Le pacte
des loups, de Christophe
Gans : brillant et excitant, romanesque et
tragique
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Le Pacte des
Loups est un film français
à la fois brillant et excitant, romanesque et
tragique. Il retrace l'histoire de la Bête du
Gevaudan, mais la légende n'est qu'un prétexte
pour y greffer toutes sortes de récits
parallèles, axés sur les rites vaudous,
chrétiens et sataniques.
Visuellement, c'est inconcevable.
Christophe Gans s'est donné les moyens de
concrétiser ce qu'une imagination extravagante est
capable de produire. Cinéaste magique, nourri de ce
que le cinéma nous a offert de mieux depuis trente
ans, il sait se référer à ses
maîtres en apportant son propre génie. Le mot
n'est pas trop fort : ce film rassemble toutes les
particularités propres aux grands genres. On y voit
des scènes de kung-fu directement venues des
meilleurs Bruce Lee ou Jackie
Chan,
des personnages décalés véhiculant
toutes sortes de cultures, des grandes scènes
épiques de chasse et de poursuites, des duels que
n'aurait pas renié Sergio Leone et bien d'autres
merveilles scénaristiques et visuelles. C'est une
vraie claque. C'est nouveau.
Les inspirations sont trop nombreuses
pour être toutes relevées, sans doute le
réalisateur n'en a-t-il même pas conscience :
les hommages à Spielberg,
Kubrick, John Woo, John
McTiernan etc. viennent donner à cette histoire
potentiellement forte une ampleur rarement atteinte.
Gans est un fils du mania, des jeux vidéos et
du cinéma d'action. Tout cela donne un
résultat comparable à Matrix, qui avait
également su mélanger du mieux possible toutes
ces influences. Qui a un jour regardé Dragon Bal,
dévoré Gunnm ou joué à Metal
Gear Solid sautillera de bonheur sur son siège. Pour
les autres, le Pacte
des Loups leur fera découvrir
les richesses de cet univers dont la reconnaissance est en
plein essor.
Au niveau du scénario, ce genre de
film se plante généralement. Trop court,
stéréotypé, les plus talentueux des
réalisateurs se sont cassés l'objectif sur des
scripts écrits sur un coin de table. La durée
du Pacte contourne cet obstacle : le film prend le temps
nécessaire pour développer chaque
caractère et instaurer une ambiance satanique et
bestiale à souhait. Les personnages qui semblent
avoir été vus mille fois (notamment celui de
l'indien, joué par Mark Dacascos qui se
découvre un don d'acteur) se révèlent
complexes et fascinants. Le récit se brise et prend
une direction surprenante chaque fois que les clichés
font mine de s'installer. Le seul bémol est à
mettre sur la fin qui tire en longueur, et il aurait sans
doute fallu couper le dernier quart d'heure qui n'apporte
rien de nouveau et perd sa cohérence.
Cela dit, rien ne saurait gâcher un
tel plaisir. Gans est aujourd'hui à classer parmi ceux qui
font du cinéma français grand spectacle, grand
public, avec le désir de prouver que action, bruit et
fureur ne sont pas l'apanage des gros sabots
américains. La France apporte juste au modèle
sa sensibilité et son héritage romantique. Aux
côtés de Besson et
Kassovitz, ce diable d'homme n'a plus qu'à penser
atteindre le public. Gageons que le Pacte des Loups
sera un succès, et ce ne serait que justice. D'autant
plus que le bonhomme a manifestement lu Stephen
King,
car l'ombre de Flagg plane sur le
royaume de Gévaudan...
article de "Sylvain Tavernier"
<syltavernier@wanadoo.fr>
© janvier 2001
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