What Randall
wants... Little Tall Island,
où résida naguère Dolores Claiborne,
est ravagée par une tempête
phénoménale. Coupés du continent, les
insulaires se réfugient à l'hôtel de
ville en attendant que ça passe. Mais un
étranger sans âge a débarqué de
nulle part, et profite de l'occasion pour qu'on lui donne ce
qu'il désire.
"J'ai passé l'âge de ces
conneries." Quoi qu'on en dise, cette tempête vaut le
détour. Une chose est sûre, Stephen King ne
s'est pas creusé pour nous servir cette histoire vue
et ratavue de thriller pseudo-fantastique, entre X-files
(décidément !) et Bazaar. Le scénario,
déjà monotone à la lecture (on se
demande d'ailleurs pour quelle raison il a été
vendu comme le dernier roman de SK ? L'argent
peut-être ?), fait preuve à la
télé de carences galactiques au niveau de la
cohérence et de la vraisemblance, et on s'empressera
de passer à autre chose une fois remportée
l'épreuve des six heures de visionnage.
Le premier épisode risque de
rebuter les plus courageux. D'un ennui impensable, les
rebondissements ont lieu tous les trois quarts d'heure, ce
qui fait peu sur une telle longueur. Les personnages se
révèlent bien moins riches que les
héros habituels de King :
stéréotypés à l'excés,
leurs motivations apparaissent claires comme de l'eau
d'Evian. Soit tout blanc, soit tout noir, aucune surprise
à attendre de ce côté-là, puisque
chaque réaction est prévisible,
téléphonnée. Même si chacun d'eux
posséde sa part de petits secrets honteux, il n'y a
rien ici qui risquerait de choquer un public
français. Le réalisateur verse quant à
lui dans le maniérisme, comme s'il se regardait
filmer : "Vous avez vu ? Je fais un Stephen King, c'est pas
rien tout de même !" Les plans en extérieur sur
le cyclone qui dévaste l'île sont
multipliés sans autre raison que de rallonger la
sauce, et de prouver que la production en avait les moyens.
Manque de pot, c'est moche et mal filmé, à la
limite du film amateur. Ces scènes
répétitives ne parviennent qu'à casser
le rythme de l'action, qui n'en avait vraiment pas besoin.
Au bout d'une heure, l'oeil le moins exercé saura
répérer à quel moment le film
était coupé par la pub lors de la diffusion
aux Etats-Unis, tant les transitions sont grossières
et tape-à-l'oeil.
Rien que du négatif jusqu'ici.
C'est alors que le deuxième film entre en jeu, et il
aurait très bien pu se passer de la première
partie, ce qui aurait conféré à
l'ensemble une structure beaucoup plus unie et
crédible. (Presque) tous les défauts sont
gommés. L'action s'intensifie, les coups de
théâtre sont amenés avec savoir-faire et
les personnages acquièrent une dimension
supérieure qui les rend crédibles et
attachants. On retrouve enfin une atmosphère et des
protagonistes dignes de King, et le spectateur se laisse
envouter par LA réussite du film, qui vaut à
elle seule le voyage. Tout le plaisir repose sur un unique
personnage-clé : qu'il est bon de retrouver Randall
Flagg ! King nous offre un nouvel aperçu de cet
étranger aux mille visages, toujours aussi charmeur
et dangeureux. André Linoge donc (noter la
délicieuse conotation française) incarne Flagg
sur la fin de sa vie. Après l'Homme noir du
Fléau, dans sa prime jeunesse et encore
inexpérimenté, puis Gaunt, vieillard
charismatique de Bazaar, il conserve toute sa force et la
mystérieuse fascination qu'il exerce n'a pas faibli.
Tour à tour roublard, sournois, drôle,
colérique, cruel ou artiste, cet individu marque le
film de son empreinte. Même s'il a troqué son
jean et ses bottes contre une large cape noire de magicien,
il sait que nous ne sommes pas dupes. Craig Baxley
réduit les séquences en extérieur et
l'intrigue se noue en huis-clos. La scène finale,
lors du tirage au sort qui désignera quel enfant doit
partir avec Linoge, est une réussite exemplaire. Le
lecteur assidu au courant du dénouement sera surpris
de l'impact du suspens et se mordra les ongles jusqu'au
générique, "juste au cas où..."
...
Sylvain Tavernier
................
......................... .................
|