Eoin Colfer, Code Éternité (Artemis Fowl, III)
Traduit de l'anglais par
Jean-François Ménard. Gallimard Jeunesse, 2003.
Eoin Colfer est homme à
transgresser sans cesse les limites avec un culot joyeux et
espiègle, multipliant les sacrilèges à
l'égard des genres en retrouvant constamment son
équilibre. Qu'écrit-il au juste? De la fantasy, en
apparence, mais pas que cela. Certes, il y a les fées, les
nains, les trolls, gobelins et autres habitants ordinaires de ces
lieux imaginés dans le temps passé. Le postulat
tranquillement affirmé par Colfer est que le peuple des
fées, qui ne se trouve pas dans le monde parallèle
connu de Harry Potter ou des
personnages de Philip Pullman, vit
sous terre. Existant bien avant les hommes, les fées utilisent
en partie l'énergie volcanique de la terre partiellement
domestiquée avec leurs technologies avancées. Pas
rétrogrades les fées : elles ont gardé tous les
pouvoirs de la magie en la corsant d'une technologie qui a un
siècle d'avance sur la notre. Elles ont gardé leurs
ailes, par exemple. Mais elles sont maintenant
mécanisées et capables de prouesses techniques
impensables pour le pauvre humain terrestre. Leur technologie
informatique est capable de pénétrer les arcanes les
plus dissimulés de nos sociétés... Les
fées auraient-elles mis au point un enseignement scientifique
apte à assurer une telle avance technologique si confortable?
Que nenni, tout repose sur le génie d'un savant tournesol,
centaure par surcroît! Foaly est le scientifique incompris
à la grosse tête touche-tout et trouve-tout, aux
réussites innombrables, qui porte sur ses quatre pattes et son
dos de cheval pratiquement toute la science du peuple souterrain des
fées...
La technologie humaine brille
par son informatique : mais pas celle, poussive et
dépassée des humains ordinaires, mais celle d'un
génie atypique, Artemis Fowl, un préadolescent de
treize ans qui, grâce à sa maîtrise des
subtilités informatiques, pénètre les codes les
plus secrets des institutions et des hommes. Il a inventé un
prototype d'ordinateur bien plus performant que le matériel
existant, l'enjeu de ce troisième roman, le cube C (clin
d'oeil à Apple?), joyau technologique aux performances
remarquables permises grâce à l'utilisation par Artemis
de la technologie des fées. Il la leur a volée lors
d'une précédente aventure. Car notre génie de
l'informatique est aussi, en dépit de son jeune âge, un
génie du crime, dans la pure tradition familiale. Dans le
premier tome du roman, il a réussi le peu banal exploit
d'arracher aux fées une bonne quantité de leur or
légendaire. Mais cette fois Artemis, en tentant de vendre la
commercialisation du cube C, se fait mettre en difficulté par
un escroc d'envergure, industriel sans scrupules, qui semble se
montrer plus malin que lui et le met momentanément en
échec. Mais les fées veillent. Elles ont reconnu leur
technologie dans les effets que produit le cube C et interviennent
grâce à leurs FAR, forces armées d'intervention
parmi les humains.
Génie technique comme
génie du crime, l'élégance naturelle d'Artemis
et sa prodigieuse culture en font un héros
contre-héros, l'antithèse de Harry Potter, que les psys
pour enfants adorent. Je ne sais pas quelle est leur attitude
à l'égard d'Artemis, , mais elle ne doit pas être
facile à expliquer aux parents... La sensibilité de ce
personnage à la Arsène Lupin est cachée sous le
masque frivole d'une ironie joyeuse, qui recherche le panache
à la manière des Mousquetaires. Le troisième
tome met d'ailleurs cette sensibilité à
l'épreuve. Le père d'Artemis lui a longtemps servi de
modèle. Mais il a subi une difficile épreuve qui l'a
plongé des mois dans le coma. Grâce à la magie,
il a été sauvé de la mort par une fée,
à la demande d'Artemis. Son père s'est maintenant
converti au Bien : il essaie de communiquer son nouvel idéal
à Artemis, qui est pour le moins hésitant. C'est si
triste d'être conformiste et honnête, et si amusant de se
jouer des autres...
La troisième intrusion
d'Artemis dans le monde des fées s'accompagne de
sérieuses perturbations dans celui-ci. La tortuosité
d'esprit d'Artemis plonge les fées dans un imbroglio dont
elles ne peuvent sortir qu'en bafouant à leur tour leurs
principes et leurs règles destinés avant tout à
assurer la survie du petit peuple. Dans le tome III, l'action des
fées dans le monde des hommes mobilise une bonne partie de la
technologie au service de la brigade des FAR et s'exécute dans
la plus entière illégalité.
Morale ridiculisée,
"fées dans le vent", de la fantasy qui n'en est pas vraiment;
de la science-fiction de par ses engins perfectionnés et
l'utilisation particulière de l'énergie
nucléaire mais qui n'en est pas puisque que la magie
intervient constamment, et que la technologie est inventée
dans des conditions invraisemblables; du récit policier en
partie puisque se rencontrent plusieurs énigmes qui demandent
des enquêtes pour les résoudre; du roman d'espionnage :
on trouve de tout dans cet enchaînement d'actions captivantes
qui emportent l'adhésion. L'humour, la vivacité du
dialogue et des actions, les suspenses habilement menés font
oublier ce que la formule Colfer, répétée depuis
le premier tome, peut comporter de redondances. Le roman est
convenablement écrit et bien traduit par le traducteur de J.
K. Rowling, François Ménard. Un exemple saisissant qui
m'a plu, quand Butler, le garde du corps d'Artemis est tué,
Artemis a la présence d'esprit de le congeler
immédiatement. La fée Holly ramène Butler
à la vie grâce à la magie. La fée a
pratiqué une ouverture au rayon laser dans son corps : "Elle
colla ses pouces l'un contre l'autre et les glissa dans l'entaille de
la peau.
Guérison, murmura-t-elle, et la magie afflua dans ses
doigts.
Des étincelles bleues dansèrent au-dessus de la
blessure puis s'engouffrèrent à l'intérieur
comme des étoiles filantes plongeant derrière
l'horizon. (...) Pendant un bon moment, il ne se passa pas grand
chose puis le dos de Butler s'arqua soudain, projetant sa poitrine en
avant. Holly entendit des vertèbres grincer. Butler retomba
dans le caisson, le sang coulant à flot de sa deuxième
plaie. Les étincelles magiques s'entremêlaient et
recouvraient son torse d'une sorte de treillis parcouru d'intenses
vibrations. Butler tressautait sur son brancard comme une bille dans
un hochet à mesure que la magie remettait en état les
atomes de son corps. Les toxines que son organisme expulsait
formaient une buée qui s'échappait par tous les pores
de sa peau. La couche de glace fondit instantanément dans un
nuage de vapeur qui se transforma en pluie lorsque les particules
d'eau se condensèrent sur le toit métallique du
fourgon. Les enveloppes de glace éclataient comme des ballons
rouges, catapultant des cristaux qui ricochaient sur les parois.
Holly avait l'impression de se trouver prise au coeur d'un orage
multicolore. (...) La vague d'énergie magique remonta jusqu'au
cou de Butler puis submergea son visage. Des étincelles bleues
prirent ses yeux pour cible, longeant le nerf optique jusqu'au
cerveau lui-même. Les globes oculaires roulèrent dans
leurs orbites, la bouche remua à son tour, déversant de
longues suites de mots empruntés à diverses langues, et
complètement dénués de sens." (pp. 101/3)
Ce troisième tome est-il vraiment le dernier de la
série comme le suggère Colfer? On le regrettera.
Le tournage du premier film consacré à Artemis Fowl
doit débuter incessamment pour une sortie à
l'été 2004.Lawrence Guterman, le
réalisateur, et John Stockwell, le
scénariste, ont été choisis. Eoin Colfer a
annoncé qu'on trouvera quelques scènes inédites
par rapport au roman.
Roland Ernould © 2003
La quatrième de
couverture :
Je pense que vous
connaissez la suite, ma réputation n'est plus à faire.
Je suis un génie, un génie du crime, j'ai monté
les mauvais coups les plus audacieux, les arnaques les plus habiles.
Mais ceci est ma dernière mission. Grâce à
certaines de vos technologies, j'ai pu inventer l'objet ultime, qui
devrait révolutionner le monde. La clé de cette petite
merveille est un code que je suis le seul à connaître...
Mais les choses tournent plutôt mal et, pour la première
fois de ma vie, je me retrouve dans une situation
désespérée. Je vous lance donc un appel au
secours. Si vous n'y répondez pas, je suis perdu. Et vous
aussi...
La troisième aventure d'Artemis Fowl est aussi folle et
géniale que son héros. Ou comment notre jeune bandit
millionnaire va comprendre que le crime ne paie pas toujours et qu'il
est bien utile d'avoir des amis aux pouvoirs magiques. Des amis
à qui il va devoir dire adieu...
Roland Ernould
©
2003
note de
lecture du
premier volume :
Artemis
Fowl
note de
lecture du
deuxième volume : Artemis Fowl
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Eoin Colfer est né en 1965 à
Wexford, en Irlande. Grand voyageur, il a travaillé
en Arabie Saoudite, en Tunisie et en Italie avant de revenir
en Irlande. Enseignant, comme l'étaient ses parents,
il vit avec sa femme Jackie et son jeune fils dans sa ville
natale. Outre les Artemis Fowl, il a
publié
Que le
diable l'emporte.
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Que le diable
l'emporte.
Meg et Blech sont deux
adolescents paumés. Meg a été chassée de
chez elle par son beau-père et elle traîne avec un
voyou, Blech, accompagné d'un pitbull. Blech a
décidé de cambrioler l'appartement d'un vieil homme.
Mais le casse tourne mal...
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.. du site Imaginaire : liste des auteurs
.. du site Différentes Saisons, revue trimestrielle
.. général