Baronian est un écrivain belge de profession, dont les activités littéraires sont diverses : romancier, critique, préfacier, anthologiste, essayiste, grand admirateur de Jean Ray et de Georges Simenon. Éclectique dans ses goûts, il peut passer du roman «littéraire» au polar signé d'un pseudonyme. Il faut d'ailleurs avoir son talent pour se lancer dans un travail aussi périlleux : un panorama qui se veut exhaustif de la littérature de langue française, où les oeuvres citées les plus récentes sont de 1999. Vieux routard de l'écriture, il avait déjà écrit plusieurs anthologies sur le genre dans les années 70, La France Fantastique, La Belgique Fantastique, et des ouvrages de réflexion comme Un nouveau Fantastique, et un Panorama qui portait déjà ce nom. Cette version d'il y a vingt ans a été évidemment actualisée (c'est dire l'importance des ajouts concernant la période contemporaine), encore que le travail de Baronian ne se soit pas limité à cela. Il a profondément revu son texte d'origine et révisé certaines appréciations en tenant compte de son recul et d'une prise de conscience plus nette de la valeur d'auteurs de la période d'après-guerre. Son double but est de tracer l'évolution de la littérature fantastique de ses origines à nos jours, et d'évoquer le lendemain littéraire d'une part, d'autre part d'essayer de réfléchir sur le phénomène fantastique lui-même : en circonscrire les contours, en apprécier les mutations successives et les formes diversifiées qu'il a pu prendre. Il s'intéresse aux grands courants du fantastique plutôt qu'aux oeuvres de circonstance.

Pour Baronian, qui a dirigé pendant de longues années la collection fantastique des éditions Marabout avec passion et érudition, "le fantastique est une des démarches les plus riches et les plus exaltantes de la création littéraire." Il déplore que la France, contrairement à d'autres pays comme l'Allemagne ou les pays anglo-saxons, ne reconnaisse pas officiellement le genre. Nous continuons à vivre, affirme-t-il, sur une tradition romanesque qui remonte au XVIIè siècle, une tradition psychologique née avec La Princesse de Clèves. Quand on regarde les auteurs qui figurent dans les manuels littéraires, on s'aperçoit qu'on n'y trouve pas de fantastiqueur en titre. Que Balzac, Nodier, Maupassant ou Tournier aient écrit des oeuvres fantastiques ne paraît pas être l'essentiel. Les critiques n'y consacrent qu'une place mineure, et on ne signale presque jamais que le fantastique a occupé une part non négligeable dans leurs recherches. Alors que le fantastique est une école du regard, une manière différente de voir le monde, de l'explorer jusqu'à l'inadmissible, les spécialistes littéraires négligent cette quête d'un monde sans cesse occculté par la banalité du quotidien. Or la caractéristique du fantastique est de pouvoir utiliser une palette très large, qui va d'une simple présence avec l'incertain et l'inquiétant jusqu'au plus spectaculaire et au gore. Est-ce à cause de ce caractère d'évocation des extrêmes, cette remise en question, ces assises du quotidien qu'il paraît en France comme une "contre-culture", sans statut véritable, un genre en dehors des genres, et à ce titre suspect?

Ce livre comporte également une bonne bibliographie, où rien d'essentiel ne manque, un index des noms propres et des oeuvres de dix-huit pages en petits caractères... Pour les amateurs de ce site, il faut signaler que peu d'auteurs étrangers sont cités. Mais que celui qui a exercé une profonde influence sur le fantastique des ces vingt dernières années, Stephen King, a droit à un développement de trois quarts de page (291) Si un curieux du fantastique désire investir dans un livre riche, écrit simplement (sans jargon universitaire) par un spécialiste qui aime le travail qu'il fait, qu'il ne rate pas celui-ci.

La quatrième de couverture :
C'est en 1978 que fut publiée une première version de cet ouvrage magistral, remis à jour par l'auteur, dans une refonte totale et complétée pour l'actualité littéraire des deux dernières décennies. Cette nouvelle édition sera donc un outil complet pour tous les amateurs de ce genre littéraire, permettant de retrouver les dates, filiations, influences d'un mouvement littéraire qui s'est imposé au cours des XIXè et XXè siècles et qui a profondément modifié les manières de voir le réel.

Table des matières : 1. La notion de fantastique. 2. Le préfantastique. 3. Le fantastique romantique. 4. Le fantastique réaliste. 5. Le fantastique "fin de siècle". 6. Le fantastique néoréaliste et le fantastique populaire. 7.Le fantastique poétique. 8. Entre tradition et nouveauté. 9. L'école belge de l'étrange. 10. Le nouveau fantastique contemporain. 11. Vers un imaginaire total. 12. L'éternel fantastique.

Roland Ernould © mars 2001.

Photo : © J-L Geoffroy, avec autorisation

Notice bibliographique : Jean-Baptiste Baronian est né à Anvers le 29 avril 1942 de parents arméniens. Tout en fondant une revue ainsi que les éditions La Plume ivre, il fait ses études supérieures à l'Université Catholique de Louvain, d'où il sortira docteur en droit et bachelier en philosophie. En 1969, il entre aux éditions Marabout où il dirigera notamment, jusqu'en 1977, la collection littéraire fantastique et science-fiction. Depuis une dizaine d'années, il se partage entre ses activités de romancier (également sous le pseudonyme d'Alexandre Lous), d'anthologiste, de préfacier, de bibliophile, de conférencier, d'essayiste et de chroniqueur, notamment dans Le Vif-L'Express à Bruxelles et le Magazine littéraire à Paris. Il est président des Amis de Georges Simenon. Il a écrit, sous son nom ou le pseudonyme Alexandre Lous, plus d'une vingtaine de romans et recueils de nouvelles, quantité d'anthologies et cinq essais. Note de lecture : Jean-Baptiste Baronian, Histoires fantômes

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