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LE MONDE DE HARRY
POTTER
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LA VIE DE
L'AUTEURE DE HARRY POTTER
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Lieux où a
vécu
Joanna K. Rowling
Yate (1965/69)
Winterbourne (1969/74)
Tutshill (1974/83)
Exeter (1983/87), dont un stage à Paris (1986)
Londres (1987/90)
Manchester (1990/91)
Porto, Portugal (1991/93)
Edimbourg (1993/
Londres (Kensington, 2001/)
actualité
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C'est dans le pays de Galles,
contrée de mystères et de légendes, que se sont
passées la sortie de l'enfance et l'adolescence de Joanne
Rowling, née en été 1965, le 31 juillet, dans le
sud-ouest de l'Angleterre. À Yate (et non à Chipping
Sadbury banlieue chic, comme elle l'a parfois prétendu). Elle
a ensuite habité Winterbourne (près de Bristol)
jusqu'à l'âge de 9 ans, puis à Chepstown, de
l'autre côté de la rivière Severn, limite du pays
de Galles.
Ses parents avaient dix-huit ans
quand ils se sont connus. Pete, son père, a
épousé Anne alors qu'elle était enceinte de 5
mois de Joanne. Ils sont alors pauvres, mais Pete, dynamique et
entreprenant, va assurer l'avenir de sa famille. Il travaille dur et
le couple passe sans les voir à côté des
années soixante, dites «folles». Pete est un homme
tranquille, solide, courageux, fiable, qui prend les choses à
coeur. Mécanicien, il travaille chez Rolls-Royce à
Filton, pas loin de chez lui. Il inspirera en partie Dumbledore.
Anne, la mère, reste au foyer, d'autant plus que deux
années plus tard elle a une autre fille, Dianne. Appartenant
à l'ancienne génération, Anne éduque les
filles avec rigueur. Les repas sont pris à table, en famille.
Bonne ménagère et cuisinière, Anne fait tout,
éduque ses filles avec ses principes, conduit ses enfants
à l'école jusqu'au collège. D'un naturel joyeux,
elle fait régner une bonne ambiance dans la maison. Elle est
passionnée de lecture et, durant ses moments de loisirs, elle
lit des romans (elle en reçoit de sa soeur lectrice chez un
éditeur) et écoute les Beatles.
L'enfance.
À 5 ans, Joanne entre à l'école maternelle de St
Michael's, appartenant à l'Église d'Angleterre, puis
à l'école primaire en 1972. Elle y suit un enseignement
traditionnel. Elle aime bien son directeur Alfred Dunn (du nom duquel
on suggère qu'elle a tiré les initiales d'Albus
Dumbledore (mais toute ressemblance s'arrêterait là : on
le verra plus loin, les deux modèles d'Albus sont le
père de Joanne et un autre directeur d'école qu'elle
eut plus tard.) Tranquille et réservée, Joanne est
l'élève la plus jeune de sa classe, menant
parallèlement à sa vie solaire la vie naturelle de la
campagne, dans un environnement privilégié : ce que
désiraient ses parents, qui trouvent encore mieux en
déménageant en 1974 à Tutshill, un paysage
rêvé : un cottage avec la falaise, une rivière en
dessous, des bois et la forêt de Dean aux alentours,
entourée de nombreuses histoires de sorcellerie et de
malédictions. Joanne magnifiera ce paysage de légende
avec le château de Poudlard. Les oiseaux (busards, corbeaux)
sont nombreux, qui ravissent Joanne . "L'imagination de la fillette ne devait pas avoir la
moindre peine à s'élever dans les airs avec les
oiseaux. Voler est un rêve d'enfant qu'elle a réussi
à intégrer dans la série Harry
Potter," indique sa
biographie1. Sans les balais et ses êtres ou choses volantes,
Poudlard perdrait beaucoup de son charme. La
téléportation (voir e2mantique.html) que pratiquent les
sorciers, la place importante que tiennent les hiboux porteurs de
courrier dans la vie quotidienne sont des transpositions de cette
période de la vie de Joanne.
À 9 ans, elle connaît la
première expérience de la mort, celle de sa
grand-mère paternelle (52 ans), Katleen, qu'elle aimait
beaucoup. Le K de sa signature est un hommage rendu à sa
grand-mère.
À l'École de l'Église d'Angleterre, on porte
toujours l'uniforme, une blouse avec une jupe et un cardigan bleus.
Joanne se souviendra de l'uniforme pour son école de sorciers.
L'école, affirme Joanne, ressemble encore à celles de
Dickens, avec ses bureaux en bois et les encriers. Par malchance,
elle a la maîtresse la plus sévère de
l'école, Sylvia Morgan, qui est aussi celle avec laquelle les
élèves apprennent le plus : on ne l'aime pas, mais on
travaille... Toujours timide et anxieuse, Joanne est
terrorisée par cette maîtresse ombrageuse dont elle se
souviendra quand elle brossera le portrait de Severus Rogue, le
professeur de potions craint par Harry. La stricte discipline de
Rogue, les règles imposées impérativement
éveillent la crainte chez Joanne, qui se souviendra dans le
tome 1 du test de connaissances qu'elle subit le premier jour de
l'année. L'enseignante répartit les
élèves dans la classe d'après les
résultats du test, les bons d'un côté, les
médiocres de l'autre. Classée moyenne, Joanne est
rangée parmi les médiocres. Mais à la fin de
l'année, elle est passée chez les bons...
Caractéristiques : elle est nulle en travaux manuels et en
sport, et ne pratique qu'un peu de danse, obligatoire à
l'École pour la démonstration offerte aux parents lors
de la fête de la fin de l'année scolaire.
L'adolescence.
En 1976, elle entre à l'école secondaire de Wyedam (une
"comprehensive school" d'État dans le système scolaire
anglais). Intelligente, elle est physiquement une rousse plutôt
quelconque, aux cheveux raides, au visage étroit et
pâle, avec des taches de rousseur, des lunettes, elle est aussi
bûcheuse et sérieuse qu'Hermione, mais quand même
plus ouverte et sociable. En fin de scolarité, elle sera
élue déléguée de classe. Un de ses
professeurs a noté chez elle le même manque de confiance
en elle que celui de Harry dans certains domaines de sa
scolarité. Ce professeur de chimie (spécialité
que Joanne détestait) admet qu'il retrouve certains de ses
traits personnels dans Rogue : "Je pense que ses personnages sont le résultat
d'un mélange intelligent, mais je retrouve des parties de
moi-même. (...)
Je crois que de nombreux
élèves me considéraient comme très
sévère, particulièrement dans les années
soixante-dix. Pour eux, à cette époque, c'était
«qui aime bien ne châtie pas»." 2 Joanne a surtout horreur de l'interrogation directe
d'un élève pris isolément que pratique ce
professeur. Si elle se montre nulle dans les domaines physiques et
scientifiques, Joanne est considérée comme bonne en
rédaction. Un professeur a donné de précieuses
informations sur ses préférences et ses qualités
littéraires3.
Elle a 15 ans quand sa mère,
souffrante depuis quelque temps, est obligée d'arrêter
l'emploi qu'elle occupait depuis que ses filles avaient grandi. Elle
apprend qu'elle souffrait d'une sclérose en plaques depuis
déjà longtemps, une maladie progressivement
invalidante. Sa mère était une femme rigoureuse, mais
plaisante, vive et pétillante, qui a toujours
privilégié les intérêts de sa famille,
tout en veillant à ne pas devenir inculte en se plongeant dans
les livres, ses travaux ménagers terminés. Dotée
d'une volonté exceptionnelle, elle a vécu des hauts et
des bas, malade pendant des années, tracassée de ne
plus pouvoir tenir convenablement sa place. L'église
était à côté de leur maison : elle alla de
temps en temps la nettoyer, pour avoir une occupation utile. Mais les
Rowling n'étaient pas pratiquants, Joanne n'a suivi aucun
catéchisme, ni assisté à des offices
religieux.
Elle grandit et commence, comme les filles de son âge, à
regarder les garçons : "Ce n'est pas parce que votre cerveau marche bien que
vous êtes meilleur que les autres pour contrôler vos
hormones." ,
dit-elle·4 Elle va danser aux rares soirées discos de ce
trou provincial. Elle joue de la guitare acoustique, instrument dont
joue sa mère. Ses anciennes amies disent qu'avec elles,
à cette époque, elle est ouverte et
agréable.
Joanne arrive enfin dans les classes supérieures de Wyedam
préparant à l'université, où elle peut se
spécialiser. Plus de sciences, mais des langues (anglais,
français et allemand). Elle soutient Greenpeace et Amnesty
International, aime la musique, aussi bien la musique classique que
la new wave. Elle découvre le théâtre avec
Shakespeare (Le
Roi Lear, Un Conte d'hiver, où le nom d'Hermione a peut-être
été emprunté. Elle a un petit ami, Sean Harris,
qui possède une voiture, une Ford Anglia turquoise... Elle
entre dans sa phase punk, adopte un maquillage noir, lourd, qu'elle
pratiquera dix ans. Avec Sean, elle fréquente les bars,
discothèques, clubs et concerts à Bristol, Bath,
Newport et Cardiff. Joanne se souvient de Sean avec affection et lui
a dédicacé Harry Potter et la chambre des secrets : "Pour Sean P.F. Harris, un spécialiste du
départ sur les chapeaux de roues et un ami du mauvais
temps."
La fin des études à
Wyedam arrive. Joanne se souvient de tout ce qu'elle a vécu
pendant ces années, l'enfance heureuse, comme l'adolescence
marquée par la maladie de sa mère. Elle a une foule de
souvenirs sur l'enseignement, comme sur la grande forêt magique
de Dean, avec ses légendes et ses paysages. Un professeur a
dit d'elle : "Joanne
était une observatrice attentive. Au bout de sept
années là-bas, elle a dû se constituer un
réservoir de connaissances avec tout ce qu'elle avait vu,
entendu et surpris."
5
L'étudiante.
Elle a demandé l'université d'Oxford, mais son dossier
a été refusé (elle vient d'une comprehensive
school, ce qui est insuffisant pour prétendre aux grandes
universités, car l'enseignement qu'on y donne ne jouit pas
d'une bonne réputation). Elle se replie sur
l'université d'Exeter, près de la côte Sud de
l'Angleterre.
L'étudiante de dix -huit ans,
de déléguée de classe, connue et
appréciée, passe au statut d'anonyme plongée
dans la vie d'un campus, peu sûre d'elle. Elle occupe une
chambre quelconque d'étudiants dans le campus. Elle
accélère son évolution, change de comportement :
le genre bûcheuse a disparu au profit d'une fille avide de
s'amuser. Elle a abandonné ses lunettes pour des verres de
contact, laisse pousser sa flamboyante chevelure rousse, plus
occupée de vie sociale que d'études académiques.
Elle porte constamment une veste en jean, se maquille fortement les
yeux , noircit de khôl son regard très bleu, un genre
à elle qui plaît aux garçons. Elle travaille peu,
fréquente assidûment la cafetaria. De ses études
(langues), seul l'anglais l'intéresse. Elle s'est mise au
français sans enthousiasme, et a laissé à ses
professeurs le souvenir d'une étudiante tout à fait
ordinaire et peu douée pour les langues. L'un d'eux l'a
décrite comme une étudiante "rêveuse"
ou "quelqu'un de très
intériorisé qui n'était pas en relation active
avec le monde extérieur." 6 Elle perd ses polycopiés, oublie de s'inscrire
aux examens. "Vous dormez
debout", lui reproche un
professeur.
Joanne sait qu'elle ne fait
guère d'efforts pour apprendre et accepte ses ignorances. Sa
présence est irrégulière aux cours, elle est
devenue l'étudiante peu studieuse qui, brusquement en
liberté après les contraintes du lycée et des
parents, s'amuse avec des copines. Elle est souvent dans la
journée à la cafétéria, fait la
fête, va dans les boîtes, les pubs, ne boit pas de
bière, comme la plupart des autres, mais de la vodka. Son pub
favori est le Black Horse dans le centre ville, où elle boit
des cafés dans la journée, en complément de ceux
pris à la cafetaria (son régime est
caféine-nicotine). Elle raconte volontiers des histoires. Une
de ses connaissances de l'époque a cependant vu ce que cette
agitation apparente cache : "Si Joanne pouvait parfois donner l'impression
d'être solide et confiante, drôle et plutôt
sociable, en réalité elle était avant tout
timide et réservée. C'est pourquoi elle était
quelqu'un de solitaire qui passait beaucoup de temps à vivre
dans son imagination."
7 Elle joue toujours de la guitare et a découvert
les Smiths en 1984, qui deviendront son groupe
préféré.
Elle fait son année de stage
pratique à Paris, où elle enseigne pendant un an pour
améliorer sa maîtrise de la langue française.
L'expérience est appréciée. Le stage
terminé, elle retourne faire sa quatrième et
dernière année de fac. Elle se remet à ses
habitudes, qu'elle avait abandonnées à Paris. Une
copine de l'époque croit avoir compris son comportement :
"Jo aimait boire des coups.
Elle aimait faire la fête et prendre du bon temps. Elle avait
pourtant un côté sérieux et je me demande si sa
manière de jouer au boute-en-train n'était pas de la
poudre aux yeux. De l'extérieur, on n'aurait jamais pu deviner
qu'il y avait un gros problème du côté de sa
mère."
8 Le besoin de se masquer la triste
réalité, sa mère sur une chaise roulante, se
déplaçant avec un déambulateur? Elle trouve un
autre petit ami, plus sérieux celui-là, une relation
qui allait durer plusieurs années, avec des hauts et des bas,
l'étudiant type qui aime sortir boire des verres, mais un peu
mou d'après les copines de Joanne. Elle participe à la
préparation d'une pièce d'Obaldia avec un professeur,
s'occupe des costumes. Elle prend ce travail qui l'intéresse
au sérieux, ne sèche aucune répétition,
contrairement à ses cours. Elle prépare aussi
sérieusement son mémoire de licence, une dissertation
qui l'intéresse et qui sera appréciée, signe
qu'elle aime et travaille ce dans quoi elle peut s'impliquer
personnellement. Elle aime toujours les livres, va souvent à
la bibliothèque (elle rend ses livres systématiquement
en retard, ce qui l'oblige à payer des amendes...). Elle passe
beaucoup de temps à la lecture du Seigneur des Anneaux et on la voit pendant des mois le livre sous
le bras.
Les résultats finaux de ses
examens ne sont pas bons : un diplôme de deuxième classe
niveau inférieur9, équivalant à la mention tout juste
passable dans l'enseignement français.
Petits boulots
et l'idée d'Harry Potter.
Joanne ne trouve de travail qu'à Londres, des jobs
temporaires, dont notamment une maison d'édition et Amnesty
International. Elle est fort désillusionnée par le
travail qu'on lui propose, mais apprend au moins à taper vite
à la machine... Elle écrit alors deux romans pour
adultes10, travaillant déjà dans les cafés
et les bars, pratique qu'elle allait continuer avec Harry Potter. En
juin 1990, elle va rejoindre son petit ami à Manchester pour
une nouvelle année de galère. Mais dans le train qui
l'y conduit, elle a, d'après elle, une illumination. Elle
pense que son train conduit un petit garçon dans un internat
pour sorciers : "Tout à
coup, l'idée de Harry m'est sautée à l'esprit.
Je ne peux pas dire pourquoi, ni ce qui l'a déclenchée.
Mais j'ai vu très clairement l'idée de Harry et de son
école de sorciers. J'ai soudain eu cette idée
fondamentale d'un garçon qui ne savait pas qui il
était, qui ne savait pas qu'il était sorcier avant de
recevoir une invitation pour l'école des sorciers. Jamais je
n'avais été aussi excitée par une
idée."
11
Elle n'a rien pour écrire,
mais passe son voyage à préciser la situation et
à chercher ses personnages, notamment Ron Weasley,
inspiré de Sean Harris, et Hagrid, le personnage qu'elle
aimerait le plus rencontrer. Elle imagine aussi les fantômes de
l'école. Plus tard, elle tira des noms d'index
géographiques et du Dictionnaire Brewer des expressions et des
fables. Pour le lieu de l'action, elle pense à un
château et le situe en Écosse, lieu où ses
parents s'étaient rencontrés. Elle consigne le tout sur
des feuilles en arrivant à Manchester, première
étape d'un stockage de notes qui remplit des cartons à
chaussures pour un livre qui ne sera publié que sept ans plus
tard, mais qui lui fait une diversion dans une vie mal vécue.
Elle a le nom de Harry Potter et a décidé
d'écrire 7 tomes, un livre par année scolaire. Ses
emplois de secrétaire à la Chambre de Commerce de
Manchester ou à l'université ne l'intéressent
guère.
A la fin de 1990, sa mère
meurt, à 45 ans, est incinérée. C'est un grand
chagrin pour Joanne, qui ne peut parler encore maintenant de sa
mère qu'avec émotion. Déboussolée, elle
se traîne encore quelques mois à Manchester, avec pour
seul dérivatif son projet sur Harry Potter : elle a
imaginé le quidditch, a trouvé des noms, des
personnalités. Sa mère lui a fait penser au miroir du
Riséd, où Harry voit ses parents et surtout sa
mère, faisant passer dans ces images les sentiments ressentis
à sa mort. Elle fait évidemment de Potter un orphelin,
comme elle est devenue maintenant orpheline...
Le
Portugal.
Elle a rompu avec son ami et cherche l'évasion. Elle trouve
à Porto un emploi d'enseignante d'anglais (niveau
débutants jusqu'au bac), en emportant évidemment le
manuscrit de Potter. Elle trouve à se loger dans
l'établissement, qui a des chambres pour les professeurs
invités. Certaines deviennent des amies et la dédicace
du Prisonnier leur
est dédiée : "À Jill Prewett et Aine Kiely, les marraines du
Swing". Le Swing est une
célèbre boîte disco où le samedi soir les
trois femmes passaient la soirée à boire et
éventuellement à chercher compagnie. Maria, la
sous-directrice portugaise de l'école les accompagnait
parfois, et elle a porté un jugement intéressant sur
Joanne : "Joanne était
quelqu'un de nerveux et d'anxieux, toujours de-ci de-là comme
un papillon. Elle avait cette espèce de rire hystérique
un peu bizarre. Je ne crois pas qu'elle se sentait comblée. On
pouvait voir qu'il lui manquait quelque chose. Un jour, elle m'a
même demandé de lui trouver un petit ami. Je crois que
Joanne avait désespérément besoin
d'amour." 12 Sentimentale, Joanne est vite
submergée par ses émotions.
Elle continue à écrire
dans les cafés, surtout au Majestic. Elle rentre pour taper
ses notes avant le début de ses cours, qui ont lieu en fin
d'après-midi et le soir. Après ses cours, elle mange
souvent des pizzas dans une brasserie avec ses amies.
Elle rencontre un étudiant en
journalisme dans un bar, Jorge Arantes, qui parle bien l'anglais.
Joanne a toujours les cheveux roux flamboyants et les yeux
très maquillés. Jorge est séduit. Joanne n'a
jamais rien voulu raconter sur la triste histoire de ses amours
tumultueuses, mais Jorge s'est montré bien plus indiscret
qu'elle dans les journaux.
D'après lui, ils couchent
ensemble deux jours après leur rencontre, le début
d'une aventure amoureuse tourmentée. Mais Jorge est un macho
séducteur aimant les conquêtes, ce qui rend Joanne
jalouse, et suscite dans le couple des disputes continuelles. La vie
commune avec Jorge, qui doit encore faire son service militaire, est
difficile dans le petit appartement de sa mère situé
dans un quartier pauvre. Joanne est enceinte, mais les querelles ne
cessent pas. Probablement pour donner un nom à l'enfant, le
couple se marie le 16 octobre 1992, sans cérémonie. Sur
la photo prise ce jour, la tristesse se lit sur le visage de Joanne,
qui tient un pauvre bouquet à la main. Aucune
réjouissance, ni lune de miel.
la photo de son premier mariage en
1992
Joanne fait une fausse-couche. Une
première dispute grave se termine dans la rue avec
intervention de la police. Joanne est à nouveau enceinte
pendant que Jorge fait son service militaire. Les amies de Joanne
l'incitent à rompre, sans succès, et Jorge ne veut plus
qu'elle sorte avec elles. Le 27 juillet 1993 naît
Jessica13. Joanne perd du poids, devient de plus en plus maigre.
Le ménage a atteint son point de rupture. Et en novembre 1993,
Joanne se retrouve dans la rue, traînée et giflée
par son mari, avec le bébé de 4 mois. Quelques jours
plus tard, elle retourne en Angleterre avec Jessica.
Pendant ce triste épisode
portugais, Joanne a continué de travailler sur Harry Potter.
Jorge prétend évidemment qu'il a été le
premier à lire le manuscrit et qu'il lui a proposé des
suggestions importantes. Mais on ne trouve aucune influence du
Portugal dans l'oeuvre, sauf peut-être la
référence possible pour le titre au poème
portant le nom de Pierre philosophale de Romulo de Carvalho, datant de 1956 et objet d'une
chanson populaire en 1970 bien connue des étudiants portugais.
Joanne est revenue du Portugal avec 3 chapitres rédigés
et beaucoup de notes et de brouillons, jusque la fin de la
série, conclusion et dernière phrase comprises.
À
nouveau la galère.
Joanne ne cherche pas refuge chez son père, qui vient de se
remarier (2 ans après la mort de son épouse) à
48 ans avec femme qui a huit ans de moins que lui, son ancienne
secrétaire, divorcée, 2 enfants laissés à
son époux Pendant 8 ans, Joanne ne verra plus son père,
mais elle ne veut pas parler de différend entre eux. Elle se
rend donc à Edimbourg chez sa soeur, qui vient de se marier.
Sans ressources, elle trouve difficilement un pauvre appartement.
Divorcée, seule avec sa fille, bénéficiant de
l'Assistance publique, elle vit dans ce petit logement mal
chauffé avec le minimum vital, 69 £ par semaine. Elle a
décrit l'humiliation hebdomadaire du carnet d'assistance
à remettre publiquement à l'employé de
l'administration chargé du versement. Elle ne peut
améliorer ses revenus, car elle ne peut pas travailler plus de
deux heures par semaine, tout salaire supérieur à 15
£ étant déduit de son allocation. Elle est
contrôlée régulièrement par l'assistante
sociale, humiliée par des jouets donnés, comme un ours
en peluche crasseux qui va directement à la poubelle. Elle qui
avait pris l'habitude de sortir souvent, s'enferme maintenant chaque
soir avec son enfant, en essayant de suivre une formation
complémentaire d'enseignement tout en
réfléchissant à Harry Potter.
En mars, Jorge vient du Portugal pour
la relancer. Mais elle ne veut pas le voir, engage une action en
interdiction pour l'empêcher de se rapprocher d'elle et de voir
sa fille. Jorge retourne à Porto, elle ne le reverra plus. En
août, elle demande le divorce et l'obtient avec la garde de sa
fille.
Commence la période la plus sombre de sa vie, la
dépression d'une période noire, où elle aurait
inventé métaphoriquement les détraqueurs et
intégré ce qu'il y a de plus personnel dans le miroir
du Riséd grâce auquel Harry voit sa mère. Joanne
ne sait pas travailler seule et a besoin à la fois
d'être solitaire et entourée (la peur des
détraqueurs). Le café est l'endroit qui remplit le
mieux cette fonction et lui convient parfaitement pour travailler.
Elle va (une tasse de café durant des heures) au café
Le Nicolson's, tenu par chance par son beau-frère. On
connaît cette histoire mainte fois répétée
de Joanne promenant Jessica dans sa poussette jusqu'à ce
qu'elle soit endormie, puis allant écrire au café avec
sa fille dans un coin tranquille. N'ayant rien à perdre, ni
job ni mari, elle mise tout sur Harry. Elle noircit des pages , son
projet est de finir le premier tome avant de chercher
sérieusement du travail. Elle pense pourtant que ses livres ne
lui rapporteront guère et qu'il va bien falloir manger.Elle
réussit l'examen qu'elle préparait lui permettant
d'avoir un diplôme de langues modernes d'enseignement. Elle
reçoit une bourse du Ministère de l'Éducation et
de l'Industrie pour entrer en formation et passer le concours
d'aptitude au poste de professeur.
Joanne a envoyé son manuscrit début 1996 à deux
agents d'édition. (elle avait à peine assez d'argent
pour le faire et devait retaper ses feuillets faute de pouvoir se
payer des photocopies). Le premier agent refuse le manuscrit. Le
second, l'agence Little l'accepte. À partir de maintenant les
faits sont bien connus : contrat d'édition, corrections,
recherche d'un éditeur. Douze refusent, jusqu'à ce que
Bloomsbury le prenne pour 1.500 £, dont 1.275 revenaient
à Joanne, la moitié payable immédiatement. La
sortie du livre était prévue pour juin 1997.
Ses problèmes de survie
immédiate, bien que rendus moins cruciaux par sa bourse, ne
sont pas pour autant résolus par la joie d'avoir
été acceptée par une agence littéraire et
d'avoir trouvé un éditeur. Une paie de professeur lui
est indispensable. Elle dû suivre un stage de plusieurs
semaines dans une école où elle faisait classe sous la
tutelle de l'enseignant en titre. De grosses journées de
travail pour Joanne, et première évaluation mauvaise :
rien que des notes très moyennes ou médiocres, D ou C.
Des observations complémentaires faites lui donnent cependant
des raisons d'espérer : on la remarque sensible aux besoins
des élèves, capable d'une bonne collaboration avec les
autres professeurs. Stimulée, elle prépare mieux ses
cours, a des résultats nettement meilleurs, des B presque
partout. les qualités relevées sont celles qu'on trouve
dans ses récits : bonne planification, compréhension
des enfants et imagination. Le stage du second semestre a lieu par
chance à côté de chez elle, avec à sa
disposition une crèche pour enfants. Elle utilise des
méthodes actives, des cartes à questions qu'elle
dessine elle-même, des diagrammes, des mots croisés, des
extraits de magazines français : ses cours plaisants
intéressent les élèves qui travaillent, tout le
contraire de Rogue qui maltraite et ridiculise ses
élèves. Pas de rangées de cancres dans sa classe
(comme à sa propre école primaire). Les
résultats sont très bons. En fin d'année, rien
que des A, un niveau exceptionnellement élevé.
En juillet 1996, elle obtient son
diplôme d'enseignante. En une année, elle a
restructurée sa vie : elle est enseignante et une auteure sur
le point d'être publiée. Elle s'attend évidemment
à devoir gagner sa vie comme professeur, métier qui
rapporte peu à une débutante . Ses livres lui
fourniront un complément, car elle manque toujours d'argent.
Elle trouve un poste à l'école de Leith, à deux
pas de chez elle.
Joanne
auteure.
Elle a corrigé les épreuves du premier tome et
écrit le second, La chambre des secrets. L'éditeur lui a fait mettre deux initiales
avant son nom, à l'américaine. Elle a choisi K, par
affection pour sa grand-mère Kathlen et pour l'euphonie.
Exceptionnellement, elle réussit à obtenir une bourse
d'auteur du Conseil Écossais des Arts (il faut normalement
avoir édité un livre pour l'avoir et pouvoir ainsi
écrire tranquillement le second). L'entretien se
révèle concluant, elle obtient une bourse de 8.000
£. Son premier achat est un traitement de textes, qui lui permet
d'en finir avec la machine à écrire. Elle continue
à rédiger des notes dans des cafés et à
planifier le parcours de tous ses personnages. Elle classe toujours
ses notes dans des cartons à chaussures. Ces notes lui sont
indispensables, car elle y ajoute au fur et à mesure tous les
éléments concernant un personnage, si bien qu'avec ses
fiches elle peut se rappeler tous les détails des personnages
et péripéties à plusieurs tomes
d'intervalle.
La publication a lieu, comme prévue, le 26 juin 1997 et
l'accueil est favorable. Un éditeur américain Scolastic
achète les droits pour 100.000$. Le montant de cette somme
fait que du jour au lendemain Joanne devient célèbre.
Elle passe une semaine au téléphone. La presse s'empare
de son cas et invente diverses histoires plus ou moins
sensationnelles.. A la fin de 1999, Harry Potter et l'école des
sorciers figure parmi les
meilleures ventes de l'année.
Le manuscrit du second tome est remis
à l'éditeur quelques mois plus tard. Joanne a
déménagé pour un appartement plus vaste, avec
une chambre pour Jessica et un bureau pour elle. Elle travaille
à son troisième livre dans des conditions maintenant
différentes : tournées de promotions, lectures à
enfants et séances de signatures. Mais elle cherche à
protéger autant que possible sa vie privée.
En juin 1999, la voilà devenue millionnaire. Des
chèques de l'Assistance sociale aux royalties de 15 à
20% du prix de vente de ses livres, il lui a fallu 5 ans pour
réussir. Elle reçoit des centaines de lettres par
jour.
Elle ne fait que de rares apparitions en public et répond peu
aux invitations à dîner. Elle doit cependant participer
de plus en plus à des tournées de production, y compris
aux USA. Ses fans forment des queues immenses pour les séances
de signature de ses livres. Avec 2 millions de £
consacrés à la promotion de La coupe de feu, c'est l'hystérie : le tirage en langue anglaise
atteint 5.400.000 exemplaires. Pour le seul tirage américain,
Rowling touche 10 millions de $... L'éditeur Bloomsbury va
jusqu'à construire une maquette du quai 93/4 à la gare
de King's Cross de Londres pour y inviter journalistes et 500
enfants...
Lancement publicitaire de Harry Potter et la coupe de
feu à la gare de King's Cross
(Londres) en 2000
En 2000, Joanne est consacrée
comme l'auteur de l'année. L'étudiante médiocre
est admise docteur honoris causa es-lettres de l'Université
d'Exeter dans une grande cérémonie de prestige.
Rowling a reçu la
médaille de l'Ordre de l'Empire Britannique (des mains du
Prince Charles)
Elle est nommée officier de
l'Ordre de l'Empire Britannique pour services rendus à la
littérature pour enfants mais se fait excuser.à la
cérémonie de remise du titre à Buckingham
Palace, prétextant que Jessica est malade. En
réalité, Jessica était à l'école,
regardée par sa mère lors de la fête de
Noël. Joanne dut cependant se rendre au château de
Balmoral, en Écosse, résidence du Prince de Galles, qui
a écrit un conte pour enfants Le vieil homme de Lochnagar (1991) Ce fut lui qui remit son OBE à
à Joanne. Elle dut rencontrer finalement la reine quand elle
visita les locaux de l'éditeur Bloomsbury à Londres. La
reine eut une longue conversation avec elle, fit faire une photo et
lui confia que sa petite fille Eugénie était fan de
Harry...
Le point en
2002.
Dans la liste des "Fortunes 2001" du Sunday Times, Joanne figure en
526ème position, avec une fortune estimée à 65
millions de £, la 42ème d'Écosse. Elle vient
d'acheter à Kensington (Londres) un un pied-à-terre,
une maison de style géorgien avec piscine souterraine,
chauffage au sol (4 millions1/2 de £), qui fait partie d'un
ensemble pour millionnaires, 25 maisons dont la
sécurité est assurée continuellement. Joanne
tient avant tout à sa tranquillité et elle a
déjà été l'objet de cambriolages.
sa nouvelle maison, estimée
à 500.000 £ (800.000 ¤)
Son habitation ordinaire se trouve
à Edimbourg près du quartier de Merchiston,
également une demeure géorgienne qu'elle a
achetée, couverte de lierre, entourée d'un haut mur de
pierre et d'un portail de sécurité, avec de grandes
baies vitrées donnant sur un vaste jardin.
Beaucoup de gens se sont enrichis avec Joanne, ceux qui l'ont
aidée dans l'édition d'abord. Son agent a gagné
en % 10 millions de £., son éditeur est devenu
richissime, ainsi que ses directeurs, qui possédaient des
actions de la société, devenus millionnaires.... Sans
compter les innombrables retombées commerciales des nombreux
objets dérivés. Il y a quelques années, une
auteure américaine, Nancy Stouffer, avait intenté un
procès à Joanne pour plagiat : Joanne lui aurait
"emprunté" le mot Muggles et quelques autres détails.
Nancy Stouffer a été déboutée de son
procès en septembre 2002, à la grande satisfaction de
Joanne, qui a consacré des années de travail à
sa série, et que cette accusation blessait dans sa
dignité d'écrivain.
Elle a connu le docteur Neil Murray,
un homme tranquille, travaillant comme médecin
anesthésiste d'hôpital et de six ans son cadet, rien
d'un étudiant rencontré dans un bar comme son
précédent mari. Il est divorcé de sa femme,
épousée en 1996, médecin comme lui,
rencontrée pendant ses études de médecine
à l'Université de Glascow. D'une classe moyenne, il
aurait un comportement proche de celui que Joanne aurait pu
épouser si elle était devenue modeste enseignante dans
son milieu d'origine. Il a gardé son emploi. Ils se sont
mariés le lendemain de Noël 2001.
On vient d'apprendre en
septembre 2002 que Joanne est enceinte et attend son deuxième
enfant.
Roland Ernould
Notes :
1 Sean Smith, J.
K. Rowling, la magicienne qui créa Harry
Potter, Favre éditeur,
2002, 41. Cette note est l'occasion de manifester ma dette à
l'égard de cet ouvrage qui contient de nombreuses
informations.
2 Propos de John Nettleship, cité par Sean Smith,
o. c. , 71. Ce professeur était surnommé "stinger" par
ses élèves (stinger = celui qui pique ou qui
mord).
3 Sean Smith, op. cit., 74/76.
4 Sean Smith, op. cit., 78.
5 Sean Smith, op. cit., 99.
6 Sean Smith, op. cit., 108.
7 Sean Smith, op. cit., 110.
8 Sean Smith, op. cit., 114.
9 Les degrés des diplômes anglais pour la
licence : le meilleur (diplôme de première classe) est
noté 1. Ensuite le diplôme de deuxième classe,
1ère division, noté 2.1; en dessous, le diplôme
de deuxième classe, 1ère division, noté
2.2.
10 Sur lesquels on n'a aucun détail.
11 Sean Smith, op. cit., 124.
12 Sean Smith, op. cit., 153.
13 En l'honneur de Jessica Mitford, dont elle a lu
à quatorze ans Hons and
rebels, (1960, non traduit)
une autobiographie qui l'a profondément marquée.
Extrait d'une interview : "I
named my daughter after her. I found her inspiring because she was a
brave and idealistic person - the qualities I most admire, in other
words." (J'ai
prénommé ma fille d'après elle. J'ai subi son
influence parce que c'est une personne courageuse et
idéaliste, les qualités que j'admire le plus pour dire
les choses autrement.). Interview du 16/10/2000, Scholastic
Inc.
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