Jean-Baptiste Baronian, Histoires fantômes

Renaissance du Livre, Les Maîtres de l'imaginaire, 2003, 275 pages.

Baronian m'est bien connu depuis longtemps par son travail dans les années soixante-dix aux éditions Marabout, où, directeur de collection, il fit beaucoup pour les littératures de l'imaginaire. Et aussi pour son livre remarquable Panorama de la littérature fantastique de langue française, paru il y a 20 ans, réédité, actualisé, en 2000 (La Renaissance du livre). Cet écrivain de profession, arménien belge de naissance (né à Anvers) et vivant à Bruxelles, a des activités littéraires multiples : romancier, critique, directeur de collections, préfacier, anthologiste, essayiste, il se montre exceptionnellement éclectique dans ses goûts. C'est un grand admirateur de Jean Ray (sur lequel il a écrit L'Archange fantastique) et de Georges Simenon (président de l'Association des amis de l'écrivain, il vient d'écrire deux ouvrages sur  : Simenon, l'homme à romans, un album riche de 550 documents, Textuel, 2002); et Simenon ou le roman gris, un essai littéraire, Textuel, 2002. En tant qu'auteur de romans, il peut passer sans problème de l'oeuvre littéraire au roman à "l'eau de rose", au fantastique ou à la SF, ou plus souvent encore au polar qu'il signe d'un pseudonyme. Il a publié à ce jour une cinquantaine de livres.

Sous le titre de
Histoires fantômes, les éditions belges de La Renaissance ont rassemblé une quarantaine de contes fantastiques, issus de quatre recueils publiés entre 1977 et 1998, plus un inédit : Les Adorateurs de l'oeil, pastiche des aventures du célèbre détective Harry Dickson, personnage mis en scène jadis par Jean Ray), paru en feuilletons. Baronian aime l'art de la parodie, et Le Grand Chalababa est un recueil qui se veut la caricature du genre SF. Les trouvailles sont nombreuses : un extraterrestre, voyageur de commerce courant les planètes, se délecte de la lecture de Proust. Un comité pour l'accélération de la vie terrestre envoie des cadeaux particuliers à ses membres. Un robot vit des aventures désopilantes. Un jeu de miroirs intrigue dans La Bibliothèque de feu.
Les autres recueils :
Sept simulacres, Disques fantômes -, comportent des nouvelles étranges, d'autres bizarres, quelquefois peu compréhensibles. Un certain nombre sont teintées de réalisme, ancrées dans un milieu typiquement belge, celui de Bruxelles, ville de vieux quartiers, de bouquinistes et paradis des buveurs de bière. Le fantastique est discret dans la plupart de ces nouvelles.

Je n'avais jamais lu auparavant de nouvelles fantastiques de Baronian. Ce livre, qui m'a déçu, m'a montré qu'il y a loin de la théorie à la pratique. Si la recherche de la situation originale est évidente, dans une mise en scène souvent moqueuse qui m'a aidé à finir le recueil, j'avoue que j'ai été souvent près de décrocher. Ces textes, qui ont pu être considérés comme avant-gardistes à l'époque de leur parution (
Le Grand Chalababa avait suscité des remous dans la presse spécialisée, scandalisée par cette dérision du genre SF) me paraissent appliqués, datés, lointains, correspondant à une sensibilité qui a considérablement évolué. Plus grave : ces textes, trop souvent distanciés, m'ont souvent paru de peu d'intérêt, trop légers dans leur recherche de divertissement, sans grandes idées. L'humour, omniprésent dans le recueil, ne peut seul suffire. Je regrette, eu égard à la dette que j'ai à l'égard de Baronian dont le premier Panorama de la littérature fantastique a contribué à ma formation, de ne pas pouvoir me montrer plus indulgent à son égard.

Quatrième de couverture :
Sous le titre de Histoires fantômes, voici rassemblés Le Grand Chalababa, une parodie facétieuse de la science-fiction, Sept simulacres, La Bibliothèque de feu, Disques fantômes et un inédit : Les Adorateurs de l'oeil, pastiche des aventures de Harry Dickson (de Jean Ray !) qui fut le feuilleton d'un été dans le magazine Le vif/L'Express.
Jean-Baptiste Baronian non seulement commente et critique tout ce que nous comprenons dans le concept de littérature de l'imaginaire, mais de plus en est un des grands auteurs. Connaisseur érudit, il est à l'aise depuis toujours dans ce monde des maîtres de la collection : en particulier avec Jean Ray, dont il organisa une exposition à la Bibliothèque royale de Bruxelles, et à propos duquel il écrivit L'Archange fantastique. Et son goût de l'insolite nous vaut ici une multitude de surprises.

Roland Ernould © 2003

Photo : © J-L Geoffroy,

avec autorisation

Notice bibliographique : Jean-Baptiste Baronian est né à Anvers le 29 avril 1942 de parents arméniens. Tout en fondant une revue ainsi que les éditions La Plume ivre, il fait ses études supérieures à l'Université Catholique de Louvain, d'où il sortira docteur en droit et bachelier en philosophie. En 1969, il entre aux éditions Marabout où il dirigera notamment, jusqu'en 1977, la collection littéraire fantastique et science-fiction. Depuis une dizaine d'années, il se partage entre ses activités de romancier (également sous le pseudonyme d'Alexandre Lous), d'anthologiste, de préfacier, de bibliophile, de conférencier, d'essayiste et de chroniqueur, notamment dans Le Vif-L'Express à Bruxelles et le Magazine littéraire à Paris. Il est président des Amis de Georges Simenon. Il a écrit, sous son nom ou le pseudonyme Alexandre Lous, plus d'une vingtaine de romans et recueils de nouvelles, quantité d'anthologies et cinq essais. Note de lecture : Jean-Baptiste Baronian, Panorama de la littérature fantastique de langue française .

Lire aussi les autres ouvrages sur le sujet publiés par le CEFAL analysés sur ce site :

Jacques Finné .... Panorama de la littérature fantastique américaine, tome 1 : Des origines aux pulps, Cefal 1993

Jacques Finné .... Panorama de la littérature fantastique américaine, tome 2 : De la mort des pulps aux années du renouveau, Cefal, 2000

 

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