseignants à préparer leurs cours a rencontré du succès. Selon l'éditeur, les professeurs trouvent qu'Harry Potter «fait lire les élèves».

9 Rowling est reconnue par ses confrères et les jurys, et a récolté de nombreux prix : The National Book Award, the Smarties Prize, the Children's Book Award, etc.

10 À la bibliothèque, vous pouvez sortir le manuel Potions magiques d'Arsénius Beaulitron ou Forces Obscures : comment s'en protéger? de Quentin Jentremble. En classe, on mâchouille des chocogrenouilles, des gommes de limaces, et des dragées de Bertie Crochue (goût foie, tripes ou chou de Bruxelles).Le traducteur, Jean-François Ménard, a dû bien s'amuser pour trouver ces équivalences.

11 Alison Lurie New York Review of Books ,16 décembre 1999. Cité dans Le Monde de l'éducation, mars 2000.

12 Dans l'Ancien Testament, Jahvé est celui qui n'a pas de nom. Il est, c'est tout. Quand Moïse sur le Mont Horel, voilant sa face pour la protéger de l'ardeur du buisson ardent, apparence choisie par la divinité pour se manifester, demande le nom de la divinité pour le signifier à son peuple, la réponse a fait le bonheur d'exégètes innombrables, «èhyèh aser èhyèh»: "Dieu dit à Moïse: «Je suis qui Je suis». Il dit: «Tu parleras ainsi aux fils d'Israël; Je Suis m'a envoyé vers vous»" . Les Hébreux diront naturellement: Il «Est», soit en hébreu yahavèh, ou Yahvé, pour désigner Dieu.

13 Citation de l'Aargauer Zeitung, du 19 octobre 2000, non vérifiée.

14 Pierre Bruno, Existe-t-il une culture adolescente?, éditions In Press, préfacé par Jack Lang.

15 Alain Bergeron, Harry Potter et le secret des bouquins enchantés, Solaris 137, printemps 2001, exclusif au supplément Web

16 Rita Skeeter, la journaliste à la plume magique qui invente les propos des interviewés, est sans doute la caricature vengeresse croquée par Rowling des journalistes de tabloïds anglais qui ont écrit n'importe quoi sur sa vie.

17 16 décembre 1999. Cité dans Le Monde de l'éducation, mars 2000.

18 Les Allemands sont particulièrement friands de Harry. Ils acvaient acheté 350.000 exemplaires de Harry Potter et la Coupe de Feu en anglais avant sa traduction très attendue en allemand.

19 Cité par Florence Noiville, Le Monde, 31 mars 2000.

J.K. Rowling est née au Pays de Galles, près de Bristol en 1965. Elle a suivi des études à l'université d'Exeter et à Paris. Elle est diplômée en langue et littérature française. Elle a d'abord travaillé à Londres au sein de l'association Amnesty International et a enseigné le français. Partie enseigner au Portugal, elle y a épousé un journaliste portugais et a eu une petite fille, Jessica. Après son divorce, quelques mois plus tard, elle s'est installée à Edimbourg. Elle vivait alors dans une situation précaire, situation que les tirages de ses romans ont complètement changée J.K. Rowling vit toujours à Edimbourg avec sa petite fille, se tenant aussi éloignée que possible des médias. Elle s'est remariée avec un médecin en décembre 2001.

Mon livre :

Du Rond des sorciers à Harry Potter

MAGIE ET FANTASTIQUE :

QUATRE APPROCHES DE LA MAGIE

(Claude Seignolle, Peter Straub, Stephen King, J. K. Rowling)

a été publié aux éditions L'Harmattan.

Faites-le vous offrir en attendant le tome 5 !

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ce texte a été publié dans ma Revue trimestrielle

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 # 13  automne 2001.

   

 

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