Dans son introduction, Claude Allègre nous explique que son
livre a été comme un " devoir de citoyen de la grande République
des Sciences ". Tandis
que celles-ci sont en plein développement et façonnent
notre vie, et qu'elles nous permettent de mieux comprendre notre
monde et, preuves de leur efficacité, de le modifier, elles
sont délaissées par les jeunes, et de plus en plus
ignorées, voire condamnées par le grand public.
Curieuse situation quand la rationalité efficace de
quelques-uns façonne la plupart des aspects quotidiens de
notre vie, alors que l'irrationalité des autres tend à
s'imposer, à preuve la prospérité sans
précédent des astrologues, cartomanciens, sectes (et
Allègre aurait pu ajouter : des médias en
général,qui vivent d'affectivité et non de
rationalité). Cette dérive est due au fait qu'une
spécialisation de plus en plus grande a isolé les
scientifiques et a contribué à rendre les connaissances
scientifiques de plus en plus abstraites et à les
écarter de ce fait de la culture générale.
Riche d'une culture encyclopédique, Allègre a entrepris
de faire partager ses émerveillements devant la science en
débordant largement de son domaine. Son livre a en effet pour
ambition de mettre à la portée de chacun les principaux
acquis de la science, même s'ils paraissent difficiles au
profane. Il ne s'agit pas d'une encyclopédie ou d'un manuel
d'enseignement, mais d'un livre de culture générale qui
prétend rendre accessibles les sciences à l'homme
cultivé du XXIe siècle. La priorité est
cependant donnée à la physique, la science de base qui
nourrit la démarche scientifique, dont Claude Allègre
est un maître reconnu (sciences de la Terre, qui demandent aux
chercheurs d'exceller dans des domaines variés de la
physique). Contrairement à ce que certains pensent, la
physique est la science sur laquelle les autres s'appuient, alors que
les mathématiques sont un langage, le plus commode pour les
sciences. Allègre a privilégié l'aspect
historique, humain des sciences, sans cependant sacrifier l'esprit et
la rigueur. Il met en évidence les incertitudes, les erreurs,
voire les errements de la science, qui, comme tout savoir humain, a
ses périodes d'ombre et de lumière. Il donne l'exemple
de la querelle qui eut lieu au début du XXe siècle
quand la preuve fut faite de l'existence des atomes. Des philosophes
comme Ernest Renan ou Auguste Comte manifestèrent contre la
théorie atomique et des «dîners
républicains» se tinrent en ville pour brocarder la
nouvelle théorie physique et la fiabilité des
microscopes et des télescopes, accusés de
déformer la réalité. Dans la cabale
antiatomique, on pouvait rencontrer d'authentiques savants, comme
Marcellin Berthelot, secrétaire perpétuel de
l'Académie des sciences, furent des militants acharnés
contre l'hypothèse atomique. Quand ce dernier devint ministre
de l'Education nationale, il interdit que l'atome soit
enseigné, ce qui était désastreux pour la
chimie, en pleine expansion, et la formation des
ingénieurs.
Allègre donne sa propre opinion sur les grands
problèmes en suspens, mais en tant que savant, qui, comme
Berthelot dans le passé, a pu se tromper. Mais pas davantage
que les philosophes ou les politiques qui, la plupart du temps,
ignorent ce qu'est une loi scientifique. C'est pourquoi des choix
décisifs pour l'avenir de l'humanité, comme ses sources
d'énergie, la pollution ou l'approvisionnement d'une
population en augmentation, risquent de se faire sous l'influence de
responsables ignares, qui ne se comportent pas différemment de
leurs proches ancêtres hostiles aux découvertes qui ont
marqué les derniers siècles.
On a compris le but que s'est donné cet ouvrage : faire
aimer la science à tous, y compris ceux qui ne la pratiquent
pas. Il va de soi qu'il y a une limite à ce que l'on peut
enseigner de manière simplifiée. Mais la
découverte ou le rappel auxquels l'auteur nous invite sera
instructive pour beaucoup et même plaisante. Les amateurs
d'imaginaire auront ici la preuve qu'on peut faire des sciences en
faisant donnant du plaisir à son imagination, celle que les
scientifiques doivent développer particulièrement lors
de leurs recherches. J'ai pris beaucoup de plaisir à le faire,
d'autant plus qu'Allègre manie le clin d'oeil. Plusieurs de
ses titres utilisent les mots magiques plus familiers à la
plupart de mes lecteurs : les atomes sont " clef du
Monde ", les triangles " magiques ", l'énergie
a ses " mystères ", l'électricité est
la " fée " bien connue, la vie possède ses
" secrets " etc.
L'auteur trouvera peut-être des contradicteurs parmi les
spécialistes des divers domaines abordés, mais il ne
fait pas de doute que beaucoup de lecteurs aimeront être
introduits, de façon simple, à des sujets qui leur
semblaient a priori hors de portée de leur entendement. Claude
Allègre, on le sait, a le goût des formules. En prenant
ses fonctions ministérielles, il s'est présenté
comme le " dégraisseur du mammouth ". En quittant le
ministère, en pleine révolte enseignante, il a dit
vouloir laisser l'empreinte d'un " assouplisseur de
dinosaure " (le mammouth est plus récent dans l'histoire
des espèces que le dinosaure, on appréciera la nuance).
Il faut souhaiter à Allègre davantage de chance avec
les lecteurs désireux de s'informer qu'avec les enseignants.
Le ministre Claude Allègre n'a pas été
essentiellement différent du chercheur Claude Allègre.
Les conservatismes auxquels il s'est opposé excitent et
parfois exaspèrent ses propos. C'est qu'il a commencé
sa carrière universitaire à une époque
où, dans les sciences de la Terre, il fallait ne pas trop
innover, ce qui n'était pas de son goût. Il a
été le militant de l'introduction dans les sciences
naturelles des méthodes les plus nouvelles des sciences
physico-chimiques et mathématiques. Son attitude novatrice et
souvent combattante lui a valu de solides inimitiés chez ses
rivaux ou les conservateurs, mais aussi la reconnaissance de ses
pairs, avec divers prix, honneurs et médailles nationaux et
internationaux. Le lecteur appréciera.
Roland Ernould © 2003
Quatrième de couverture :
" Ce livre a pour ambition de mettre à la portée de chacun les grands acquis de la science, y compris les plus difficiles. Il ne s'agit pas d'un ouvrage technique, ni d'un manuel d'enseignement, mais d'un livre de culture générale qui prétend se rendre accessible à l'honnête homme du XXIe siècle.
Pour bien faire comprendre l'essence des découvertes fondamentales et du cheminement de la pensée scientifique, j'ai évité tout recours au langage mathématique afin de ne pas rebuter ceux qui y sont allergiques. J'ai au contraire privilégié l'aspect historique, humain, vivant de la grande aventure de la science, sans pour autant en sacrifier ni l'esprit ni la rigueur.
Dans cette affaire, mon ambition ultime est de parvenir à faire aimer la science à tout le monde, y compris ceux qui ne la pratiquent pas. J'ose même espérer faire partager à certains l'extraordinaire plaisir intellectuel que nous éprouvons, nous autres scientifiques, à la pratiquer. Un succès même partiel dans cette direction serait pour moi une immense récompense ". C.A.
Avec 56 planches, dont 15 en couleur
Table des
matières :
Introduction
Atomes, clef du Monde
La chute des graves
La lumière
Les triangles magiques
Les mystères de l'énergie, premier épisode
La fée électricité
Le hasard au secours des atomes et des molécules
La révolution atomique
Tout est relatif
Les secrets de la vie
Terre-patrie
Épilogue et annexes
Claude
Allègre est professeur à l'Institut
universitaire de France, à l'université de
Paris VII-Denis Diderot.et à l'Institut de physique
du Globe Il a reçu le prix Crafoord en 1986 et la
médaille d'or du CNRS en 1994. Il est membre de
l'Académie des sciences, de la National Academy des
Etats-Unis et de la Royal Society de Grande-Bretagne . Il a
été ministre de l'Education nationale, de la
recherche et de la technologie de 1997 à 2000. Il est
l'auteur d'une vingtaine de livres.
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