fantastique ou insolite

Le château dans le ciel de Hayao Miyazaki

Perdue au creux des nuages et dans le coeur des hommes, la forteresse de Lapiuta attend celui qui saura la réveiller. Son souvenir s'est transmis dans les familles d'aviateurs et de mineurs, et tous rêvent d'atteindre un jour le royaume volant. L'aventure commence pour deux enfants, gardiens de la magie contre pirates et militaires, poussés dans le dos par ce souffle dont on fait les légendes...

L'un des plus anciens films du maître Hayao
Miyazaki a conservé toute sa force, malgré l'hégémonie de Disney et les sorties françaises de Princesse Mononoke et du Voyage de Chihiro, ses oeuvres les plus récentes qui avaient placé la barre vers les sommets. Le Château dans le Ciel risquait donc de souffrir de la comparaison en accusant ses quinze ans d'âge, et pourtant... pourtant, l'oeuvre de Miyazaki est si riche de thèmes et d'émotions que ses films techniquement dépassés conservent un ton unique, une fraîcheur palpable, une faculté si rare d'envoûter le spectateur en deux notes et trois dessins.

L'animation des personnages est peut-être le seul moyen de deviner la vieillesse du film. Simple et précis, leur design reste très élégant et rappelle bien souvent celui des héros de l'ancienne série animée de
Sherlock Holmes, dont Miyazaki avait justement réalisé un grand nombre d'épisodes. Datant de la même époque, on retrouve dans Le Château, avec nostalgie, le monde de l'industrie et les machines volantes de Sherlock Holmes à bord desquelles il combattait le Pr.Moriarty. Nos deux enfants, Pazu et Chihita, affrontent ici les machines de guerre des militaires prêts à tout pour obtenir la puissance de Lapiuta.

Les schémas de
Miyazaki sont toujours très simples et sonnent juste. Bien trop doué pour tomber dans l'opposition désuète des gentils enfants contres les méchants adultes, il privilégie la lutte de l'espoir et du rêve contre la force de guerre et l'obscurantisme. Les pirates sont à ce sens les personnages les plus intéressants : motivés par la promesse du trésor, ils se révèlent vite les alliés précieux de Chihita et prouvent que les adultes sont également capables de croire en la magie. Miyazaki ne réserve pas la beauté et l'émotion aux seuls enfants, ce qui offre à ses films une portée universelle.

La musique bouleversante de son compère Joe
Hisaishi s'adapte à la beauté calme des décors. Pas de fonds numériques surchargés, pas d'effets de caméra ravageurs, pas de violons pour expliquer aux spectateurs à quel moment il doit être ému ou indigné. Tout passe dans la musique et les nuages, l'amitié des jeunes aventuriers et la croyance en quelque cité perdue. Le mythe de l'Atlantide est convoqué dans un renouvellement réjouissant, à des lieues de la grosse artillerie disneyenne qui a coulé son film sur le même thème à grands coups de chansons, de blagues grasses et d'animation cubique. Miyazaki n'a jamais commis de fausse note, dans aucun de ses films. Il veille au sens de chaque plan, à la beauté du moindre ciel, et même les dialogues sont en osmose, ce qui n'est pas un mince exploit quand on sait la maladresse dont font preuve réalisateurs et scénaristes dès qu'il s'agit de transmettre les émotions enfantines.

On se saurait vous inciter plus à vous laisser porter par la magie des univers de
Miyazaki : de Nausicaa de la Vallée du Vent au Voyage de Chihiro, ses films sont porteurs d'émerveillement, de sensibilité et de légendes. On annonce que l'ensemble de son oeuvre va ressortir en France, à raison de deux films par an, il n'y a aucune excuse valable pour se priver d'un tel cadeau. Fermez les yeux, et écoutez le vent : il a toujours une histoire à vous raconter.

Pour ne pas trop émousser le plaisir de découvrir
Le Château dans le Ciel, le texte de ce mois-ci sera l'occasion de pousser un coup de gueule, un vrai, avec des postillons et tout. Je m'adresse à tous ceux qui ne savent pas de quoi ils parlent dès qu'il s'agit d'animation japonaise. D'abord, on dit bien « film d'animation », ou dessin animé à la rigueur, mais surtout pas MANGA. Le Manga, c'est la BANDE DESSINÉE japonaise, ça veut dire «illustré», et il n'a absolument rien à voir avec les films d'animation. On ne dit pas d'un dessin animé américain que c'est un comics, non ? Alors pourquoi faire l'erreur sous prétexte que c'est japonais et qu'on n'y connaît rien ? Certains mangas peuvent effectivement être adaptés en films, ou en séries télé comme c'est le cas pour la plupart, mais ce sont deux supports, et surtout deux modes d'expression, totalement différents.

Bon, c'était le premier point. Maintenant il est temps d'en finir avec les préjugés occidentaux sans fondement sur la prétendue débauche infernale de violence qui hante chaque image du moindre film provenant du Japon. La culture japonaise est immense, très diversifiée, et ne s'est jamais limitée à
Dragon Ball ou aux Pokemon. D'abord, je reste un fan de Dragon Ball devant l'éternel, j'ai regardé cette série toute mon enfance et ça n'a pas fait de moi un sociopathe. Mais les oeuvres nippones NE SONT PAS « toutes pareilles », avec tout plein de sang et de combats, d'explosions dans tous les sens et de monstres horribles, houla !, mon dieu dire qu'on laisse les enfants regarder ce genre de choses. Malheureusement, le public français n'a accès qu'à une infime partie de cette culture, et les oeuvres distribuées chez nous sont en général les plus commerciales, donc les plus violentes ou, pire !, les plus baclées.

Les
Pokemon sont une machine alimentaire dont la seule volonté affirmée est de faire du fric, d'en engranger un maximum avant de passer au concept suivant : ce que les Américains font tout aussi bien avec la déclinaison de plus en plus fréquente en série TV de leurs gros succès cinéma, la vente de produits dérivés et les partenariats avec les grandes marques de boisson. Cette chienlit porte un tort considérable aux oeuvres somptueuses de gens comme Miyazaki, Yukito Kishiro ou encore Katsuhiro Otomo, de véritables artistes, des dessinateurs accomplis dont l'imagination dépasse de loin n'importe quel studio hollywoodien. L'engagement écologique et humaniste de Miyazaki n'est plus à démontrer, et Otomo dénonce la lutte pour le pouvoir et les dérives imprévisibles de la course au nucléaire. Certaines oeuvres, comme Akira, sont violentes en effet, mais où avez-vous vu que le monde ne l'était pas ? Je préfère une violence logique, justifiée, qui démontre justement l'absurdité de la guerre et de la mort, à une violence stupide et sans autre fondement que de rendre bien d'un point de vue cinématographique.

La sortie prochaine de la filmographie de
Miyazaki va enfin contribuer à faire changer les mentalités. Il faut cesser ces jugements à l'emporte-pièce sur la supposée débilité de ces « mangas » (comme on dit !), et prendre la peine de connaître ce que l'on critique. Le festival Télérama a eu la formidable idée de placer le Voyage de Chihiro dans sa sélection, et il est visible tout le week-end pour trois euros. Le film le plus récent du maître est également son plus grand, un chef-d'oeuvre incontournable qui devrait convaincre les plus réfractaires à tout ce qui porte le label Made in Japan. Peut-être ferez-vous bientôt partie des 2 500 000 spectateurs qui en sont déjà tombés amoureux, ainsi que des millions d'admirateurs de Miyazaki dans le monde qui savent ce que signifie l'émotion.
article de "Sylvain Tavernier" <syltavernier@wanadoo.fr> -© janvier 2003

Tenku no shiro Rapyuta. Scénario : Hayao Miyazaki. Animation : H. Miyazaki, Tsukaza Niwauchi Kaneda. Musique : Joe Hisaishi. Japonais : 2h04. Prod. les Studios Ghibli.

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"Filmer la peur" a été le premier thème choisi, avec un programme ambitieux : "Parvenir aux origines émotives du cinéma, aux réactions des premiers spectateurs devant les bandes des frères Lumière, et interroger à nouveau le cinéma comme double expérience d'éblouissement et de peur." Pour des informations complémentaires sur Simulacres ou le sommaire des numéros parus.

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