Clive Barker
Galilée 1
et 2
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Rivages Fantasy, 1999.
Galilée
est la première "romance" hétérosexuelle de
Barker, qui s'est mis tardivement à la narration sentimentale,
un peu comme Stephen King avec Magie et Cristal,
mais pour des raisons différentes. Barker a accordé
jusqu'à présent son attention aux relations "gay"
(Sacrament en est
le meilleur exemple) et il y a d'ailleurs dans Galilée un personnage de lesbienne particulièrement
tumultueux. Galilée est lui-même
hétérosexuel. Mais il faut noter que, contrairement
à King, cette romance repose sur une sexualité brute,
avant tout autre contact humain, le seul type de sexualité qui
semble d'ailleurs plaire à des auteurs comme Barker ou Poppy
Z. Brite. L'érotisme et la séduction
n'intéressent pas Barker, qui ne témoigne guère
d'intérêt à ce type d'imaginaire. Cette romance
a, en outre, la caractéristique d'être interraciale
(Rachel, l'héroïne, est une blanche de Boston, et
Galilée un noir) et de concerner deux êtres très
différents (Rachel est une femme ordinaire, aux pieds bien sur
terre, et Galilée un demi-dieu). En soi, excepté son
intensité, cette romance n'a rien de particulièrement
original. Si les relations entre les familles Barbarossa et Cleary
sont celles des Capulet et des Montaigu, les personnages n'ont rien
de la mièvrerie des héros de Shakespeare, et il leur
faut un théâtre à la mesure de leur "connexion",
le monde entier, et l'histoire des deux derniers siècles.
Les relations entre une humaine et un dieu sont moins
compliquées qu'on le pense. Car les dieux que créent
les écrivains modernes ne ressemblent guère à
celui de La
Bible, omnipotent, omniscient et
coincé. Proche des dieux grecs, romains ou nordiques, ils sont
humains dans leurs comportements et leurs sentiments, avec quelques
pouvoirs surnaturels. D'une part, ils participent au monde de
l'imaginaire, le seul qui vaille la peine d'être vécu
pour certains romanciers, contrairement à la plupart des
hommes ordinaires qui préfèrent vivre dans leur
quotidien, fut-il triste et gris. Ils sont aussi liés à
l'intérêt que Barker porte aux rejetés de la
société et aux monstres, qui vivent d'autres
règles et qui généralement ne cherchent pas
à justifier leurs actions. Il y a dans ce roman, comme dans
d'autres de Barker, une certaine célébration de la
monstruosité....
Cette grande fresque d'imaginaire impressionne, avec ses nombreux
personnages, ses êtres particuliers présentant d'autres
mentalités, vivant dans un univers éloigné des
expériences quotidiennes. Cette fantasy originale, qui
s'appuie sur des figures qui semblent s'être
créés d'elles-mêmes, avec des pouvoirs pas
toujours clairement mis en oeuvre, par exemple des serviteurs pour
les tâches subalternes, des sortes de machinistes dont on
ignore tout, est l'histoire de deux mondes qui coexistent
difficilement jusqu'à leur destruction. Celui de l'Enfant,
l'extraordinaire villa de ce nom, qui aurait été
construite par Jefferson, le troisième président des
USA, pour son amante la déesse noire Cesaria, qui a
donné naissance à une famille de presque immortels, et
celui plus ordinaire du clan Geary, dynastie industrielle riche et
puissante. Les deux familles ont entre elles des liens subtils
à démêler. Ce nom "L'enfant" - d'autres
explications sont avancées dans le roman - caractérise
d'une certaine manière l'espèce particulière
d'imagination que Barker sollicite de ses lecteurs : celui de
l'enfance, avec l'acceptation de la coexistence d'un monde de
l'imaginaire avec celui des réalités, le signe le plus
évident du divin dans l'homme pour le narrateur. Car les
explications et les dieux sont deux forces antinomiques et il nous
faut bien admettre l'univers particulier de Cesaria, une force
éternelle, une créature née du feu primitif. Son
monde est celui des chasseurs d'avant le Christ, qui n'étaient
pas des bergers d'hommes.
La première place est donnée aux tensions entre les
deux sexes, mères et fils, frères et soeurs, amant et
amante. Du conte de fées vécu par Rachel sortie de
l'obscurité par son mariage avec un Geary, rêve de
toutes les midinettes, jusqu'à son amour fou pour
Galilée en passant par le pittoresque mariage des lesbiennes
et l'érotisme macabre, cette fantasy érotique cherche
à explorer des territoires de l'amour humain nouveaux pour
Barker, à les montrer sous des angles inédits. Plus
d'une fois onirique - on trouve des rêves remarquables dans
Galilée -,
parfois sordide (la diarrhée et ses descriptions tient une
place peu ordinaire, l'élaboration du roman est d'ailleurs
comparée à une longue excrétion (584)), le
récit oscille entre le goût pour le chaos et le
rêve de paradis.
Enfin dans ce premier roman à la première personne,
l'habileté de Barker est de simuler la narration écrite
par un étranger à l'écriture, qui en cherche les
règles, change de registre, joue sur le suspense ou au
contraire, se repentant, va droit à l'essentiel. Il fait
état de ce qu'il pense être des erreurs, regrette
d'avoir présenté ses personnages sous un jour trompeur,
feint d'apprendre son métier phrase après phrase. Il
multiplie les mises en scènes, les effets d'annonce.Ce
procédé a ses avantages, mais il présente aussi
parfois l'inconvénient d'être disparate; de
générer ici et là des longueurs, de devenir
phraseur sans vraiment avancer, contrairement au projet de
l'écrivain en herbe qui voudrait bien séduire d'abord
par la beauté et la musique des mots avant que le lecteur se
penche sur le sens des phrases, honteux de sa sensualité
littéraire. Ceci dit, le lecteur sera intéressé
souvent par de pertinentes remarques sur le métier
d'écrivain.
Le narrateur de cette fresque gigantesque, traversée par le
symbolisme de la Roue des Étoiles, pense parfois que les
appétits sexuels de son père se sont retrouvent
transposées dans l'écriture, avec cette comparaison
significative chez Barker, la semence du père convertir en
encre de stylo (347).Il doit se lire aussi avec l'esprit de la
forte Rachel, bien obligée d'admettre que le monde dans lequel
elle a été élevée est fortement
réducteur, et qu'il existe dans l'univers des forces qui
dépassent les limites de son intelligence et de son
éducation, des choses animées par une vie sauvage,
invisible et infinie, les rêves des humains toujours à
l'inlassable recherche de leurs dieux au delà des limites du
connaissable. Le troisième volume, écrit mais non
publié, est impatiemment attendu.
La quatrième de
couverture :
Tome 1 :
Aussi puissants
et adulés que les Kennedy, aussi riches que les Rockefeller,
les Geary sont l'un de ces rares clans qui influencent le destin de
l'Amérique depuis la guerre de Sécession. Aujourd'hui
pourtant, leur empire va se trouver menacé par l'irruption
dans la famille d'une jeune femme innocente, Rachel Pallenberg, qui
pressent les terribles secrets à l'origine de leur pouvoir.
Car autour des Geary et de leurs éternels rivaux, les
Barbarossa, se dessine un monde cauchemardesque. Galilée,
prince du clan Barbarossa, condamné, tel le Hollandais Volant,
à errer sur les mers du monde entier, rencontre Rachel et
tombe fou amoureux d'elle. Leur passion déclenchera une guerre
impitoyable. Sur le champ de bataille des sentiments et de la chair,
les deux clans adverses vont s'entre-déchirer. Une formidable
épopée où le réalisme se mêle
à la magie, aux délires érotiques et aux visions
oniriques qui ont permis à Clive Barker, peintre,
cinéaste et auteur adulé des Livres de Sang et
d'Imajica, de séduire des millions de lecteurs.
Tome 2 :
Au coeur des
marais de Louisiane, dans la fabuleuse demeure que l'on a
nommée L'Enfant, l'étrange Edmund Maddox dévoile
l'histoire d'une bataille de titans entre deux clans rivaux qui ont
bâti l'Amérique. Galilée est le fils prodigue de
la famille des Barbarossa, un séducteur-né. Sa famille
livre depuis des générations une guerre souterraine
à ses ennemis jurés, les Geary, un clan richissime,
puissant et profondément corrompu. Lorsque Galilée
tombe amoureux de Rachel, la jeune épouse d'un prince
héritier du clan Geary, l'enfer se déchaîne et
emporte les amants dans un monde de cauchemar. Voici la seconde
partie du grand soap-opera biblico-fantastique où Clive Barker
explore l'histoire de l'Amérique depuis la guerre de
Sécession. Une "romance" gothique où le réalisme
se mêle à l'épouvante, aux fantasmes
érotiques et aux visions délirantes qui ont permis
à Clive Barker, peintre, cinéaste et auteur
adulé, de séduire des millions de lecteurs.
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Né à Liverpool
en 1952, londonien pendant de longues années, vivant
aujourd'hui à Los Angeles, Clive Barker est le plus
américain des grands écrivains anglais.
Artiste complet, homme de théâtre et
illustrateur de grand talent, scénariste et
réalisateur de films-cultes tels que la série
des Hellraiser,
Cabal et
Lord of
Illusions, Barker
est désormais un auteur de référence.
Tandis que ses magnifiques recueils de nouvelles
Livres de
Sang continuent de
lui amener de nouveaux lecteurs, ses grands romans comme
Everville,
Imajica ou
Galilée ont imposé son talent extraordinaire.
Ce visionnaire à l'imagination sans limites
développe pour l'instant plusieurs projets de films,
tout en préparant de nouveaux recueils de nouvelles
et trois romans. Bibliographie.
Mes autres notes de lecture
:
Le
jeu de la damnation
- Galilée - Abarat - Sacrement
Stephen King/Clive
Barker : les Maîtres de la
terreur
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Bibliographie
Mes autres notes de lecture
:
Le jeu de la
damnation - Sacrements -
Stephen King/Clive Barker
: les Maîtres de la
terreur
Roland Ernould © 2001
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.. du site Imaginaire : liste des auteurs
.. du site Différentes Saisons, revue trimestrielle
.. du site Stephen King
mes dossiers
sur les auteurs
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