Retour à
l'Overlook. Quinze ans après
le film de Kubrick, la famille Torrance s'installe de
nouveau dans l'hôtel hanté et il s'y passe en
gros la même chose : Danny réveille les
fantômes et son papa n'aime pas ça. Mais alors
pas du tout.
Stanley Kubrick doit en ricaner doucement
dans sa tombe. Voir son propre film reformaté pour la
TV (car c'est bien de cela qu'il est question : un remake),
voilà une idée qui l'aurait fait sourire. Ne
revenons pas sur les raisons qui ont poussé King a
tourné sa propre version de l'histoire (se reporter
au texte "Shining, un duel au K par K), car il faut bien
admettre que ce deuxième film possède de
nombreuses qualités. Le scénario est son atout
principal : rédigé par SK, il conserve chaque
scène clé du roman, ce dont se moquait la
version de 1981. La tension monte progressivement, à
mesure que la folie s'empare de Jack, beaucoup moins vite
que chez Kubrick. Ici Mick Garris prend dont temps, il sait
que le dénouement doit être amené de
façon crédible et il étudie bien le
déchirement qui s'opère chez Jack. Celui-ci a
conscience que sa raison s'altère et il lutte autant
que possible contre ses accès de violence, mais le
manque d'alcool et la claustrophobie ne lui laissent aucune
chance. L'autre point fort de cette adaptation est la
présence de Rebecca de Mornay : elle ne se contente
pas d'être bien plus jolie que Shelley Duvall, la
Wendy d'origine, elle est aussi plus présente au
coeur de l'action. Alors que Kubrick en faisait une fille
presque attardée et exaspérante, la Wendy de
Mick Garris participe au drame comme dans le roman. On ne se
retrouve plus avec un trio bancal, composé des deux
forts éléments masculins,
rélégant au rang de potiche la mère de
famille.
Sur un plan plus technique en revanche,
la force est avec Kubrick. Les génies sont rares et
Garris, malgré son admiration pour King et un talent
certain, ne tient pas la comparaison avec le maître.
La réalisation est on ne peut plus classique, sans
raffinement. L'impression de regarder un
téléfilm est trop grande pour ne pas
gâcher une partie du plaisir. Les maquillages et
effets spéciaux sont honnêtes, sans atteindre
le niveau que leur aurait conféré un budget
plus solide. Mais le souvenir du Kubrick est malheureusement
trop présent, et l'on s'attend à chaque
scène à entendre telle musique, ou à
voir jaillir une rivière de sang de la porte de
l'ascenseur. La peur transmise par le livre est totalement
absente de cette vision un peu soft. Même s'il est
toujours plaisant de revoir ces personnages et cet
hôtel que l'on a tant aimés, Mick Garris nous
livre un film trop propre, trop lisse. Reste le cas de
l'insupportable gamin qui interprète Danny : l'air
abruti et le visage dévoré par une
lèvre supérieure gonflée,
énorme, qui l'empêche de fermer la bouche, il
est en plus un acteur détestable. Une erreur de
casting impardonnable, qui nous fera longtemps regretter
Jack Nicholson et sa petite famille.
Fidélité : bonne
Sylvain Tavernier...............
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