Dossier de presse

STEPHEN KING ET LE SEXE, Roland Ernould, Éditions Naturellement

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Entretien avec Christian Furling

La Voix du Nord du Jeudi 25 Mai 2000

Passion

Roland Ernould a publié un essai sur le sexe dans l'oeuvre du romancier et créé son site sur Internet.

Le "papy" qui surfait sur Stephen King

 

Comme la nature, Roland Ernould a horreur du vide. À 70 ans, cet ancien professeur consacre ses journées à un maître américain de l'horreur, Stephen King. Il surfe sur le Web et alimente, à jet continu, son propre site sur le romancier à succès (voir ci-contre).


Le vide, l'Armentiérois Roland Ernould en a fait l'expérience voilà cinq ans, alors qu'il venait de quitter sa grande maison du Pays de l'Alloeu pour un appartement en ville. Il avait effectué toute sa carrière d'enseignant à Armentières, aux lycées Paul-Hazard et Gustave-Eiffel. Il avait enseigné pendant 25 ans à de futurs professeurs. Certifié de lettres et histoire, agrégé de philosophie et spécialiste de psychopédagogie, il possédait 8 000 livres dans sa bibliothèque. Il en a sacrifié les trois quarts. "
Un livre ne se vend pas". Il a fait don de ses ouvrages. Il avait amassé des kilos de documents relatifs à la psycho-pédagogie. Il a offert son fonds à une université polonaise. Il est reparti de zéro.

De Saint-Ex au sexe

Comment ce lettré sérieux, respectueux des classiques et de Malraux, Saint-Exupéry, Gide et Sartre, a-t-il rencontré l'univers de Stephen King ? Ce fut il y a dix ans. Roland Ernould avait constaté que le premier auteur lu par les jeunes était le romancier de Bangor (Maine). Il offrit Simetierre à son fils de 17 ans, féru de fantastique. Il le lut à son tour. "Ça ne m'a pas tellement branché, mais j'ai continué à en lire, par divertissement", confie-t-il. Il ne s'est plus détaché de cette oeuvre de plus de 40 titres.


Alors, pour combler le vide, il a songé à étudier les écrits de Stephen King. Il a rejoint le fan-club lillois du romancier, a écrit des articles pour sa revue..."
J'ai pris ça comme une détente ; j'avais vécu une vie où les trois quarts des lectures étaient obligées. J'ai découvert petit à petit que, derrière le divertissement, il y avait beaucoup à creuser."


Roland Ernould s'est mis à décortiquer l'oeuvre de Stephen King, s'intéressant au mal, son thème majeur, et accouchant d'un essai. Celui-ci a été refusé par les éditeurs. Conseillé par son fils, l'Armentiérois a choisi un thème plus "vendeur", le sexe. Bingo ! Un petit éditeur vient de le publier (*).


Roland Ernould a deux autres essais en chantier sur le surnaturel et sur les mythes. À chaque recherche, il relit tout King. Aujourd'hui, ce bourreau de travail, qui consacre sept à huit heures par jour à l'univers kingien, a lu cinq fois l'ensemble de cette oeuvre. "
Stephen King restera comme une sorte de sociologue donnant une vision très précise et riche des Américains de son temps, plutôt que comme un grand auteur littéraire", estime-t-il. Outre son admiration pour la plume naturaliste de King, Roland Ernould apprécie le fonctionnement de son imaginaire : "Ses personnages sont des gens qui vivent la vie ordinaire, dans laquelle apparaît un événement insolite. Face à lui, ils continuent d'avoir des réactions quotidiennes et ça leur donne de l'humanité."


Il est fasciné par "
la richesse des thèmes, introduits dans les milieux sociaux les plus variés. Il y a 40 ans d'une époque que j'ai vécue". Enfin, il a repéré des correspondances entre le romancier et lui. "King a été marqué par sa mère, une méthodiste", qui lui a inculqué une morale stricte. Roland Ernould a subi une mère rigoriste. Comme King, il a connu sa femme alors qu'ils étaient étudiants, ils partagent une vie paisible et son avis lui est précieux.

Un voyeur

Et le sexe, alors ? Dans l'oeuvre de King, il n'occupe pas plus de place que ça. Roland Ernould dresse un inventaire scrupuleux des passages sexuels écrits par King. C'est clair, précis et complet, mais ce travail de vulgarisation intéressera presque exclusivement les fans de Stephen King.


L'Armentiérois commence par une biographie du romancier. On découvre un garçon complexé par ses rondeurs. Cette biographie se fonde sur des documents américains, recoupés. "
À partir de 25 ans,la vie et l'oeuvre de Steve se confondent et sa biographie n'a plus d'intérêt", assure Roland Ernould. Du matin au soir, King écrit.
"
King est-il provocateur ?", glisse Roland Ernould en fin d'inventaire. "Les Tartuffe du sexe pris à leur propre jeu ! Quoi de plus réjouissant ?". Mais "King est-il choquant ?". Non : le sexe y a "des aspects variés, tendres, truculents, ironiques, poétiques, appliqués, aériens, lourds. décrivant des humains authentiques, vivant, pétant, pelotant, baisant, imparfaits sans doute. Mais la vie réelle, pas la pornographie".

Cette vie, celle de la libération sexuelle, a intéressé Roland Ernould. "King est en retrait", commente-t-il. "Il a suivi l'évolution des moeurs, mais ne l'a pas appliquée pour son compte. Il est curieux du sexe, mais comme celui qui visite un zoo. C'est un voyeur". C'est aussi un être duel. Tiraillé entre ses plusions de fêtard animal et un équilibre mâtiné de réserve. Du mal, "il a une idée biblique : un Dieu lointain, le diable ; le monde est une confrontation entre forces du bien et du mal".


Roland Ernould ne partage pas cette vision, lui qui milita longtemps à la Libre Pensée. Néanmoins, il emploie une image métaphysique pour qualifier la mort. "
Comme ma femme, je ressens une inquiétude en pensant à la grande ombre". Et il espère laisser "une oeuvre en relation avec moi".

Christian
Furling

(*)
Stephen King et le sexe, Éditions Naturellement, 540 pages, 180 F.

La Voix du Nord du Jeudi 25 Mai 2000 www.lavoixdunord.fr

 

Jean-Pierre Andrevon, L'Écran fantastique

Stephen King et le sexe possède une accroche qui en fera saliver plus d'un... En réalité même s'il s'amuse à noter que King est né l'année même de la publication aux USA du fameux rapport Kinsey, l'auteur explore toutes les incursions de King, dans les domaines du fantastique social et psychologique où il est passé maître, mettant tout de même en relief la timidité de l'auteur pour évoquer le sexe : non que les scènes directement sexuelles soient absentes de son Ïuvre (c'est loin d'être le cas, mais elles viennent en général dans les creux des récits, sans faire partie de leur thématique : il y n'y a pas (ou bien peu) de «monstres-femelles» qui agiraient par leur puissance sexuelle chez King. Et les domaines périphériques comme I'homosexualité ou le sida sont quasiment absents de l'Ïuvre. King aurait des problèmes en ce sens : Roland Ernould semble nous le souffler, et, regrettant la phobie de la psychanalyse qu'éprouve l'auteur de Carrie, nous prévient que ça ne s'arrangera pas (ce que la religiosité diffuse qui envahit peu à peu les textes de King paraissent prouver).

Jean-Pierre Andrevon, L'Écran fantastique, septembre 2000, p. 68.

revue Hauteurs.

Roland Ernould, Stephen King et le sexe, Editions Naturellement, 1999.

Roland Ernould pourrait être un personnage de roman, et même de roman d'épouvante. Après une carrière respectable d'enseignant, il passe sa retraite, en charentaises et blouse de nylon bleue, à scruter, depuis son bureau dominant la ville d'Armentières, les aberrations et monstruosités du sexe. Celles de la vie quotidienne, et même de la psychiatrie, ne lui suffisant pas, il explore celles issues de l'imagination maladive des écrivains fantastiques. Devenu spécialiste de Stephen King, voilà qu'il expose son travail dans un volumineux et cependant passionnant ouvrage: Stephen King et le sexe. On y apprend beaucoup car l'homme est loin de l'idée que l'on s'en fait (n'en dévoilons pas les surprises) et on mesure surtout combien la vie de King a nourri son oeuvre. Il n'est pas besoin d'avoir lu King pour se plonger dans ce livre qui peut constituer une excellente introduction à l'oeuvre démesurée du célèbre écrivain. Ernould a de la sympathie pour son héros, mais pas de complaisance, et il sait en traquer les limites et contradictions. Avoir choisi le sexuel comme axe de son étude et l'avoir étayée (avec mesure) de solides connaissances psy chanalytiques, pourrait faire qualifier Stephen King et le sexe d'essai de psychanalyse appliquée. Mais un ouvrage aussi intéressant et si croustillant ne mérite pas une étiquette aussi " grave ". Disons simplement qu'il s'agit du magistral portrait, en trois dimensions, authentique et souvent poignant, d'un auteur et de son oeuvre. Et aussi, à travers lui, celui d'une génération.

Alain Delbe, Hauteurs 2, p.121.

 

INTERVIEW AVEC ROLAND ERNOULD

Mon cher Roland, cela fait maintenant plusieurs années que nous avons le plaisir de lire vos études sur Stephen King dans les pages de notre magazine. A l'occasion de la publication de votre ouvrage " Stephen King et le sexe ", nous aimerions découvrir un peu, non pas le fruit de vos travaux, mais plutôt la source créatrice, les motivations et l'auteur. Nous vous remercions de bien avoir accepté de répondre à cette petite interview.

1) Je commencerai par ce qui me semble être la question la plus importante : Pourquoi Stephen King ? La plupart des enseignants universitaires considèrent King comme un auteur de littérature au rabais, tout juste bonne à être vendue pour un public de masse... Certains qualifient les ouvrages de King de " livres de plage ". Alors, pourquoi ce choix ? Pourquoi cette passion pour les Ïuvres de King ?

 

Cette "passion" ne m'est pas venue tout de suite. Le premier roman de King que j'ai lu, Simetierre, à sa parution en France, m'avait diverti, sans plus. J'ai lu ensuite Ça, qui m'a franchement rebuté par sa longueur : je n'arrivais pas à pénétrer dans cet univers particulier, je ne crois pas avoir terminé le livre. J'ai lu un King de temps à autre, un peu dérouté par les changements de sujet et de ton. Bref, ce n'était pas le grand amour.

Quand j'ai pris ma retraite, je me suis trouvé sans projet à long terme. La spécialité que j'avais enseignée pendant vingt ans, la psycho-pédagogie dans ce qui est devenu un Institut Universitaire de Formation de Maîtres, ne se prêtait pas à un travail tel que je l'envisageais, je me souhaitais davantage de divertissement. J'ai alors repensé à King. J'avais dirigé des mémoires d'étudiants qui portaient sur divers sujets touchant l'enseignement, dont la lecture, et le sujet des lectures des élèves était fréquemment repris sous forme d'enquête. Le nom le plus cité était celui de Stephen King, dont les professeurs ne parlaient pas, puisque, s'ils avaient lu occasionnellement un roman, ils ne connaissaient rien de l'auteur, et qu'aucune documentation n'était disponible. Pourquoi ne pas m'atteler à un travail de longue haleine sur Stephen King, dans un domaine où il y avait beaucoup à défricher? Je me suis mis à le lire méthodiquement, dans l'ordre de parution. Je m'étais également procuré le livre de George Beahm, The Stephen King Story (une mine d'informations, jamais traduit en français malheureusement) et j'ai cherché des pistes de réflexion. Il n'existait rien en français sur King et le sujet était porteur. Le projet pouvait m'occuper plusieurs années, j'avais du temps devant moi. Je me suis rapproché du Stephen's Club de Lille et j'ai commencé à écrire pour le Rag. Mes premiers articles sont consacrés soit aux romans de jeunesse, soit aux parutions récentes. Ma formation m'a porté d'emblée à écrire des analyses à caractère psychologique et sociologique plutôt que littéraire.

C'est peu à peu que ce qui était un divertissement s'est transformé en projet plus vaste. En conclusion, un mariage de raison plutôt qu'un mariage d'amour. L'amour n'est venu qu'ensuite, quand j'ai commencé à mieux connaître King.

2) Les thèmes récurrents dans les ouvrages de Stephen King sont très nombreux et sont une source d'étude intarissable. On pourrait citer, par exemple, le mal, le double, le temps, les couleurs, l'alcoolisme et j'en passe... Vous avez vous-même écrit de nombreuses études sur les thèmes principaux que l'on retrouve dans les livres de King. Pourquoi avoir choisi précisément "King et le sexe" comme thème pour votre ouvrage et comment situez-vous ce thème au sein de l'Ïuvre de King ?

 

L'essai King et le sexe est né dans des circonstances particulières. J'avais écrit un premier essai, qui n'avait pas trouvé d'éditeur après un an de recherches. Je venais de terminer une longue étude sur King et le trivial, paru dans un hors-série de Steve's Rag, et j'y annonçais dans une note une seconde étude portant sur King et le sexe. Je prévoyais un travail de l'ordre d'une quarantaine de pages dactylographiées. J'avais en effet rassemblé, en même temps que je travaillais sur le trivial, des notes sur ce sujet qui présente des recoupements avec le précédent. Je pensais alors à un second essai, dont le titre me paraissait plus «porteur» pour les éditeurs que les mythes, King et le surnaturel. À cette époque, c'était «l'année du sexe» aux USA, où on ne parlait que des aventures de Bill Clinton et de Monica, ou du viagra. En manière de plaisanterie, mon fils, qui s'était bien amusé en lisant King et le trivial, me dit : "Pourquoi ne fais-tu pas un bouquin sur le sexe? Tu trouveras preneur." À première vue, cela ne me paraissait pas pouvoir faire la matière d'un livre. Je m'y suis mis en me disant que cela me servirait pour le Rag. Et peu à peu je me suis rendu compte que le sujet prenait une ampleur considérable. Le livre naissait.

J'ai insisté sur le rigorisme méthodiste qui imprègne l'oeuvre de King. King parle du sexe, comme tous les auteurs, mais avec modération, bien moins que la plupart de ses collègues. Il m'a toujours paru inhibé par le sujet. Le trivial l'excite, mais le sexe lui fait plutôt peur. Je pense que King vit avant tout sa vie comme un écrivain qui ne pense à rien d'autre. Dans cette perspective, le sexe est pour lui une perturbation, aussi bien pour sa stabilité mentale que par le désordre qu'il pourrait entraîner dans sa vie conjugale. Tabitha, en bonne catholique qui pardonne la faiblesse de la chair, est beaucoup plus explicite sur le sujet qu'un King qui prend souvent ses distances en bon puritain.

 

3) Je suppose qu'un thème aussi vaste demande une somme de travail colossale... Relecture de tous les ouvrages, prises de notes, synthèse etc. Pourriez-vous nous livrer quelques secrets de votre méthode de travail ?

 

Effectivement un tel travail demande de la méthode. À ma deuxième relecture de l'Ïuvre de King (toujours dans l'ordre de rédaction des Ïuvres), j'ai mis en place un fichier où je repère sous diverses rubriques ce qui pourrait m'intéresser ultérieurement. À chaque relecture, je le complète suivant mes nouvelles perspectives. Quand je veux faire une recherche, il me suffit de consulter la thématique de mon fichier pour retrouver l'essentiel. Par exemple, pour un article comme King et le base-ball, à propos de La petite fille qui aimait Tom Gordon, il ne me faut que quelques heures pour retrouver les passages où King en parle. Pour un essai, je peux reprendre les passages qui m'intéressent, et les regrouper, selon mes hypothèses de travail, en chapitres provisoires, que je transformerai avec l'avancement du travail. Ce n'est qu'après avoir réfléchi sur ces données que je peux confirmer - ou infirmer - mes hypothèses de recherche. Il y a donc plusieurs temps dans la rédaction d'un livre comme King et le sexe : la recherche dans les fiches, les hypothèses de travail, la relecture systématique de toute l'Ïuvre pour vérifier si rien n'a été oublié, et enfin le regroupement en chapitres, la synthèse et la rédaction.

La partie la plus ingrate est de reprendre tous les passages sélectionnés à l'ordinateur. Cela en fait des heures de frappe! Et je suis loin par exemple d'avoir épuisé toutes mes notes concernant King et le sexe. Il faut faire un choix de pertinence, et supprimer les redites.

 

4) Quel sera le thème de votre prochain ouvrage et quand pouvons-nous espérer le lire ?

 

Je travaille actuellement sur King et le surnaturel, dont j'ai rédigé plus de 110.000 mots (à peu près 300 pages). L'importance du volume terminé sera équivalente à celle de King et le sexe. Le sujet sera sans doute plus ingrat pour certains lecteurs que le précédent! Mais personnellement, il m'intéresse beaucoup plus. Il me donne notamment l'occasion de multiples lectures sur un sujet vaste, qui touche aussi bien le rationnel que l'irrationnel, les vérités scientifiques établies que les croyances. En une époque où l'affectivité prend le pas sur la raison, le sujet permettra, outre ce qu'il apportera sur King, de préciser son propre référentiel dans ce domaine.

Le livre est retenu et promis à l'éditeur pour octobre. Encore faut-il qu'à ce moment-là il lui plaise! Puis il faut plusieurs mois pour les corrections et l'impression. L'éditeur cherche ensuite le «créneau» d'édition le plus approprié pour la vente. Ainsi King et le sexe devait sortir en octobre 1999, et le livre était prêt. Mais la publication de plusieurs ouvrages sur King a fait reculer la date jusqu'en janvier 2000. J'espère que King et le surnaturel sera édité début 2001. Personnellement, j'aurais préféré que King et les mythes soit le premier édité. King et le sexe m'a donné une réputation sulfureuse! L'édition locale du quotidien La Voix du Nord n'a pas fait mention du livre, en dépit de plusieurs relances. Le sexe s'étale partout, à la télévision, dans les rues, mais en province, on n'en parle toujours pas... Le sujet y est resté incroyablement tabou.

 

5) J'ai pu remarquer que vous travaillez principalement sur les traductions françaises des ouvrages de King. N'avez-vous pas peur de trahir un peu King ? Par exemple, dans " Stephen King et le sexe ", vous citez aux pages 256 & 257 : " (...) Il va de soi que l'homosexualité ne se résume pas à l'anal mais le King inexpérimenté de ces années semble l'y réduire. Non seulement il y a quantité d'interjections familières s'y rapportant (" Vas-y, Charlie, encule-les tous ! " ; " Va te faire enculer ! ", " j'en ai plein le cul ! " (...) ". Ces expressions ne se retrouvent pas dans le texte américain et certains termes, comme " fuck " en anglais, ne se limitent pas à une seule traduction, comme le verbe " enculer " dans le cas présent, mais veut dire tout un tas de choses. Ainsi, certaines parties de votre étude sont tout à fait cohérentes mais uniquement en ce qui concerne la traduction. Dans le cas présent, nous perdons ainsi toute connotation anale dans le texte original. Ne pensez-vous pas que le fait de travailler uniquement sur un texte traduit est réducteur ?

 

À vrai dire, j'ai souvent l'impression de courir le risque de trahir mon auteur! Si le travail que je fais avait un caractère universitaire, il ne me serait pas possible de procéder ainsi. Peu de lecteurs français de King ont pas à leur disposition les livres de King en édition originale, et si je veux citer le texte anglais dans des notes, ils seraient rebutés par leur quantité fastidieuse. J'augmenterais les dimensions du livre (plus le livre est long, plus il coûte cher, plus il se vend mal). Moi-même, qui ne suis pas angliciste, je possède suffisamment d'anglais pour traduire, mais sans subtilité. J'ai surtout une mauvaise connaissance de la langue parlée et de l'argot, dont les Ïuvres de King sont truffées. Je ne serais donc pas plus avancé. J'avais commencé un tel travail de report à l'original, mais cela me prend un temps énorme. Cela revient en gros à retraduire TOUT King! Ce travail de report au texte n'est concevable que pour qui étudie universitairement une ou deux Ïuvres, pas l'ensemble, gigantesque, de la production de King. J'en suis à ma cinquième relecture des Ïuvres de King, pour mon prochain livre, et cela me prend à chaque fois six mois. Alors, traduire...

Et, autre problème : comment faire avec mes lecteurs français qui ne peuvent se rapporter qu'aux traductions? Pourquoi auraient-ils davantage confiance dans la mienne? Ils peuvent aussi penser que ma traduction va dans le sens de ma thèse. C'est un problème insoluble pour qui fait des synthèses. Après avoir traduit La Bible à partir de la vulgate latine, on a traduit à partir du grec, puis maintenant de l'hébreu, et les commentateurs s'épuisent à des querelles sans fins sur des problèmes de traduction d'un vieil hébreu au sens incertain. S'il en est ainsi pour le livre sacré des judéo-chrétiens, sur lequel les exégètes travaillent depuis des siècles, alors que des hommes se sont persécutés durablement sur le sujet, il faut bien admettre que chaque peuple est enfermé dans sa langue. La tour de Babel... Faut-il rester ainsi prisonnier?

Bien sûr que le travail sur des traductions est terriblement réducteur. J'en ai bien conscience, et des universitaires qui ont lu mon livre me l'ont aussi reproché. Du moins cet essai, s'il n'a qu'une valeur approximative sur le plan méthodologique, pourra inspirer de jeunes chercheurs, qui pourront partir d'hypothèses de travail et ne pas reprendre tout à zéro.

 

6) Pour continuer dans le domaine de la traduction, William Olivier Desmond, traducteur de nombreux ouvrages de King, m'a un jour dit que le texte de King n'était pas si littéraire que cela et que son rôle de traducteur était de réadapter les ouvrages de King pour le public français qui, selon lui, a besoin d'un contenu culturel et littéraire plus consistant que le public américain. Son rôle de traducteur est de " rehausser " la qualité du texte américain. En regardant de plus près ses traductions, nous avons pu dénombrer de nombreuses erreurs, faux sens, troncatures etc. Qu'en pensez-vous ?

 

J'ai lu des articles de Jean-Daniel Brèque sur le sujet et je n'ignore rien des difficultés de toute traduction. L'aphorisme italien : traduttore traditore, traducteur = traître, est malheureusement trop vrai. Comment rendre un texte original sans le trahir? Toute traduction est fatalement infidèle. Brèque, qui a traduit un certain nombre d'ouvrages de King, reconnaît devoir beaucoup fonctionner au sentiment, voire même traduire "au pif" certains passages. Un traducteur n'a pas toujours beaucoup de temps pour traduire : c'est un travail ingrat, et mal payé. William Olivier Desmond est, par exemple, un traducteur plus «littéraire» que Brèque, qui cherche davantage la formule percutante. Alors, moi-même je m'interrogerais avec plus d'angoisse sur la rigueur de mes hypothèses, si je n'avais pas cherché à les confirmer par la confrontation avec l'ensemble de l'oeuvre. Je crois que la trahison serait certaine si je ne m'appuyais que sur un seul roman pour fonder un échafaudage fragile. Je crois sincèrement que dans le détail des éléments sont à revoir, mais l'interprétation d'ensemble «colle» à la pensée de King. Je pense que ce travail donnera des pistes de réflexion à ceux qui ultérieurement auront à reprendre le sujet. Je ne prétend pas que mon interprétation soit définitive.

7) Vous avez rédigé un ouvrage intitulé " Stephen King, le mal et les mythes " que nous avons eu la chance de lire. Cependant, la plupart des maisons d'éditions auxquelles vous l'avez envoyé l'ont rejeté. Pourriez-vous nous parler de cet ouvrage et des raisons pour lesquelles il a peut-être été refusé ?

 

King, le mal et les mythes a été terminé il y a deux ans, mais je n'ai pas trouvé d'éditeur. La réponse était du genre : intéressant, mais pas vendable. Au bout d'un an de démarches, je finissais par ne plus y croire. Il est déjà difficile de trouver un lectorat cultivé pour les essais, à moins qu'ils portent sur un sujet d'actualité. Trouver des acheteurs pour un lectorat populaire comme les amateurs de King fait peur aux grosses maisons. Par exemple, peu d'amateurs peuvent s'offrir l'essai remarquable de Denis Mellier sur le fantastique, L'écriture de l'excès, paru chez Champion l'an dernier, et qui coûte... 396 Fr! Beaucoup de mes jeunes correspondants Internet ont déploré le prix de mon livre, et n'ont pas pu se l'offrir : ils n'achètent les romans de King qu'en livre de poche. Albin Michel, par exemple, qui a publié la plupart des romans de King, s'est bien gardé d'éditer L'anatomie de l'horreur, jugé peu rentable, qui a été repris par un éditeur plus marginal comme les éditions du Rocher. Je me demande qui va éditer le prochain essai de King sur l'écriture, qui doit paraître en octobre. Je pense que le titre de mon essai a beaucoup fait pour faciliter son édition. Et j'ai eu la chance que Guy Astic me signale un jeune éditeur qui cherchait un essai original. En un mois, le contrat était signé.

J'ai récemment repris King, le mal et les mythes à mon éditeur, alors que le contrat d'édition est signé. En trois ans, ma pensée s'est approfondie, et je juge que certaines parties sont à reprendre, d'autres à creuser. Ensuite l'essai a besoin d'être actualisé. Enfin sont parus récemment plusieurs livres sur les mythes - y compris littéraires - que je ne connaissais pas au moment de la rédaction. Je n'ai pas assez insisté sur la symbolique. Bref, après King et le surnaturel, je vais consacrer six mois à l'améliorer, avant de passer à un quatrième essai sur King et son temps. En tous cas, j'enlèverai le mot «mythe» du titre : beaucoup ne savent pas bien ce que cela veut dire, l'école n'enseigne plus les mythes. Bref, le titre deviendra King et le mal.

King a très bien parlé dans Sac d'os de ces problèmes d'édition. Un éditeur cherche à faire de l'argent; au moins il ne peut se permettre d'en perdre. Quand un livre lui est proposé, avant même de le lire, il se demande : se vendra-t-il? Les grands éditeurs sont les plus redoutables, car il faut, en plus pour l'auteur, entrer dans le cadre d'une collection, d'une politique éditoriale, passer au travers d'une quantité de filtres, les comités de lecture. J'avais joint à mes tapuscrits une enveloppe timbrée pour le retour. Des éditeurs ne m'ont ni répondu, ni rien renvoyé. Quand on songe qu'en France plus de 10.000 livres sont édités par an, c'est effectivement une grande chance que de trouver à se faire éditer. Les éditeurs fonctionnent avec l'air du temps, des acheteurs d'éphémère surtout intéressés par l'actualité de livres qui seront oubliés le lendemain, quand les médias cesseront d'en parler. Les petites maisons, spécialisées dans un ou deux genres, sont généralement plus ouvertes aux auteurs nouveaux.

 

8) Stephen King a autrefois déclaré qu'en tant qu'ancien professeur de littérature il laissait des indices dans ses romans destinés à ses étudiants, un peu comme un jeu de l'enseignant à l'enseigné. King ne fait-il pas la même chose avec ses lecteurs ? Toutes ces belles théories que nous établissons, nous avides lecteurs et " spécialistes es King ", ne sont-elles pas dirigées par King en personne ? N'est-il pas possible que nous tombions dans le jeu de cet écrivain diabolique? Qu'en pensez-vous ?

 

King est un auteur qui se méfie maladivement des interprétations. Il ne lira jamais mon essai, mais je me demande ce qu'il en penserait. Sa crainte des critiques universitaires, ou des analystes, est permanente et on en trouve des traces dans toute son Ïuvre. Sans compter les charges contre les spécialistes. J'en ai parlé longuement dans un chapitre de mon livre.

En laissant de côté les allusions littéraires ou cinématographiques en grand nombre, et en restant sur le plan de la seule psychologie comportementale, King laisse des indices qui correspondent à l'image qu'il voudrait donner. Il joue souvent la comédie. Outre les petits rôles joués dans des films, ne pas oublier qu'en 1970, en sortant de la fac, il n'a pas seulement obtenu sa licence de littérature et un certificat d'aptitude à l'enseignement, mais aussi une mention en élocution - ce qui explique son goût pour l'enregistrement de ses textes - surtout en art dramatique. Il «joue» sans arrêt avec son public, vit masqué, a fait toutes sortes de commentaires fallacieux sur son accident, pour affoler son public. Il fait croire des choses qui ne sont pas, cabotine. Il adore faire parler de lui. Tabitha est bien plus sincère que Steve et se moque souvent, dans des interventions, de ces travers de son époux, resté un grand gamin.

Bref, ce ne sont pas ces indices laissés volontairement par King qui ont de l'importance pour l'exégète, sauf à les utiliser pour les interpréter comme je le fais. Bien souvent les critiques littéraires ordinaires, qui ne le connaissent que superficiellement, s'y laissent prendre. Laurent Bourdier, qui a utilisé des matériaux de sa thèse pour écrire un livre d'ensemble sur Stephen King, parcours d'une Ïuvre, est à mon sens celui qui le connaît le plus complètement, le plus «humainement». Je corresponds avec lui, et il se montre à la fois pointu et pertinent, sur l'ensemble de l'Ïuvre kingienne. Il ouvre des perspectives autres que le livre d'Edgar Morin, irremplaçable bibliographiquement (incidemment, Morin le remet actuellement à jour, comme Bourdier le fait du sien), mais très pauvre dans ses analyses. Je ne pense pas que King soit tellement difficile à percer pour qui veut voir au-delà des apparences. Si je ne savais que King a une peur terrible qu'on dévoile ses faiblesses - quel homme n'en a pas? - je dirais volontiers qu'il offre finalement une image stéréotypée qui plaît, mais que, ce faisant, il mutile l'homme qu'il est vraiment. Je me demande d'ailleurs si cette attitude est innocente de sa part ou si elle ne témoigne pas d'un certain mépris à l'égard de ses lecteurs, considérés comme des badauds prêts à applaudir au spectacle de ses facéties, comme d'ailleurs à certains passages de ses Ïuvres aux gros effets qui m'horripilent, mais qui sont là pour appâter et exciter le lecteur ordinaire.

 

9) Ne pensez-vous pas que nous, spécialistes de King, sur-interprétons l'Ïuvre de King un peu trop souvent ? N'allons nous pas un peu trop loin en tentant d'interpréter des choses auxquelles King n'avaient même pas pensé ? N'est-ce pas le piège de ce genre d'étude ?

 

Je pense qu'au contraire un écrivain est d'autant plus riche qu'il offre des lectures et des interprétations variées. Il va de soi qu'aucun créateur ne peut songer à tout ce qu'il met dans son Ïuvre. Chacun est la résultante de facteurs et d'influences multiples qu'il ne perçoit pas toujours lui-même. Il y a aussi la partie inconsciente de sa personnalité, celle qui ne lui apparaît que fugitivement, qui se révèle sans qu'il le veuille, pour peu qu'il s'investisse, comme King le fait, dans une Ïuvre à laquelle il se consacre entièrement. Qu'il puisse y avoir des excès, cela est indéniable.

D'autre part, dans le domaine du sexe surtout, apparaît le problème de l'interprétation psychanalytique, avec sa problématique. Des chercheurs se disputent sur l'homosexualité de Michel-ange ou de David, sur le sadisme de Géricault ou de Delacroix. Comprendre ce qui se trouve derrière les apparences des corps peints ou dessinés n'est évidemment pas facile. Si je prends cet exemple, c'est qu'une exposition se tient actuellement au Louvre sur le thème : "Posséder et détruire, stratégies sexuelles dans l'art d'Occident", qui est riche d'interprétations, mais avec des incertitudes. Il en est de même pour toute création humaine, ou plus simplement de tout comportement. J'ai mené ma recherche aussi sincèrement que j'ai pu. Ma plus grande satisfaction a été de recevoir ce courrier d'un psychanalyste d'enfants, Alain Delbe, amateur de King : "Ta connaissance de la psychanalyse est réelle et surtout - le psy que je suis a apprécié cela - très bien employée. C'est vraiment à une psychanalyse de King que tu t'es livré. J'ai même envie de dire que ton livre est autant un livre de psychanalyse, de psychanalyse appliquée, que de critique littéraire (pense à l'adresser à des revues de psychanalyse pour sa promotion, on ne sait jamais).Tu as su te servir du rapport de King au sexuel comme fil conducteur pour synthétiser et ordonner le foisonnement de son imaginaire et pour finalement aller à l'essentiel."

 

10) Quels sont les romans que vous préférez et ceux que vous aimez le moins et pourquoi ?

 

Question pénible! Je vais avouer une chose : je n'aime inconditionnellement AUCUN roman de King. King est un écrivain impur, et j'ai la même position à son égard qu'à celui de Gustav Mahler, compositeur que j'adore et qui lui ressemble : des parties sublimes, et d'autres, heureusement moins nombreuses heureusement, qui relèvent à mon sens du mauvais goût, avec effets de masses orchestrales, de cuivres, de timbales, etc Les exégètes assurent que Mahler a été influencé enfant par la fanfare de la caserne militaire à côté de la taverne de ses parents. De même, issu d'un milieu populaire - ce n'est pas péjoratif - , King en est resté aux goûts des gamins de la novella Le corps. Pour plaire à un électorat avide de sensationnel, a souvent multiplié des passages avec asticots, intestins tombant par terre, pourriture, puanteur, effets utilisés sans discrétion. Cela marche avec le grand public : personnellement, cela me rebute. King est friand de trivialité, du désordre, du grand bouleversement des choses, alors qu'il mène une petite vie tranquille bien ordonnée de bourgeois, quand sa fortune se chiffre par milliards de francs. Quand il le veut, il sait jouer la discrétion, comme dans La petite fille qui aimait Tom Gordon. Sac d'os était très bon, mais cinquante pages de gros effets auraient pu disparaître sans me gêner.

Bref, (l'île déserte, et le reste...), si je devais en choisir un, ce serait Le Fléau. À mon sens, la plus grande partie des schèmes de fonctionnement de King y sont contenus, et le roman, qui présente des aspects variés, pas seulement littéraires, offre des thèmes multiples à explorer. Un deuxième? Shining, où King a mis au point ses techniques de manière complète, mais sans la grosse artillerie qu'il croit nécessaire à l'expression de l'horreur. Je vais te décevoir, je ne suis pas comme toi un fan de la Tour. Si le recueil de nouvelles Le Pistolero me ravit, par sa sobriété et son mystère, les deux tomes qui ont suivi m'ont déçu. Magie et cristal m'a un peu réconcilié avec la Tour.

On peut s'étonner de mes réticences. Mais ceci dit, pour renverser les perspectives, à imaginer que je sois en ballon avec la collection complète des King dans la nacelle, que je perde de la hauteur et doive me délester en lançant des livres par-dessus bord, je crois que je préférerais tous les risques d'un atterrissage forcé dangereux en désespoir de cause, faute d'avoir pu me résoudre à en jeter un seul...

 

Je pense que j'ai encore un bon nombre de questions en tête mais ce sera pour une autre fois... Merci d'avoir bien voulu participer à cette interview.

 

Ernould Roland et Lou Van Hille © avril 2000. Steve's Rag # 22

 

¥ Pour rester dans le domaine des parutions sur King, signalons le travail imposant de Roland Ernould, Stephen King et le sexe, éd. Naturellement, Coll. « Fictions » 540 p., 180 F

Même si le sujet semble au premier abord réducteur concernant King (on trouverait plus de pertinence à étudier le sexe dans les fictions d'un Clive Barker ou d'un Graham Masterton) - le sexe n'engendre pas une esthétique décalée, ne suscite pas un malaise réel dans les fictions de King -, l'approche minutieuse et méthodique de Roland Ernould finit par convaincre. Surtout, I'auteur a le trés grand mérite de maîtriser sur le bout des doigts le corpus vertigineux du maitre de Bangor, et manie les rapprochements avec à-propos, sans forcer le trait, sans faire rentrer dans des cases toutes faites les récits. Les premières parties, plus anecdotiques (le sexe dans la vie de King) ou plus générales, apportent moins que les derniers développements - notamment la partie « Sexe, fantastique [on a envie d'écrire, étant donné le contexte, fantastrique !] et terreur). Avec une très belle formule pour clore l'étude, si évidente en ce qui concerne King: « un dionysiaque prudent ».

Les autres études de Roland Ernould peuvent être consultées sur son site, remarquable instrument d'information et de réflexion, un site visité par 5.OOO internautes durant le mois d'avril (c'est dire !)

RELIC # 10, mai 2000, p. 11.

Ténèbres, # 10, juin-août 2000, 158

STEPHEN KING ET LE SEXE, Roland Ernould, Éditions Naturellement, 540 pages, 180 F.

Les fans de King, longtemps privés de livres critiques francophones consacrés à l'auteur de Bangor, peuvent enfin se réjouir : en l'espace de trois ans, ce ne sont pas moins de six de six livres qui ont été publiés. Après Stephen King : Hantise de l'écrivain (1997, Philippe Hemsen), Stephen King : Trente ans de terreur (1997, Hugues Morin), Stephen King : Parcours d'une Ïuvre (1999, Laurent Bourdier), Stephen King : Le faiseur d'histoires (1999, Jean-Pierre Dufreigne) et Stephen King : Premières approches (2000, Guy Astic), c'est au tour de Roland Ernould de nous proposer son Stephen King et le sexe. Roland Ernould n'en est pas à son coup d'essai, puis qu'il a déjà publié, dans des fanzines tels que Cleaver, Steve's Rag ou encore Fenêtre secrète sur Stephen King, de nombreuse études consacrées à l'auteur. Il suffit de visiter son site internet (http://perso.club-inter net.fr/rernould) pour se rendre compte de la richesse de ses analyses.

C'est donc un passionné et un connaisseur qui nous propose ici une étude très ciblée et imposante. Le livre comporte sept parties ("Le sexe dans la vie de King", "La découverte du sexe", "Le sexe adulte", "Le sexe social", "Déviances", "Sexe, fantastique et terreur" et "King écrivain du sexe") qui recensent avec beaucoup de justesse les citations de King sur le sujet et qui analysent les indices qui, dans l'Ïuvre, permettent d'interpréter la façon dont King aborde et perçoit cet aspect encore tabou de la nature humaine. L'approche est très pointue, et par conséquent, «tout en s'efforçant d'être simple», l'auteur n'a pas pu éviter d'entrer dans des domaines de spécialiste en psychologie et en sociologie. » (préface, page 6) Pour ces raisons, l'ouvrage s'adresse donc plutôt aux spécialistes de King, ou en tout cas à des lecteurs qui ont une bonne connaissance de l'auteur américain.

De plus, proposer le livre à un tel prix relève du suicide de la part de l'éditeur, d'autant plus que la maquette ne rend pas justice au contenu : la vignette de couverture dénature l'Ïuvre originale de Bosch, les erreurs typographiques sont fréquentes. Ensuite, les sous-parties de la table des matières, bien que se révélant parfaitement pertinentes lors de la lecture, s'avèrent très déroutantes lorsque on y jette un Ïil furtif. Et lorsqu'un lecteur cherche à se décider pour savoir s'il va acquérir un livre critique (surtout pour un ouvrage aussi cher), son premier regard se tourne vers cette même table des matières pour jauger le contenu du livre. Enfin, les abréviations utilisées, qui peuvent se justifier pour un gain de place, entretiennent un peu plus la confusion pour le lecteur moyen, d'autant plus qu'aucune bibliographie, même sommaire, n'est proposée.

Ces réserves ne remettent pas en cause la qualité du travail de Roland Ernould. Il connaît assurément l'Ïuvre du maître de Bangor sur le bout des doigts, et son analyse est critique et rigoureuse. On se demande simplement si un recueil d'articles sur des thématiques différentes (sur le modèle du Trente ans de terreur de Morin) n'aurait pas été plus judicieux, car il aurait permis une approche moins ciblée et plus accessible pour le plus grand nombre. Peut-être lors d'une prochaine publication ?

Laurent Bourdier

 

Autosatisfaction!

King sur le Web

La Voix du Nord du Jeudi 25 Mai 2000

Dès qu'il délaisse ses essais destinés au support papier, Roland Ernould se consacre au site Internet qu'il a voué à Stephen King. Il passe généralement deux à trois heures par jour à renouveler le contenu de ses pages et à répondre aux messages d'interlocuteurs souvent jeunes, ce qui lui permet de garder des contacts avec une tranche d'âge qu'il a longtemps fréquentée.
Roland Ernould a créé son site de toutes pièces, voilà un an. Depuis, il a attiré la bagatelle de 25 000 lecteurs. Ce site est volumineux, puisqu'il comprend environ 1 300 pages...
Il s'agit d'un ensemble très documenté, complet et précis, ce qui est la marque de fabrique de Roland Ernould. Ainsi, pour
La ligne verte, l'Armentiérois a réuni un résumé des feuilletons écrits par King sous ce titre, puis du scénario tiré de l'oeuvre de "Steve", puis du film réalisé à partir de ce scénario. Avec, à chaque étape, une critique.
Roland Ernould donne aussi des nouvelles du romancier. Son site a d'ailleurs pris de l'essor après l'accident de la circulation dont a été victime Stephen King, l'été dernier. L'ancien professeur surfe sur les sites des périodiques du Maine, l'état où réside l'écrivain américain. Et il en a donné des nouvelles régulières, y compris photographiques.

Christian
Furling
La Voix du Nord du Jeudi 25 Mai 2000
www.lavoixdunord.fr

Commentaires des revues sur le site

 

roland.ernould@neuf.fr

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