"Les cavernes les plus profondes,
écrivait l'Arabe fou, l'auteur du
Necronomicon2, ne peuvent être aperçues par des yeux qui
voient, car elles recèlent d'étranges et terrifiantes
merveilles. Maudite soit la terre où les pensées mortes
revivent sous des formes étranges, et damné soit
l'esprit qui ne contient aucun cerveau."
Un esprit "qui ne contient
aucun cerveau", sorti d'une
caverne des "plus
profondes", au bout d'une
galerie de mine, c'est Tak, entité mystérieuse
réduite à son pneuma, qui a
besoin de corps d'emprunt pour se manifester dans des actions
dévastatrices. Tak apparaît simultanément dans
les deux derniers romans de King, Desperation3 et The
Regulators4, dans des récits divergents dont le point commun
est l'affrontement de Tak avec un groupe de personnages aux noms
semblables, mais qui ne vivent pas à l'identique.
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Le propos n'est pas ici de comparer ces deux oeuvres point par point5, mais d'étudier des aspects différents de l'horreur. En effet, après la difficulté de l'écriture d'un feuilleton dans un temps limité, King a cherché une nouvelle difficulté : comment utiliser, dans deux ouvrages jumeaux, un certain nombre de données similaires sans obtenir des effets identiques? Ce sont les procédés utilisés pour rendre terrifiant le personnage de Tak qui seront examinés ici.
D'où
vient-il?
D'une caverne dans une mine,
l'ini, "le puits des mondes" (D, p. 436). "Tak est l'ancien, le corps informe" (...), "un étranger complet, tellement différent
de nous que nous ne pouvons pas y appliquer notre
esprit" (D, p. 515).
"Tak est réel, c'est un
être. Pas exactement un corps, mais un
être" (D, p. 465). Il
cherche à défendre son territoire
désertique.
Comment
fonctionne-t-il?
"Ça ne peut pas sortir
de l'ini - le puits. L'orifice du puits est trop petit pour son corps
physique. Il faut donc que
ça attrape des gens,
que ça les habite (...). Et puis
que ça change quand ils sont
usés" (D, p.
465).
Tak, pur esprit, ne peut vivre que dans le corps d'un humain. La prise de possession initiale se fait dans l'ini, par pénétration des orifices du nez et de la bouche (D, p. 549). Cette première prise de possession effectuée,Tak use l'organisme de sa victime d'emprunt à une vitesse considérable. Il lui faut donc constamment changer de corps. Le second type de possession se fait par un bouche-à-bouche de transfert (D, p. 463) avec la nouvelle victime choisie.
Tak utilise aussi les can tahs, les petits dieux, sortes de statuettes de pierre. "Il sentait les can tahs l'appeler, l'attirer comme la lune attire les marées (...). Les can tahs avaient de douces voix raisonnables qui proposaient des actes inavouables" (D, p. 546). Les humains qui touchent ou portent des can tahs deviennent les créatures de Tak et sont affligés d'une "abominable rage destructrice" (D, p. 408).
Il fait agir toutes sortes de
serviteurs animaux - coyotes, loup, busards, araignées, etc -
auxquels il donne des instructions en utilisant "le vieux langage" (D, p. 488), "la
langue des morts" (D, p.
282), "la langue de l'informe,
celle de l'époque où tous les animaux ne faisaient
qu'un" (D, p. 349).
Que veut et peut
Tak?
A partir de l'ini,
siège de la "force du
mal" (D, p. 437), il veut
régner, par la violence et le meurtre, "comme il a toujours régné,
dans le désert désolé, où les plantes
migrent et où le sol est magnétique" (D, p. 463).
Cependant ses pouvoirs sont limités. Il domine la plupart des
humains et les animaux, mais il a peur du dieu de David (D, p. 551),
par un agent duquel il sera mis en échec et dynamité
dans l'ini.
Qu'en penser?
Peu compliqué, ce Tak vit dans un décor de western qui
lui appartient, décrit avec un grand luxe de faits historiques
miniers, de détails matériels empruntés à
Lovecraft et quantité d'accessoires particuliers, plusieurs
fois décrits6. Son action psychique est sans nuances; il se contente
d'utiliser la psychologie, les connaissances et les comportements des
êtres qu'il occupe sans les modifier, en ajoutant leurs tics de
langage aux siens et en y joignant la langue de l'informe. Il les
fait parler aux animaux qui obéissent, leur donne ses
orientations et leur communique ses besoins sanguinaires. Un Tak
pauvre psychologiquement, très vite à court d'actions
vraiment nouvelles, agissant dans un environnement qui paraît
avoir été créé par d'autres, sur lequel
il a peu de prises et qu'il se contente d'user. Il est
comportementalement prévisible et assez vite il va
s'essouffler. Il est significatif que l'intérêt se
déplace au milieu du roman de Tak au groupe d'humains
chargés de le détruire, et il se révèle
être à ce moment un prétexte folklorique pour
faire progresser l'action.
L'hôte de Tak, Seth.
Le corps de Seth Wyler, 8
ans, est habité depuis deux ans par Tak, "une tumeur consciente qui se complairait dans
la cruauté et la violence" (R, p. 325).
Autiste, il ne "prononce pratiquement jamais une parole qu'on
puisse comprendre" et il ne
"manifeste pas beaucoup
d'intérêt pour la vie ordinaire" (R, p. 290). Mais il a des qualités
cachées : "Il est
parfaitement conscient, parfaitement éveillé; dans ce
puits profond au fond de lui-même (...), il a
quelque chose d'un génie" (R, p. 348). Il sait déplacer des objets (R, p.
283), faire voler ses vans (R, p. 243). Il communique avec sa tante
par télépathie, peut créer avec elle une sorte
de communion mystique (R, p. 373). Il est surtout capable de
créer d'autres espace-temps, de s'y manifester, d'y
déplacer sa tante Audrey et des objets (R, p. 99).
Son imaginaire.
Il aime dessiner et adore la télé. "Seth regarde sans fin ses films et les
feuilletons télévisés. Voilà sa
véritable éducation" (R, p. 329). Il possède également la
série complète des vans MotoKops 2200, avec lesquels il
joue dans son bac à sable (R, p. 329). C'est un garçon
gentil, qui, dans ses jeux, associe les méchants aux bons.
Son cerveau.
Il a une façon à lui de se déplacer dans son
esprit par des boyaux et des souterrains qu'il creuse (R, p. 346).
Ces souterrains sont meublés et décorés d'images
à lui, et comme les enfants de son âge, il utilise toute
une mise en scène (des téléphones par exemple)
pour transmettre sa pensée (R, p. 347).
D'où
vient-il?
Il y a beaucoup moins de détails localisés que
dans
DESPERATION. .Il attend dans
un puits de mine de Désolation, Nevada : "A mon avis le désert où il
attendait (...)
n'était pas son lieu
d'origine, mais sa prison"
(R, p. 333).
Il prend possession de Seth (R, p. 302) et devient capable de suivre
son mental et ses conversations (R, p. 352).
Comment
fonctionne-t-il?
Au début, il était faible (R, p. 325), "se tenait très tranquille, les
observait et rassemblait ses forces en attendant le bon moment pour
agir" (R, p. 100).
"Seth est son fournisseur de
base, mais il ne lui suffit pas. Il a besoin davantage pour se
fortifier"- C'est un vampire, n'est-ce pas? (...) sauf qu'il puise de l'énergie psychique au lieu
de sang" (R, p. 326). Il
pompe l'énergie des autres (R, p. 208), et "l'énergie dont il a besoin est
disponible avec d'autant plus d'abondance que la personne souffre"
(R, p. 327). Il peut se
désincarner sous la forme d'escarbilles rougeoyantes pour se
réincarner par les yeux (R, p. 353) et il dépense
d'autant plus d'énergie qu'il est loin d'un corps (R, p. 355).
"Seul Seth était
capable de le contenir. Seth ou quelqu'un d'autre comme lui,
quelqu'un de très particulier". Un autre corps ne peut le contenir sans éclater
(R, p. 369). Par moments, il s'endort, et pendant ces absences, Seth
redevient lui-même (R, p. 372).
Il sait contrôler les autres.
Il devine ce que pensent les gens et "leur fait faire ce qu'il désire" (R, p. 330). Tak est capable d'exercer un
contrôle psychique "à très petite distance", quelques mètres. "Au delà, son emprise physique
décline très rapidement d'habitude. Mais à
l'heure actuelle, on ne peut plus compter là-dessus. Jamais il
n'a été autant chargé
d'énergie" (R, p.
326).
Que veut et peut
Tak?
Il est le mal, venu pour "s'amuser" (R, p.
211). En tant que force du mal , il utilise Seth, dont il a
intégré l'imaginaire : "Le cauchemar que nous vivons est une combinaison des
Régulateurs, son western préféré, et de
MotoKops 2200, son dessin animé préféré.
D'un épisode particulier, de celui qui met en scène le
Corridor de Force". Il s'agit de détruire "de redoutables
extra-terrestres cachés dans le Corridor de Force. Les
extra-terrestres se trouvent dans des cocons (...).
J'ai bien l'impression que les cocons sont nos
maisons" (R, p. 331).
"Les histoires ont toujours
strictement appartenu à Seth, je crois; elles sont le moyen
par lequel Tak puise dans les pouvoirs de Seth,
complémentaires des siens.Tak..., je crois tout simplement que
Tak aime ce qui nous arrive" (R, p. 332).
"Nous faire mal. Nous libérons quelque chose quand nous
souffrons, quelque chose qu'il lèche, comme...une crème
glacée. Et quand nous mourons, c'est encore
mieux" (R, p. 333).
Il utilise la possibilité qu'a Seth de créer un autre
espace-temps pour y faire régner, avec les vans, le climat de
terreur et de destruction qu'il aime ( "On va rayer cette ville de la carte" (R, p. 326), tout en recréant une
ville-ranch du XIXè dans son décor et sa faune de
désert.
Il a déjà essayé
de retenir Tak (R, p. 255). Pour lui, Tak est le "Voleur", le "Cruel", le
"Despote" (R, p. 346). Il a appris à
échapper mentalement à Tak et essaie de le dominer :
"Je sens qu'au fond de lui il
est terrifié. Comme Mickey dans Fantasia quand il perd le
contrôle des balais"
(R, p. 332). Par ailleurs, son imaginaire change avec l'âge :
les Régulateurs et les Motokops perdent leur charme (R, p.
347).
Dès qu'il le peut, Seth élimine Tak.
Le plan de sa tante est de profiter d'une absence de Tak alors que
Seth est aux toilettes pour l'enlever et ainsi empêcher Tak de
le réintégrer (R, p. 353). Ce plan parait trop
risqué à Seth (ou il mesure mieux la puissance de Tak),
et il préférera se faire tuer en même temps que
sa tante - ce qui enlèvera à Tak toute
possibilité de se réincarner à nouveau (R, p.
366).
Tak se rend compte "qu'il a
été floué.(...). Comment
une chose pareille est-elle possible, après des
millénaires passés emprisonné dans les
ténèbres, à réfléchir, à
prévoir ?" (R, p.
366). Faute d'un corps de rechange, il disparaît.
Et Seth se retrouve avec sa tante dans un espace qu'elle
connaît, mais en un autre temps, en 1982, quatorze ans plus
tôt...
Qu'en penser?
Ce Tak est le contraire du précédent. Psychologiquement
beaucoup plus riche, il apprend, calcule, manipule, combine sans
cesse. Il est difficilement pris à l'improviste, alors que le
Tak de Desperation,
plutôt balourd, est souvent pris de court, par exemple par la
maladie de certains de ses corps d'emprunt ou leur usure anormale,
qui l'empêche de les utiliser comme il l'aurait
souhaité. Sa symbiose et la synergie qu'il a avec Seth rendent
son champ mental complexe, en conflit incessant avec le psychisme
enfantin et les limitations physiques d'un enfant de huit ans, dont
il a absolument besoin.
Il a une dimension érotique que n'a pas l'autre Tak. On
l'imagine très bien avec un comportement tout à fait
différent dans un corps d'adulte qui lui aurait permis
d'accroître l'éventail de ses possibilités, avec
des conduites bien plus rusées que le Tak de
Desperation et ses
avatars. Le suspense est plus grand en ce qui concerne son
évolution et ne cesse qu'avec la fin du roman. Le conflit avec
Seth, où chacun manipule l'autre jusqu'à la victoire
finale, n'a rien à voir avec l'utilisation des fantoches par
le Tak de Desperation, et demeure un
élément décisif dans l'intérêt qui
lui est porté.
En résumé, ces deux Tak sont tout à fait
dissemblables, celui de Wentworth plus compliqué et plus
riche, tant dans son fonctionnement symbiotique avec une seul humain
que par l'utilisation d'un imaginaire moderne, alors que les
référentiels de l'autre Tak restent très
traditionnels.
Le Tak de
Désolation a,
indépendamment de son essence, les comportements de
l'humanité depuis la nuit des temps. Sa cruauté est
effroyable, mais, pour défendre un territoire, ou en
conquérir un autre, bien des humains ont été
aussi cruels dans le passé et ils le sont encore dans le
présent. Ses comportements (instinct de conservation,
défense de son domaine, élimination des intrus), sont
certes d'une humanité animale terrifiante, mais c'est de cette
humanité primitive que nous avons commencé à
sortir il y a des milliers d'années. Et nous y retournons
régulièrement avec nos conflits
d'intérêts, nos massacres et nos guerres.
Tak n'est pas plus cruel et exclusif que son rival Yahvé, le
Dieu hébreu du Pentateuque qui empoisonne, brûle, tue,
massacre même les siens quand ils ne lui sont pas
fidèles7 Tous ses comportements sont humainement
prévisibles et se retrouvent à chaque page de nos
livres d'histoire. Et de ces comportements qui nous habitent,
à peine enfouis sous quelques strates éducatives
fragiles, nous avons peur : mi-ange, mi-bête. C'est cet aspect
mauvais de l'humanité, que des hommes cherchent à
juguler depuis longtemps par la morale, la religion et la loi, qui
nous terrifie. Si nous prenons part aux actions menées pour
détruire Tak, si nous nous réjouissons que Tak soit
éliminé, fût-ce au prix de vies
sacrifiées, c'est que symboliquement nous évacuons
cette partie effrayante de nous-mêmes. Et nous nous rassurons
avec cette démonstration que le bien a, encore une fois,
justement triomphé du mal, même si cela a exigé
quelques sacrifices humains.
C'est le mal intérieur
qui est ainsi combattu, ce mal que nous sentons en nous si prompt
à se manifester8. En résumé, ce Tak serait l'inhumain -
trop humain - du passé que nous traînons derrière
nous, qui nous fascine et que nous détestons à la
fois.
Le Tak de
Wentworth
est un Tak
déshumanisé par notre société de
consommation, où la création d'objets commerciaux et
l'exploitation publicitaire systématique, relayée par
la télévision, rendent la violence humaine
mécanisée, robotisée, aveugle et
incompréhensible. Cette violence subie - sans
même que la conscience puisse intervenir pour lutter, et
où tout libre-arbitre a disparu9, est peut-être encore plus horrible, parce que ce
monde n'a plus de sens apparent, les repères habituels sont
abolis, les références humaines quotidiennes ont
disparu. Le réel est remplacé par un virtuel, une
activité inventée avec des sentiments fabriqués,
usinés, stéréotypés. Ainsi naît
l'horreur de l'impuissance : que faire, dans ce cas? Contre qui
lutter?
Il est consternant de voir des enfants fréquenter
assidûment et parfaitement connaître ces personnages de
fiction télévisée- même si certains
d'entre eux sont classés «bons»- et vivre à
un si jeune âge dans un univers de violence gratuite,
entièrement fabriqué. Il est effrayant de constater,
avec la démonstration que King en a faite, jusqu'où,
dans certains esprits, l'expression physique de cette violence peut
aller. La violence existe déjà chaque jour au quotidien
: faut-il la doubler par une violence artificielle, uniquement pour
des buts lucratifs?
Chez les adultes, les séquelles sont significatives. Aux
Régulateurs, puissances robotisées qui
détruisent la rue, une rescapée tient ces propos
stéréotypés,...et dérisoires :
"Je vous accorde une
chance (...). Partez tant qu'il est temps. Sinon..."
(R, p. 345). Propos entendus
des dizaines de fois dans des séries
télévisées rabâchées et ressortis
ici sans réflexion...A la fois adaptés au
scénario apparent, ineptes et et inadaptés à la
situation réelle. Il n'y a pas trace de sentiments
humanitaires dans son intervention : poker et rapports de
force...
Tak, dieu ancien d'une ville de cow-boys et disparaissant
symboliquement dans un nuage cow-boy, manipulateur d'hommes et
d'animaux, a accru les pouvoirs de destruction traditionnels
limités - bien que déjà effrayants - qu'il
possédait à Désolation : empruntant l'imaginaire
d'un enfant, et des moyens résolument modernes, manipulateur
d'espaces et de mécaniques sans âme , il atteint une
puissance illimitée... Le Tak de Désolation est un dieu
ancien, inhumain, du passé; le Tak de Wentworth est le dieu
10 d'un avenir futuriste inhumain et
désincarné. Sans doute pire.
King a publié trois romans en
1996, trois manifestations différentes du mal, toujours
accompagnées de chaleur et de froidure, mais
différentes dans sa concrétisation. Dans
The Green
Mile, le mal
apparaît sous la forme symbolique de moucherons,
dans Desperation,
sous la forme de l'oeil de l'ini; dans The Regulators, ce sont des escarbilles rougeoyantes.
De même, le combat prend des formes diverses. Dans
The Green
Mile, Caffey,un homme
illettré, venu d'on ne sait où, doué du pouvoir
de guérir, sorte de Christ noir, lutte contre le démon
à y perdre la vie. Dans Desperation,
David,un préadolescent, sorte de Moïse indiquant les
directives de Yahvé, donne à son groupe la
possibilité de vaincre un démon ressemblant à un
Grand Ancien. Dans The
Regulators, Seth, un
enfant autiste surdoué, met en échec un pur esprit de
la destruction en jouant des labyrinthes de son esprit et de la
création d'espace-temps. Tous trois guérissent,
réparent, essaient de remettre les choses dans leur ordre
normal. Mais les forces qui leur indiquent la normalité de ces
ordres ne sont pas les mêmes.
Pour David, le Bien, c'est l'ordre du Dieu de la Torah. Pour Caffey,
condamné et con-damné à faire le bien, la source
du Bien n'est pas claire11: l'ordre est ailleurs. Pour Seth, il semble probable
qu'il est allé vers Tak, poussé par on ne sait quelle
force : à la mine, sur des photos aériennes, il a mis
le doigt sur le même point : "C'était cela qu'il voulait voir : non pas le
trou de la mine à ciel ouvert, mais la galerie qu'on ne
distinguait même pas sur les photos" (R, p. 308). Ou se sont-ils appelés mutuellement
? Dans la mine, Seth fredonne le thème de Bonanza (R, p. 300)
et Tak reprend en "seconde
voix" (R, p.
301)12. Dans la première hypothèse, Seth, d'un
autre ordre et maître de l'espace-temps, serait dans la
situation de Caffey, venu d'une autre constellation, appelé
par le mal, le détruisant, mais en étant
simultanément détruit.
Ainsi va King oscillant ainsi entre des représentations du
Dieu de son enfance et d'autres forces.
Roland Ernould
© 1997..
1 In RAGE 1977, Richard Bachman, éd. fr. Albin Michel 1990, p. 100.
2 Abdul Alhazred, dans Lovecraft, Oeuvres complètes, édition en 3 volumes, présentée et établie par Francis Lacassin, Laffont, édition de 1995, tome 1, p. 54.
3 1996, trad. fr. Désolation, éd. Albin Michel, 1996. Les citations sont précédées de la lettre (D).
4 1996, sous le pseudonyme de Richard Bachman, trad. fr. Les Régulateurs, éd. Albin Michel, 1996. Les citations sont précédées de la lettre (R).
5 Encore qu'il y aurait toute une étude à faire : d'une part sur des intrigues qui s'excluent, mais qui s'interpellent dans des effets de rappels, d'échos, de jeux de miroirs, d'antonymies et de substitutions; d'autre part sur les moyens littéraires : utilisés par King pour donner une personnalité très différente à chacune des oeuvres.
6 Un peu à la manière de la musique répétitive américaine, en ajoutant au thème une note supplémentaire qui l'enrichit et permet de faire avancer le développement global.
7 Voir mon étude Du Necronomicon au livre parue dans Steve's Rag, janvier 1997.
8 "Nous avons rencontré le monstre, et comme Peter Straub le fait remarquer dens Ghost Story, le monstre, c'est nous-mêmes", King, Anatomie de L'Horreur ,éd. du Rocher, 1995, p. 59.
9 "Une société hautement moraliste trouve une soupape de sûreté psychologique dans le concept de mal extérieur : ne résiste pas, mon chou, cela nous dépasse tous les deux", King, Anatomie de L'Horreur ,op. cit., p. 80.
10 Dieu, omniprésent dans Desperation, est pratiquement absent de The Regulators. Il n'y apparaît que caricaturalement : avec le baptiste et son fils voleur (R, p. 246), et le prospectus religieux d'Audrey (R, p. 181). Une fois aussi Seth prie "pour qu'il puisse la trouver [sa tante] dans les ténèbres" (R, p. 362).
11 Voir Steve's Rag, hors série 2, octobre 1996, THE GREEN MILE, Ernould © 1996.
12 Tak n'a qu'un rayon d'action limité (R, p. 326) et il n'y a aucune preuve de télépathie à longue distance de sa part : comment aurait-il pu appeler Seth dans la mine ? Par contre, il peut appeler Seth en chantonnant quand celui-ci l'approche.
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