Dossier de presse
STEPHEN KING ET LE
SEXE, Roland Ernould, Éditions
Naturellement
Entretien avec Christian Furling
La Voix du
Nord du Jeudi 25 Mai 2000
Passion
Roland
Ernould a publié un essai sur le sexe dans l'oeuvre du
romancier et créé son site sur Internet.
Le "papy" qui
surfait sur Stephen King
Comme la nature, Roland Ernould a
horreur du vide. À 70 ans, cet ancien professeur consacre ses
journées à un maître américain de
l'horreur, Stephen King. Il surfe sur le Web et alimente, à
jet continu, son propre site sur le romancier à succès
(voir
ci-contre).
Le vide, l'Armentiérois Roland Ernould en a fait
l'expérience voilà cinq ans, alors qu'il venait de
quitter sa grande maison du Pays de l'Alloeu pour un appartement en
ville. Il avait effectué toute sa carrière d'enseignant
à Armentières, aux lycées Paul-Hazard et
Gustave-Eiffel. Il avait enseigné pendant 25 ans à de
futurs professeurs. Certifié de lettres et histoire,
agrégé de philosophie et spécialiste de
psychopédagogie, il possédait 8 000 livres dans sa
bibliothèque. Il en a sacrifié les trois quarts.
"Un livre ne se vend
pas". Il a fait don de ses
ouvrages. Il avait amassé des kilos de documents relatifs
à la psycho-pédagogie. Il a offert son fonds à
une université polonaise. Il est reparti de
zéro.
De
Saint-Ex au sexe
Comment ce lettré
sérieux, respectueux des classiques et de Malraux,
Saint-Exupéry, Gide et Sartre, a-t-il rencontré
l'univers de Stephen King ? Ce fut il y a dix ans. Roland Ernould
avait constaté que le premier auteur lu par les jeunes
était le romancier de Bangor (Maine). Il offrit
Simetierre à son fils de 17 ans, féru de
fantastique. Il le lut à son tour. "Ça ne m'a pas tellement branché, mais j'ai
continué à en lire, par divertissement", confie-t-il. Il ne s'est plus
détaché de cette oeuvre de plus de 40 titres.
Alors, pour combler le vide, il a songé à
étudier les écrits de Stephen King. Il a rejoint le
fan-club lillois du romancier, a écrit des articles pour sa
revue..."J'ai pris ça
comme une détente ; j'avais vécu une vie où les
trois quarts des lectures étaient obligées. J'ai
découvert petit à petit que, derrière le
divertissement, il y avait beaucoup à creuser."
Roland Ernould s'est mis à décortiquer l'oeuvre de
Stephen King, s'intéressant au mal, son thème majeur,
et accouchant d'un essai. Celui-ci a été refusé
par les éditeurs. Conseillé par son fils,
l'Armentiérois a choisi un thème plus "vendeur", le
sexe. Bingo ! Un petit éditeur vient de le publier (*).
Roland Ernould a deux autres essais en chantier sur le surnaturel et
sur les mythes. À chaque recherche, il relit tout King.
Aujourd'hui, ce bourreau de travail, qui consacre sept à huit
heures par jour à l'univers kingien, a lu cinq fois l'ensemble
de cette oeuvre. "Stephen King
restera comme une sorte de sociologue donnant une vision très
précise et riche des Américains de son temps,
plutôt que comme un grand auteur
littéraire",
estime-t-il. Outre son admiration pour la plume naturaliste de King,
Roland Ernould apprécie le fonctionnement de son imaginaire :
"Ses personnages sont des gens
qui vivent la vie ordinaire, dans laquelle apparaît un
événement insolite. Face à lui, ils continuent
d'avoir des réactions quotidiennes et ça leur donne de
l'humanité."
Il est fasciné par "la
richesse des thèmes, introduits dans les milieux sociaux les
plus variés. Il y a 40 ans d'une époque que j'ai
vécue". Enfin, il a
repéré des correspondances entre le romancier et lui.
"King a été
marqué par sa mère, une
méthodiste", qui lui a
inculqué une morale stricte. Roland Ernould a subi une
mère rigoriste. Comme King, il a connu sa femme alors qu'ils
étaient étudiants, ils partagent une vie paisible et
son avis lui est précieux.
Un
voyeur
Et le sexe, alors ? Dans l'oeuvre de
King, il n'occupe pas plus de place que ça. Roland Ernould
dresse un inventaire scrupuleux des passages sexuels écrits
par King. C'est clair, précis et complet, mais ce travail de
vulgarisation intéressera presque exclusivement les fans de
Stephen King.
L'Armentiérois commence par une biographie du romancier. On
découvre un garçon complexé par ses rondeurs.
Cette biographie se fonde sur des documents américains,
recoupés. "À
partir de 25 ans,la vie et l'oeuvre de Steve se confondent et sa
biographie n'a plus d'intérêt", assure Roland Ernould. Du matin au soir, King
écrit.
"King est-il provocateur
?", glisse Roland Ernould en
fin d'inventaire. "Les
Tartuffe du sexe pris à leur propre jeu ! Quoi de plus
réjouissant ?". Mais
"King est-il choquant
?". Non : le sexe y a
"des aspects variés,
tendres, truculents, ironiques, poétiques, appliqués,
aériens, lourds. décrivant des humains authentiques,
vivant, pétant, pelotant, baisant, imparfaits sans doute. Mais
la vie réelle, pas la pornographie".
Cette vie, celle de la
libération sexuelle, a intéressé Roland Ernould.
"King est en
retrait", commente-t-il.
"Il a suivi l'évolution
des moeurs, mais ne l'a pas appliquée pour son compte. Il est
curieux du sexe, mais comme celui qui visite un zoo. C'est un
voyeur". C'est aussi un
être duel. Tiraillé entre ses plusions de fêtard
animal et un équilibre mâtiné de réserve.
Du mal, "il a une idée
biblique : un Dieu lointain, le diable ; le monde est une
confrontation entre forces du bien et du mal".
Roland Ernould ne partage pas cette vision, lui qui milita longtemps
à la Libre Pensée. Néanmoins, il emploie une
image métaphysique pour qualifier la mort. "Comme ma femme, je ressens une
inquiétude en pensant à la grande
ombre". Et il espère
laisser "une oeuvre en
relation avec moi".
Christian Furling
(*) Stephen King
et le sexe, Éditions
Naturellement, 540 pages, 180 F.
La Voix du Nord du Jeudi 25 Mai 2000
www.lavoixdunord.fr
Jean-Pierre Andrevon,
L'Écran fantastique
|
Stephen King et le sexe
possède une accroche qui en fera saliver plus d'un...
En réalité même s'il s'amuse à
noter que King est né l'année même de la
publication aux USA du fameux rapport Kinsey, l'auteur
explore toutes les incursions de King, dans les domaines du
fantastique social et psychologique où il est
passé maître, mettant tout de même en
relief la timidité de l'auteur pour évoquer le
sexe : non que les scènes directement sexuelles
soient absentes de son Ïuvre (c'est loin d'être le
cas, mais elles viennent en général dans les
creux des récits, sans faire partie de leur
thématique : il y n'y a pas (ou bien peu) de
«monstres-femelles» qui agiraient par leur
puissance sexuelle chez King. Et les domaines
périphériques comme I'homosexualité ou
le sida sont quasiment absents de l'Ïuvre. King aurait des
problèmes en ce sens : Roland Ernould semble nous le
souffler, et, regrettant la phobie de la psychanalyse
qu'éprouve l'auteur de Carrie, nous prévient
que ça ne s'arrangera pas (ce que la
religiosité diffuse qui envahit peu à peu les
textes de King paraissent prouver).
Jean-Pierre Andrevon,
L'Écran
fantastique, septembre
2000, p. 68.
|
revue Hauteurs.
Roland Ernould, Stephen King et le
sexe, Editions Naturellement,
1999.
Roland Ernould pourrait être un
personnage de roman, et même de roman d'épouvante.
Après une carrière respectable d'enseignant, il passe
sa retraite, en charentaises et blouse de nylon bleue, à
scruter, depuis son bureau dominant la ville d'Armentières,
les aberrations et monstruosités du sexe. Celles de la vie
quotidienne, et même de la psychiatrie, ne lui suffisant pas,
il explore celles issues de l'imagination maladive des
écrivains fantastiques. Devenu spécialiste de Stephen
King, voilà qu'il expose son travail dans un volumineux et
cependant passionnant ouvrage: Stephen King et le sexe. On y apprend beaucoup car l'homme est loin de
l'idée que l'on s'en fait (n'en dévoilons pas les
surprises) et on mesure surtout combien la vie de King a nourri son
oeuvre. Il n'est pas besoin d'avoir lu King pour se plonger dans ce
livre qui peut constituer une excellente introduction à
l'oeuvre démesurée du célèbre
écrivain. Ernould a de la sympathie pour son héros,
mais pas de complaisance, et il sait en traquer les limites et
contradictions. Avoir choisi le sexuel comme axe de son étude
et l'avoir étayée (avec mesure) de solides
connaissances psy chanalytiques, pourrait faire qualifier Stephen
King et le sexe d'essai de psychanalyse appliquée. Mais un
ouvrage aussi intéressant et si croustillant ne mérite
pas une étiquette aussi " grave ". Disons simplement qu'il
s'agit du magistral portrait, en trois dimensions, authentique et
souvent poignant, d'un auteur et de son oeuvre. Et aussi, à
travers lui, celui d'une génération.
Alain Delbe,
Hauteurs 2, p.121.
INTERVIEW
AVEC ROLAND ERNOULD
Mon cher Roland, cela fait maintenant
plusieurs années que nous avons le plaisir de lire vos
études sur Stephen King dans les pages de notre magazine. A
l'occasion de la publication de votre ouvrage " Stephen King et le
sexe ", nous aimerions découvrir un peu, non pas le fruit de
vos travaux, mais plutôt la source créatrice, les
motivations et l'auteur. Nous vous remercions de bien avoir
accepté de répondre à cette petite
interview.
1) Je commencerai par
ce qui me semble être la question la plus importante : Pourquoi
Stephen King ? La plupart des enseignants universitaires
considèrent King comme un auteur de littérature au
rabais, tout juste bonne à être vendue pour un public de
masse... Certains qualifient les ouvrages de King de " livres de
plage ". Alors, pourquoi ce choix ? Pourquoi cette passion pour les
Ïuvres de King ?
Cette "passion" ne m'est pas venue
tout de suite. Le premier roman de King que j'ai lu, Simetierre,
à sa parution en France, m'avait diverti, sans plus. J'ai lu
ensuite Ça, qui m'a franchement rebuté par sa longueur
: je n'arrivais pas à pénétrer dans cet univers
particulier, je ne crois pas avoir terminé le livre. J'ai lu
un King de temps à autre, un peu dérouté par les
changements de sujet et de ton. Bref, ce n'était pas le grand
amour.
Quand j'ai pris ma retraite, je me
suis trouvé sans projet à long terme. La
spécialité que j'avais enseignée pendant vingt
ans, la psycho-pédagogie dans ce qui est devenu un Institut
Universitaire de Formation de Maîtres, ne se prêtait pas
à un travail tel que je l'envisageais, je me souhaitais
davantage de divertissement. J'ai alors repensé à King.
J'avais dirigé des mémoires d'étudiants qui
portaient sur divers sujets touchant l'enseignement, dont la lecture,
et le sujet des lectures des élèves était
fréquemment repris sous forme d'enquête. Le nom le plus
cité était celui de Stephen King, dont les professeurs
ne parlaient pas, puisque, s'ils avaient lu occasionnellement un
roman, ils ne connaissaient rien de l'auteur, et qu'aucune
documentation n'était disponible. Pourquoi ne pas m'atteler
à un travail de longue haleine sur Stephen King, dans un
domaine où il y avait beaucoup à défricher? Je
me suis mis à le lire méthodiquement, dans l'ordre de
parution. Je m'étais également procuré le livre
de George Beahm, The Stephen King Story (une mine d'informations,
jamais traduit en français malheureusement) et j'ai
cherché des pistes de réflexion. Il n'existait rien en
français sur King et le sujet était porteur. Le projet
pouvait m'occuper plusieurs années, j'avais du temps devant
moi. Je me suis rapproché du Stephen's Club de Lille et j'ai
commencé à écrire pour le Rag. Mes premiers
articles sont consacrés soit aux romans de jeunesse, soit aux
parutions récentes. Ma formation m'a porté
d'emblée à écrire des analyses à
caractère psychologique et sociologique plutôt que
littéraire.
C'est peu à peu que ce qui
était un divertissement s'est transformé en projet plus
vaste. En conclusion, un mariage de raison plutôt qu'un mariage
d'amour. L'amour n'est venu qu'ensuite, quand j'ai commencé
à mieux connaître King.
2) Les thèmes
récurrents dans les ouvrages de Stephen King sont très
nombreux et sont une source d'étude intarissable. On pourrait
citer, par exemple, le mal, le double, le temps, les couleurs,
l'alcoolisme et j'en passe... Vous avez vous-même écrit
de nombreuses études sur les thèmes principaux que l'on
retrouve dans les livres de King. Pourquoi avoir choisi
précisément "King et le sexe" comme thème pour
votre ouvrage et comment situez-vous ce thème au sein de
l'Ïuvre de King ?
L'essai King et le sexe est né
dans des circonstances particulières. J'avais écrit un
premier essai, qui n'avait pas trouvé d'éditeur
après un an de recherches. Je venais de terminer une longue
étude sur King et le trivial, paru dans un hors-série
de Steve's Rag, et j'y annonçais dans une note une seconde
étude portant sur King et le sexe. Je prévoyais un
travail de l'ordre d'une quarantaine de pages
dactylographiées. J'avais en effet rassemblé, en
même temps que je travaillais sur le trivial, des notes sur ce
sujet qui présente des recoupements avec le
précédent. Je pensais alors à un second essai,
dont le titre me paraissait plus «porteur» pour les
éditeurs que les mythes, King et le surnaturel. À cette
époque, c'était «l'année du sexe» aux
USA, où on ne parlait que des aventures de Bill Clinton et de
Monica, ou du viagra. En manière de plaisanterie, mon fils,
qui s'était bien amusé en lisant King et le trivial, me
dit : "Pourquoi ne fais-tu pas un bouquin sur le sexe? Tu trouveras
preneur." À première vue, cela ne me paraissait pas
pouvoir faire la matière d'un livre. Je m'y suis mis en me
disant que cela me servirait pour le Rag. Et peu à peu je me
suis rendu compte que le sujet prenait une ampleur
considérable. Le livre naissait.
J'ai insisté sur le rigorisme
méthodiste qui imprègne l'oeuvre de King. King parle du
sexe, comme tous les auteurs, mais avec modération, bien moins
que la plupart de ses collègues. Il m'a toujours paru
inhibé par le sujet. Le trivial l'excite, mais le sexe lui
fait plutôt peur. Je pense que King vit avant tout sa vie comme
un écrivain qui ne pense à rien d'autre. Dans cette
perspective, le sexe est pour lui une perturbation, aussi bien pour
sa stabilité mentale que par le désordre qu'il pourrait
entraîner dans sa vie conjugale. Tabitha, en bonne catholique
qui pardonne la faiblesse de la chair, est beaucoup plus explicite
sur le sujet qu'un King qui prend souvent ses distances en bon
puritain.
3) Je suppose qu'un
thème aussi vaste demande une somme de travail colossale...
Relecture de tous les ouvrages, prises de notes, synthèse etc.
Pourriez-vous nous livrer quelques secrets de votre méthode de
travail ?
Effectivement un tel travail demande
de la méthode. À ma deuxième relecture de
l'Ïuvre de King (toujours dans l'ordre de rédaction des
Ïuvres), j'ai mis en place un fichier où je repère sous
diverses rubriques ce qui pourrait m'intéresser
ultérieurement. À chaque relecture, je le
complète suivant mes nouvelles perspectives. Quand je veux
faire une recherche, il me suffit de consulter la thématique
de mon fichier pour retrouver l'essentiel. Par exemple, pour un
article comme King et le base-ball, à propos de La petite
fille qui aimait Tom Gordon, il ne me faut que quelques heures pour
retrouver les passages où King en parle. Pour un essai, je
peux reprendre les passages qui m'intéressent, et les
regrouper, selon mes hypothèses de travail, en chapitres
provisoires, que je transformerai avec l'avancement du travail. Ce
n'est qu'après avoir réfléchi sur ces
données que je peux confirmer - ou infirmer - mes
hypothèses de recherche. Il y a donc plusieurs temps dans la
rédaction d'un livre comme King et le sexe : la recherche dans
les fiches, les hypothèses de travail, la relecture
systématique de toute l'Ïuvre pour vérifier si rien n'a
été oublié, et enfin le regroupement en
chapitres, la synthèse et la rédaction.
La partie la plus ingrate est de
reprendre tous les passages sélectionnés à
l'ordinateur. Cela en fait des heures de frappe! Et je suis loin par
exemple d'avoir épuisé toutes mes notes concernant King
et le sexe. Il faut faire un choix de pertinence, et supprimer les
redites.
4) Quel sera le
thème de votre prochain ouvrage et quand pouvons-nous
espérer le lire ?
Je travaille actuellement sur King et
le surnaturel, dont j'ai rédigé plus de 110.000 mots
(à peu près 300 pages). L'importance du volume
terminé sera équivalente à celle de King et le
sexe. Le sujet sera sans doute plus ingrat pour certains lecteurs que
le précédent! Mais personnellement, il
m'intéresse beaucoup plus. Il me donne notamment l'occasion de
multiples lectures sur un sujet vaste, qui touche aussi bien le
rationnel que l'irrationnel, les vérités scientifiques
établies que les croyances. En une époque où
l'affectivité prend le pas sur la raison, le sujet permettra,
outre ce qu'il apportera sur King, de préciser son propre
référentiel dans ce domaine.
Le livre est retenu et promis
à l'éditeur pour octobre. Encore faut-il qu'à ce
moment-là il lui plaise! Puis il faut plusieurs mois pour les
corrections et l'impression. L'éditeur cherche ensuite le
«créneau» d'édition le plus approprié
pour la vente. Ainsi King et le sexe devait sortir en octobre 1999,
et le livre était prêt. Mais la publication de plusieurs
ouvrages sur King a fait reculer la date jusqu'en janvier 2000.
J'espère que King et le surnaturel sera édité
début 2001. Personnellement, j'aurais
préféré que King et les mythes soit le premier
édité. King et le sexe m'a donné une
réputation sulfureuse! L'édition locale du quotidien La
Voix du Nord n'a pas fait mention du livre, en dépit de
plusieurs relances. Le sexe s'étale partout, à la
télévision, dans les rues, mais en province, on n'en
parle toujours pas... Le sujet y est resté incroyablement
tabou.
5) J'ai pu remarquer
que vous travaillez principalement sur les traductions
françaises des ouvrages de King. N'avez-vous pas peur de
trahir un peu King ? Par exemple, dans " Stephen King et le sexe ",
vous citez aux pages 256 & 257 : " (...) Il va de soi que
l'homosexualité ne se résume pas à l'anal mais
le King inexpérimenté de ces années semble l'y
réduire. Non seulement il y a quantité d'interjections
familières s'y rapportant (" Vas-y, Charlie, encule-les tous !
" ; " Va te faire enculer ! ", " j'en ai plein le cul ! " (...) ".
Ces expressions ne se retrouvent pas dans le texte américain
et certains termes, comme " fuck " en anglais, ne se limitent pas
à une seule traduction, comme le verbe " enculer " dans le cas
présent, mais veut dire tout un tas de choses. Ainsi,
certaines parties de votre étude sont tout à fait
cohérentes mais uniquement en ce qui concerne la traduction.
Dans le cas présent, nous perdons ainsi toute connotation
anale dans le texte original. Ne pensez-vous pas que le fait de
travailler uniquement sur un texte traduit est réducteur
?
À vrai dire, j'ai souvent
l'impression de courir le risque de trahir mon auteur! Si le travail
que je fais avait un caractère universitaire, il ne me serait
pas possible de procéder ainsi. Peu de lecteurs
français de King ont pas à leur disposition les livres
de King en édition originale, et si je veux citer le texte
anglais dans des notes, ils seraient rebutés par leur
quantité fastidieuse. J'augmenterais les dimensions du livre
(plus le livre est long, plus il coûte cher, plus il se vend
mal). Moi-même, qui ne suis pas angliciste, je possède
suffisamment d'anglais pour traduire, mais sans subtilité.
J'ai surtout une mauvaise connaissance de la langue parlée et
de l'argot, dont les Ïuvres de King sont truffées. Je ne
serais donc pas plus avancé. J'avais commencé un tel
travail de report à l'original, mais cela me prend un temps
énorme. Cela revient en gros à retraduire TOUT King! Ce
travail de report au texte n'est concevable que pour qui
étudie universitairement une ou deux Ïuvres, pas l'ensemble,
gigantesque, de la production de King. J'en suis à ma
cinquième relecture des Ïuvres de King, pour mon prochain
livre, et cela me prend à chaque fois six mois. Alors,
traduire...
Et, autre problème : comment
faire avec mes lecteurs français qui ne peuvent se rapporter
qu'aux traductions? Pourquoi auraient-ils davantage confiance dans la
mienne? Ils peuvent aussi penser que ma traduction va dans le sens de
ma thèse. C'est un problème insoluble pour qui fait des
synthèses. Après avoir traduit La Bible à partir
de la vulgate latine, on a traduit à partir du grec, puis
maintenant de l'hébreu, et les commentateurs s'épuisent
à des querelles sans fins sur des problèmes de
traduction d'un vieil hébreu au sens incertain. S'il en est
ainsi pour le livre sacré des judéo-chrétiens,
sur lequel les exégètes travaillent depuis des
siècles, alors que des hommes se sont persécutés
durablement sur le sujet, il faut bien admettre que chaque peuple est
enfermé dans sa langue. La tour de Babel... Faut-il rester
ainsi prisonnier?
Bien sûr que le travail sur des
traductions est terriblement réducteur. J'en ai bien
conscience, et des universitaires qui ont lu mon livre me l'ont aussi
reproché. Du moins cet essai, s'il n'a qu'une valeur
approximative sur le plan méthodologique, pourra inspirer de
jeunes chercheurs, qui pourront partir d'hypothèses de travail
et ne pas reprendre tout à zéro.
6) Pour continuer
dans le domaine de la traduction, William Olivier Desmond, traducteur
de nombreux ouvrages de King, m'a un jour dit que le texte de King
n'était pas si littéraire que cela et que son
rôle de traducteur était de réadapter les
ouvrages de King pour le public français qui, selon lui, a
besoin d'un contenu culturel et littéraire plus consistant que
le public américain. Son rôle de traducteur est de "
rehausser " la qualité du texte américain. En regardant
de plus près ses traductions, nous avons pu dénombrer
de nombreuses erreurs, faux sens, troncatures etc. Qu'en pensez-vous
?
J'ai lu des articles de Jean-Daniel
Brèque sur le sujet et je n'ignore rien des difficultés
de toute traduction. L'aphorisme italien : traduttore traditore,
traducteur = traître, est malheureusement trop vrai. Comment
rendre un texte original sans le trahir? Toute traduction est
fatalement infidèle. Brèque, qui a traduit un certain
nombre d'ouvrages de King, reconnaît devoir beaucoup
fonctionner au sentiment, voire même traduire "au pif" certains
passages. Un traducteur n'a pas toujours beaucoup de temps pour
traduire : c'est un travail ingrat, et mal payé. William
Olivier Desmond est, par exemple, un traducteur plus
«littéraire» que Brèque, qui cherche
davantage la formule percutante. Alors, moi-même je
m'interrogerais avec plus d'angoisse sur la rigueur de mes
hypothèses, si je n'avais pas cherché à les
confirmer par la confrontation avec l'ensemble de l'oeuvre. Je crois
que la trahison serait certaine si je ne m'appuyais que sur un seul
roman pour fonder un échafaudage fragile. Je crois
sincèrement que dans le détail des
éléments sont à revoir, mais
l'interprétation d'ensemble «colle» à la
pensée de King. Je pense que ce travail donnera des pistes de
réflexion à ceux qui ultérieurement auront
à reprendre le sujet. Je ne prétend pas que mon
interprétation soit définitive.
7) Vous avez
rédigé un ouvrage intitulé " Stephen King, le
mal et les mythes " que nous avons eu la chance de lire. Cependant,
la plupart des maisons d'éditions auxquelles vous l'avez
envoyé l'ont rejeté. Pourriez-vous nous parler de cet
ouvrage et des raisons pour lesquelles il a peut-être
été refusé ?
King, le mal et les mythes a
été terminé il y a deux ans, mais je n'ai pas
trouvé d'éditeur. La réponse était du
genre : intéressant, mais pas vendable. Au bout d'un an de
démarches, je finissais par ne plus y croire. Il est
déjà difficile de trouver un lectorat cultivé
pour les essais, à moins qu'ils portent sur un sujet
d'actualité. Trouver des acheteurs pour un lectorat populaire
comme les amateurs de King fait peur aux grosses maisons. Par
exemple, peu d'amateurs peuvent s'offrir l'essai remarquable de Denis
Mellier sur le fantastique, L'écriture de l'excès, paru
chez Champion l'an dernier, et qui coûte... 396 Fr! Beaucoup de
mes jeunes correspondants Internet ont déploré le prix
de mon livre, et n'ont pas pu se l'offrir : ils n'achètent les
romans de King qu'en livre de poche. Albin Michel, par exemple, qui a
publié la plupart des romans de King, s'est bien gardé
d'éditer L'anatomie de l'horreur, jugé peu rentable,
qui a été repris par un éditeur plus marginal
comme les éditions du Rocher. Je me demande qui va
éditer le prochain essai de King sur l'écriture, qui
doit paraître en octobre. Je pense que le titre de mon essai a
beaucoup fait pour faciliter son édition. Et j'ai eu la chance
que Guy Astic me signale un jeune éditeur qui cherchait un
essai original. En un mois, le contrat était
signé.
J'ai récemment repris King, le
mal et les mythes à mon éditeur, alors que le contrat
d'édition est signé. En trois ans, ma pensée
s'est approfondie, et je juge que certaines parties sont à
reprendre, d'autres à creuser. Ensuite l'essai a besoin
d'être actualisé. Enfin sont parus récemment
plusieurs livres sur les mythes - y compris littéraires - que
je ne connaissais pas au moment de la rédaction. Je n'ai pas
assez insisté sur la symbolique. Bref, après King et le
surnaturel, je vais consacrer six mois à l'améliorer,
avant de passer à un quatrième essai sur King et son
temps. En tous cas, j'enlèverai le mot «mythe» du
titre : beaucoup ne savent pas bien ce que cela veut dire,
l'école n'enseigne plus les mythes. Bref, le titre deviendra
King et le mal.
King a très bien parlé
dans Sac d'os de ces problèmes d'édition. Un
éditeur cherche à faire de l'argent; au moins il ne
peut se permettre d'en perdre. Quand un livre lui est proposé,
avant même de le lire, il se demande : se vendra-t-il? Les
grands éditeurs sont les plus redoutables, car il faut, en
plus pour l'auteur, entrer dans le cadre d'une collection, d'une
politique éditoriale, passer au travers d'une quantité
de filtres, les comités de lecture. J'avais joint à mes
tapuscrits une enveloppe timbrée pour le retour. Des
éditeurs ne m'ont ni répondu, ni rien renvoyé.
Quand on songe qu'en France plus de 10.000 livres sont
édités par an, c'est effectivement une grande chance
que de trouver à se faire éditer. Les éditeurs
fonctionnent avec l'air du temps, des acheteurs
d'éphémère surtout intéressés par
l'actualité de livres qui seront oubliés le lendemain,
quand les médias cesseront d'en parler. Les petites maisons,
spécialisées dans un ou deux genres, sont
généralement plus ouvertes aux auteurs nouveaux.
8) Stephen King a
autrefois déclaré qu'en tant qu'ancien professeur de
littérature il laissait des indices dans ses romans
destinés à ses étudiants, un peu comme un jeu de
l'enseignant à l'enseigné. King ne fait-il pas la
même chose avec ses lecteurs ? Toutes ces belles
théories que nous établissons, nous avides lecteurs et
" spécialistes es King ", ne sont-elles pas dirigées
par King en personne ? N'est-il pas possible que nous tombions dans
le jeu de cet écrivain diabolique? Qu'en pensez-vous ?
King est un auteur qui se
méfie maladivement des interprétations. Il ne lira
jamais mon essai, mais je me demande ce qu'il en penserait. Sa
crainte des critiques universitaires, ou des analystes, est
permanente et on en trouve des traces dans toute son Ïuvre. Sans
compter les charges contre les spécialistes. J'en ai
parlé longuement dans un chapitre de mon livre.
En laissant de côté les
allusions littéraires ou cinématographiques en grand
nombre, et en restant sur le plan de la seule psychologie
comportementale, King laisse des indices qui correspondent à
l'image qu'il voudrait donner. Il joue souvent la comédie.
Outre les petits rôles joués dans des films, ne pas
oublier qu'en 1970, en sortant de la fac, il n'a pas seulement obtenu
sa licence de littérature et un certificat d'aptitude à
l'enseignement, mais aussi une mention en élocution - ce qui
explique son goût pour l'enregistrement de ses textes - surtout
en art dramatique. Il «joue» sans arrêt avec son
public, vit masqué, a fait toutes sortes de commentaires
fallacieux sur son accident, pour affoler son public. Il fait croire
des choses qui ne sont pas, cabotine. Il adore faire parler de lui.
Tabitha est bien plus sincère que Steve et se moque souvent,
dans des interventions, de ces travers de son époux,
resté un grand gamin.
Bref, ce ne sont pas ces indices
laissés volontairement par King qui ont de l'importance pour
l'exégète, sauf à les utiliser pour les
interpréter comme je le fais. Bien souvent les critiques
littéraires ordinaires, qui ne le connaissent que
superficiellement, s'y laissent prendre. Laurent Bourdier, qui a
utilisé des matériaux de sa thèse pour
écrire un livre d'ensemble sur Stephen King, parcours d'une
Ïuvre, est à mon sens celui qui le connaît le plus
complètement, le plus «humainement». Je corresponds
avec lui, et il se montre à la fois pointu et pertinent, sur
l'ensemble de l'Ïuvre kingienne. Il ouvre des perspectives autres que
le livre d'Edgar Morin, irremplaçable bibliographiquement
(incidemment, Morin le remet actuellement à jour, comme
Bourdier le fait du sien), mais très pauvre dans ses analyses.
Je ne pense pas que King soit tellement difficile à percer
pour qui veut voir au-delà des apparences. Si je ne savais que
King a une peur terrible qu'on dévoile ses faiblesses - quel
homme n'en a pas? - je dirais volontiers qu'il offre finalement une
image stéréotypée qui plaît, mais que, ce
faisant, il mutile l'homme qu'il est vraiment. Je me demande
d'ailleurs si cette attitude est innocente de sa part ou si elle ne
témoigne pas d'un certain mépris à
l'égard de ses lecteurs, considérés comme des
badauds prêts à applaudir au spectacle de ses
facéties, comme d'ailleurs à certains passages de ses
Ïuvres aux gros effets qui m'horripilent, mais qui sont là
pour appâter et exciter le lecteur ordinaire.
9) Ne pensez-vous pas
que nous, spécialistes de King, sur-interprétons
l'Ïuvre de King un peu trop souvent ? N'allons nous pas un peu trop
loin en tentant d'interpréter des choses auxquelles King
n'avaient même pas pensé ? N'est-ce pas le piège
de ce genre d'étude ?
Je pense qu'au contraire un
écrivain est d'autant plus riche qu'il offre des lectures et
des interprétations variées. Il va de soi qu'aucun
créateur ne peut songer à tout ce qu'il met dans son
Ïuvre. Chacun est la résultante de facteurs et d'influences
multiples qu'il ne perçoit pas toujours lui-même. Il y a
aussi la partie inconsciente de sa personnalité, celle qui ne
lui apparaît que fugitivement, qui se révèle sans
qu'il le veuille, pour peu qu'il s'investisse, comme King le fait,
dans une Ïuvre à laquelle il se consacre entièrement.
Qu'il puisse y avoir des excès, cela est
indéniable.
D'autre part, dans le domaine du sexe
surtout, apparaît le problème de l'interprétation
psychanalytique, avec sa problématique. Des chercheurs se
disputent sur l'homosexualité de Michel-ange ou de David, sur
le sadisme de Géricault ou de Delacroix. Comprendre ce qui se
trouve derrière les apparences des corps peints ou
dessinés n'est évidemment pas facile. Si je prends cet
exemple, c'est qu'une exposition se tient actuellement au Louvre sur
le thème : "Posséder et détruire,
stratégies sexuelles dans l'art d'Occident", qui est riche
d'interprétations, mais avec des incertitudes. Il en est de
même pour toute création humaine, ou plus simplement de
tout comportement. J'ai mené ma recherche aussi
sincèrement que j'ai pu. Ma plus grande satisfaction a
été de recevoir ce courrier d'un psychanalyste
d'enfants, Alain Delbe, amateur de King : "Ta connaissance de la
psychanalyse est réelle et surtout - le psy que je suis a
apprécié cela - très bien employée. C'est
vraiment à une psychanalyse de King que tu t'es livré.
J'ai même envie de dire que ton livre est autant un livre de
psychanalyse, de psychanalyse appliquée, que de critique
littéraire (pense à l'adresser à des revues de
psychanalyse pour sa promotion, on ne sait jamais).Tu as su te servir
du rapport de King au sexuel comme fil conducteur pour
synthétiser et ordonner le foisonnement de son imaginaire et
pour finalement aller à l'essentiel."
10) Quels sont les
romans que vous préférez et ceux que vous aimez le
moins et pourquoi ?
Question pénible! Je vais
avouer une chose : je n'aime inconditionnellement AUCUN roman de
King. King est un écrivain impur, et j'ai la même
position à son égard qu'à celui de Gustav
Mahler, compositeur que j'adore et qui lui ressemble : des parties
sublimes, et d'autres, heureusement moins nombreuses heureusement,
qui relèvent à mon sens du mauvais goût, avec
effets de masses orchestrales, de cuivres, de timbales, etc Les
exégètes assurent que Mahler a été
influencé enfant par la fanfare de la caserne militaire
à côté de la taverne de ses parents. De
même, issu d'un milieu populaire - ce n'est pas
péjoratif - , King en est resté aux goûts des
gamins de la novella Le corps. Pour plaire à un
électorat avide de sensationnel, a souvent multiplié
des passages avec asticots, intestins tombant par terre, pourriture,
puanteur, effets utilisés sans discrétion. Cela marche
avec le grand public : personnellement, cela me rebute. King est
friand de trivialité, du désordre, du grand
bouleversement des choses, alors qu'il mène une petite vie
tranquille bien ordonnée de bourgeois, quand sa fortune se
chiffre par milliards de francs. Quand il le veut, il sait jouer la
discrétion, comme dans La petite fille qui aimait Tom Gordon.
Sac d'os était très bon, mais cinquante pages de gros
effets auraient pu disparaître sans me gêner.
Bref, (l'île déserte, et
le reste...), si je devais en choisir un, ce serait Le Fléau.
À mon sens, la plus grande partie des schèmes de
fonctionnement de King y sont contenus, et le roman, qui
présente des aspects variés, pas seulement
littéraires, offre des thèmes multiples à
explorer. Un deuxième? Shining, où King a mis au point
ses techniques de manière complète, mais sans la grosse
artillerie qu'il croit nécessaire à l'expression de
l'horreur. Je vais te décevoir, je ne suis pas comme toi un
fan de la Tour. Si le recueil de nouvelles Le Pistolero me ravit, par
sa sobriété et son mystère, les deux tomes qui
ont suivi m'ont déçu. Magie et cristal m'a un peu
réconcilié avec la Tour.
On peut s'étonner de mes
réticences. Mais ceci dit, pour renverser les perspectives,
à imaginer que je sois en ballon avec la collection
complète des King dans la nacelle, que je perde de la hauteur
et doive me délester en lançant des livres par-dessus
bord, je crois que je préférerais tous les risques d'un
atterrissage forcé dangereux en désespoir de cause,
faute d'avoir pu me résoudre à en jeter un
seul...
Je pense que j'ai
encore un bon nombre de questions en tête mais ce sera pour une
autre fois... Merci d'avoir bien voulu participer à cette
interview.
Ernould Roland et Lou Van Hille © avril
2000. Steve's
Rag # 22
¥ Pour rester dans le domaine
des parutions sur King, signalons le travail imposant de Roland
Ernould, Stephen
King et le sexe, éd.
Naturellement, Coll. « Fictions » 540 p., 180 F
Même si le
sujet semble au premier abord réducteur concernant King (on
trouverait plus de pertinence à étudier le sexe dans
les fictions d'un Clive Barker ou d'un Graham Masterton) - le sexe
n'engendre pas une esthétique décalée, ne
suscite pas un malaise réel dans les fictions de King -,
l'approche minutieuse et méthodique de Roland Ernould finit
par convaincre. Surtout, I'auteur a le trés grand
mérite de maîtriser sur le bout des doigts le corpus
vertigineux du maitre de Bangor, et manie les rapprochements avec
à-propos, sans forcer le trait, sans faire rentrer dans des
cases toutes faites les récits. Les premières parties,
plus anecdotiques (le sexe dans la vie de King) ou plus
générales, apportent moins que les derniers
développements - notamment la partie « Sexe, fantastique
[on a envie d'écrire, étant donné le contexte,
fantastrique !] et terreur). Avec une très belle formule pour
clore l'étude, si évidente en ce qui concerne King:
« un dionysiaque prudent ».
Les autres
études de Roland Ernould peuvent être consultées
sur son site, remarquable instrument d'information et de
réflexion, un site visité par 5.OOO internautes durant
le mois d'avril (c'est dire !)
RELIC # 10, mai 2000,
p. 11.
Ténèbres,
# 10, juin-août 2000, 158
STEPHEN KING ET LE
SEXE, Roland Ernould, Éditions
Naturellement, 540 pages, 180 F.
Les fans de King, longtemps privés de
livres critiques francophones consacrés à l'auteur de
Bangor, peuvent enfin se réjouir : en l'espace de trois ans,
ce ne sont pas moins de six de six livres qui ont été
publiés. Après Stephen King : Hantise de
l'écrivain (1997, Philippe Hemsen), Stephen King : Trente ans
de terreur (1997, Hugues Morin), Stephen King : Parcours d'une Ïuvre
(1999, Laurent Bourdier), Stephen King : Le faiseur d'histoires
(1999, Jean-Pierre Dufreigne) et Stephen King : Premières
approches (2000, Guy Astic), c'est au tour de Roland Ernould de nous
proposer son Stephen King et le sexe. Roland Ernould n'en est pas
à son coup d'essai, puis qu'il a déjà
publié, dans des fanzines tels que Cleaver, Steve's Rag ou
encore Fenêtre secrète sur Stephen King, de nombreuse
études consacrées à l'auteur. Il suffit de
visiter son site internet (http://perso.club-inter
net.fr/rernould) pour se rendre compte
de la richesse de ses analyses.
C'est donc un passionné et un
connaisseur qui nous propose ici une étude très
ciblée et imposante. Le livre comporte sept parties ("Le sexe
dans la vie de King", "La découverte du sexe", "Le sexe
adulte", "Le sexe social", "Déviances", "Sexe, fantastique et
terreur" et "King écrivain du sexe") qui recensent avec
beaucoup de justesse les citations de King sur le sujet et qui
analysent les indices qui, dans l'Ïuvre, permettent
d'interpréter la façon dont King aborde et
perçoit cet aspect encore tabou de la nature humaine.
L'approche est très pointue, et par conséquent,
«tout en s'efforçant d'être simple», l'auteur
n'a pas pu éviter d'entrer dans des domaines de
spécialiste en psychologie et en sociologie. »
(préface, page 6) Pour ces raisons, l'ouvrage s'adresse donc
plutôt aux spécialistes de King, ou en tout cas à
des lecteurs qui ont une bonne connaissance de l'auteur
américain.
De plus, proposer le livre à un tel prix
relève du suicide de la part de l'éditeur, d'autant
plus que la maquette ne rend pas justice au contenu : la vignette de
couverture dénature l'Ïuvre originale de Bosch, les erreurs
typographiques sont fréquentes. Ensuite, les sous-parties de
la table des matières, bien que se révélant
parfaitement pertinentes lors de la lecture, s'avèrent
très déroutantes lorsque on y jette un Ïil furtif. Et
lorsqu'un lecteur cherche à se décider pour savoir s'il
va acquérir un livre critique (surtout pour un ouvrage aussi
cher), son premier regard se tourne vers cette même table des
matières pour jauger le contenu du livre. Enfin, les
abréviations utilisées, qui peuvent se justifier pour
un gain de place, entretiennent un peu plus la confusion pour le
lecteur moyen, d'autant plus qu'aucune bibliographie, même
sommaire, n'est proposée.
Ces réserves ne remettent pas en cause
la qualité du travail de Roland Ernould. Il connaît
assurément l'Ïuvre du maître de Bangor sur le bout des
doigts, et son analyse est critique et rigoureuse. On se demande
simplement si un recueil d'articles sur des thématiques
différentes (sur le modèle du Trente ans de terreur de
Morin) n'aurait pas été plus judicieux, car il aurait
permis une approche moins ciblée et plus accessible pour le
plus grand nombre. Peut-être lors d'une prochaine publication
?
Laurent Bourdier
Autosatisfaction!
King sur le
Web
La Voix du
Nord du Jeudi 25 Mai 2000
Dès qu'il délaisse ses
essais destinés au support papier, Roland Ernould se consacre
au site Internet qu'il a voué à Stephen King. Il passe
généralement deux à trois heures par jour
à renouveler le contenu de ses pages et à
répondre aux messages d'interlocuteurs souvent jeunes, ce qui
lui permet de garder des contacts avec une tranche d'âge qu'il
a longtemps fréquentée.
Roland Ernould a créé son site de toutes pièces,
voilà un an. Depuis, il a attiré la bagatelle de 25 000
lecteurs. Ce site est volumineux, puisqu'il comprend environ 1 300
pages...
Il s'agit d'un ensemble très documenté, complet et
précis, ce qui est la marque de fabrique de Roland Ernould.
Ainsi, pour La ligne
verte, l'Armentiérois
a réuni un résumé des feuilletons écrits
par King sous ce titre, puis du scénario tiré de
l'oeuvre de "Steve", puis du film réalisé à
partir de ce scénario. Avec, à chaque étape, une
critique.
Roland Ernould donne aussi des nouvelles du romancier. Son site a
d'ailleurs pris de l'essor après l'accident de la circulation
dont a été victime Stephen King, l'été
dernier. L'ancien professeur surfe sur les sites des
périodiques du Maine, l'état où réside
l'écrivain américain. Et il en a donné des
nouvelles régulières, y compris photographiques.
Christian Furling
La Voix du Nord du Jeudi 25 Mai 2000 www.lavoixdunord.fr
Commentaires des revues sur le site
roland.ernould@neuf.fr
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